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Mon père, disoit-il, de pareils attentats
Sont-ils connus du roi ? »-- « Comment pourroient-ils l’être ?
Disait le chien : les grands approchent seuls du maître,
    Et les mangés ne parlent pas. »
Ainsi, sans raisonner de vertu, de prudence,
Notre jeune lion devenoit tous les jours
Vertueux & prudent : car c’est l’expérience
    Qui corrige, & non les discours.
A cette bonne école il acquit, avec l’âge,
    Sagesse, esprit, force & raison.
    Que lui falloit-il davantage ?
Il ignoroit pourtant encor qu’il fût lion,
Lorsqu’un jour qu’il parloit de sa reconnoissance
    A son maître, à son bienfaiteur,
Un tigre furieux, d’une énorme grandeur,
Paraissant tout à coup, contre le chien s’avance.
    Le lionceau, plus prompt, s’élance,
Il hérisse ses crins, il rugit de fureur,
Bat ses flancs de sa queue ; & ses griffes sanglantes
Ont bientôt dispersé les entrailles fumantes
    De son redoutable ennemi.
À peine il est vainqueur qu’il court à son ami :
Oh ! quel bonheur pour moi d’avoir sauvé ta vie !
    Mais quel est mon étonnement !
Sais tu que l’amitié, dans cet heureux moment,