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Cela dit, il s’échappe à travers le taillis.
Immobile de peur, Thomas est bientôt pris ;
Il tire la bourse & la donne.

Qui ne songe qu’à soi quand sa fortune est bonne
Dans le malheur n’a point d’amis.

FABLE V.

Les Serins & le Chardonneret.


Un amateur d’oiseaux avoit, en grand secret,
Parmi les œufs d’une serine
Glissé l’œuf d’un chardonneret.
La mère des serins, bien plus tendre que fine,
Ne s’en aperçut point, & couva comme sien
Cet œuf qui dans peu vint à bien.
Le petit étranger, sorti de sa coquille,
Des deux époux trompés reçoit les tendres soins,
Par eux traité ni plus ni moins
Que s’il étoit de la famille.
Couché dans le duvet, il dort le long du jour
À côté des serins dont il se croit le frere,
Reçoit la béquée à son tour,
Et repose la nuit sous l’aile de la mere.
Chaque oisillon grandit, &, devenant oiseau,
D’un brillant plumage s’habille ;
Le chardonneret seul ne devient point jonquille,