Page:Œuvres complètes de Florian, Fauché-Borel, 1793, tome 9 - fables.djvu/33

Cette page n’a pas encore été corrigée

aille se consacrer à l’éducation de ses enfants, leur donner les leçons d’amour, d’innocence, de bonheur, qu’il a reçues et pratiquées ; qui passe enfin sa vie entière dans les douceurs de l’amitié, dans les jouissances de la nature, et dans cette heureuse ignorance, cette imprévoyance de maux, cette incuriosité qui, comme dit le bon Montaigne, est un chevet si doux, si sain à reposer une tête bien faite.

Pensez-vous que le premier philosophe qui a pris la peine de rapprocher de ces mœurs si pures, si douces, nos intrigues, nos haines, nos crimes ; de comparer avec mon chevreuil, allant paisiblement au gagnage, l’homme, caché derrière un buisson, armé de l’arc qu’il a inventé pour tuer de plus loin ses frères, et employant ses soins, son adresse, à contrefaire le cri de la mère du chevreuil, afin que son enfant trompé, venant à ce cri qui l’appelle[1], reçoive une mort plus sûre

  1. C’est ainsi qu’on tue les chevreuils.