Page:Œuvres complètes de Florian, Fauché-Borel, 1793, tome 9 - fables.djvu/181

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L’animal, irrité, se dresse ;
Et l’écureuil, s’agenouillant,
Tremble & se fait petit aux pieds de son altesse.
Après l’avoir considéré,
Le léopard lui dit : Je te donne la vie,
Mais à condition que de toi je saurai
Pourquoi cette gaité, ce bonheur que j’envie,
Embellissent tes jours, ne te quittent jamais ;
Tandis que moi, roi des forêts,
Je suis si triste & je m’ennuie.
Sire, lui répond l’écureuil,
Je dois à votre bon accueil
La vérité : mais pour la dire,
Sur cet arbre un peu haut je voudrois être assis.
— Soit, j’y consens : monte. — J’y suis.
À présent je peux vous instruire.
Mon grand secret pour être heureux,
C’est de vivre dans l’innocence :
L’ignorance du mal fait toute ma science ;
Mon cœur est toujours pur, cela rend bien joyeux.
Vous ne connoissez pas la volupté suprême
De dormir sans remords : vous mangez les chevreuils,
Tandis que je partage à tous les écureuils
Mes feuilles & mes fruits ; vous haïssez, & j’aime :
Tout est dans ces deux mots. Soyez bien convaincu
De cette vérité que je tiens de mon père :