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Mais son bec, ses yeux & ses ailes,
Diffèrent fort des tourterelles ;
La mère les voit ressemblants.
À bien élever sa jeunesse
Elle met tous ses soins, lui prêche la sagesse,
Et surtout l’amitié, lui dit à chaque instant :
Pour être heureux, mon cher enfant,
Il ne faut que deux points, la paix avec soi-même,
Puis quelques bons amis dignes de nous chérir.
La vertu de la paix nous fait seule jouir ;
Et le secret pour qu’on nous aime,
C’est d’aimer les premiers, facile & doux plaisir.
Ainsi parloit la tourterelle,
Quand, au milieu de sa leçon,
Un malheureux petit pinson,
Échappé de son nid, vient s’abattre auprès d’elle.
Le jeune nourrisson à peine l’aperçoit
Qu’il court à lui : sa mère croit
Que c’est pour le traiter comme ami, comme frère,
Et pour offrir au voyageur
Une retraite hospitalière.
Elle applaudit déjà : mais quelle est sa douleur,
Lorsqu’elle voit son fils, ce fils dont la jeunesse
N’entendit que leçons de vertu, de sagesse,
Saisir le foible oiseau, le plumer, le manger,
Et garder, au milieu de l’horrible carnage,
Ce tranquille sang-froid, assuré témoignage