Page:Œuvres complètes de Florian, Fauché-Borel, 1793, tome 9 - fables.djvu/126

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      Où s’offrent à leurs yeux ravis
      Tous les trésors de la nature ;
Des prés, des eaux, des bois, des vergers pleins de fruits.
Nos pèlerins, voyant cette terre chérie,
      Éprouvent les mêmes transports
Qu’Énée & ses Troyens en découvrant les bords
      Du royaume de Lavinie.
Mais ce riche pays étoit de toutes parts
      Entouré d’un marais de tourbe,
      Où des serpents & des lézards
      Se jouoit l’effroyable bourbe.
Il falloit le passer, & nos trois voyageurs
S’arrêtent sur le bord, étonnés & rêveurs.
L’hermine la première avance un peu la patte ;
      Elle la retire aussitôt,
      En arrière elle fait un saut,
En disant : Mes amis, fuyons en grande hâte ;
Ce lieu, tout beau qu’il est, ne peut nous convenir :
Pour arriver là-bas il faudroit se salir ;
      Et moi je suis si délicate,
      Qu’une tache me fait mourir.
Ma sœur, dit le castor, un peu de patience ;
On peut, sans se tacher, quelquefois réussir ;
Il faut alors du temps & de l’intelligence ;
Nous avons tout cela : pour moi qui suis maçon,