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     Et le bec rempli de pâture,
     Il apporte sa nourriture
     À l’orpheline qui gémit.
O du puissant Allah providence adorable !
S’écria le dervis, plutôt qu’un innocent
Périsse sans secours, tu rends compatissant
Des oiseaux le moins pitoyable !
Et moi, fils du Très-Haut, je chercherois mon pain !
     Non, par le prophète j’en jure,
Tranquille désormais, je remets mon destin
À celui qui prend soin de toute la nature.
Cela dit, le dervis couché tout de son long,
     Se met à bayer aux corneilles,
De la création admire les merveilles,
     De l’univers l’ordre profond.
     Le soir vint ; notre solitaire
Eut un peu d’appétit en faisant sa prière :
Ce n’est rien, disoit-il, mon souper va venir.
Le souper ne vient point. Allons, il faut dormir,
Ce sera pour demain. Le lendemain, l’aurore
     Parait, & point de déjeuner,
     Ceci commence à l’étonner ;
     Cependant il persiste encore,
Et croit à chaque instant voir venir son dîner.
Personne n’arrivoit ; la journée est finie,
Et le dervis à jeun voyoit d’un œil d’envie