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Sa famille & la mienne ont rempli mon asile ;
Je te plains bien sincèrement ;
Adieu, mon cher ami. » Cela dit, il s’échappe,
Et voici la meule qui jappe.
Le pauvre lièvre part. À quelques pas plus loin,
Il rencontre un taureau que, cent fois au besoin,
Il avoit obligé ; tendrement il le prie
D’arrêter un moment cette meute en furie
Qui de ses cornes aura peur.
« Hélas ! dit le taureau, ce seroit de grand cœur :
Mais des génisses la plus belle
Est seule dans ce bois, je l’entends qui m’appelle ;
Et tu ne voudrois pas retarder mon bonheur. »
Disant ces mots, il part. Notre lièvre hors d’haleine,
Implore vainement un daim, un cerf dix-cors,
Ses amis les plus sûrs ; ils l’écoutent à peine,
Tant ils ont peur du bruit des cors.
Le pauvre infortuné, sans force & sans courage,
Allait se rendre aux chiens, quand du milieu du bois
Deux chevreuils reposant sous le même feuillage,
Des chasseurs entendent la voix :
L’un d’eux se lève & part ; la meule sanguinaire
Quitte le lièvre & court après.
En vain le piqueur, en colère,
Crie & jure, & se fâche ; à travers les forêts