Page:Œuvres complètes de Florian, Fauché-Borel, 1793, tome 9 - fables.djvu/113

Cette page n’a pas encore été corrigée


Ainsi, pour tous les animaux,
Cerfs, moutons, coursiers, daims, taureaux,
Complaisant, empressé, toujours rempli de zèle,
11 vouloit de chacun faire un ami fidèle,
Et s’en croyoit aimé parce qu’il les aimoit.
Certain jour que, tranquille en son gîte, il dormoit,
Le bruit du cor l’éveille, il décampe au plus vite ;
Quatre chiens s’élancent après,
Un maudit piqueur les excite,
Et voilà notre lièvre arpentant les guérets.
11 va, tourne, revient, aux mêmes lieux repasse,
Saute, franchit un long espace
Pour dévoyer les chiens, &, prompt comme l’éclair,
Gagne pays ; & puis s’arrête :
Assis, les deux pattes en l’air,
L’œil & l’oreille au guet, il élève la tête,
Cherchant s’il ne voit point quelqu’un de ses amis.
Il aperçoit dans des taillis
Un lapin que toujours il traita comme un frère ;
Il y court : « Par pitié, sauve-moi, lui dit-il,
Donne retraite à ma misère,
Ouvre-moi ton terrier ; tu vois l’affreux péril… »
« Ah ! que j’en suis fâché ! répond d’un air tranquille
Le lapin : je ne puis t’offrir mon logement,
Ma femme accouche en ce moment,