Ornithologie du Canada, 1ère partie/FAUVETTES


Atelier typographique de J. T. Brousseau (p. 187-188).

FAUVETTES.
(Warblers.)


« Taille élégante, mouvements vifs et légers, joli ramage, naturel gai, telles sont les qualités aimables que la nature a prodiguées à presque tous les oiseaux de cette nombreuse famille. Si les Fauvettes de l’Amérique n’ont pas un chant aussi flatteur, des accents aussi variés, que celles d’Europe, elles en sont dédommagées par des couleurs plus vives, plus brillantes. Le vert, le jaune, le noir et le bleu, agréablement fondus ou opposés avec une belle entente, servent de parure au plus grand nombre.

« Les unes vivent solitaires dans les bois ; d’autres ne se plaisent que dans les bosquets ; plusieurs préfèrent les vergers et les jardins ; quelques-unes fixent leur résidence habituelle dans les buissons arrosés par un petit courant d’eau vive ; d’autres, enfin, se cachent dans les roseaux qui croissent dans les marais. Elles animent leur domicile par leur pétulance, leurs jeux, leurs petits combats et la variété de leurs chansons amoureuses. Elles nichent sur des arbrisseaux ou dans les broussailles. Deux couvées de quatre ou cinq œufs chacune sont ordinairement le fruit de leur fécondité annuelle. Le mâle et la femelle travaillent à la construction du nid ; le premier partage les soins de l’incubation, depuis midi, environ, jusqu’à trois ou quatre heures du soir, et sa compagne, le reste du jour et pendant la nuit. Tous les deux s’empressent de fournir une abondante nourriture à leurs petits, qui, dans le plus grand nombre des espèces, naissent privés de ce léger duvet, premier vêtement de la plupart des autres oiseaux. Le père et la mère portent toujours au bout du bec la nourriture destinée à leur jeune famille ; mais si on leur donne de l’inquiétude, ils la font descendre à l’entrée de l’œsophage, afin qu’elle n’indique pas la proximité du nid, et ils la ramènent plus tard à l’extrémité des mandibules pour la distribuer à leurs petits. Toutes les Fauvettes de l’Amérique septentrionale sont entomophages. Elles vivent de chenilles, surtout de celles qui ne sont pas velues, de nymphes et de mouches ; elles les cherchent sur des arbres, sur les herbes, sur les légumes, dans les buissons et quelquefois à terre. Quelques-unes joignent à ces aliments les baies molles et la pulpe des fruits tendres. Lorsqu’elles ont saisi un insecte quelconque, elles pressent sa tête avec leur bec, le secouent vivement ou le frappent avec violence contre un corps dur, afin de le tuer ; car elles ne le mangent jamais s’il n’est blessé à mort : cette manière de se nourrir les distingue des Moucherolles qui avalent leur proie telle qu’ils la prennent. Ces différentes pâtures, les seules qui soient propres à ces oiseaux, ne se trouvant pas en hiver dans les contrées que la plupart habitent pendant l’été, ils quittent ce domicile à l’automne, pour se rendre sous les tropiques, où elles sont alors en abondance. Les Fauvettes ne font pas toutes leurs courses périodiques de la même manière ; les unes se tiennent en troupes nombreuses, d’autres par famille, et quelques-unes séparément. Elles reviennent avec les beaux jours dans leur pays natal et s’apparient dès leur arrivée. Chaque couple se rend alors le maître d’un petit canton, où il ne souffre aucun oiseau de sa race. Est-ce la jalousie, ou le besoin de trouver près du nid la quantité d’aliments nécessaires à ses petits, qui les porte à s’isoler de cette sorte ? Peut-être est-ce l’un et l’autre ; mais il est certain que ce besoin y contribue pour beaucoup, car, dans les lieux cultivés, où les insectes sont toujours plus nombreux qu’ailleurs, les couples sont plus rapprochés, et c’est le contraire dans les endroits où cette pâture est rare. Cependant ce canton, qui est exclusif pour les individus de la même espèce, ne l’est pas pour les autres, quoique entomophages comme eux. »