Nous tous/Balzac
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XV
BALZAC
Ô toi dont l’œuvre qu’on admire
Est comme un lac
Où notre humanité se mire,
Divin Balzac !
Oui, nous dresserons ta statue,
Roi des esprits,
Auguste et de splendeur vêtue,
Dans ton Paris.
Alors, ô sculpteur de colosses
Jamais ployé,
Contre qui tant de vils molosses
Ont aboyé ;
Géant, chevelu comme un arbre
Tendant ses bras,
Dans l’immortalité du marbre
Tu revivras !
Tu riras au ciel qui t’azure !
Et de la main
Tu désigneras la masure,
Le flot humain,
Et mille femmes, et le lustre
Des clairs palais,
Et tout ce qui vit, fils illustre
De Rabelais !
Et dans son sublime délire,
À nous, lassés,
Roi, ta bouche semblera dire :
Hommes, passez.
Passez, amours, colères, foule
Dont les sanglots
Se lamentent comme la houle
Parmi les flots !
Mais dans le sacré sanctuaire
Où l’esprit bout,
Moi l’Ouvrier, le Statuaire
Toujours debout ;
Ô foules pâles et meurtries,
Moi l’Inspiré
Qui de mes mains vous ai pétries,
Je resterai.