Neuf Upanishads, la théosophie des Védas/Notice

Traduction par G. R. S. Mead et Jagadisha Chandra Chattopadhyaya en anglais ; traduction française de Jean-Émile Marcault Élément soumis aux droits d’auteur..
(p. iv-vi).


NOTICE


Il nous paraît nécessaire d’appeler l’attention sur les mots Soi et Homme écrits avec une majuscule dans le cours de cette traduction, et dont le sens a besoin d’être nettement déterminé.

La traduction anglaise de MM. Mead et Chattopâdhyâya fait une distinction entre self et Self, et entre man et Man. Nous avons rendus self par moi et Self par Soi, nous réservant d’expliquer cette traduction. Ces deux mots correspondent à deux notions psychologiques différentes, et à des mots distincts dans le texte sanscrit. Self, avec majuscule, est la traduction du terme Atman et self avec minuscule est employé pour rendre des expressions sanscrites où le mot Atman est modifié par un correctif qui lui donne un tout autre sens que le sens technique du mot isolé. On en trouve un exemple de la Prashnop IV, II, où : vijnânâtmâ est traduit par : le moi connaissant.

Atman est le principe supérieur de l’homme, ce centre suprême et divin qui, encapsulé dans des corps matériels, leur donne la conscience et le pouvoir évolutif. Les Upanishads s’efforcent de montrer que l’activité, les facultés, les états de conscience corporels ne sont que des aspects, des apparences de ce centre de conscience unique, âtmâ. C’est lui qui voit, touche, entend, sent, goûte, etc. (Prashnop, IV, 9). C’est cet Atman qui résout l’antinomie du sujet et de l’objet, car, étant lié à des corps, il perçoit par eux des objets, mais, enfermant un fragment de la divinité, il en possède en propre la conscience universelle. L’évolution a pour but de faire graduellement passer cette conscience divine dans les centres individuels. Dieu se multiplie ainsi en un nombre infini de Dieux.

La conscience d’Atman est donc une conscience proprement impersonnelle. Elle ne devient personnelle que lorsqu’elle se revêt d’un voile, d’un masque (persona) matériel. C’est pourquoi nous avons cru devoir désigner Atman par le pronom « Soi », plus impersonnel à notre sens que le pronom « moi ». Qu’on veuille bien nous pardonner cette innovation. Nous avons réservé le mot moi pour les aspects personnels et inférieurs d’Atman.

Quant au mot Homme, il traduit le terme sanscrit « Purusha ». Étymologiquement, Purusha vient de : Pura, ville, et usha, dérivé du verbe vas, demeurer. Il signifie donc : celui qui demeure dans la ville. La ville dont il est question est l’homme avec sa constitution si complexe, allant du corps physique, son principe inférieur, à Atma, son principe supérieur et spirituel. Ceux qui regardent l’homme de l’extérieur ne voient que l’apparence matérielle et trompeuse mais celui qui cherche au-dedans d’Atma y découvre la divinité cachée oui donne sa vie à Atma lui-même ; c’est là l’homme véritable, non l’homme illusoire ; l’homme transcendental et non l’homme matériel. C’est lui que nous désignons par l’Homme avec une majuscule, réservant à l’apparence humaine, au moi ordinaire, l’orthographe commune de ce mot. Chacun de ses termes, Atman et Purusha, exigerait un volume d’explications, car ils sont le point culminant de toute la psychologie, de toute la science de l’Inde. Nous pouvons grossièrement les caractériser ainsi : Atman est l’âme spirituelle suprême, et Purusha est l’Esprit, considéré comme distinct des centres matériels.

E. M.