La Jeunesse blanche (1913)/Mysticisme
MYSTICISME
À ses yeux purs, je veux n’offrir
Que des choses douces et blanches ;
Résumant ce qui peut fleurir
De fleurs pascales sur les branches.
Je rêve tout ce qu’il y a
De plus délicat autour d’elle,
Des blancheurs de magnolia
Et des hymens de tourterelle.
Car son âme au parfum troublant,
Sa grande âme que je devine
Est aussi comme un bouquet blanc
Fleuri dans la serre divine.
Et pour ses chemins d’ici-bas
Un désir raffiné m’obsède
De pouvoir mettre sous ses pas
Une neige qui serait tiède.
À l’heure exquise des aveux
Et des lèvres appesanties,
Je veux pour la charmer, je veux
Des mots blancs comme des hosties.
Je veux des mots musiciens,
Pareils à ces versets mystiques
Que dans les tableaux anciens
Peignaient les vieux peintre gothiques ;
Ave pieux, textes divins,
Dont ils déroulaient les paroles
Hors des lèvres des séraphins
En ondulantes banderoles.
Des banderoles où leur voix
Traduit le chaste élan des âmes
Et murmure à la Vierge : Sois
Bénie entre toutes les femmes !