Méthode d’équitation basée sur de nouveaux principes/Effets de jambes

IX

EFFETS DE JAMBES.



Si je demandais au premier cavalier venu les moyens pour changer de direction, il me répondrait assurément : « Si vous voulez tourner à droite, portez la main à droite et faites sentir la jambe du même côté. »

C'est, en effet, le principe que tous les traités d'équitation, jusqu'au mien, ont donné comme le seul efficace pour ce mouvement. Mais tant d'erreurs se sont érigées en principes, que j'ai voulu m'assurer de l'exactitude de ce dernier.

J'ai donc, pour tourner à droite, par exemple, porté la main à droite et fait sentir la jambe du même côté.

Quelque légèreté qu'eût mon cheval sur la ligne droite et bien que j'eusse fait sentir la jambe indiquée, j'éprouvais souvent une résistance dont, long- temps, j'ai cherché la cause et les moyens de la détruire.

L’expérience m’a démontré que souvent, par suite de l’action de la jambe droite, la croupe se portant à gauche, empêche, par sa mobilité, le poids de se fixer sur le point d’appui nécessaire au pivot de conversion et jette ainsi de l’irrégularité et de l’incertitude dans le mouvement.

La répression de cette résistance exige naturellement, me suis-je dit, l’emploi de la jambe gauche. J’adoptai donc ce moyen comme correctif. Il me donna d’abord des résultats surprenants, mais la persistance de son emploi devint la source d’une autre résistance.

La croupe, portée trop à droite par la pression de la jambe gauche, s’arc-boutait, pour ainsi dire, contre l’épaule droite, et paralysait ses mouvements.

Après de minutieuses observations, je conclus donc que l’emploi exclusif de l’une ou de l’autre jambe ne peut être prescrit comme principe absolu dans les changements de direction, puisque, destiné à prévenir, il provoque, au contraire, des résistances.

En effet, quand je veux placer le cheval pour le changement de direction, j’ignore de quel côté viendra la résistance, puisque la croupe peut se dérober à droite ou à gauche ; j’ignore même s’il y aura résistance. Il n’est donc pas rationnel de déterminer, à priori, l’emploi exclusif de l’une ou de l’autre jambe, et le principe, reconnu faux, doit être abandonné.

Revenons donc aux vrais principes de l’équitation :

La main seule donne la position, les jambes donnent l’impulsion.

Si, d’après les prescriptions formelles de ma méthode, vous avez dirigé l’éducation de votre cheval de manière à lui donner une juste répartition du poids et des forces, le changement de direction lui deviendra aussi facile que la marche sur la ligne droite. Le cheval étant bien placé obéira à la première invitation de la main, la tête et l’encolure prendront la position propre au mouvement, et le liant parfait de toute la machine amènera les épaules et la croupe à prendre sans résistance la part qui leur convient pour la régularité et la facilité du changement de direction. D’où je conclus que l’emploi de l’une ou de l’autre jambe prescrit comme principe est un non-sens, pour ce mouvement, puisque sa régularité et sa facilité ne dépendent que de l’harmonie apportée dans l’équilibre de l’animal.

Je dis plus. L’aide des deux jambes deviendra tout à fait inutile, quand le cheval sera arrivé au point d’éducation où doit le conduire inévitablement ma méthode.


Point important. Dès que le cheval commencera à prendre la position indiquée par la main, celle-ci devra cesser son action et laisser à l’animal sa liberté de mouvement, en ayant soin toutefois de le suivre dans son déplacement. Si, au contraire, après un commencement d’exécution, la main persistait dans son action, la position de l’encolure deviendrait forcée et amènerait un dérangement de croupe, d’où naîtrait une résistance qu’on ne pourrait vaincre qu’a l’aide des jambes.