Mémoires historiques/Appendice 7

Volume V Appendice I
De l’authenticité des Annales écrites sur bambou.
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Volume V Appendice I

De l’authenticité des Annales écrites sur bambou.


Le présent volume de la traduction de Se-ma Ts’ien contient l’histoire de la maison princière de Wei ; en étudiant ce chapitre des Mémoires historiques, nous avons eu souvent l’occasion dans nos notes de faire allusion aux Annales écrites sur bambou qui sont, dans leurs dernières pages, une chronique du pays de Wei. Le moment paraît donc venu de dire notre opinion sur l’authenticité de cet ouvrage (101). La question est d’importance. En effet, les Annales écrites sur bambou ont été déposées dans une tombe en l’an 299 av. J.-C., quatre-vingt-six ans par conséquent avant la proscription de la littérature édictée en 213 av. J.-C. par Ts’in Che hoang ti ; elles échappent donc entièrement à la cause de suspicion qui atteint les livres anciens publiés par les érudits de l’époque des Han.D’autre part, comme les Annales écrites sur bambou sont restées enfouies dans la terre pendant près de six siècles, de 299 av. J.-C. à 281 ap. J.-C., elles n’ont pas été connues de Se-ma Ts’ien qui écrivait vers l’an 100 avant notre ère ; elles se trouvent ainsi être un témoin dont la parole est indépendante de celle de Se-ma Ts’ien et elles peuvent servir à contrôler, à compléter et parfois à rectifier les Mémoires historiques. Enfin elles ont été utilisées par les quatre principaux commentateurs des Mémoires historiques, Sin Koang, P’ei Yn, Se-ma Tcheng et Tchang p.447 Cheou tsie, et se trouvent ainsi étroitement rattachées à l’œuvre de Se-ma Ts’ien.

Considérons d’abord les conditions dans lesquelles ont été découvertes ces Annales. Quoique les renseignements que nous possédons à ce sujet soient étendus, il ne sera pas inutile d’en traduire ici la majeure partie afin de bien montrer que peu de trouvailles archéologiques anciennes se présentent à l’examen de la critique moderne avec des garanties aussi sérieuses.

Le célèbre commentateur du Tso tchoan, Tou Yu (app. Yuen k’ai), qui vécut de 222 à 284, put, dans les dernières années de sa vie, prendre connaissance des Annales qui venaient de reparaître au jour ; il dit dans sa Postface au Tso tchoan (102) :

« La première année (280) t’ai kang, le troisième mois, les rebelles de Ou étant enfin pacifiés (103), je revins de Kiang-ling (104) à Siang yang (105)  ; je me débarrassai de la cuirasse et je déposai les armes ; alors je donnai suite à mes anciens projets et je rédigeai entièrement (les ouvrages intitulés) Tch’oen ts’ieou che li (Interprétation et arrangement du Tch’oen ts’ieou). p.448 et King tchoan tsi kie (Explications réunies du livre classique et de son commentaire). A peine avais-je fini cela que, dans la sous-préfecture de Ki (106) de la commanderie de Ki, il y eut des gens qui, en ouvrant une ancienne tombe de cette région, trouvèrent en grande quantité d’anciens livres qui étaient tous écrits en caractères k’o teou (107) sur des liasses de fiches en bois ; les hommes qui avaient ouvert la tombe, n’attachant pas d’importance (à ces fiches) les dispersèrent au hasard au fur et à mesure (de la découverte) ; l’écriture k’o teou est depuis longtemps tombée en désuétude et quand on cherche à remonter au sens, on ne peut tout expliquer (108) ; on commença par serrer (ces fiches) dans les archives secrètes ; je ne pus les voir qu’assez tard (109). Ce qu’elles relatent formerait en tout approximativement soixante-quinze rouleaux (110) ; beaucoup d’entre elles sont brisées en fragments pêle-mêle ou contiennent des choses bizarres et ne peuvent être expliquées et comprises. Le I (king) des Tcheou et les Annales sont ce qu’il y a de plus distinct. Le I (king) des Tcheou, tant pour la première que pour la seconde partie, est exactement identique au (I king) actuel ; il s’y trouve annexée à part une dissertation sur le yn et le yang, mais il y manque (les appendices appelés) t’oan, siang, wen yen et hi-ts’e (111) ; peut-être est-ce parce qu’à cette époque Tchong ni p.449 (Confucius) avait implanté (ces appendices) dans le pays de Lou mais qu’on ne les avait pas encore répandus dans les royaumes éloignés. Quant au volume des Annales, il commence par les Hia, les Yn et les Tcheou et traite des règnes des souverains de ces trois dynasties ; il ne fait pas de distinction entre les divers royaumes, si ce n’est cependant qu’il traite plus spécialement du royaume de Tsin ; (en ce qui concerne ce dernier royaume), il commence à Chang chou (784-781) et passe en revue (les règnes) du marquis Wen (780-746) et du marquis Tchao (745-730) pour arriver jusqu’au comte Tchoang, de K’iu ou (112). Le onzième mois de la onzième année du comte Tchoang correspond au premier mois de la première année (722) du duc Yn de Lou (113) ; constamment c’est en se servant du calendrier des Hia qui fait du mois yn le début de l’année que (ce livre) range les années à la suite les unes des autres. Après l’extinction du p.450 royaume de Tsin (403), il ne rappelle plus que les événements du royaume de Wei et descend jusqu’à la vingtième année (299) du roi Ngai, de Wei (114) ; (ce livre) doit donc être les Mémoires historiques 13 du royaume de Wei (115). Si on vérifie par le calcul ce qu’est la vingtième année du roi Ngai, (on constate que) le t’ai-soei était dans les signes jen siu (299), que c’était la 16e année du roi Nan de la dynastie Tcheou, la 8e année du roi Tchao de Ts’in, la 13e année du roi Siang de Han, la 27e année du roi Ou-ling de Tchao, la 30e année du roi Hoai de Tch’ou, la 13e année du roi Tchao de Yen, la 25e année du roi Min de Ts’i ; de cette date, en remontant jusqu’à la mort de Kong K’ieou (Confucius † 479 av. J.-C.), il y a 181 années, et en descendant jusqu’à la présente 3e année t’ai-k’ang (282 ap. J.-C.) (116), il y a 581 années. Le roi Ngai serait, d’après les Mémoires historiques (de Se-ma Ts’ien), le fils du roi Siang et le petit-fils du roi Hoei ; le roi Hoei serait mort dans la 36e année de son règne ; le roi Siang serait alors monté sur le trône et serait mort après un règne de 16 années ; alors le roi Ngai serait monté sur le trône. D’après les Annales écrites en caractères antiques, le roi Hoei, dans la 36e année de son règne, aurait changé le principe (du calcul des années), et, partant de la 1e année serait arrivé jusqu’à la 16e année ; (les Annales) disent alors que le roi Hoei-tch’eng mourut ; (ce roi) n’est autre que le roi Hoei. Peut-être les Mémoires historiques (de Se-ma Ts’ien) ont-ils fait par erreur de Hoei et de Tch’eng deux rois successifs de manière à constituer les années d’un second règne. Le roi Ngai mourut en la 23e année de son règne ; c’est pourquoi précisément (les Annales) ne mentionnent pas son nom posthume et l’appellent « le roi actuel » (117).

p.451 Un autre témoignage, contemporain de celui de Tou Yu, est celui de Siun Hiu (app. Kong ts’eng) (118), qui mourut en l’an 289 ap. J.-C. et qui prit part au travail de l’édition du Tchou chou ki nien ; ce lettré écrivit une préface au Mou t’ien tse tchoan ou récit du voyage légendaire du roi Mou en Occident, ouvrage qui faisait partie, en même temps que les Annales, de la masse de livres que renfermait la tombe de Ki ; dans cette préface, il nous dit :

« Le Mou t’ien tse tchoan en caractères antiques est un livre qui fut trouvé lorsque, en la deuxième année t’ai-k’ang (281), un homme de la sous-préfecture de Ki, nommé Piao (119) Tchoen, ouvrit une ancienne tombe pour la piller. Tout cet ouvrage était p.452 constitué par des fiches en bambou que reliaient des cordons en soie ; si on les mesure avec l’ancien pied dont j’ai précédemment déterminé la valeur, ces fiches étaient longues de deux pieds et quatre pouces ; chaque fiche contenait quarante mots écrits à l’encre noire. La région de Ki était, à l’époque des royaumes combattants, un territoire du pays de Wei.Les Annales qu’on y trouva prouvent que cette tombe devait être celle du roi Ling (120), fils du roi Hoei-tch’eng, de Wei ; d’après le Che pen, ce roi serait le roi Siang. D’après le tableau chronologique des six royaumes qui se trouve dans les Mémoires historiques (de Se-ma Ts’ien), depuis la vingt et unième année du roi Ling jusqu’à la trente-quattrième année de Ts’in Che hoang, qui est celle où on brûla les livres, il s’écoula quatre-vingt six années ; jusqu’à la deuxième année t’ai-k’ang (281), qui est celle où on découvrit cet ouvrage, il s’est écoulé cinq cent soixantg dix-neuf années. »

Un troisième texte, contemporain lui aussi des témoignages de Tou Yu et de Siun Hiu, nous est fourni par une stèle gravée en l’année 289 ap. J-C. En effet, dans le Koang tch’oan chou pa, de Tong Yeou (ouvrage qui parut après la mort de l’auteur avec une préface écrite par son fils et datée de l’année 1157 ; ce traité épigraphique a été réimprimé dans la quatrième section du Hoai lou ts’ong chou), on voit citée (chap. VI, p. 3 v°- 4 v°) la stèle du temple funéraire de T’ai-kong  ; cette inscription, qui fut gravée sous la dynastie Tsin, en la dixième année t’ai-k’ang (289 ap. J.-C.), se trouvait, à l’époque où écrivait Tong Yeou, dans la sous-préfecture de Kong, qui est aujourd’hui la sous-préfecture de Hoei p.453 (préf. de Wei-hoei, prov. de Ho-nan) et qui est assez voisine de la sous-préfecture de Ki où furent découvertes, en l’an 281 de notre ère, les fiches de bois du Tchou chou ki nien ; la stèle de 289 fut gravée pour commémorer le souvenir d’un fragment historique écrit sur quelques-unes des fiches qui furent exhumées en même temps que celles du Tchou chou ki nien ; elle nous atteste donc la réalité de la trouvaille qu’on avait faite huit années seulement auparavant et elle nous montre l’importance qu’on attribua à ces textes anciens dès qu’ils eurent reparu à la lumière. Voici la partie de cette inscription que cite Tong Yeou :

« L’Illustre duc Wang était originaire de cette sous-préfecture ; la deuxième année t’ai-k’ang (281), du côté occidental (121) de la sous-préfecture, des voleurs, en violant une sépulture, trouvèrent des textes écrits sur des fiches de bambou. L’année où furent enterrés ces textes (299 av. J.-C.) doit être de quatre-vingt six ans antérieure à celle où Ts’in fit périr les lettrés (122). Le mémoire sur les Tcheou, qui fait partie de ces textes, dit :

« Le roi Wen rêva que l’Empereur céleste, revêtu d’un vêtement (123) noir, se tenait debout auprès du gué de Ling-hou ; l’Empereur lui dit :

— O Tch’ang (124), p.454 je vous donne en présent Wang (125).

Le roi Wen se prosterna par deux fois et toucha du front la terre. L’Illustre duc derrière lui se prosterna par deux fois et toucha du front la terre. Dans la nuit où le roi Wen eut ce songe. l’Illustre duc fit le même songe. Plus tard, quand le roi Wen vit l’illustre duc, il l’interrogea en disant :

— Votre nom personnel n’est-il pas Wang ?

L’autre répondit. qu’il en était effectivernent ainsi. Le roi Wen lui dit :

— Il me semble que je vous ai déjà vu.

L’Illustre duc lui raconta en quel jour c’était, puis lui rapporta les paroles qui avaient été dites (en ajoutant) :

— C’est en cette occasion que moi, votre sujet, j’ai pu vous voir.

Le roi Wen dit :

— C’est bien là ce qui s’est passé, c’est bien là ce qui s’est passé.

Alors il revint en l’emmenant avec lui et le nomma haut dignitaire.


A Côté des Annales, de la relation du roi Mou et des nombreux textes historiques dont un fragment fut reproduit sur la stèle de 289 ap. J.-C., la tombe de Mou recélait encore une masse d’ouvrages plus ou moins endommagés. L’inventaire le plus complet que nous en ayons nous est fourni dans la biographie de Chou Si, qui mourut à quarante ans vers l’an 300 de notre ère. Cette biographie fait partie d’un des chapitres du Tsin chou dont la composition est attribuée à l’empereur T’ai-tsong (qui régna de 627 à 649), de la dynastie T’ang ; mais elle paraît bien reproduire, dans le passage que nous allons traduire, un document rédigé dès l’époque de la dynastie Tsin : (Tsin chou, chap. LI, p. 10 v°-11 r°)

« Auparavant, la deuxième année t’ai-kang (281 ap. J.-C.), un homme de la commanderie de Ki, (nommé) Piao Tchoen, avait violé pour la piller la tombe du roi Siang, (du pays) de Wei ; d’autres disent que c’était la tombe du roi Ngan hi ; il y trouva plusieurs dizaines de charretées de livres écrits sur bambou. C’étaient les ouvrages suivants : 1. Les Annales en 13 liasses ; elles rappellent, en mettant bout à bout les événements, ce qui s’est passé depuis (la p.455 dynastie) Hia jusqu’à (l’époque où) le roi Yeou fut mis à mort par les Kiuen Jong ; après que les trois familles (Han, Tchao et Wei) se furent partagé (le royaume de Tsin), (ces Annales) continuent à raconter les événements du pays de Wei et vont jusqu’à la vingtième année du roi Ngan hi ; c’est sans doute l’ouvrage des historiens du royaume de Wei ; en gros, ces Annales sont sur tous les points en accord fréquent avec le Tch’oen ts’ieou ; ce qu’on y trouve qui diffère fort des livres classiques et de leurs commentaires, ce sont les faits que voici : la durée de la dynastie Hia fut plus grande que celle de la dynastie Yn (126) ; I s’opposa à ce que K’i montât sur le trône et K’i le tua (127) ; T’ai-kia tua I yn (128) ; Wen ting tua Ki-li (129) ; depuis l’époque où les Tcheou reçurent le mandat (céleste leur conférant la royauté) il y eut cent années, mais ce n’est pas à dire que le roi Mou vécut cent ans (130) ; quand le roi Yeou fut allé à sa perte, le comte de Kong, Ho, assuma par intérim la charge du Fils du Ciel, mais ce ne furent pas les deux conseillers qui furent ensemble en bonne harmonie (131). 2. Le I king, en deux liasses ; il est identique aux deux parties du livre classique appelé le I des Tcheou. 3. Le I yao et le Yn yang koa, en deux liasses ; (ces ouvrages) sont assez semblables au I des Tcheou, mais le style du (I) yao est différent. 4. Le Koa hia i king, en une liasse, ressemble à (l’appendice) chouo koa, mais présente p.456 des différences. 5. Le Kong suen Toan (132), en deux liasses, contient les discussions de Kong suen Toan avec Chao Tche au sujet de I. 6. Le Kouo yu, en trois liasses, parle des événements (des pays) de Tch’ou et de Tsin. 7. Le Ming, en trois liasses, ressemble au Li Ki et offre aussi des ressemblances avec le Eul ya et le Luen yu. 8. Le Che Tch’oen, en une liasse, relate les cas de divination par la tortue et par l’achillée qui se trouvent dans le Tso tchoan ; (le titre) Che Tch’oen semble être le nom de famille et le nom personnel de l’auteur du livre. 9. Le So yu (textes fragmentaires), en onze liasses, est un livre de divination traitant des augures, des songes et des prodiges. 10. Le Leang k’ieou ts’ang, en une liasse, commence par dresser la liste généalogique (des princes) de Wei avec les nombres (d’années de leurs règnes) ; ensuite il parle de ce qui concerne les objets en or et en jade du trésor K’ieou. 11. Le Kiao chou, en deux liasses, traite de la méthode du tir à l’arc. 12. Le Cheng fong, en une liasse, (parle) des fiefs qui furent conférés par les empereurs et les rois. 13. Le Ta li, en deux liasses, est du genre des dissertations de Tseou-tse sur le ciel. 14. Le Mou t’ien tse tchoan, en cinq liasses, parle du voyage que fit le Fils du Ciel Mou chez les barbares, et de sa visite à la Mère Reine d’Occident sur le belvédère impérial. 15. Le T’ou chou, en une liasse, est de la catégorie des notices qu’on met sur les peintures. En outre, dix-neuf liasses d’écrits divers, traitant des règles des apanages sous les Tcheou, de la diseussion des affaires de p.457 Tch’ou écrite au temps des Tcheou, de la mort de Cheng ki, mei-jen (concubine de rang élevé) du roi Mou de la dynastie Tcheou. — En tout, il y avait soixante-quinze liasses, mais, pour sept liasses, les fiches écrites étaient rompues et endommagées et on ne peut en connaître le titre (133). — On trouva, en outre, une épée en bronze qui était longue de deux pieds et cinq pouces. — L’écriture faite au vernis était tout entière en caractères k’o teou. Au premier moment, ceux qui violèrent la tombe allumèrent les fiches de bois pour s’éclairer afin de prendre les objets précieux ; lorsqu’ensuite les fonctionnaires recueillirent (ces fiches), il y avait un grand nombre de fiches brûlées et de morceaux de bois brisés ; le texte était endommagé et on ne pouvait le discerner et en rétablir l’enchaînement. L’empereur Ou plaça ces écrits dans les archives secrètes pour qu’on les examinât, qu’on les rassemblât. qu’on les mît en ordre, qu’on en déterminât le sens et qu’on les écrivît en caractères modernes. (Chou) Si lut au nombre de ceux qui firent ce travail de rédaction ; il put étudier ces écrits sur bambou ; à chaque point p.458 douteux il assigna une explication et tout (ce qu’il dit à ce sujet) était juste et bien démontré.

Chou Si ne fut pas le seul érudit qui fut chargé d’étudier et de publier le texte des Annales ; il n’avait été en réalité que le continuateur de son supérieur hiérarchique, Wei Heng, qui avait été mis à mort en 291 avant d’avoir pu terminer son œuvre :

« En ce temps, lisons-nous dans la biographie de Wang Tsie (Tsin chou,chap. LI, p. 12 r°) le préposé en second aux archives secrètes, Wei Heng, faisait une recension critique des livres trouvés dans la tombe de Ki ; mais, avant qu’il eût terminé, il lui arriva malheur (291). Le tchou tso lang qui l’aidait, Chou Si, continua sa tâche et l’acheva ; en beaucoup de cas, il déterminait des sens très particuliers. Le gouverneur de Tong lai, Wang T’ing kien, originaire de Tch’en lieou, lui fit des objections et lui aussi apportait la démonstration (de ses dires). (Chou) Si à son tour fournit des explications et fit des objections. Cependant, (Wang) T’ing kien étant mort, le san ki-che lang P’an T’ao dit à (Wang) Tsie :

— Vos talents, votre science, votre jugement et votre sens critique vous qualifient pour trancher le débat entre ces deux hommes ; vous devriez essayer de traiter ce sujet.

Alors (Wang) Tsie exposa minutieusement les points où (Chou si et Wang T’ing kien) avaient raison et ceux où ils s’étaient trompés ; Tche Yu et Sie Heng qui étaient tous deux fort instruits en toutes sortes de matières, furent d’accord pour juger que (ses dires) étaient parfaitement exacts.

Wei Heng lui-même a fait allusion aux livres de la tombe de Ki dans sa dissertation sur l’écriture (Tsin chou, chap. XXXVI, p. 3 v°) :

« La première année t’ai-k’ang (280), dit-il, un homme de la sous-préfecture de Ki viola pour la piller la tombe du roi Siang, du royaume de Wei ; il y trouva des textes écrits sur fiches contenant plus de cent mille caractères ; ils offraient quelque ressemblance avec les caractères tracés par (Wei) King heou ; des caractères antiques de plusieurs sortes s’y trouvaient aussi. Parmi ces écrits, un chapitre qui traitait p.459 des événements (du pays) de Tch’ou était particulièrement parfait (au point de vue de l’écriture) ; moi, (Wei) Heng, j’ai pris plaisir à ce livre et c’est pourquoi j’épuise mes faibles pensées pour en louer 1a beauté.

Un autre lettré qui paraît avoir joué un rôle considérable dans la publication des fiches du Tchou chou ki nien, est Ho Kiao (app. Tch’ang yu), qui mourut en 292. A vrai dire, la biographie de ce personnage, telle qu’elle se trouve dans le Tsin chou (chap. XLV, p. 6 r°-v°), ne nous fournit aucun renseignement à ce sujet ; mais nous pouvons glaner ailleurs quelques informations. Dans les chapitres du Soei chou consacrés à la littérature, chapitres qui furent composés par Wei Tcheng entre 629 et 636 (134), il est dit (chap. XXXIII, p. 3 r°) :

« Sous les Tsin, la première année t’ai-k’ang (280), des gens de la commanderie de Ki violèrent la tombe du roi Siang, de Wei, et y trouvèrent d’anciens écrits sur fiches en bambou ; les caractères étaient tous de l’espèce k’o teou. Ceux qui violèrent la tombe, n’attachant pas d’importance (à cette découverte), dispersèrent en désordre (ces fiches). L’empereur ordonna au tchong chou kien Siun Hiu et au (tchong chou ) ling Ho Kiao de rédiger et de mettre en ordre (ces écrits) qui formèrent quinze ouvrages en quatre-vingt sept rouleaux... (135) » D’autre part, Lieou Tche ki, qui date de l’année 710 la préface de son grand p.460 ouvrage de critique historique intitulé Che t’ong, parle (136) des Annales de la tombe de Ki par Ho Kiao. Enfin Tchang Cheou tsie, dans son commentaire des Mémoires historiques de Se-ma Ts’ien qu’il publia en 736, rappelle ceci (137) : « Siun Hiu dit : Au témoignage de Ho Kiao, les Annales commencent à Hoang ti et finissent au roi actuel de Wei, ce roi actuel étant le fils du roi Hoei-tch’eng de Wei ».

A côté de tous les lettrés que nous venons de nommer comme s’étant occupés du Tchou chou ki nien, citons encore Siu Hien (app. Hiao tsong), qui mourut âgé de quatre-vingt-dix-sept ans sous le règne de Che Ki-long (335-349) et qui avait composé une « Explication des textes écrits en caractères antiques de la tombe de Ki » (Tsin chou, chap. XCI, p. 5 v°).

Comme on le voit par tous ces témoignages, les Annales écrites sur bambou furent, dès leur apparition, l’objet de travaux nombreux et considérables ; elles faisaient partie de tout un ensemble de livres exhumés dans des circonstances qui nous sont décrites minutieusement et à diverses reprises. Les affirmations précises des contemporains ne nous laissent donc aucun doute sur la réalité de la trouvaille faite dans la tombe de Ki et sur l’importance qu’on attribua aussitôt aux ouvrages qu’un heureux hasard remettait ainsi au jour.

Sur trois points cependant les textes que nous avons traduits présentent quelque incertitude, car ils ne s’accordent ni sur la date exacte à laquelle la tombe de Ki fut violée, ni sur le nom du roi de Wei dont cette sépulture renfermait les restes, ni sur le point de départ chronologique des Annales.

En ce qui concerne la date où Piao Tchoen commit son bienheureux p.461 sacrilège, Siun Hiu, dans sa Préface au Mou t’ien tse tchoan (138), l’inscription de 289 (139) et la biographie de Chou Si dans le Tsin chou (140), la fixent à l’année 281 ; Wei Heng, dans sa dissertation sur l’écriture (141), et Wei Tcheng, dans le traité sur la littérature qui fait partie du Soei-chou (142), opinent pour l’année 280. Tou Yu, écrivant en 282 sa Postface au Tso tchoan, se plaint de n’avoir pu voir qu’assez tard les fiches du Tchou chou ki nien qui étaient restées quelque temps cachées aux profanes dans les archives du palais (143) ; d’autre part, il dit que ces fiches avaient été découvertes au moment où il venait de terminer deux ouvrages qu’il avait commencé d’écrire le troisième mois de l’année 280 (144) ; cette double indication tendrait à reporter la violation de la tombe de Ki à la fin de l’année 280 ou, plus vraisemblablement, au commencement de l’année 281. En tous cas, il me semble qu’il faut rejeter comme fautif le témoignage suivant des Annales principales du Soei chou (chap. III, p. 8 r°) :

« La cinquième année hien ning (279 ap. J.-C.), le dixième mois, un homme de la commanderie de Ki, (nommé) Piao Tchoen, fit un trou dans la tombe du roi Siang, (du pays) de Wei, et trouva des fiches de bambou couvertes de plus de cent mille mots en caractères antiques de la petite écriture tchoan ; on les serra dans les archives secrètes.

Cette date de 279, qui nous est donnée par un livre écrit au VIIe siècle et qui ne concorde pas avec la date de 280 ou 281 relatée par ceux qui furent contemporains de la découverte, ne saurait être tenue pour exacte (145).

Considérons maintenant le problème soulevé par le nom du roi de Wei enterré dans la tombe de Ki : remarquons d’abord que c’est par une simple hypothèse qu’on regarde généralement la sépulture de Ki comme étant celle d’un roi de Wei ; les faits sur lesquels s’appuie cette conjecture sont les suivants : les Annales, qui sont, dans leur dernière partie, une chronique du royaume de Wei, prennent fin à p.462 l’année 299 av. J.-C., qu’elles appellent « la vingtième année du roi actuel » ; d’autre part, la localité de Ki faisait partie du royaume de Wei ; enfin la sépulture témoignait par l’abondance même des trésors renfermés dans son sein qu’elle devait abriter les restes d’un très haut personnage ; de ces considérations on conclut que cette tombe si magnifique qui se trouvait dans l’État de Wei devait être celle d’un roi de ce pays, lequel roi dut mourir en l’année 299 puisque c’est à cette date que les Annales furent interrompues pour être placées dans la sépulture. Encore que cette théorie soit plausible, elle ne s’impose pas cependant d’une manière irrésistible, et Tou Yu a peut-être été bien inspiré en se bornant à dire simplement que les Annales furent trouvées dans une ancienne tombe de la région de Ki (146). Mais, que cette sépulture soit celle du roi lui-même, ou simplement celle d’un grand dignitaire du pays de Wei, encore importe-t-il de déterminer quel était le roi de Wei qui était en la vingtième année de son règne quand les Annales furent déposées dans cette tombe. Ho Kiao se contente de rappeler que le roi actuel dont parlent les Annales est le fils du roi Hoei-tch’eng (147) ; Tou Yu dit que les Annales s’arrêtent à la vingtième année du roi Ngai (148) ; Siun Hiu et Wei Heng, suivis par Wei Tcheng, voient dans la tombe de Ki celle du roi Siang (149) ; la biographie de Chou Si met aussi en avant le nom du roi Siang, mais paraît ensuite admettre que le roi Ngan hi doit être substitué au roi Siang (150). Cette dernière opinion est insoutenable, car le roi Ngan-hi, qui régna de 276 à 243 est bien postérieur à l’époque du « roi actuel » dont la vingtième année est l’année 299 ; nous pouvons donc mettre sans discussion le roi Ngan hi hors de cause. Si maintenant on se reporte aux Tableaux chronologiques de Se-ma Ts’ien, le roi qui régnait en 299 était le roi Ngai (318-196) et il semble ainsi au premier abord que Tou Yu ait raison. Mais un examen plus attentif nous révèle qu’il est peut-être imprudent d’accepter les indications de Se-ma Ts’ien. D’après cet historien, en effet, la succession des rois de Wei comporte : le roi Hoei (370-335), le roi Siang (334-319), le roi Ngai (318-296) ; au contraire, d’après les Annales écrites p.463 sur bambou, il faudrait admettre que le roi dont le nom posthume est Hoei-tch’eng régna d’abord de 370 à 335, puis de 334 à 319, en faisant de l’année 334 le point de départ d’une nouvelle supputation des années ; le roi Hoei-tch’eng eut pour successeur « le roi actuel » dont la vingtième année correspond à l’année 299 av. J.-C. Qui a tort, des Annales ou de Se-ma Ts’ien ? Les avis ont été longtemps partagés, car, encore au VIIIe siècle de notre ère, si Tchang Cheou tsie opinait en faveur des Annales, Se-ma Tcheng donnait raison à Se-ma Ts’ien (151). Il semble bien cependant qu’en définitive le système des Annales doive être considéré comme exact ; seul en effet, il permet d’établir l’ordre chronologique dans la biographie de Mencius où se trouvent mentionnés les entretiens de ce philosophe avec le roi Hoei, puis avec le roi Siang (152) ; seul aussi il s’accorde avec le Che pen qui, comme les Annales, ne reconnaissent que deux souverains (le roi Hoei, le roi Siang) là où Se-ma Ts’ien en admet trois (le roi Hoei, le roi Siang et le roi Ngai). Ainsi le roi Ngai n’a jamais dû exister ; les années 318-296 que Se-ma Ts’ien attribue à son règne appartiennent au roi Siang et c’est donc le roi Siang que les Annales désignent en l’appelant « le roi actuel » ; telle est la conclusion à laquelle étaient déjà arrivés Siun Hiu (153) et Wei Heng (154). Faut-il aller plus loin et introduire une nouvelle correction dans la chronologie de Se-ma Ts’ien en disant que le roi qui régna, d’après l’historien, de 318 à 296, dut en réalité mourir en 299 ? Cette correction serait nécessaire si la tombe de Ki était la sépulture de ce roi, car, les Annales s’interrompant à l’année 299, il est vraisemblable que c’est à cette date qu’elles furent déposées dans la tombe en même temps que le cercueil du défunt. Nous avons indiqué dans une note de notre traduction (155) que, d’après Se-ma Tcheng, le roi qui passe p.464 pour avoir été enterré dans la tombe de Ki, serait en effet mort en 299, mais que, par piété filiale, son successeur aurait encore rapporté à so règne les trois années du deuil réglementaire. Point n’est besoin cependant de recourir à cette explication trop ingénieuse si l’on considère que la tombe de Ki peut fort bien, comme nous l’avons indiqué plus haut (p.462, lignes 9-12), n’avoir été que la sépulture d’un haut dignitaire du pays de Wei qui serait mort en 299, tandis que le roi régnant à cette époque aurait vécu trois années encore.

Reste enfin à rendre compte du désaccord qu’on remarque entre Tou Yu (156) et le biographe de Chou Si (157) d’une part qui font commencer les Annales à la dynastie Hia, et Ho Kiao (158) d’autre part qui fixe leur point de départ à Hoang ti. En fait, c’est Ho Kiao qui a raison, et les Annales telles que nous les avons aujourd’hui s’ouvrent au règne de Hoang ti. Tou Yu et le biographe de Chou Si n’ont parlé que par à peu près ; leur dire a été invoqué à tort par certains critiques qui, ignorant le témoignage décisif de Ho Kiao, ont prétendu que les Annales actuelles étaient apocryphes puisqu’elles débutaient par Hoang ti et non par la dynastie Hia.

Si les lettrés de la fin du me siècle de notre ère qui furent contemporains de la découverte des fiches de bambou constituant le Tchou chou ki nien n’ont pas émis le moindre doute sur l’authenticité de cet ouvrage, les érudits qui vinrent après eux partagèrent leur conviction et firent un usage fréquent des Annales pour contrôler ou rectifier les textes historiques. Énumérer toutes les citations qu’ils en firent serait une tâche presque illimitée ; il ne sera pas cependant sans utilité de signaler brièvement les principaux auteurs qui ont considéré le Tchou chou ki nien comme une source scientifique de première importance ; leur multitude même constituera une très forte présomption en faveur de ce livre dont on a parfois contesté la valeur.

Les Annales sont invoquées à diverses reprises par un commentateur du Ts’ien Han chou qui s’appelle lui-même « votre sujet, Tsan ». Les érudits, tels que P’ei Yn (deuxième moitié du Ve siècle de notre ère) et Yen Che kou déclarent ignorer p.465 qui pouvait être ce personnage que Li Tao yuen († 527) nomme Sie Tsa, tandis que Yao Tch’a (seconde moitié du VIe siècle) le nomme Yu Tsan, ces deux noms de famille étant déterminés au moyen de conjectures peu solides. Un critique de l’époque des Song, Song K’i (998-1061), paraît avoir trouvé le mot de l’énigme (159) : il fait remarquer que ce Tsan cite les « écrits trouvés dans la tombe Mao » et les « ordonnances relatives aux emplois officiels à l’époque des Han » ; or ces deux ouvrages ont été perdus lors des troubles qui, dans les premières années du IVe siècle, chassèrent les Tsin de Lo yang à Nanking ; comme, d’autre part, Tsan fait usage du Tchou chou ki nien qu’il désigne sous le nom de « le texte antique de la commanderie de Ki », il dut donc écrire entre 281, date où la tombe de Ki fut violée, et 317, date où Nanking devint la capitale des Tsin. Dès lors il devient fort probable que Tsan n’est autre que le Fou Tsan dont il est question dans la Table des matières du Mou t’ien tse tchoan en ces termes :

« Le lang tchong, reviseur des livres dans le bureau des archives secrètes, Fou Tsan, dit dans sa recension du Mou tien tse tchoan en caractères antiques : Ce livre, qui rappelle l’histoire du Fils du Ciel Mou, fut trouvé par un certain Piao Tchoen, originaire de la sous-préfecture de Ki, quand il viola une ancienne tombe.

Ce Fou Tsan, ayant le titre officiel de reviseur des livres, il devait adresser ses travaux à l’empereur, et c’est pourquoi il se désignait lui-même en s’appelant « votre sujet, Tsan » ; d’autre part, comme il fut contemporain de la découverte des livres dans la tombe de Ki et qu’il fut chargé de l’examen d’un de ces livres. le Mou t’ien tse tchoan, on comprend qu’il ait été à même de connaître et d’apprécier le Tchou chou ki nien (160). p.466 L’un des plus anciens commentateurs de Se-ma Ts’ien, Siu Koang, mort en 425 av. J.-C., cite les Annales sous le nom de « les Annales de la tombe de Ki » (161).

C’est à P’ei Yn (seconde moitié du Ve siècle de notre ère) que nous devons la conservation des fragments de Siu Koang qui nous sont parvenus ; il s’est aussi inspiré souvent du commentaire du Ts’ien Han chou par (Fou) Tsan. Cependant il a eu parfois recours personnellement au Tchou chou ki nien, car les emprunts qu’il fait à ce livre ne sont pas toujours amenés par la mention de Siu Koang ou de (Fou) Tsan (162).

Li Tao yuen, qui mourut en 527, s’est servi à plus de cent reprises du Tchou choie ki nien dans son célèbre commentaire du Choei king. Le Commentaire du Heou Han chou, publié en 676 par une commission de lettrés ayant à sa tête le prince Li Hien, fait des citations des Annales qui, bien que présentant avec le Tchou chou ki nien actuel quelques variantes, s’accordent parfois si exactement avec le texte du Heou Han chou qu’on peut se demander si l’auteur même de ce grand ouvrage historique, Fan Ye († 445), n’a pas puisé directement dans les Annales pour rédiger certains passages de son livre (163).

Les deux grands commentateurs de Se-ma Ts’ien à l’époque des T’ang, Se-ma Tcheng qui écrivait dans la première moitié du VIIIe siècle, et Tchang Cheou tsie qui p.467 date sa préface de l’année 736, font tous deux fréquemment appel aux Annales (164) ; mais, tandis que Tchang Cheou tsie les invoque surtout pour l’époque des Yn et du commencement des Tcheou, Se-ma Tcheng y a recours principalement pour la période des Royaumes combattants, en particulier lorsqu’il s’agit de l’histoire de ce royaume de Wei dont la dernière partie des Annales sont la chronique.

Dans son important ouvrage de critique historique publié en 710 sous le titre de Che t’ong, Lieou Tche ki à parlé à diverses reprises du Tchou chou ki nien.

« Les Annales écrites sur bambou, dit-il (165), sont, dans les événements qu’elles rapportent, entièrement en accord avec le Tch’oen ts’ieou de Lou. Mencius (166) a dit :

« Dans le pays de Tsin ce qu’on appelle Tch’eng, dans le pays de Tch’ou ce qu’on appelle Tao ou, et dans le pays de Lou ce qu’on appelle Tch’oen ts’ieou, ce sont en réalité des ouvrages de même sorte. »

Ainsi donc, Tch’eng et Annales, de même que Tao ou, ne sont que des noms différents (appliqués à des livres identiques au) Tch’oen ts’ieou ». — Ailleurs (167) Lieou Tche ki montre comment le Tso tchoan, éclipsé à l’époque des Han par les commentaires de Kong-yang et de Kou leang, fut remis en honneur grâce à la publication des Annales qui en démontrèrent la parfaite véracité ; il rappelle à ce propos le mot de Chou Si déclarant que,

« si ce livre avait fait son apparition au temps des Han, Lieou Hin n’aurait pas été gouverneur de Ou-yuen.

En effet, sous le règne de l’empereur Ngai (6-1 av. J.-C.), Lieou Hin avait dû quitter la cour et demander un poste en province pour échapper à la haine des lettrés p.468 qui lui reprochaient d’avoir soutenu la supériorité du commentaire de Tso sur ceux de Kong yang et de Kou leang : si Lieou Hin avait pu prouver le bien-fondé de sa théorie en s’appuyant sur le Tchou chou ki nien, il aurait fermé la bouche de ses détracteurs et n’aurait pas été obligé de s’éloigner de la capitale.

Rappelons enfin, sans entrer dans le détail, les auteurs et les ouvrages qui, en dehors de ceux que nous venons. d’énumérer, font les plus fréquentes citations des Annales ; ce sont : Kouo P’o (276-324) dans ses commentaires du Chan hai hing et du Mou t’ien tse tchoan ; Li Chan, dans son commentaire du Wen siuen publié en 658 ; Lo Pi dans le Lou che publié en 1170, et Lo P’ing, fils du précédent, à qui on attribue un commentaire du Lou che qui est peu-être l’œuvre de Lo Pi lui-même ; Kin Li-siang (1232-1303) dans ses « livres antérieurs du Kang-mou » ; Hou Yng-lin (fin du XVIe siècle), dans le Pi ts’ong ; Ho K’ie (docteur en 1625), dans le Che king che pen kou i ; Ma sou (docteur en 1659) dans le I che ; Kou Yen-ou, dans le Je tche lou publié vers 1673 ; Kao Che-k’i (1645-1704), dans le Tch’oen ts’ieou ti li k’ao lio ; Li K’ie, dans le Chang Che qu’il composa de 1730 à 1746 ; Leang Yu-cheng, dans le Che Ki tche i. Mentionnons encore parmi les ouvrages qui font un fréquent usage du Tchou chou ki nien les encyclopédies telles que : le I wen lei tsiu, compilé par Ngeou-yang Siun (557-645) et d’autres au commencement du VIIe siècle ; le Pei t’ang chou tch’ao de Yu Che-nan (558-638) ; le Tch’ou hio Ki composé par Siu Kien (659-729) et d’autres ; le T’ai p’ing yu lan publié en 983 ; enfin p.469 les dictionnaires, répertoires de rimes et encyclopédies qui ont vu le jour sous la dynastie actuelle.

Comme on peut ainsi le constater, les Annales écrites sur bambou n’ont pas cessé de jouir du plus grand crédit depuis la date où elles furent découvertes jusqu’à nos jours. Elles ont cependant rencontré, du moins sous leur forme actuelle, des détracteurs dont l’opinion a reçu comme l’estampille officielle en étant admise dans la grande Bibliographie impériale intitulée Se k’ou ts’iuen chou tsong mou (chap. XLVII), qui fut publiée en 1782. Examinons donc ce que vaut leur thèse.

L’auteur de la notice insérée dans la Bibliographie impériale déroule une longue liste de citations des Annales qu’on peut relever dans divers ouvrages depuis l’époque où la tombe de Ki livra ses trésors jusqu’au XIIe siècle et il montre que ces passages, ou sont absents du Tchou chou ki nien actuel, ou en contredisent le témoignage. Il ajoute, comme considération accessoire que le Tchou chou ki nien rappelle deux faits tirés l’un du chapitre Yun tcheng,l’autre du chapitre Yue ming du Chou king ; or ces deux chapitres font partie du pseudo-texte antique qui paraît être celui que retrouva Mei Tsi au temps de l’empereur Yuen (317-323) ; comment donc le Tchou chou ki nien, qui fut exhumé dès l’année 281, a-t-il pu connaître des textes qui furent mis au jour une quarantaine d’années plus tard ? Enfin la Bibliographie impériale soutient que le Tchou chou ki nien actuel doit être postérieur au fameux commentaire de Hou Ngan kouo (1074-1138) sur le Tch’oen ts’ieou, car ainsi seulement peut-on expliquer le fait que les Annales présentent une combinaison du calendrier des Hia avec le calendrier du Tch’oen ts’ieou. En conclusion, les Annales écrites sur bambou étaient bien à l’origine un livre authentique qui se transmit depuis l’année 281 ap. J.-C. jusqu’au XII° siècle, mais qui ensuite fut perdu. Elles ont dû être refaites sous la dynastie des Ming par quelque érudit qui les reconstitua au moyeu de divers livres.

A supposer même que cette opinion fût exacte, elle serait loin d’enlever toute valeur aux Annales telles que nous les avons. On sait que plusieurs ouvrages qui semblaient irrémédiablement anéantis, out été reconstruits avec une patience et une précision admirables par des p.470 savants qui se sont ingéniés à en recueillir et à en agencer les fragments épars de ci et de là dans la vaste littérature chinoise. On remarquera qu’à côté de la cinquantaine de citations dont l’auteur de la notice de la Bibliographie impériale signale l’absence dans le Tchou chou ki nien, il en existe des milliers d’autres qui s’y retrouvent fort exactement ; on est donc autorisé à déclarer que, dans son ensemble, le Tchou chou ki nien actuel n’est pas fort différent de ce qu’il était lorsqu’on le retira de la tombe de Ki. Mais bien plus, la multitude même de ces concordances, et surtout le fait que bon nombre d’entre elles se produisent dans des cas où la citation n’est pas textuelle et n’a donc pas pu servir à rétablir la leçon originale, nous obligent à rejeter la thèse de la Bibliographie impériale et à admettre que la transmission des Annales ne s’est jamais interrompue. Aussi bien serait-il fort surprenant qu’un ouvrage universellement connu jusqu’au XIIe siècle ait soudain disparu en totalité. Comment donc répondrons-nous aux objections qu’on élève contre l’authenticité du Tchou chou ki nien actuel ?

Considérons d’abord l’argument tiré des citations qui ne se retrouvent plus aujourd’hui dans le Tchou chou ki nien. On a vu que, lcrs de l’ouverture de la tombe de Ki, les lamelles de bambou sur lesquelles était écrit ce livre, gisaient pêle-mêle au milieu d’un nombre formidable de fiches analogues dont on fit des dizaines de charretées. Parmi ces fiches, plusieurs traitaient de matières historiques, et, ne pouvant être groupées en un tout continu, furent désignées sous le nom générique de « Paroles fragmentaires ». Si maintenant on se rappelle que les fiches de bambou sur lesquelles étaient écrits les livres antiques étaient fort étroites et contenaient chacune une seule ligne de caractères, que par conséquent recueillir et classer les innombrables fiches d’un ouvrage lorsqu’elles avaient été dispersées et mêlées à d’autres fiches, était une tàche extrêmement délicate et difficile, on conçoit que des divergences d’opinion se soient produites, les uns prétendant que certaines fiches pouvaient être rattachées à tel ouvrage, tandis que les autres voulaient les en exclure ; c’est ainsi que, suivant les éditeurs, des fiches furent tantôt incorporées aux Annales, et tantôt rejetées dans la catégorie des Paroles fragmentaires. Maint passage a donc dû autrefois être inséré dans les Annales qui en fut plus tard éliminé par une critique plus sévère. Ainsi s’explique sans doute qu’on puisse relever depuis le IVe jusqu’au VIIIe siècles p.471 des citations qui ne figurent plus maintenant dans le Tchou chou ki nien.

Pour se rendre compte des incertitudes qui n’ont cessé de planer sur les limites exactes du texte des Annales, il suffit d’étudier le commentaire original qui l’accompagne ; ce commentaire est mis sous le nom de Chen Yo qui vécut de 441 à 513. Mais il n’est dû que pour une faible part à ce lettré ; il renferme, à côté de paragraphes qui décèlent une date postérieure au Ve siècle, un assez grand nombre de passages que la critique moderne tantôt attribue aux Paroles fragmentaires et tantôt suppose avoir fait primitivement partie des Annales elles-mêmes. Si on n’est pas parvenu à tracer bien nettement la ligne de démarcation, entre le texte des Annales et le commentaire original, on comprend que le même flottement ait pu se produire aussi lorsqu’il s’est agi de distinguer entre le texte des Annales et d’autres phrases des Paroles fragmentaires qui n’ont pas été conservées dans le commentaire original.

La remarque faite par la Bibliographie impériale que, en deux endroits, les Annales paraissent s’inspirer du pseudo-texte antique du Chou king n’autorise aucune conclusion. En effet, si le pseudo-texte antique est l’œuvre de Mei Tsi, quelle raison a pu empêcher ce faussaire d’emprunter quelques-unes de ses affirmations aux Annales, et de quel droit vient-on soutenir que ce sont au contraire les Annales qui ont dû puiser dans les chapitres du Chou king fabriqués par Mei Tsi ? Si, d’autre part, comme je le crois, le pseudo-texte antique n’est pas forgé de toutes pièces, mais est bien plutôt composé avec des débris de matériaux antiques plus ou moins habilement soudés les uns aux autres, qui nous empêche d’admettre que les deux faits relatés à la fois par le pseudo-texte antique et par les Annales appartenaient au patrimoine commun de l’histoire la plus ancienne, en sorte que ni les Annales n’ont eu à s’inspirer de Mei Tsi, ni Mei Tsi des Annales ?

Abordons enfin la troisième observation de la Bibliographie impériale : les Annales actuelles, combinent le calendrier du Tch’oen ts’ieou avec le calendrier des Hia. Pour comprendre cette critique, il convient d’instituer une discussion nécessairement un peu longue. Nous avons déjà eu l’occasion d’indiquer que, d’après Tou Yu, les Annales se servaient du calendrier des Hia qui fait commencer l’année au mois yn (168) ; la même p.472 affirmation est d’ailleurs reproduite par Wei tcheng dans le Soei chou (chap. XXXIII, p. 3 r°) ; il devait donc y avoir pour la période Tch’oen ts’ieou un désacord de deux mois entre les dates des Annales et les dates du Tch’oen ts’ieou ; Tou Yu lui-même nous en a fourni un exemple probant en nous disant que la date qui était pour les Annales, le onzième mois de la onzième année du comte Tchoang, de K’iu ou, correspond au premier mois de la première année du duc Yn, de Lou. Il n’y a pas lieu d’être surpris que les Annales aient employé le calendrier des Hia même pendant la période Tch’oen ts’ieou : Les Annales en effet étaient une chronique particulière de l’État de Tsin, puis de Wei, comme le prouvent encore aujourd’hui des expressions telles que « nos soldats » désignant les troupes de Tsin ou de Wei. Or, les princes de Tsin se servaient du comput des Hia, tandis que les rois de la dynastie Tcheou fixaient deux mois plus tôt le commencement de l’année ; le premier mois des Tsin était donc le troisième mois des Tcheou ; c’est ce qui explique pourquoi le Tso tchoan, lorsqu’il emprunte ses renseignements aux chroniques de Tsin est en désaccord de deux mois avec le Tch’oen ts’ieou ; Legge (Chinese Classics, vol. V, Prol. p. 98) en a signalé trois exemples significatifs et a pu conclure que « Tsin évidemment réglait son calcul des mois sur le calendrier des Hia ». Il est donc tout naturel que le Tchou chou ki nien, qui était une chronique de Tsin, se soit conformé au calendrier des Hia. Si cependant les Annales étaient, dans leur dernière partie, une chronique particulière de l’État de Tsin, puis de celui de Wei, elles devaient donc classer les événements d’après les règnes des princes de Tsin, puis de Wei, tout de même que le Tch’oen ts’ieou, chronique particulière de l’État de Lou, se guide sur les règnes des ducs de Lou. En effet, sous leur forme primitive, les Annales, à partir de l’année 770 av. J.-C., étaient distribuées suivant les règnes des princes de Tsin, et, à partir de l’année 403 av. J.-C., suivant les règnes des princes de Wei. Tch’en Fong heng, dans son édition du Tchou chou ki nien publiée en 1813, a pu grouper (chap. XLIII, p. 5 v° et suiv.), 108 citations des Annales faites par Li Tao yuen dans son commentaire du Choei king, et ces 108 passages expriment les dates d’après les années des princes de Tsin ou de Wei. De même aussi les citations du Tchou chou Ki nien faites par Se ma Tcheng attestent que, au VIIIe siècle de notre ère, les Annales étaient encore disposées de la même manière.

Actuellement, les Annales se présentent à nous sous une forme bien p.473 différente. Du commencement à la fin, elles sont rangées d’après les règnes des Fils du Ciel, et, dans la période Tch’oen ts’ieou et 1a période des Royaumes combattants, les princes de Tsin et de Wei se sont effacés devant les rois de la dynastie Tcheou. Ainsi donc, à une date postérieure au VIIIe siècle de notre ère, on a dû remanier profondément la dernière partie des Annales pour substituer à une chronologie fondée sur les règnes des princes de Tsin et de Wei une chronologie fondée sur les règnes des rois de la dynastie Tcheou. Par exemple, si nous comparons les dates exprimées dans le Tchou chou ki nien tel que le cite Li Tao wen au VIe siècle de notre ère avec les mêmes dates telles qu’elles sont exprimées dans le Tchou chou ki nien actuel, nous trouvons les équivalences suivantes :

Autrefois Aujourd’hui

12e an. Tchoang po, de K’iu ou 1e an. roi Hoan (719).

14e an. duc Hoei, de Tsin 15e an. roi Siang (647). 5e an. duc Tch’ou, de Tsin 6e an. roi Yuen (470).

9e an. roi Hoei-tch’eng, de Leang (ou Wei)7e an. roi Hien (362),

etc., etc.

Lorsqu’il s’agit des mois, ce remaniement des Annales paraît y avoir introduit la plus grande confusion, car tantôt, on a fait la correction nécessaire pour réduire le calendrier des Hia au calendrier des Tcheou et tantôt on l’a omise. Ainsi, lorsque les Annales nous disent :

« La cinquantième année (720) du roi P’ing, au printemps, le deuxième mois, le jour ki-se, il y eut une éclipse de soleil,

elles sont en accord rigoureux avec le Tch’oen ts’ieou qui nous apprend que :

« La troisième année du duc Yn (720), au printemps, le deuxième mois du calendrier royal, le jour ki-se, il y eut une éclipse de so-leil.

Voici au contraire un exemple où la correction n’a pas été faite :

Li Tao-yuen cite un passage du Tchou chou ki nien primitif qui était ainsi conçu :

« La 25e année (652) du duc Hien, de Tsin, le premier mois, les Ti attaquèrent Tsin.

Le Tchou chou ki nien actuel écrit :

« La 25e année (652) du roi Hoei (de la dynastie Tcheou), au printemps, le premier mois, les Ti attaquèrent Tsin.

Puisque le premier mois du calendrier des Hia correspond au troisième mois du calendrier des Tcheou, il aurait fallu substituer le troisième mois au premier, du moment qu’on remplaçait le duc Hien par le roi Hoei ; si cette correction avait été faite, l’attaque des Ti contre Tsin se serait trouvée reportée au dernier mois du printemps et les Annales auraient alors été assez près de s’accorder avec le Tch’oen ts’ieou qui p.474 place cette incursion des barbares dans l’été de la huitième année du duc Hi (652). Ainsi, tantôt les Annales suivent le calendrier des Tcheou, tantôt elles restent fidèles au calendrier des Hia. Il ne me semble donc pas qu’il y ait lieu de dire, comme le fait la Bibliographie impériale, que les Annales actuelles combinent le calendrier des Hia avec le calendrier Tch’oen ts’ieou suivant un système savant emprunté à Hou Ngan kouo ; mais bien plutôt il paraît évident que les Annales ont été remaniées fort maladroitement ; qu’on n’a pas su réduire d’une manière uniforme les dates exprimées d’après le calendrier des Hia en dates exprimées d’après le calendrier des Tcheou. Nous ne songeons point à dissimuler la gravité des altérations qu’a subies de ce chef le texte du Tchou chou ki nien ; il est évident que, dans toute la section qui prend son point de départ à l’année 770 av. J.-C., la rédaction de ces Annales devait avoir primitivement un aspect fort différent de celui qu’elle offre aujourd’hui ; classée pour les années d’après les règnes des princes de Tsin ou de Wei et appliquant avec régularité pour les mois le calendrier des Hia, elle était bien, comme le disait déjà Lieou Tche ki (169), l’équivalent dans le pays de Tsin de ce que le Tch’oen ts ieou fut dans le pays de Lou ; il est fort regrettable que cette chronique locale ait perdu son véritable caractère grâce à l’intervention fâcheuse d’un homme trop zélé qui a voulu en faire le cadre d’une histoire générale de la Chine ancienne.

La partie des Annales qui traite des événements postérieurs à l’année 771 ne forme cependant guère plus du tiers de l’ouvrage total. Les deux autres tiers ont donc échappé à la cause de trouble que nous venons de signaler et paraissent moins altérés. Ce n’est pas à dire toutefois qu’ils soient sortis entièrement indemnes des mains des éditeurs successifs du Tchou chou ki nien. On remarquera, en effet que, dans tout le cours de l’ouvrage, un grand nombre de dates sont exprimées avec l’indication des caractères du cycle sexagénaire ; or, on sait que, même à l’époque où écrivait Se-ma Ts’ien, c’est-à-dire vers l’an 100 av. notre ère, le cycle sexagénaire formé au moyen des deux séries kia, i, ping, ting... et tse, tch’eou, yn, mao... n’était pas encore appliqué à la notation des années ; il est donc bien impossible que ce cycle ait pu figurer dès l’année 299 av. J.-C. dans les Annales. En fait, aucune des citations du Tchou chou ki nien, antérieure à l’époque des T’ang, ne présente de caractères cycliques. C’est dans le chapitre du Soei chou p.475 sur le calendrier (chap. XVII, p. 6 r°) que nous relevons pour la première fois une date du Tchou chou ki nien, accompagnée de caractères cycliques. « D’après le Tchou chou ki nien, lisons-nous, la première année de Yao fut l’année ping tse ». Ce chapitre du Soei chou est l’œuvre d’une commission de lettrés, présidée par Tchang suen Ou-ki (d. 659), qui présenta son travail à l’empereur en l’année 656. C’est donc au milieu du VIIe siècle que les caractères cycliques font leur apparition dans le texte du Tchou chou ki nien et nous avons tout lieu de croire que c’est vers cette époque qu’ils y furent introduits.

Ce passage du Soei chou est encore intéressant à un autre point de vue. Il donne en effet à entendre que la date de la première année de Yao est la plus ancienne qui, dans le Tchou chou ki nien, tel qu’on le connaissait en l’an 656 de notre ère, fût exprimée en caractères cycliques. Cette indication s’accorde bien avec le Tchou chou ki nien actuel qui ne marque les caractères cycliques qu’à partir de Yao. La question se pose maintenant de savoir pourquoi, puisque le Tchou chou ki nien commence à Hoang ti, les caractères cycliques n’y ont été ajoutés que depuis le règne de Yao. La raison de cette singularité se laisse aisément apercevoir. Elle provient de l’incertitude où s’est trouvé l’interpolateur au sujet du règne de l’empereur Tche : d’une part, dans le Tchou chou ki nien actuel, on trouve mentionné,immédiatement après l’empereur Hoang ti, « l’empereur Tche qui fut Chao hao »  ; mais aucune durée de règne ne lui est assignée ; d’autre part, dans le « Commentaire original », après l’empereur K’ou et avant l’empereur Yao, on lit « Tche, fils de l’empereur, prit le pouvoir ; au bout de neuf ans il fut dégradé ». Il est évident que ces deux indications contradictoires rendent suspecte la chronologie antérieure à Yao ; l’interpolateur à qui on doit l’adjonction des caractères cycliques s’est donc arrêté à Yao ; aussi bien ce souverain est-il celui auquel commence la littérature classique représentée par le Chou king. A vrai dire cependant, le choix est facile à faire entre les deux témoignages du Tchou chou ki nien et du Commentaire original. En plaçant l’empereur Tche après l’empereur K’ou, le Commentaire original est d’accord avec Se ma Ts’ien ; en le plaçant après Hoang ti, le p.476 Tchou chou ki nien est conforme au système de Lieou Hin (fin du 1er siècle av. J.-C. et çommencement du 1er siècle ap. J.-C.), tel qu’il est exposé dans le Lu li tche du Ts’ien Han chou. A priori il y a tout lieu de croire que le Commentaire original représente la leçon primitive des Annales qui sont, dans leur ensemble, plus près de la chronologie de Se-ma Ts’ien que de celle de Lieou Hin (170). Mais on peut aller plus loin et apporter une preuve décisive de l’exactitude du texte qui place Tche après K’ou et lui attribue 9 ans de règne ; ce texte en effet nous permet d’établir un accord rigoureux entre les Annales et un passage du Tso tchoan (8e année du duc Chao, 534 av. J.-C.) dans lequel la mort de l’empereur Tchoan hiu est assignée à une année choen ho, c’est-à-dire, si l’on convertit cette date en notation moderne, à une année marquée du signe hai (171) ; en effet, en remontant dans le Tchou chou ki nien à partir de la 1e année de Yao qui est une année ping tse (2145 av. J.-C.), on trouvera, si on adopte la leçon du Commentaire original, que la première année de Tche sera l’année 2154 (= 2145+9), qui est une année ting mao, que la première année de K’ou sera l’année 2217 (= 2151+63), qui est une année kia-tse, et que, par conséquent, l’empereur Tchoan hiu, qui précède K’ou, mourut en l’année 2218 qui est une année koei-hai. La date que nous obtenons ainsi est en accord absolu avec celle que suppose le passage précité du Tso tchoan daté de l’année 534 av. J.-C., et cette coïncidence prouve la haute antiquité de quelques-uns des principes chronologiques que suppose le Tchou chou ki nien.

Après avoir déterminé la place que doit occuper l’empereur Tche et la durée de son règne, rien ne nous empêche plus de continuer le calcul des dates jusqu’à l’origine même du Tchou chou ki nien, p.477 c’est-à-dire jusqu’à Hoang ti. La première année de l’empereur Tchoan hiu sera l’année 2295 (=2217+78) qui est une année ping ou, et la première année de Hoang ti sera l’année 2395 (=2295+100) qui est une année ping yn. En faisant ces constatations, nous ne saurions encourir le reproche de rien ajouter au texte de notre propre chef ; nous nous bornons à compléter l’interpolateur qui, sans modifier en quoi que ce soit le Tchou chou ki nien, a exprimé au moyen du cycle sexagénaire les dates résultant nécessairement des durées de règne des souverains. Remarquons en effet, que le Tchou chou ki nien est un livre d’Annales, c’est-à-dire que sa prétention est de disposer les événements suivant les années classées d’après les règnes des souverains ; il faut donc nécessairement que, dès le début de cet ouvrage, tous les règnes successifs aient été enregistrés avec leur durée exacte, et, si l’empereur Tche seul échappe en apparence à la règle, c’est là une anomalie que le Commentaire original nous permet de faire disparaître. Le Tchou chou ki nien appartenait à une classe de livres que Se-ma Ts’ien connaissait bien :

« J’ai lu, dit-il (chap. XIII, p. 1 r°), les Mémoires fondés sur les listes (de souverains) ; à partir de Hoang ti, tous indiquent les durées en années (des règnes des souverains).

Puisque le Tchou chou ki nien lui-même était encore caché sous la terre à l’époque où écrivait Se-ma Ts’ien, ce n’est donc pas à ce livre mais à des ouvrages analogues, qu’il fait ici allusion ; son témoignage nous atteste que le Tchou chou ki nien n’était pas unique en son genre et que d’autres auteurs encore adoptaient une chronologie dont le point de départ était Hoang ti.

Le sens critique de Se-ma Ts’ien a fait justice de ces anciennes chronologies en établissant qu’elles ne pouvaient s’accorder avec les textes historiques et que toute tentative de fixer des dates précises antérieurement à l’année 841 av. J.-C. était chimérique. Il n’en reste pas moins avéré que, quelle que soit sa valeur intrinsèque, le système chronologique du Tchou chou ki nien est le plus ancien qui nous soit connu. On ne doit donc pas être surpris qu’il ait conservé quelque faveur auprès des érudits chinois et que, par exemple, Li Tchao lo (première moitié du XIXe siècle) l’ait adopté dans sa table supplémentaire des dates antérieures à l’année 140 av. J.-C. (172), p.478 de préférence au système bien postérieur qui fut combiné au XIe siècle de notre ère par Chao Yong (173) et qui a pris droit de cité dans la sinologie (174).

Le seul argument de quelque poids qu’on puisse alléguer contre l’antiquité de la chronologie du Tchou chou ki nien est tiré du passage de la biographie de Chou Si dans lequel il est dit (175) que, d’après les Annales, la dynastie Hia eut une durée plus grande que la dynastie Yn, ce qui est contraire aux données du Tchou chou ki nien actuel. Legge (176) en a conclu que, en introduisant les caractères cycliques, on avait dû altérer la chronologie primitive des Annales de manière à rendre la dynastie Hia plus courte que la dynastie Yn (cf. p. 455, n. 1). p.479 Il ne me semble pas qu’un témoignage unique, et peut-être fautif, rende nécessaire une conclusion aussi radicale, car enfin l’auteur de la biographie de Chou Si a pu se tromper ; on ne voit pas trop quelles raisons auraient pu motiver des changements profonds dans les indications que présentait le Tchou chou ki nien primitif au sujet des dynasties Hia et Yn. Le témoignage de la biographie de Chou Si me paraît, comme d’ailleurs à Tch’en Fong heng, inexplicable.


En conclusion, les Annales écrites sur bambou nous semblent être un livre d’une authenticité incontestable. Sans doute elles ont subi des remaniements de forme qui ont altéré leur physionomie, surtout dans la section qui traite des événements postérieurs à l’année 771 av. J.-C. ; sans doute aussi elles ont pu être éditées de manières notablement différentes suivant qu’on a considéré certaines des fiches trouvées dans la tombe de Ki comme faisant ou non partie de cet ouvrage ; mais, ces réserves faites, elles doivent, dans l’État où elles sont aujourd’hui, reproduire encore assez exactement les Annales qui furent enfouies dans la tombe de Ki en l’année 299 av. J.-C. ; elles sont donc pour l’historien un document d’une réelle importance.

Notes

a51.(101. ) Le Tchou chou ki nien a été traduit par Ed. Biot (Journ. As., déc. 1841, p. 537-578, et mai 1812, p. 381-431), puis par Legge (Chinese Classics, vol. III ; Proleg., p. 105-183).

a51.(102. ) Ce texte est cité dans les ‘Prolégomènes de l’édition des Annales publiée en 1813 par Tch’en Fong heng sous le titre de Tchou chou ki nien tsi tcheng (section tsi chouo, p. 1 r°-3 r°). La Bibliothèque nationale (n. f. chinois, n° 4474-4476) possède un exemplaire de l’édition princeps de cet excellent ouvrage qui provient de la bibliothèque de M. de Paravey (cf. une note de Ed. Biot dans le Journal Asiatique de février 1842, p. 203-207). Dans la bibliothèque de l’Université de Cambridge se trouve une autre édition datée de 1842 (cf. Catalogue de Giles, X, 123-129)..

a51.(103. ) Tou Yu avait été le commandant en chef des troupes qui mirent fin à la dynastie de Ou : voyez sa biographie dans le chap. XXXIV du Tsin chou.

a51.(104. ) Aujourd’hui, la sous-préfecture de Kiang-ling fait partie de la ville préfectorale de King tcheou, dans la province de Hou-pei.

a51.(105. ) Aujourd’hui, ville préfectorale de Siang yang, dans la province de Hou pei. a51.(106. ) Aujourd’hui encore sous-préfecture de Ki, dans la préfecture de Wei-hoei, province de Ho-nan. a51.(107. ) C’est-à-dire en forme de têtards. Ce nom est une dénomination populaire qu’on appliqua aux caractères antiques lorsque les fiches constituant le manuscrit en caractères antiques du Chou king réapparurent au deuxième siècle avant notre ère (Cf. Journ. Asiatique, janv. fév. 190. 5, p. 22, n. 2),

a51.(108. ) On voit, par ce témoignage de Tou Yu, que le manuscrit des Annales présentait, dès l’époque où il fut retrouvé, de grandes difficultés de lecture à cause de l’archaïsme de ses caractères.

a51.(109. ) C’est-à-dire que ces fiches de bois, si elles étaient recopiées sur des rouleaux de papier, formeraient soixante-quinze de ces rouleaux.

a51.(110. ) Tous ces appendices, au dire de Se-ma Ts’ien, furent composés par Confucius. Cf. p. 400, n. 6.

a51.(111. ) Cf. t. IV, p. 253.

a51.(112. ) Cf. t. IV, p. 254. Le comte Tchoang, qui était le représentant de la branche cadette de la famille princière de Tsin et qui régna à K’iu ou de 731 à 716, eut pour fils et successeur le duc Ou qui, en 679, déposséda entièrement la branche aînée et fonda une nouvelle lignée de princes de Tsin. Les Annales écrites sur bambou ne reconnaissaient comme légitime que cette seconde lignée et, sous leur forme primitive, dataient les événements d’après les années de règne de ses représentants même dès l’époque où ils n’étaient encore que princes de K’iu ou. a51.(113. ) Tou Yu indique ici la relation qui existe entre la chronologie des Annales et celle du Tch’oen ts’ieou dont le point de départ est le premier mois de la première année (722) du duc Yn, de Lou ; on voit que le onzième mois pour les Annales correspond au premier mois pour le Tch’oen ts’ieou ; en effet, comme le fait observer Tou Yu dans la phrase suivante, les Annales se servaient du calendrier des Hia qui faisait commencer l’année au mois yn (3e du cycle), tandis que le Tch’oen ts’ieou applique le calendrier des Tcheou d’après lequel le début de l’année est le mois tse (1er du cycle) ; par conséquent, lorsque les Annales parlent du premier mois, ce mois est appelé le troisième dans le Tch’oen ts ieou, ou encore lorsque les Annales parlent du onzième mois, ce mois devient le premier de l’année suivante dans le Tch’oen ts’ieou. Nous montrerons plus loin que la dernière partie des Annales, sous sa forme actuelle, est rangée d’après les règnes des rois de la dynastie Tcheou et suit le calendrier des Tcheou ; mais il est bon de remarquer dès maintenant que, d’après Tou Yu, elle devait, sous sa forme primitive, noter les années d’après les règnes des ducs de Tsin et se servir du calendrier des Hia.

a51.(114. ) Nous aurons à examiner plus loin (p. 461-463) si Tou Yu a eu raison de considérer comme étant le roi Ngai le souverain de Wei à la vingtième année duquel s’interrompent, en 299 av. J.-C., les Annales.

a51.(115. ) En d’autres termes, les Annales sont, dans leur dernière partie, une chronique particulière de l’État de Tsin, puis, après le démembrement de Tsin, une chronique particulière de l’État de Wei. a51.(116. ) Cette indication nous fournit la date exacte à laquelle Tou Yu écrivit sa Postface au Tso tchoan. a51.(117. ) Tou Yu montre ensuite par quelques exemples comment certains faits sont exposés d’une manière un peu différente dans les Annales et dans le Tch’oen ts’ieou ; cela provient de ce que l’auteur des Annales ne visait qu’à l’exactitude, tandis que Confucius a prétendu donner des leçons de justice dans le Tch’oen ts’ieou. — Tou Yu prouve encore que les Annales concordent d’une manière remarquable avec le Tso tchoan, mais sont en désaccord avec les commentaires de Kong-yang et de Kou leang ; c’est un indice que ces deux derniers commentaires n’ont pas autant de valeur historique que le Tso tchoan. — Enfin, quoique les Annales ne coïncident pas toujours avec les témoignages du Chou king et des Mémoires historiques de Se-ma Ts’ien, elles peuvent cependant aider à l’intelligence correcte des faits qui y sont racontés. — Tou Yu ajoute qu’un chapitre distinct de cet ouvrage était un recueil de tous les faits de divination rapportés par le Tso tchoan ; ce chapitre est intitulé Che Tch’oen, titre qui paraît être le nom de l’auteur. — Tou Yu termine en montrant la grande différence qui existe entre les Annales et le Chou king en ce qui concerne le récit des relations de l’empereur T’ai-kia avec son conseiller I Yn ; Tou Yu semble croire qu’ici le Chou king est fautif par suite de quelque défaut de mémoire du vieux Fou Cheng qui le récita.

a51.(118. ) La biographie de Siun Hiu se trouve dans le chap XXXIX du Tsin chou. Nous y apprenons (p. 5 v°) que, « lorsqu’on découvrit dans une sépulture de la commanderie de Ki les livres écrits sur bambou en caractères antiques, (Siun) Hiu fut chargé par décret impérial de les rédiger et de les classer pour en faire des livres de la bibliothèque impériale qui seraient placés dans les archives secrètes ». — La préface de Siun Hiu au Mou t’ien tse tchoan est citée dans les Prolégomènes du Tchou chou ki nien tsi tcheng (1813) de Tch’en Fong heng (p. 7 r°).

a51.(119. ) Le dictionnaire Tcheng tse t’ong (publié en 1705), cité par le Kang hi tse tien au mot [], indique que, lorsque le caractère [] est un nom de famille, il doit se prononcer avec l’ancienne prononciation piao. a51.(120. ) Ce prétendu roi Ling résulte simplement d’une mauvaise lecture du texte des Annales qui appellent « le roi actuel » le roi sous le règne duquel elles s’achèvent.

a51.(121. ) Il semble qu’il y ait ici une erreur, car la sous-préfecture de Ki est au Sud-Est (et non à l’Ouest) de la sous-préfecture de Hoei. a51.(122. ) Ceci n’est pas tout à fait exact ; il s’écoula 86 années depuis l’année 299, date où le Tchou chou ki nien se termine, jusqu’à l’année 213, qui est celle où Ts’in Che hoang ti proscrivit les livres ; mais les lettrés ne furent mis à mort qu’en 212.

a51.(123. ) Le mot [] semble n’exister que dans ce texte, s’il faut en croire le dictionnaire de K’ang hi qui cite le passage de l’inscription de T’ai- kong d’après le Kin che lou de Tchao Ming tch’eng (commencement du XIIe siècle). — Tong Yeou remarque que si ce caractère ne se trouve pas dans le Chouo men (publié en 100 ap. J.-C.), il figure dans le Tse chouo de Wei RongS (premier siècle ap. J.-C.) et dans le Tse tche de Kouo Tchao k’ing. Il est vraisemblable d’ailleurs que Kouo Tchao k’ing n’a fait ici que copier Wei Hong. a51.(124. ) Nom personnel du roi Wen. a51.(125. ) Wang est ici regardé comme le nom personnel de l’Illustre duc. D’après Se-ma Ts’ien cependant, T’ai kong wang ne serait en réalité qu’un surnom signifiant « celui que l’Illustre duc a prévu » (cf. t. IV, p. 36, n. 1-3) ; si on adopte la manière de voir de Se-ma Ts’ien, le titre « l’Illustre duc » désignerait le père du roi Wen, tandis qu’ici ce terme s’applique évidemment au personnage même que le roi Wen prit pour conseiller.

a51.(126. ) Cette indication est en désaccord avec le Tchou chou ki nien actuel qui donne 430 années aux Hia et 507 aux Yn. Le Commentaire original assigne 471 années aux Hia et 496 années aux Yn. Cf. Legge, C. C., vol. III, prolég., p. 181-182.

a51.(127. ) Ki est le second empereur de la dynastie Hia. Le Tchou chou ki nien actuel ne dit point que K’i ait tué I ; cependant, comme Lieou Tche ki (Che t’ong t’ong che, chap. XIII, p. 7 r°) attribue lui aussi ce dire au Tchou chou ki nien, il est probable que nous avons affaire ici à l’un de ces textes historiques que les premiers éditeurs des Annales crurent pouvoir admettre, mais qu’on rejeta plus tard dans la catégorie des Textes fragmentaires.

a51.(128. ) Cf. Legge, C. C., vol. III, prolég., p. 130.

a51.(129. ) Cf. Legge, C. C., vol. III, prolég., p. 138.

a51.(130. ) L’âge de cent ans est attribué au roi Mou par le chap. Lu hing du Chou king (cf. Legge, C. C., vol. III, p. 588).

a51.(131. ) Cf. notre traduction de Se-ma Ts’ien, tome I, n. 04.381.

a51.(132. ) Tch’en Fong heng (Prolég., chap. Tsi yu, p. 4 v°), écrit Kong suen Kia.

a51.(133. ) On remarquera que, dans cette énumération, il n’est pas question du Tcheou chou qu’on désigne cependant souvent sous le nom de Tcheou chou de la tombe de Ki, titre sous lequel cet ouvrage est réimprimé dans le Han Wei ts’ong chou ; mais cette dénomination fautive provient d’une assertion du Soei chou (chap. XXXIII, p. 3 r°) qui est dénuée de tout fondement. En réalité le Tcheou chou est déjà mentionné dans le chap. XXX, p. 2 v° du Ts’ien Han chou, c’est-à-dire qu’il était connu à une époque où la tombe de Ki n’avait point encore été ouverte ; il ne provient donc pas de cette tombe. Cela n’ôte rien à la valeur de cet ouvrage, qui paraît être constitué, comme l’indique Yen Che kou, avec les textes anciens que Confucius avait refusé d’admettre dans le Chou king ; il serait fort désirable que nous eussions une bonne traduction du Tcheou chou basée sur l’excellente édition qu’en a donnée Tchou Yeou ts’eng en 1846. Cette édition est reproduite dans S. H. T. K. K., chap. 1028 1038 ; voyez en outre les observations de Wang Nien suen sur le Tcheou chou dans S. H. T. K. K., chap. 209 212 ; Tch’en Fong heng, l’éditeur des Annales écrites sur bambou, a aussi publié en 1825 le Tcheou chou en y ajoutant un commentaire (Voyez Giles, Wade Collection of Chinese Books, B, 1081-1082).

a51.(134. ) Actuellement, ces chapitres (Soei chou, chap. XXXII à XXXV) sont mis sous le nom de Tchang souen Ou-ki et de ses collègues, mais ils étaient bien en réalité l’œuvre de Wei Tcheng comme l’indiquent les éditeurs de l’époque K’ien long à propos d’un passage de la notice placée à la fin du Soei chou dans l’édition des Song (voyez, à la fin de la réimpression du Soei chou publiée en caractères de plomb à Chang hai en 1888).

D’ailleurs à la fin du chap. XXXII (p. 15 v°) du Soei chou, Wei Tcheng se désigne bien lui-même comme l’auteur du traité sur la littérature en introduisant son propre nom par la mention « votre sujet Wei Tcheng ». a51.(135. ) Dans ce qui suit, Wei Tcheng reproduit assez fidèlement quelques-unes des observations faites par Tou Yu dans sa Postface au Tch’oen ts’ieou (voyez plus haut, pp.449-450).

a51.(136. ) Chap. X, p. 1 v° du Che t’ong t’ong che (réimpression de 1885).

a51.(137. ) Se-ma Ts’ien, éd. lithographique de Chang hai, 1888 chap. XLIV, p. 4 v°, avant-dernière colonne.

a51.(138. ) Cf. p. 451, ligne 9.

a51.(139. ) Cf. p. 453, ligne 12.

a51.(140. ) Cf. p. 454, ligne 24.

a51.(141. ) Cf. p. 458, ligne : 9.

a51.(142. ) Cf. p. 459, lignes 12-13.

a51.(143. ) Cf. p. 448, ligne 12 et p. 450 n. 3.

a51.(144. ) Cf. p. 447, ligne 13.

a51.(145. ) C’est donc à tort que j’ai accepté la date de 279 dans mon Introduction (vol. I, p. CLXXXIX, ligne 1).

a51.(146. ) Cf. p. 448, ligne 4.

a51.(147. ) Cf. p. 460, lignes 6-7.

a51.(148. ) Cf. p. 450, lignes 4-5.

a51.(149. ) Cf. p. 452, lignes 8-9, p. 458, ligne 30 et p. 459, lignes 13-14.

a51.(150. ) Cf. p. 454, lignes 26-27.

a51.(151. ) Cf. Mém. hist., chap. XCIV, p. 4 v° à 5 r° où les deux thèses sont exposées successivement dans les deux commentaires juxtaposés.

a51.(152. ) Cf. la note de Legge dans ses Prolégomènes (p. 33, n. 1) du vol. II des Chinese Classics. a51.(153. ) Cf. p. 452, lignes 8-9.

a51.(154. ) Cf. p. 458, ligne 30.

a51.(155. ) Cf. p. 168, n. 3.

a51.(156. ) Cf. p. 449, ligne 3.

a51.(157. ) Cf. p. 455, ligne 1.

a51.(158. ) Cf. p. 460, lignes 5-6.

a51.(159. ) La discussion instituée par Song K’i à ce sujet se trouve reproduite à la fin de la réimpression du Ts’ien Han chou publiée à Chang hai en 1888, dans une note à la Préface de Yen Che kou, p. 3 r°.

a51.(160. ) Voici quelques-uns des passages ou (Fou) Tsan s’appuie sur l’autorité du Tchou chou ki nien : Ts’ien Han chou, chap. XXVIII, a, p. 6 v° (cf. Tchou chou ki nien, 13e année du duc Hoan, 707) ; ibid., p. 9 v° (cf., T. c. k. n., 7e année de P’an keng, 1309) ; ibid., p. 13 r°-14 v° (cf. T. c. k. n., 1e année de T’ai-k’ang, 1958, et 1e année de l’empereur Koei, 1589) ; chap. XXXVI, p. 10 r° (cf. T. c. k. n., aux dates de 1044 et de 1023) ; etc.

a51.(161. ) Voyez notamment Se-ma Ts’ien (éd. de 1888), chap. V, p. 12 r°, col. 11 ; chap. XLIII, p. 8 r°, col. 7 ; chap. XLIV, p. 3 r°, col. 9 ; etc.

a51.(162. ) Voyez Se-ma Ts’ien, chap. IV, p. 11 r°, col. 11 : chap. XLIV, p. 4 r°, col. 10 ; etc.

a51.(163. ) Voyez Heou Han chou (éd. de 1888), chap. CXV, p. 1 r°, col. 7, 8, 11, 12 ; chap. CXVII, p. 1 v°, col. 5, 6, 7, 11 ; etc.

a51.(164. ) Pour les citations faites par Se-ma Tcheng, Voyez Se-ma Ts’ien, chap. V, p. 9 r°, col. 3 ; chap. XXXIV, p. 2 r°, dern. col., p. 2 v°, col. 3 ; chap. XXXVII, p. 5 r°, col. 5 ; chap. XXXVIII, p. 7 r°, col. 6 ; chap. XLI, p. 4 v°, col. 9 ; chap. XLIV, p. 3 r°, col. 1, 2, 7, 8 ; p. 3 v°, col. 5 ; p. 4 r°, col. 4, 9, 11 ; p. 4 v°, col. 3 ; p. 5 v°, col. 10, etc. —

Pour les citations faites par Tchang Cheou tsie voyez Se-ma Ts’ien, chap. III, p. 1 r°, col. 1 ; chap. III, p. 5 r°, col. 3 ; chap. IV, p. 6 v°, col. 2 ; p. 9 r°, col. 7, etc.

a51.(165. ) Che tong t’ong che (réimpression de 1885),.chap. I, p. 5 r°.

a51.(166. ) Cf. Mencius. IV, b. 21, § 2.

a51.(167. ) Che t’ong t’ong che, chap. XIV, p. 19 v°-20 r°.

a51.(168. ) Cf. p. 449, lignes 10-14 et n. 2.

a51.(169. ) Cf. p. 467, lignes 11-15.

a51.(170. ) Voyez Introduction, p. CXCXI-CXCXIV. Dans la note 1 de la p. CXCXIV, j’ai écrit par inadvertance : « Les grands synchronismes sont identiques dans les deux ouvrages et suffisent à prouver que l’un s’inspire de l’autre » ; il faut dire : « ... suffisent à prouver qu’ils s’inspirent d’un même système. » Il est évident en effet que Se ma Ts’ien n’a pas pu connaître le Tchou chou ki nien enfoui sous terre en 299 av. J.-C. et exhumé seulement en 281 ap. J-C.

a51.(171. ) Sur la manière dont doit être faite cette conversion, voyez tome III, appendice III, p. 656-659.

a51.(172. ) Antérieurement à la 1e année de Yao qui est une année ping-tse (2145), Li Tchao lo fait ses calculs d’une manière assez bizarre : aux 9 années de Tche, il ajoute 3 années pendant lesquelles ce souverain fut en deuil de son père ; il reporte donc son accession au trône à l’année kia tse=2157 ; la première année de K’ou se trouve dès lors rejetée à l’année sin yeou=2220 ; la première année de Tchoan hiu devient l’année keng tse=2301, ce qui accuse une différence de 6 années avec nos calculs, comme si Li Tchao lo avait encore admis soit pour K’ou, soit pour Tchoan hiu, une période supplémentaire de 3 ans motivée par le deuil ; avant Tchoan hiu, Li Tchao lo place Chao hao auquel il attribue 87 années de règne (2388 2302) ; il cherche ainsi assez maladroitement à concilier le Tchou chou ki nien et le Commentaire original en dédoublant Tche et Chao hao dont il fait deux personnages distincts ; enfin Li Tchao lo admet vraisemblablement que les cent années du règne de Hoang ti furent suivies de 3 années de deuil et c’est pourquoi il fixe la 1e année de Hoang ti à l’année keng-yn=2491. a51.(173. ) Chao Yong (1011 1077 : cf. Giles, Biog. Dict., n° 1683) fut le premier qui, dans son ouvrage intitulé Hoang ki king che chou, assigna le début du règne de Yao à l’année kia tch’en=2357. Cette opinion fut adoptée par Kin Li-siang (1232 1303 ; cf. Giles, Biog. Dict., n° 381) dans le T’ong kien ts’ien pien et c’est à partir de ce moment qu’elle fut généralement reçue (cf. les remarques de Tch’en Fong keng dans le Tchou chou ki nien tsi tcheng, 1e année de Yao). a51.(174. ) Voyez les Tables chronologiques de Mayers et de Giles.

a51.(175. ) Cf. p. 455, lignes 9 10 et n. 1.

a51.(176. ) Cf. Legge, Chinese Classics, vol. III, Proleg., p. 181, lignes 30-36 et p. 182, lignes 1-15.


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