Mémoires de physique et de chimie de la Société d’Arcueil/Tome 1/Introduction


La Physique et la Chimie, qui contractent de plus en plus des rapports intimes, sont cultivées avec une telle émulation dans une grande partie de l’Europe, que l’on voit les découvertes jaillir de toutes parts et se succéder rapidement ; mais en même tems des opinions souvent contradictoires paroissent jetter de l’incertitude sur les résultats de l’expérience, qui devient elle-même de plus en plus difficile.

Pour que les progrès de ce genre de connoissances soient réels, et qu’ils aient une marche constamment progressive, il faut qu’on apporte une grande précision dans les faits, que l’on perfectionne tous les moyens qui servent à les établir, que l’on compare les résultats obtenus par différens physiciens, et dans des circonstances différentes. Ce n’est que par ces soins et à l’aide d’une saine critique, que l’on peut parvenir à des théories inébranlables, à des vérités qui ne pourront jamais être contestées.

Ainsi, la science exige d’autant plus d’efforts qu’elle acquiert plus d’étendue et de perfection : elle doit aspirer à une précision d’autant plus grande, qu’elle s’engage dans des recherches plus difficiles.

Une Société de quelques personnes qui cultivent les différentes branches de la Physique et de la Chimie, s’est formée dans la vue d’accroître les forces individuelles par une réunion fondée sur une estime réciproque et sur des rapports de goûts et d’études, mais en évitant les inconvéniens d’une association trop nombreuse. Voici son régime :

Elle se réunit tous les 15 jours à Arcueil ; le jour de réunion est consacré à répéter les expériences nouvelles qui paroissent le mériter par leur éclat ou qui exigent d’être constatées, et à faire celles qui sont indiquées par quelque membre de la Société, sur-tout lorsquelles demandent des appareils particuliers, ou que l’auteur desire d’avoir des aides, des témoins ou des conseils.

Tous les Mémoires qui doivent entrer dans le recueil de la Société sont soumis à une discussion ; mais l’auteur reste libre dans ses opinions, et en répond seul.

Chacun se charge de la lecture d’un ou de plusieurs journaux et des ouvrages qui sont mis au jour, et qui concernent la science qu’il cultive particulièrement. Le rapport en est fait dans la réunion.

La Société voit avec orgueil le nom de M. La Place inscrit sur sa liste.

Celui qui a conçu le projet de former cette réunion, y trouve, en voyant approcher la fin de sa carrière, la douce satisfaction de contribuer, par cette pensée, aux progrès des sciences auxquelles il s’est devoué, beaucoup plus efficacement qu’il n’auroit pu le faire par les travaux qu’il peut encore se promettre de continuer.

Les progrès de la Physique sont d’un assez grand intérêt, puisqu’ils ont pour objet de remonter aux véritables causes des phénomènes, de reconnoître les forces de la nature, et d’en indiquer l’application à l’industrie de l’homme.

Puisse sous ces rapports le zèle de la Société d’Arcueil mériter l’approbation du chef auguste de notre Gouvernement !

Puisse la paix, dont le desir est depuis longtems dans le cœur du héros triomphateur, permettre à son génie de répandre son influence féconde sur les arts et sur les sciences, qui, seuls, auroient pu faire sa gloire, si les destinées du monde ne lui eussent été confiées !


La Société est composée de

MM. MM.
La Place. Thenard.
C. L. Berthollet. Decandolle.
Biot. Collet-Descostils.
Gay-Lussac. A. B. Berthollet.
Humboldt.
Arcueil, 9 juillet 1807