Mémoires d’une ex-palladiste parfaite, initiée, indépendante/13/Nos coups ont porté… Redoublons !

Nos coups ont porté… Redoublons !




Nul catholique ne saurait douter de l’utilité des Congrès antimaçonniques internationaux, dont le premier s’ouvrira à Trente au moment même de la publication de ce fascicule ; non, aucun doute n’est possible, puisque le Pape a parlé.

Dans sa Lettre publique au président Guglielmo Alliata, le Vicaire infaillible de Jésus-Christ s’exprime ainsi :


« Nous ne doutons pas que cette réunion n’obtienne le succès que présage l’importance des questions qui y seront traitées et l’utilité qu’on est en droit d’espérer.

« Toutefois, afin que les résultats désirés correspondent pleinement aux espérances conçues, il importe que ceux qui prendront part à cette assemblée mettent la main à la racine du mal pour l’extirper, qu’ils recherchent soigneusement les moyens par lesquels on peut plus efficacement tenir tête aux efforts grandissants des sectes.

« Dans Nos lettres encycliques, citées plus haut, Nous avons abondamment signalé ces moyens qui peuvent se résumer en un seul : c’est que vos efforts se coalisent et se concentrent sur le terrain même où le combat est tout engagé par les francs-maçons.

« Il importe donc souverainement que les documents pontificaux et la direction qu’ils ont donnée soient gardés et retenus comme éditant les règles et les prescriptions formelles auxquelles il faut se conformer avec respect, vous-même d’abord, et, plus tard, ceux qui, dans la suite, appliqueront leur zèle et leur collaboration à la délibération de ces moyens.

« Assurément, comme nous l’avons proclamé ailleurs, les doctrines audacieuses, perverses de cette secte, et les moyens pernicieux qu’elle emploie pour réussir, causeraient moins de maux et s’affaibliraient même peu à peu, si les catholiques s’inquiétaient d’opposer aux francs-maçons une résistance plus ferme et une stratégie plus habile. Ceux-ci, en effet, mettent leur confiance dans le mensonge et les manœuvres ténébreuses ; c’est pourquoi, si l’on parvient à leur arracher le masque dont ils se couvrent, il est hors de doute que tous les honnêtes gens se refuseront à participer à leur détestable perversité et la réprouveront. »


Donc, le devoir des catholiques est nettement tracé :

1° Mettre la main à la racine du mal, pour l’extirper ; — 2° coaliser les efforts catholiques et les concentrer sur le terrain même où les francs-maçons ont engagé le combat ; — 3° se conformer avec respect aux régies et prescriptions formelles édictées par les documents pontificaux, lesquels donnent la seule direction à suivre dans l’œuvre de la défense de l’Église contre la secte ; — 4° arracher, avec plus d’énergie que jamais, le masque dont les francs-maçons se couvrent, dénoncer leurs doctrines audacieuses, perverses, et leurs moyens pernicieux, afin que tous les honnêtes gens réprouvent leur détestable perversité et s’éloignent de la secte avec horreur.

Le Congrès examinera, à la lumière des enseignements de Pierre, quelle est la racine du mal et quel est, d’une façon précise, le champ de bataille choisi par les suppôts de Satan pour tenter de détruire l’Église. Les congressistes reliront avec fruit les documents pontificaux et, en premier lieu, l’immortelle encyclique Humanum Genus.

Tout particulièrement, ceux qui ont l’honneur de tenir une plume chrétienne se feront un devoir de dévoiler les doctrines de la secte, si audacieuses, et si perverses soient-elles, et de soulever l’opinion publique contre les pernicieux moyens d’action des sectaires, c’est-à-dire complots et attentats politiques, crimes privés, corruption générale. Après l’ordre du Pape, si formellement renouvelé, aucune hésitation n’est possible.

Quant à moi, c’est cette insistance du Souverain Pontife qui m’a décidée à aller jusqu’au bout, malgré les haines devenues maintenant féroces et ne reculant plus devant aucune manœuvre pour m’atteindre ; jamais je n’aurais osé publier intégralement l’infâme Rituel de Chevalière de la Colombe, avant la lettre de Léon XIII au président Guglielmo Alliata. Ces documents et d’autres, je me proposais, non de les passer sous complet silence, mais d’en faire un court résumé qui n’eût été intelligible qu’aux érudits. Je les donnerai donc tels quels, laissant aux ecclésiastiques le soin de commenter et d’expliquer ; là est la limite que je m’impose, et chacun comprendra que je ne puis la franchir.

Après l’envoi de mon volume Le 33e Crispi au Vatican, je reçus, le 11 juillet, de l’un des secrétaires particuliers de Sa Sainteté, une précieuse lettre, me disant, entre autres choses :


« Continuez, Mademoiselle, continuez à écrire et à démasquer l’inique secte ! La Providence a permis, pour cela même, que vous lui ayez appartenu pendant un si long temps. »


Mettant ma confiance en Dieu qui connaît la pureté de mes intentions, et n’aspirant à aucune récompense des hommes, heureuse même de souffrir pour Jésus, quand les traits de la calomnie ou de la déception rancunière me sont décochés dans l’ombre et quand l’ignorance les ramasse et ravive ma blessure, je ne prends donc part à la lutte qu’avec le désir de contribuer à détruire l’œuvre du Mal.

Car, maintenant, la guerre est bien déclarée ; l’heure des combats a sonné. Honneur aux vaillants antimaçons qui ont appelé les catholiques à la nouvelle Croisade !

Les premiers coups ont porté. Vive Dieu ! La secte est dans un frémissement de rage ; mais Saint Michel et Jeanne d’Arc sont à la tête des croisés de Trente. Bataillons, bataillons hardiment ! Dieu nous donnera la victoire !

Le gage du triomphe, il est dans la lettre furieuse que le F ▽ Ernesto Nathan, le successeur de Lemmi à la direction de la Maçonnerie italienne, vient d’adresser, par ordre du Vicaire de Satan, à toutes les Loges de la Péninsule.

Voici le document :


A∴ G∴ D∴ G∴ A∴ D∴ U∴

Grand Orient d’Italie (Circulaire 32)


À toutes les Loges Maçonniques de la Communion Italienne.


Chers Frères,


La colère malfaisante est arrivée au paroxysme ! Des princes et prélats de l’Église au dernier plumitif, des Congrès eucharistiques au dernier petit Bulletin, le cléricalisme, qui prend la religion pour enseigne, mais convoite les biens terrestres en même temps que la destruction de l’unité de la Patrie, concentre tout son pouvoir contre la Maçonnerie. Le Pontife lui-même se mêle à ce concert et excite ses prosélytes en répétant contre nous des accusations que rejette maintenant toute conscience impartiale et honnête. Chargé d’années et de pensées, porte-étendard de la charité et de la mansuétude chrétienne, il descend de son siège élevé, et, oublieux des préceptes de l’Évangile, il nous injurie et prêche l’extermination d’hommes qui, le front haut et la conscience en paix, poursuivent une œuvre de bien public. Les attaques éparses, la guerre d’embuscade, les invectives des marchands de papier et des rhéteurs, se condensent et se résument en un Congrès international antimaçonnique tenu à Trente, du 26 au 30 septembre, loué, encouragé et béni solennellement par le Pape.

Là se réuniront les réactionnaires de tous les pays, et les assauts, jusqu’ici dirigés contre notre Ordre en Italie, s’élargiront et s’étendront à toute la Maçonnerie Universelle.

Nous pourrions déplorer la conduite d’hommes qui, drapés dans les plus solennels vêtements de la religion, ne se refusent pas, dans un but de parti, à une guerre déshonnête et déloyale ; mais nous devons accueillir et enregistrer le fait avec une profonde joie, avec le sentiment d’une haute et grave responsabilité, l’appréciant à la lumière de sa grave situation. Désormais, devant une telle attitude, nul doute ne peut rester dans notre esprit ; nous sommes calomniés, guettés, attaqués, parce que, au moment où elle s’apprêtait à jouir d’un triomphe longuement recherché et qu’elle espérait prochain, la réaction sent et voit dans notre Ordre une solide barrière, un rempart formidable contre la complaisante restauration de son pouvoir sur les corps et sur les âmes.

À vous, Frères, pas n’est besoin d’excitation. Lisez dans ce livre qui s’ouvre si clairement devant vos yeux ; lisez le péril pour la Patrie, pour le progrès civil, pour l’éducation et pour la conscience des Italiens, pour leur bien moral et matériel : lisez vos devoirs ! Attaqués, ramassons, tranquilles, mais prompts à tout sacrifice, le gant du défi.

Et que cet enseignement ne soit pas pour nous seuls. Désormais, il apparaît clairement à tous : d’un côté, le retour au passé ; de l’autre, le progrès indéfini et continu ; d’un côté, les conspirations ourdies dans le mystère avec les garanties de l’État, fortifiées par le secret de la confession et par le lien de corporation opérant dans le monde, dans l’ombre, avec l’immunité de la soutane ; de l’autre côté, le secret maçonnique, ce secret maçonnique si abhorré, conservé pour protéger des lâches attaques, des sottes défiances, nos Frères qui travaillent pour les idéalités pures de la Patrie et de l’Humanité d’un côté, ceux qui invoquent le ciel pour dépouiller la terre ; de l’autre, ceux qui, dans l’intégrité de la conscience, et dans la foi, qui anime et élève, s’occupent, sur la terre, de la grande Famille humaine, en resserrent les liens fraternels et travaillent à la perfectionner, à la purifier et à l’améliorer.

Donc, qu’ils prennent position, les hommes d’esprit et de cœur ; qu’ils décident, tous ceux qui aiment leur pays sérieusement et honnêtement, de quel côté ils doivent se ranger ; qu’ils pensent, les patriotes, ce qu’est l’Italie d’aujourd’hui et ce qu’elle pourrait être demain ; qu’ils pensent, les braves, aux guerres d’indépendance entreprises et à celle qu’il faudra encore entreprendre ; qu’ils jugent, les citoyens libres, si les clés de leur conscience doivent être gardées dans le Vatican ; qu’ils réfléchissent, les défiants et les indifférents, à ce que fut et à ce que serait le règne des Papes ; qu’ils voient, qu’ils s’unissent dans la sincérité de leurs intelligences, au travail d’une Institution qui ne reconnaît ni secte ni école, qui, nationale et humaine, respectueuse de toute foi, de toute conviction honnête, s’élève au-dessus de tous, et réunit tous les hommes dans un but de rédemption morale et civile de la Nation, et, par elle, de l’Humanité.

Au Congrès international antimaçonnique de Trente, nous, Frères, en union avec tous ceux qui ont des sentiments italiens, nous opposerons notre fête nationale du 20 septembre ; ce jour, solennel dans l’histoire des peuples, où la réunion de Rome à l’Italie scellait dans le monde les rapports entre la conscience individuelle et le devoir social. Et, dans cette fête des nations, l’écho de l’honnête réjouissance pour la conquête humaine que la Loi Éternelle assigna à notre Italie, résonnera par claies monts, par delà les mers. Or, chers Frères, tandis que vous célébrerez la fête nationale, que votre pensée vole auprès de ceux qui luttent pour la liberté et pour leur nationalité, que votre affection se dirige vers ces peuples et ces chrétiens héroïques qui, tandis que leur Suprême Pasteur reste muet, combattent pour sauver leur conscience, de l’oppression islamique ; leur patrie, de la tyrannie étrangère et leurs familles, de la honte.

Si les chefs de religion se taisent, si les États les plus puissants, dans la triste impuissance de leur stérile jalousie, restent inertes, l’arme aux pieds, la Maçonnerie sent et reconnaît les liens qui l’unissent avec les opprimés contre les oppresseurs, et elle ne manquera pas à son devoir.

Salut, lutteurs intrépides, salut à vous, pionniers du progrès qui invoquez la lumière, la résurrection nationale et qui offrez votre vie pour la liberté et pour la civilisation. Vainqueurs ou vaincus, notre cœur reste avec vous.

Recevez, très chers Frères, notre salut fraternel.

Donné dans la Vallée du Tibre,
à l’Orient de Rome,
le 5e jour du 7e mois, an 000896 de la Vraie Lumière, — et de l’ère vulgaire, le 5 septembre 1896.
Le Grand-Maître :
Ernesto Nathan, 33e


Oui, à cette heure, quel catholique n’aurait pas confiance ? Je ne veux pas parler de la suprême fin, de la dernière issue de la lutte ; non prævalebunt, a dit le Christ. Mais je parle même des combats actuels ; la victoire des nouveaux croisés abrégera les épreuves.

Lemmi a fait peau neuve sous les oripeaux maçonniques de son suppléant. La secte a pensé que Nathan, fils naturel de Mazzini, est un grand-maître présentable ; on peut l’exhiber au public, celui-ci. Mais c’est toujours Lemmi qui parle et qui écrit ; sa voix est mal déguisée, et l’on reconnaît son style. « Guerre d’embuscade ! » hurle-t-il. « Invectives des marchands de papier et des rhéteurs ! » Eh bien, oui, nous l’avons débusqué, c’est en publiant partout son casier judiciaire que nous l’avons contraint à rentrer dans son antre. Eh bien, oui, il faut combattre par les conférences et par l’imprimé : la parole de la vérité viendra à bout des mensonges ; le papier de la bonne presse sera victorieux du papier de la mauvaise presse.

Ô Lemmi et Nathan, vous enragez, et votre fureur prouve que nous avons raison, que nos révélations vous blessent à mort ; c’est à nos amis et à nous-même que vous jetez votre venin. Nos coups ont porté… Nous redoublerons !