Louÿs – Poésies/Premiers vers 22

Slatkine reprints (p. 50).

Les yeux qui voient la mer


Les yeux qui voient la mer et les champs et les eaux
Verdissent comme une onde immobile et sereine.
Il s’y balance encor le profil des roseaux
Et leur charme se mêle au chant de la sirène.

La brume vespérale où dorment les étangs
Voile d’ombre et de blanc leur eau mystérieuse,
Et dans la paix du soir et des bois palpitants
Leur glace éteinte autour des sombres bords se creuse.

D’autres yeux altérés d’y mirer leur effroi
Se penchent sur leur nuit pour des nuits éternelles ;
Mais le vierge narcisse ira fleurir, lys froid,
Sans que les mornes yeux aient troublé leurs prunelles.

Sans que les mornes yeux aient 30 janvier 1891.