Louÿs – Poésies/La forêt des Nymphes 3

Slatkine reprints (p. 147).

LA FLÈCHE



Aurore. En chasse au bois ! C’est l’instant où l’on noue
Le cuir couleur de brume au lin couleur de jour,
Où l’on darde la flèche à plume de vautour,
Qui fait gémir la corde et frissonner la joue.

À travers la forêt, dans l’herbe, dans la boue,
Suivant la piste droite ou le brusque détour,
Toutes, sous l’arc de jonc comme l’enfant Amour,
Traquent le sanglier qui détale et s’ébroue.

La bête hurle. Une ombre éteint ses mornes yeux.
— Alors, laissant les sœurs dans le sang glorieux,
Loin de la troupe heureuse, Artémis conquérante

Vise un aigle ébloui dans l’air jaune, et souvent
Quelque flèche égarée aux surprises du vent
File à travers le ciel comme une étoile errante.