Louÿs – Poésies/Astarté 18

Slatkine reprints (p. 104).

UN PORT


À P.-Albert Laurens.


L’ocre éclatant des rocs sur la mer bleue ailée
S’ombre de lilas clair à l’aurore en éveil
Dans le port ébloui d’azur et de soleil
Qui pavane l’orgueil de sa queue ocellée.

Le quai monumental de marbres étagés
Où s’éloignent des perspectives de colonnes
Accueille les traitants venus des Barcelones
Des Rhodes et des Tyrs vers ses ronds orangers.

Entre des zingari bariolés, des femmes
Passent. Des bateliers bruns dorment sur les rames.
Des nègres heurtent des cages et des ballots

Lourds sur des planches frêles et jettent leur charge
Aux vaisseaux accroupis les ailes vers le large
Prêts à partir, d’un vol lent, penchés sur les flots.