Lettres à la princesse/Lettre085

Lettres à la princesse, Texte établi par Jules TroubatMichel Lévy frères, éditeurs (p. 110-111).


LXXXV


Ce jeudi matin, 18 août.
Princesse,

J’ai pour aujourd’hui une douce espérance. — Je suis en plein travail et n’ayant pas achevé, je ne suis nullement sous le charme, vous le verrez ; mais c’est une grande difficulté de tout concilier, et il y a les convenances envers une grande infortune[1]. De l’ensemble ressortira, je pense, une impression vraie, non exagérée. — Je suis on ne saurait plus compatissant à votre ennui : ce monde est une comédie, et le vrai, le faux, l’or et le clinquant, l’habile et le niais, le sage et le crétin, s’y mêlent et s’y confondent dans un curieux imbroglio. L’œil de l’observateur prend plaisir à tout démêler ; vous avez cet œil-là : c’est le prix de votre ennui, et puis on apprend a mieux jouir de soi dans les jours où l’on se possède.

Je suis avec respect, Princesse, votre très-fidèle et très-humble attaché.


  1. M. Sainte-Beuve préparait, pendant cette semaine, son troisième article sur Marie-Antoinette. (Nouveaux Lundis, tome VIII.)