Lettres à Herzen et Ogareff/À Ogareff (3-05-1870)

Lettres à Herzen et Ogareff
Lettre de Bakounine à Ogareff - 3 mai 1870



LETTRE DE BAKOUNINE À OGAREFF


3 mai 1870. Locarno.


Mon ami Aga,


Te souviens-tu de notre conversation au sujet des « fonds » la veille au soir de mon départ ? C’est une question d’honneur pour toi que tous ces comptes soient réglés et que tu les portes à la connaissance du public. D’abord, tu dois régler le compte avec Tchernetzki et sans le remettre de jour en jour, comme c’est ton habitude ; si besoin est, tu feras une facture spéciale, en détaillant minutieusement ce qui a été transféré au Comité russe par l’intermédiaire de Nétchaïeff. Avec cela tu devras exposer que Herzen et toi, vous étiez seuls revêtus du droit exclusif de disposer de ce capital, dont après la mort de Herzen tu es devenu l’unique dispensateur ; les motifs qui vous engagèrent, Herzen et toi, à en remettre une partie entre les mains de Nétchaïeff pour la propagande russe, et qui après la mort de Herzen, en raison de ton titre de gérant irresponsable de ces « fonds », te déterminèrent à verser le reste des sommes qui les composaient dans la caisse du susdit Comité russe, encore par l’intermédiaire de Nétchaïeff. Enfin, conformément à la vérité, tu devras déclarer formellement que Bakounine n’a jamais prétendu s’immiscer dans l’administration de la caisse de ces « fonds », qu’il n’en avait pas le droit et que jamais il ne s’en est mêlé, mais qu’il t’a simplement donné l’avis de remettre le capital constituant ces « fonds » au susdit Comité russe, toujours par l’intermédiaire de notre ami Nétchaïeff (ce qui d’ailleurs était aussi ton idée).

Je crains que la rédaction de ce mémoire ne te prenne beaucoup trop de temps. Ce mémoire devra absolument porter la signature de Nétchaïeff lui-même et de deux témoins : O. et S., et même de quatre, en y ajoutant celles de Tata[1] et de Joukovski, s’ils veulent s’y prêter. Je te prie donc, mon vieil ami, d’envoyer préalablement à O. et à S. une déclaration écrite dans laquelle tu affirmeras que jamais je ne me suis mêlé de l’administration de la caisse des « fonds Bakhmétieff », et que je n’en avais même pas le droit. Cela est devenu indispensable pour mon honneur. Trop de calomnies sont soulevées contre moi et il n’est que temps d’en finir. Assurément S. et O. t’ont déjà parlé de nos intentions. Viens leur donc en aide, ainsi qu’à moi-même.


Ton M. B.


J’attends ta réponse à ma lettre datée du 30 avril.

Dis à Marie de m’envoyer une livre de thé (à 4 francs la livre), par la poste, « contre remboursement ».


Ton M. B.


  1. Natalie Alexandrovna Herzen. (Trad.).