Les vitraux du Moyen âge et de la Renaissance dans la région lyonnaise/1.10

VITRAUX DES CHAPELLES LATÉRALES
xve et xvie siècles


Chapelle du Saint-Sépulcre : 2me à droite.

Fig. 68. — Chapelle du Saint-Sépulcre
Vitraux des ajours.


Dans les jours supérieurs des deux fenêtres, on reconnaît les armes du fondateur de la chapelle, l’archevêque de Lyon, Philippe de Thurey, 1401 : de gueules au sautoir d’or, surmontées du chapeau cardinalice et entourées d’anges musiciens (fig. 68).

Il est permis d’attribuer ces peintures aux successeurs de Henri de Nivelle, Perronet ou Saquerel, dont les Actes capitulaires mentionnent les travaux de 1414 à 1427.


Chapelle Saint-Michel : 4me à gauche.

Des anciens vitraux de cette chapelle, construite en 1448, il ne reste plus que les panneaux des remplages représentant des anges musiciens et une Annonciation (fig. 69) traités en grisaille rehaussée de jaune à l’argent. Ce dernier sujet a été enlevé pour faire place aux armes de Grégoire XVI et du cardinal de Bonald.
Fig. 69. — L’Annonciation
Vitraux des ajours de la chapelle Saint-Michel.
Heureusement, cette gracieuse composition n’est pas encore devenue la proie des brocanteurs : elle attend toujours, dans un réduit abandonné, le jour où ceux qui sont préposés à la garde de l’édifice voudront bien la rendre à sa destination première… si, à ce moment, elle n’a pas déjà disparu. Laurent Girardin, qui jouit de l’office de peintre-verrier de Saint-Jean de 1440 à 1471, peut être considéré comme l’auteur de ces panneaux.
Fig. 70. — Balustrade méridionale de la chapelle des Bourbons

Chapelle du Saint-Sacrement ou des Bourbons
(Commencement du xvie siècle).

Le cardinal archevêque Charles de Bourbon fonda cette chapelle en 1486 et en fit une merveille architecturale. Elle fut achevée par Pierre, duc de Bourbon, comte de Forez et souverain des Dombes.

L’ornementation sculptée est un chef-d’œuvre de grâce et de délicatesse qui n’a pas été dépassé dans l’art de la fin du quinzième siècle. Partout, dans les gorges des piliers et les nervures des voûtes, sur la balustrade de la galerie, se retrouvent, sculptés comme de la dentelle, le chiffre et le dextrochère de Charles de Bourbon alternant avec les monogrammes de Pierre de Bourbon et d’Anne de France, la devise célèbre n’espoir ne peur, le cerf ailé ceint du baudrier en banderole gravé du mot espérance (fig. 70).

Au milieu des emblèmes princiers, des feuillages frisés et des découpures « flamboyantes », un détail annonce que la Renaissance italienne commence à pénétrer à la cour de Pierre de Bourbon : plusieurs des petits dais qui abritent les niches ménagées dans l’épaisseur des piliers, et aujourd’hui vides de leurs statues, sont surmontés de tempietti à coupole, qui contrastent avec les pignons aigus et les arcs-boutants en miniature au-dessus desquels ils élèvent leur lanternon (planche hors texte).

Deux grandes fenêtres qui s’ouvrent au midi ont conservé absolument intacte la décoration translucide des parties hautes dont la beauté fait déplorer davantage la disparition des panneaux inférieurs, remplacés en l844 par de grandes figures dues au pinceau de Maréchal. Dans ces deux compositions, des séraphins rouge feu,
Photogravure Berthaud                                                                                                                                                                                    Cl. L. Bégule
CHAPELLE DES BOURBONS
(xvie siècle.)
Photogravure Berthaud                                                                                                                                                                                    Cl. L. Bégule
CHAPELLE DES BOURBONS
(xvie siècle.)
vitrail du côté droit
Photogravure Berthaud                                                                                                                                                                                    Cl. L. Bégule
CHAPELLE DES BOURBONS
(xvie siècle.)
vitrail du côté gauche
les mains jointes, et des anges agenouillés, vêtus de blanc, chantent en l’honneur du Saint-Sacrement des strophes inscrites sur des banderoles qu’ils tiennent à la main :
Panem angelorum manducavit homo. Et vinum lactificet cor hominis.
Educas panem de terra. Panem de cœlo præstitisti eis.
Omne delectamentum in se habentem.
Fig. 71. — Tête de lange portant les armes du cardinal de Bourbon

Au-dessous une série d’enfants nus et des petits génies ailés, portés par des motifs d’architecture et des coquilles Renaissance soutiennent des guirlandes de feuillage. Au sommet de la baie de gauche, un ange aux ailes rouge flamboyant tient les armes du cardinal de Bourbon : d’azur à trois fleurs de lis d’or, à la bande de gueules : c’est une figure d’un dessin superbe, et du plus grand style (fig. 71).

Si, dans l’architecture et la sculpture de la chapelle, l’art du quinzième siècle conserve encore toute son intégrité, la Renaissance triomphe dans les vitraux : niches à coquilles, putti nus, guirlandes, dauphins, médaillons avec des portraits de profil à l’italienne (fig. 72). Ce sont tous les motifs que nous verrons se développer encore et s’épanouir à Brou. Mais les anges qui volent au-dessus de ces architectures italiennes sont de dessin et de type tout français.

Fig. 72. — Figurine de la chapelle des Bourbons

La tonalité générale claire et cependant vivement colorée est infiniment heureuse. Tous les anges aux robes blanches ont la chevelure rehaussée de jaune d’or et s’enlèvent sur des fonds bleus adoucie, les ailes ont des colorations vert tendre et pourpre correspondant à celles des coquilles.

Au couchant, une rose de forme hélicoïdale surmonte une baie rectangulaire, aujourd’hui murée, mais qui devait éclairer fort heureusement les délicates sculptures de la chapelle.

Le décor translucide de cette rose est constitué par une très riche mosaïque, chaudement colorée, à dominantes rouge et bleu, sur laquelle se détachent deux écussons aux armes de Charles de Bourbon. C’est là un intéressant spécimen de vitrail en mosaïque de la fin du quinzième siècle, pouvant rivaliser comme éclat avec les plus belles œuvres du treizième.

L’atmosphère créée par toutes ces verrières s’harmonisait de façon parfaite avec le caractère de la décoration sculptée sur laquelle les figures sombres de Maréchal font malheureusement régner une obscurité presque complète.

Les vitraux de la chapelle des Bourbons furent exécutés de 1501 à 1503 par Pierre de Paix, alors maître-verrier de la cathédrale[1]

Fig. 73. — Armes de l’archevêque Philippe de Thurey
(Vitraux de la nef de la Cathédrale de Lyon.)
  1. La cathédrale de Lyon n’était assurément pas la seule église de la ville à posséder d’anciens vitraux. La vaste Saint-Nizier, dans laquelle étaient élus la membres du Consulat lyonnais, possédait, à n’en pas douter, de précieuses dues à la munificence des consuls de la haute bourgeoisie, aussi bien que des nombreuses confréries titulaires des chapelles. Mais, Saint-Nizier, peut-être plus encore que les autres églises lyonnaises, eut à subir les terribles dévastations des calvinistes en 1562 et les assauts des révolutionnaires de 1793, surtout au moment du siège de Lyon, la flèche de l’édifice servant de point de mire aux bombes de la Convention.
    Toute l’ancienne vitrerie a disparu et ses débris, qui subsistaient encore en 1850, furent successivement arrachés lors de l’établissement des vitraux modernes des chapelles, dans la seconde moitié du siècle dernier. Vers 1868, comme nous avons pu le constater, il existait encore dans les chapelles latérales de nombreux panneaux armoriés et principalement dans la chapelle de Sainte-Élisabeth de Hongrie, dans le collatéral du midi.
    La historiens lyonnais, en décrivant l’ancienne église paroissiale Saint-Georges, réunie à la Commanderie de l’ordre de Malte, dont les tours massives se reflétaient dans les eaux de la Saône, ont mentionné les verrières aux couleurs éclatantes qui éclairaient l’abside dont elles étaient contemporaines. Ce chœur, édifié au quinzième siècle, était remarquable par la hardiesse des piliers, l’élancement des nervures et la grâce des clefs pendantes. Nous ne sommes malheureusement pas renseignés sur la composition de ce décor translucide.