Les mystères de l’île Saint-Louis/Tome 1/01

M. Lévy (tome Ip. 12-22).

PREMIÈRE PARTIE

LA DUCHESSE DE FORNARO


I

LE PASSEUX DE L’ILE AUX VACHES.


En 1638, époque à laquelle se passe la première partie de ce récit, la pointe de l’île Saint-Louis vers laquelle nous conduisons le lecteur, était loin d’offrir un aspect semblable à celui qu’elle présente en cet an de grâce 1845 ; il nous paraît donc indispensable de lui restituer en peu de lignes sa physionomie ancienne.

L’île Saint-Louis se composait d’abord autrefois de deux îles : de l’île Notre-Dame et de l’île aux Vaches. Ces deux îles réunies n’en formèrent bientôt plus qu’une.

La partie est de l’île était échue à Luc Le Poulletier, secrétaire de la chambre du roi ; dans cette partie se trouve encore une rue qui porte son nom[1].

L’île Notre-Dame, appelée aujourd’hui l’île Saint-Louis, ne reçut ce premier nom que parce qu’elle relevait de l’église métropolitaine, et qu’elle lui appartenait en propre. Elle se trouvait partagée d’abord en deux par un petit bras de la rivière ; ce bras la traversait dans l’endroit même où est maintenant l’église de Saint-Louis.

Dans la plus petite de ces îles (l’île aux Vaches), on menait paître les bestiaux ; dans la plus grande (l’île Notre-Dame), le chapitre régnait en maître si absolu que, malgré plusieurs arrêts du conseil obtenus par les entrepreneurs des constructions de l’île, commencées en 1614, ses oppositions seules empêchèrent la construction du pont Marie, jusqu’à ce que le roi intervint et promit de donner dans un mois, au chapitre, cinquante mille livres.

Le chapitre de Notre-Dame traversa les entrepreneurs jusqu’en 1642.

Ces entrepreneurs étaient Christophe Marie, entrepreneur général des ponts de France, Le Regrattier, trésorier des Cent-Suisses, et Poulletier, commissaire des guerres.

En 1614, Christophe Marie s’était déjà obligé à joindre, en dix ans, les deux îles, à les environner de quais revêtus de pierres de taille, et à bâtir des maisons, à y faire des rues et un pont vis-à-vis celle des Nonaindières.

Après avoir fait bâtir une partie de l’île, Marie et ses associés se rebutèrent. Leur traité fut cédé par eux, puis repris, puis recédé ; l’entreprise ne fut achevée qu’en 1647, par Herbert et autres habitants de l’île.

Toutefois, dès 1635, le pont Marie était terminé.

Il faut bien le dire, pour un Parisien peu fait aux merveilles monumentales de l’Espagne ou de l’Italie, ce pont, l’un des trois par lesquels on entre dans l’île, réalisait un magnifique travail.

Sur ses cinq belles arches de pierre, complétées par quatre piles et deux culées, s’élevait une double ligne de maisons uniformes et profondes de quatre toises. Le pont lui-même en avait cinquante de longueur. L’île Notre-Dame, développant son immense carré couvert de toits encore rares et bordé de quais, alors en voie de construction, ne pouvait lui opposer que le pont Rouge, encore celui-ci était-il de bois[2], comme le pont de la Tournelle. Ce dernier même venait de se voir emporter par les glaces et le débordement de la Seine, en 1637, l’année d’avant[3]. Le regard du passant plongeait à travers les fenêtres neuves des maisons, d’un côté, sur cet horizon de fabriques et d’édifices qui s’arrête à peine au Louvre ; de l’autre, sur l’étendue alors inculte de terrains coupés par la Seine, qui donne au paysage les seules limites de Charenton. Le marteau des travailleurs retentissait déjà à la pointe de l’île aux Vaches ; tout ce que la cour comptait de seigneurs ou de gens riches marchandait, soit par spéculation, soit par luxe, ce sol vierge encore, sur lequel l’édilité mettait la main, et qu’elle vendait au plus offrant. Les événements de la guerre étaient de nature à satisfaire les esprits ; l’œuvre lente et progressive de Richelieu, l’abaissement de la maison d’Autriche allait se voir dû aux succès de nos propres armes. Louis XIII avait alors six armées sur pied, dans les Pays-Bas, dans le Luxembourg et la Champagne, en Languedoc, en Italie et en Piémont. Le duc de Rohan, ce fameux chef des huguenots qui s’était soumis au roi après le siège de la Rochelle, venait de mourir à Rhinfeld, après s’être signalé par plusieurs victoires contre les impériaux dans la Valteline. Le maréchal de Créquy, l’un des plus grands généraux de Louis XIII, avait perdu la vie d’un coup de canon au siège de Brême. Ces retentissements guerriers imprimaient alors à Paris une allure martiale et grandiose, la population tournait au soldat. La France rêvait les conquêtes, et, à l’aide de mouvements extérieurs, le cardinal venait de se rendre plus nécessaire que jamais.

Alors aussi, tout ce qu’il y avait de gens de cape et d’épée dans les pays voisins refluait vers nos murailles. Les aventuriers d’Espagne, d’Angleterre et d’Italie venaient essayer de notre soleil, et traîner à la cour ou par les rues ces manteaux, souvent troués, que Callot immortalisa de son burin. Ceux-ci quittaient la solde de Piccolomini, ceux-là le pain de Buckingham, d’autres l’or du cardinal de Savoie. Il n’était pas de cour en Europe dont le cardinal ne connût les intérêts et dont les négociateurs les plus obscurs ne lui servissent. Les espions de Richelieu exerçaient partout une inquisition victorieuse. Occupé à la fois du dedans et du dehors, Richelieu venait enfin de fonder l’Académie. Il avait fait un traité entre la France et la Hollande par lequel ces deux puissances devaient s’unir mais les Espagnols, instruits de ce traité et ayant surpris Trèves, avaient enlevé l’électeur. Ce coup hardi avait occasionné entre la France et l’Espagne une longue et cruelle guerre.

Par une soirée brumeuse de janvier 1638, un personnage à la cape longue, éraillée, sorte de couverture semée de taches, qui laissait à peine apercevoir le bout de sa longue rapière, longeait la draperie neuve des maisons du pont Marie. Indifférent aux bruits divers de la foule, il marchait d’un pas ferme vers cette partie de l’île Saint-Louis où se trouve situé aujourd’hui l’hôtel Pimodan, mais dont le terrain était alors semé d’herbes comme ceux qui l’avoisinaient. À son air préoccupé, il était facile de voir que les embellissements nouveaux de cette portion du vieux Paris le touchaient peu, car il n’avait pas même jeté un regard d’encouragement aux travailleurs employés à ce quai par Christophe Marie, et qui fredonnaient, en taillant la pierre, un refrain en vogue alors au cabaret de la Femme sans tête.

Plusieurs de ces ouvriers, voyant la journée finie, emportaient déjà leur besace pleine d’outils, quand l’apparition du nouveau venu vint les mettre en veine de malice et de gaieté.

En effet, outre que l’espace vers lequel notre personnage s’avançait pouvait à bon droit passer pour un lieu peu fréquenté, il était semé d’une foule de matériaux à travers lesquels il eût pu difficilement se faire jour.

Tantôt sa longue cape se prenait aux moellons ou à la scie, tantôt il trébuchait sur des bois amoncelés ; ses éperons s’accrochaient comme à plaisir au milieu d’herbes et de varechs rejetés en cet endroit par la Seine ; sa rapière interminable battait ses flancs et menaçait de le faire tomber. À son feutre gris pendait un panache agonisant ; ses bottes étaient ouvertes aux quatre points cardinaux ; son pourpoint avait pour boutons de méchantes cordes. Tout ce qu’on pouvait voir raisonnablement de sa figure, c’étaient deux moustaches dont les crocs menaçaient le ciel, une royale démesurée et quelques touffes de cheveux. Il était long, osseux, et ressemblait alors à un héron qui sautille. Enfin, piège horrible ! et dont sa méditation profonde l’avait sans doute empêché de s’apercevoir : il portait en guise de galon au bas de son manteau un énorme bouchon de paille, que de malins clercs de Sorbonne, ou des vendeurs de lèchefrite du pont Neuf lui avaient attaché injurieusement, lorsqu’il y pensait le moins.

Un concert d’acclamations bouffonnes accueillit l’inconnu à son passage. Ce fut à qui, parmi les ouvriers de maitre Christophe Marie, lui lancerait un lardon.

— Où allez-vous donc, monsieur le masque ? prenez garde de salir vos broderies !

— Ce courageux pèlerin va prendre sans doute un bain d’hiver.

— Vous n’y êtes pas : il vient acheter un terrain pour s’y construire un palais !

— C’est un riche bourgeois qui veut fonder ici un jeu de paume !

— Il rebondira sur la raquette comme un volant ! Il est si maigre !

— Examine ses jambes, ne dirait-on pas de deux arches du pont Marie !

— Et ce bouchon de paille ! Ah çà ! il est donc à vendre !

L’inconnu se drapa silencieusement dans son manteau, et rejetant son corps en arrière avec fierté, il se mit à toiser dédaigneusement ces épais railleurs. C’était un homme d’une quarantaine d’années, aussi brun qu’un Cafre au premier coup d’œil, mais dont la physionomie rusée, le regard étincelant et la désinvolture élégante trahissaient bien vite le pays : il était Italien. Une chevelure noire, abondante, s’échappait en boucles entremêlées sous son feutre ; il avait le rire aigu, éclatant ; il n’eut pas de peine à remettre à leur place les mauvais plaisants qui l’obsédaient.

— Arrière leur cria-t-il ; je croyais avoir affaire ici à des hommes et non à des pierres ! Le terrain que je foule m’appartient autant qu’à vous !

Il se fit un silence forcé dans la foule ; elle s’écarta pour mieux lui faire passage.

— La maison de maître Gérard ? demanda-t-il.

Ces hommes se regardèrent ; maître Gérard était le passeux de l’île aux Vaches, mais ils n’avaient guère souvenance qu’à cette heure avancée et dans pareille saison, un gentilhomme pût avoir fantaisie de lui faire détacher sa barque pour côtoyer les îlots de la Seine. Peu de seigneurs frappaient en hiver à sa cabane isolée.

— Eh bien ! ne m’avez-vous pas entendu ? poursuivit l’Italien, je vous prie de me dire où reste maître Gérard ?

— Mais… à cette hutte sur la Seine, répondit l’un d’eux en indiquant du doigt à l’Italien une sorte de cabane revêtue de mauvais ciment, et au pied de laquelle une barque était amarrée.

Cette habitation chétive faisait face à l’Arsenal.

Il se racontait sur ce lieu de sombres et tragiques histoires. Une fatalité étrange, mystérieuse, voulait que vers cette pointe de l’île nombre d’imprudents ou de malheureux eussent trouvé la mort, les uns en se noyant, d’autres en s’étant battus en duel malgré les édits, car pour les duels ce terrain écarté était commode.

L’Italien prit à peine le temps de remercier son homme, et il se dirigea d’un air résolu vers la cahute.

Dix heures sonnaient alors à l’église des Célestins ; le froid était vif, notre personnage doubla le pas.

La demeure du passeux de l’île aux Vaches laissait à peine échapper un jet de lumière… L’abord en était silencieux comme l’abord d’une tombe.

— Maître Gérard ! cria l’inconnu d’une voix ferme.

En appelant ainsi, il se trouvait à deux pas de la cahute ; l’unique porte de ce gîte noirâtre s’ouvrit.

— Que me veut-on ? demanda d’une voix fêlée un petit vieillard qui tenait en main une lanterne.

— Tu vas le savoir, mais d’abord prends.

Maître Gérard recula d’un pas, en sentant le poids de quelques écus tomber dans sa main.

— Entrez, mon gentilhomme, entrez, dit-il au nouveau venu.

L’Italien descendit dans la cahute du passeux en s’y laissant couler le long de la corde qui formait sa rampe.

Il ne tarda pas à se voir dans une pièce lambrissée de méchantes planches, ayant à son plafond quelques misérables filets de pêche pour tout ornement. Sur une table boiteuse, le souper de maître Gérard était servi ; dans un coin de la cahute, on entrevoyait une sorte de créature humaine roulée près du feu. C’était un chien.

À l’approche de l’étranger, le chien se dressa sur ses jarrets vigoureux, et flaira la cape de l’Italien. Peu satisfait de son examen, il revint ensuite à sa place devant le foyer d’un air de mépris taciturne.

— Je suis à vos ordres, monsieur, dit le vieillard en courbant sa maigre échine ; permettez-moi seulement de m’étonner…

— De ce que je vienne chez vous si tard par un semblable froid, mon brave homme ? Dame, je n’avais pas le choix de l’heure et de la saison, reprit l’inconnu.

— Que voulez-vous de moi ? demanda maître Gérard avec une crainte secrète. En même temps il regardait le chien, unique gardien de sa solitude, et la bourse qu’il venait de recevoir.

— Une chose bien simple, répondit l’Italien ; je veux votre barque.

— Y songez-vous, monseigneur ? La promenade en Seine est peu praticable par le temps présent, et à moins qu’il ne vous prenne envie d’aller par eau à l’Arsenal…

— Je n’ai rien à faire à l’Arsenal, objecta l’Italien ; c’est une promenade que je veux faire, rien de plus.

Maître Gérard se prit à considérer l’inconnu avec une attention défiante.

Peu de peintres eussent pu trouver un plus curieux sujet d’études ; le visage de cet homme défiait l’analyse et la réflexion. Quelques rides légères sillonnaient son front habituellement pâle et méditatif, mais ces rides indiquaient aussi bien les fatigues de l’esprit que celles du corps. Le ton de l’inconnu était bref et saccadé ; mais il provenait peut-être autant de l’habitude du commandement que d’une résolution soudaine. La flamme qui brillait dans ce regard laissait l’examen indécis, elle représentait aussi bien le courage que la folie. Cette défroque usée de gentilhomme pouvait enfin cacher un aventurier comme un seigneur.

Ce qui affermissait le doute chez Gérard, c’était une ironie insistante dans le sourire de l’étranger ; lui-même avait l’air de s’être pris le premier pour but d’une amère plaisanterie ; il se raillait devant le passeux par une pantomime hautaine et cruelle, inspectant tour à tour avec mépris, et le manteau troué qu’il portait, et ses bottines prenant l’eau.

— C’est peut-être un fou qui a parié de me faire sortir ! pensa le vieillard. En ce cas, le temps est mal choisi ; mon souper m’attend et ma journée a été rude.

En se parlant ainsi à lui-même, l’honnête passeux jetait un regard sur sa cabane. L’araignée suspendait sa toile grise à ses planches, le vent y faisait une basse lamentable et continue. Les flots de la Seine, grossis par les pluies d’hiver, en battaient les ais avec un sombre roulis. Auprès de la table était le lit, au-dessus du lit un amas de cordes, de harpons, de nasses, de poissons fumés et desséchés. Dans un coin de cette pièce, il y avait un berceau à l’osier disjoint, sur lequel Gérard avait étendu sa cape grise, humide encore de givre. L’inconnu examinait à peine ces détails, et semblait plongé dans la plus profonde méditation. La flamme de l’âtre renvoyait de temps à autre des reflets énergiques à sa figure, et cette figure révélait alors un mélange indéfinissable de haine, de pitié ou de dédain. Il poursuivait un monologue approfondi avec lui-même, se parlant tantôt avec une vivacité hautaine, tantôt retombant comme épuisé sur son escabeau dans le plus morne des silences. Le passeux restait muet devant cet hôte inattendu, il n’osait l’appeler et le tirer de sa rêverie.

Tout d’un coup l’Italien fit un bond.

– Je suis prêt, dit-il, et vous ?

Maître Gérard s’inclina machinalement.

L’inconnu s’était levé, il avait ôté son manteau ; en y trouvant le bouchon de paille, il fit un léger mouvement d’épaule.

— Je ne m’étais pas encore vendu ici, cependant ! murmura-t-il avec une singulière expression.

Il jeta le bouchon de paille au feu, et commanda au passeux d’amener sa barque.

Cette fois, maître Gérard se sentit pris malgré lui d’une frayeur invincible. Il représenta de nouveau à l’étranger, en balbutiant, qu’il était tard, que la Seine était froide et peu propice à la promenade. Les sentinelles de l’Arsenal s’effrayeraient, on allait peut-être les interroger tous deux. En un mot, Gérard accumula tout ce qu’il put trouver de raisons ; mais l’inconnu insista.

Le passeux eut si peur qu’il offrit de rendre la bourse.

— Gardez-la, dit l’autre, nous n’irons pas loin, rassurez-vous.

— Mais où voulez-vous donc que je vous conduise ? reprit Gérard.

— Que vous importe ?

– Monseigneur, reprit Gérard, malgré vos habits, vous me faites l’effet d’un brave gentilhomme. Peut-être en ce moment les fumées du vin vous traquent la cervelle. Si c’est un pari que vous avez fait de l’autre côté de la Seine, soyez tranquille, je dirai que vous l’avez gagné, je vous jure.

– Voilà huit jours que mes lèvres n’ont touché une coupe, dit l’étranger ; voilà huit jours que j’aurais dû faire ce que je fais aujourd’hui.

— Monseigneur, vous ne voulez pas, n’est-il pas vrai, vous moquer ici d’un pauvre homme ? Je n’ai pas de famille, mon cher seigneur, quoique dans le temps on eût pu voir ici une pauvre petite créature jouer avec ses mains d’ange dans ce berceau qui est vide, hélas ! Mais je suis connu dans l’île Notre-Dame pour un digne homme, j’honore Dieu, le roi et M. le cardinal.

À ce dernier nom, l’inconnu fronça le sourcil, mais reprenant bientôt un ton d’autorité, il dit à maitre Gérard :

— Me prendriez-vous d’aventure pour un voleur ?

— Certainement non, reprit le passeux, mais une fois en Seine, qui me dit…

— Honnête Gérard, reprit l’inconnu, voici mon épée, je la laisserai dans ta cahute ; ce poignard, je le dépose sur ta table ; ces mains, tu vas les lier toi-même. À présent, hésites-tu ?

— Non, non, mon gentilhomme, répondit Gérard ; mais alors, que vais-je faire ?

— Tu ne le devines pas ? dit l’étranger.

— Non, mon gentilhomme.

— Tu vas m’introduire dans cette barque ; au plus profond de la Seine… Eh bien ! qu’as-tu donc ? je n’ai pas encore parlé…

— Rien… oh ! rien… murmura le passeux demi-mort de peur, achevez…

— Eh bien, maître Gérard, au plus profond de la Seine, tu me pousseras hors de ta barque et tu me noieras !

  1. Il faut même s’étonner de ce que les membres du conseil municipal ne l’aient pas encore débaptisée. Ce sont cependant ces mêmes édiles qui commettent chaque jour d’impardonnables âneries. Pour n’en citer qu’une, qui se trouve sur le chemin de notre hôtel, la rue de la Tonnellerie conserve encore, grâce à eux, l’inscription la plus apocryphe. Molière y est inscrit comme étant né en 1620, tandis qu’il ne vit le jour qu’en 1622, et rue Saint-Honoré, au coin de celle des Vieilles-Étuves. Ainsi que l’a fait observer un ingénieux critique, bibliothécaire de la ville, M. Rolle, que doit penser l’étranger en voyant d’un côté, rue de la Tonnellerie, l’inscription susdite à la date de 1620, et à la fontaine Molière, au coin de la rue Richelieu, celle de 1622 ? Nous demanderons humblement à ces mêmes édiles pourquoi, ayant en main les chartes du royaume, Germain Brice, etc., etc., ils s’obstinent encore à estropier le nom de Poulletier dans sa rue même ils l’écrivent Poultier.
  2. Alors le pont de Bois.
  3. Le temps de la reconstruction de ce pont en pierres de taille date de 1656. Alexandre de Sève, prévôt des marchands, y fit placer le distique suivant :
    Ædiles recreant submersum flumine pontem.
    Non est officii, Sed pietatis opus.