Les Veillées des maisons de prostitution et des prostituées/5

QUATRIÈME TABLEAU

Le peintre et son modèle.

Nous avons vu tout à l’heure le passetemps des bergers, et il me serait assez difficile de vous expliquer le Tableau que vous avez maintenant sous les yeux sans me répéter : puisque dans un tableau qui a pour titre : le Peintre et son modèle, c’est encore de branlades mutuelles qu’il s’agit, et qu’il n’y a guère de changé que le lieu de la scène. N’importe, je vais toujours essayer.

Ce n’est plus d’une simple et innocente bergère qu’il est question dans ce Tableau ; la putain que vous voyez est une dame de haute aristocratie qui s’est fait foutre par le tiers et le quart, la haute noblesse et le clergé y ont passé d’abord, c’est à présent le tour de la roture, et depuis qu’elle y a tâté, elle y a pris goût ; car de son aveu même : vit de manant vaut mieux que vit de prince. Dans son ardeur de foutre, elle descendra un à un tous les échelons de l’ordre social. Ne croyez pas surtout que ce soit le désir d’avoir son portrait qui l’a conduite chez le peintre que vous voyez. Son portrait, elle l’a déjà fait faire plus de cinquante fois dans toutes les grandeurs, dans toutes les dimensions, à l’huile, en miniature, au pastel, voire même au crayon ; dès qu’elle entend parler d’un peintre de talent, elle s’informe d’abord s’il est joli garçon, et sur l’affirmation, elle se rend chez lui dans le costume le plus coquet, on prend jour pour la séance, et ce jour-là on a la robe la plus décolletée qu’il soit possible, au point de laisser deviner, sinon apercevoir, les deux petites fraises qui ornent les deux plus jolis tétons du monde, en se plaçant pour que le peintre puisse commencer son travail, on arrange sa robe et on laisse voir une jambe faite au tour que recouvre un bas blanc bien tiré ; une douce langueur se peint dans les regards chaque fois qu’ils rencontrent ceux de l’artiste. Bientôt le peintre devine ce qu’on lui veut, car il n’y a plus à s’y méprendre sur la lascivité de ces piquants coups-d’œil. Oh ! alors le feu gagne, l’incendie se communique, et, jetant au loin palette et pinceaux, on jette le modèle sur un sopha, on le trousse, et on lui met en main un autre modèle, modèle qui n’a pas de copie, tant il est énorme, mais il ne le sera jamais trop pour la grande dame, qui bientôt, par de fréquents soupirs, laisse apercevoir combien elle est impressionanelle ; enfin, une mutuelle branlade n’est que le prélude de la scène qui se termine par une vigoureuse fouterie et toute imprégnée du sperme régénérateur. La noble putain prend congé du fouteur roturier, en lui payant largement la séance et en se promettant de lui en donner souvent de pareilles.