Les Romans de la Table ronde (Paulin Paris)/Lancelot du lac/Notes

Léon Techener (volume 4.p. 351-373).

NOTES

ET OBSERVATIONS GRAMMATICALES.


Page 4, « Loin d’elle il ne peut être en bon point », c’est-à-dire dans un bon état de santé. De ces trois mots nous avons fait très-improprement embonpoint, et nous en avons modifié le sens naturel au point de pouvoir parler d’un embonpoint excessif, — du trop d’embonpoint, — de beaucoup d’embonpoint.
P. 4. Quand il fut au monter. Quand il fut au moment de monter à cheval. — Les mots cheval et chevalier reviennent si souvent que j’ai trouvé à propos d’en diminuer le nombre. D’ailleurs, c’est dans le texte qu’on se contente de dire seulement, comme ici, monter. La forme « être au monter » semble un gallicisme qu’on eût pu conserver.
P. 4. La quête. Enquête, recherche. On a encore restreint le sens de ce mot ; il ne répond plus guère qu’à demande. On disait également la quête de celui qu’on cherchait, et la quête de celui qui cherchait ; de même que dans l’acception actuelle on dit : « la quête du dimanche » et la quête de madame N.
P. 4. Messire Gauvain. Gauvain et Yvain sont toujours ainsi qualifiés, comme fils aînés de rois encore vivants.
P. 5. Un clerc revêtu, c’est-à-dire en costume de clerc allant officier ; en surplis, comme on dirait aujourd’hui.
P. 5. N’est-il pas dans la forêt d’autre religion, d’autre maison religieuse. On n’a guère conservé cette ancienne acception que pour ceux qui entrent « en religion ».
P. 6. Le clerc se chargea d’établer le cheval. De le mettre à l’écurie ; mot qui n’était pas encore usité.
P. 8. Messire Allier. L’histoire d’Allier, père de Maret, semble, sous des noms fictifs, se rapporter à Guichart III, sire de Beaujeu, devenu moine de Cluny en 1137. Bien que je ne sois plus aujourd’hui aussi persuadé que je l’étais il y a trois ans de la part que Gautier Map aurait prise à la composition des romans de la Table ronde, il faut encore, à l’appui de cette attribution, tenir compte de quelques passages du De nugis curialium. Au chap. xiii de la première Distinction, G. Map a raconté de Guichart III, seigneur de Beaujeu, mort vers 1140, ce qu’on trouve dans notre XLVIIIe laisse (p. 13) de mess. Allier père de Maret. Voici le passage qu’on pourra comparer :
« Guichardeus de Bellojoco[1] pater hujus Imberti cui nunc cum filio suo conflictus est, in ultimo senectutis suæ Cluniaci assumpsit liabitum, distractumque prius tempore, scilicet militiæ, singularis animi copiam adeptus, etiam quietem adegit : in unum collectis viribus, se subito poetam persensit, sua quo modo lingua, scilicet gallica, pretiosus effulgens, laïcorum Homerus fuit. Hæ mihi utinam induciæ ! ne, per multos diffusæ mentis radios, error solæcismum faciat[2]. Hic jam Cluniacensis monachus factus, jam dicto Imberto filio suo, licet vix impetratus ab abbate et conventu, totam terram suam, quam idem filius per potestatem hostium et suam impotentiam amiserat, armata manu restituit. Reversusque, devotus in voto persistens, diem suum felici clausit exitu. »
M. Victor Leclerc, Hist. litt., tome XXIII, p. 250, avait déjà conjecturé que les vers publiés sous le titre de Sermon de Guichart de Beaulieu étaient de Guichart seigneur de Beaujeu, mort, ajoute-t-il, en 1137. Mais je crois qu’il s’est mépris en rapportant la composition de ces vers au temps où ce Guichart était encore dans le siècle. C’est dans l’abbaye de Cluny qu’il dut les faire, non comme un sermon prononcé en chaire, mais comme épître ou discours moral. Guichart fut l’« Homère des laïcs », parce qu’il s’était adressé directement dans cette épître aux laïcs ; non parce que lui-même était encore laïc. Pour ce nom d’Homère, il n’en faudrait pas induire que Guichart eût fait quelque chanson de geste, mais seulement qu’on le comparait, comme ancien poëte français, au plus grand et au plus ancien des poëtes grecs.
P. 10. Il vaut une « échelle » entière. Une aile, un bataillon. Notre diminutif bataillon dérive de bataille, corps d’armée rangée en bataille. On disait la bataille du roi, pour l’aile que commandait le roi.
P. 11. Quand ils eurent « levé leur ventaille ». J’aurais dû dire baissé. La ventaille était une espèce de petite pièce qui dépendait du hautbert, et qui descendait sur la poitrine, quand on ne la remontait pas sur le visage pour l’attacher à la coiffe du haubert. Je ne crois pas qu’elle montât jamais jusqu’aux yeux. Elle fut plus tard remplacée par la visière, qui dépendait du casque, heaume, ou armet. Disons en passant, qu’armet ne vient pas d’arme, mais de l’italien elmo heaume, elmetto, petit heaume.
P. 11. Deux jeunes « pucelles ». Ce mot n’avait d’autre sens que celui du latin puella, femme non mariée.
P. 11. Les deux amis quittent « heaume, épée, haubert. » L’aspiration de l’initiale h rend ces formes, heaume, haubert, un peu dures. L’italien elmo, albergo est assurément plus agréable. Je ne pouvais substituer casque à heaume, ni cuirasse à haubert, ces deuxièmes noms ayant une physionomie trop moderne. Il en a été de même de l’écu, que n’aurait pas exactement remplacé le bouclier. J’ai parfois aussi conservé ost au lieu d’armée. Pour des récits surannés, il faut souvent des expressions et même des constructions vieillies. Brocher des éperons ne vaut-il pas mieux que piquer des deux ? Defermer au lieu d’ouvrir n’est-il pas à regretter un peu ?
P. 14. Messire Gauvain devait être facile à reconnaître au sinople de son escu ». Les armoiries sont encore de fantaisie dans nos romans. Bien que les chevaliers affectent de certaines couleurs, de certaines figures, ils en changent et les cèdent volontiers. Rien plus éloigné de la vérité que les attributions faites à la fin du quinzième siècle, dans un livre souvent réimprimé sous le titre Armoiries des chevaliers de la table ronde. Tout y est imaginaire.
P. 17. Celui qui m’« outrera » n’est pas encore né. Celui qui me vaincra. Le mot vaincre, dur à conjuguer, justifie l’emploi de synonymes même vieillis, comme ici outrer dans le sens de vaincre, réduire à merci.
P. 17. Un sergent va dans le « moutier ». Ce mot se prenait pour église ou pour chapelle, aussi bien que pour monastère : dans ce dernier sens, on préférait même le mot religion.
P. 21. Et ce chevalier « félon ». L’Académie, qui me semble avoir prodigué les accents, peut être blâmée d’en avoir affublé félon, dont le radical français est fel : je n’ai jamais entendu prononcer félon. Il en est de même de l’accent qu’elle exige pour pèlerin.
P. 21. À l’entrée d’une « lande ». Plaine non cultivée, aride ou couverte de gazon.
P. 21. Vous avez fait que « vilain », comme « vous avez fait que sage ». C’est-à-dire « vous avez fait ainsi que vilain ferait. »
P. 21. Vous amenderez le méfait. Vous réparerez, vous compenserez. Bonne locution perdue. On dit encore dans un sens presque analogue : faire amende honorable.
P. 22. Vous êtes le meilleur « vassal » du monde. Le premier et le vrai sens de ce mot répond à chevalier, et non pas à tenancier d’un fief seigneurial. Messire Gauvain n’était pas de ces tenanciers. Le radical latin qu’on trouve dans la loi salique est vassus : on l’a rendu d’abord par vax, puis par vassal, noble chevalier. Dans nos chansons de geste et dans nos romans, Charlemagne et Artus sont fréquemment loués comme bons vassaux. Si l’on a confondu l’ancienne et la nouvelle acception, c’est parce qu’en recevant l’adoubement ou vêtement militaire, on devenait l’obligé de celui qui vous armait. Mais Vassal suppose néanmoins une position indépendante ; aussi ne voit-on jamais, dans nos premiers textes de langue, l’expression vassal de quelqu’un ; mais ce vassal peut être le : chevalier d’un prince, à raison de son hommage ou des soudées qu’il recevait. Les mots de la basse latinité vassus, vassalis, vassaletus et vassus vassorum représentent vax, vassal, vallet ou varlet, et vavasseur.
P. 25. Sagremor le « desrée » sur ce surnom, voyez encore t. I, page 290.
P. 25. Les trois « gloutons », synonyme de notre drôles, ou vauriens. « Glout » dans les chansons de geste.
P. 25. Nous pourririons encore dans la « chartre » de Marganor. La prison. C’est le latin carcer. Le rapprochement du sens de ce mot avec le nom de la ville des Carnutes, Chartres, n’a pas été sans influence sur le type des monnaies chartaines. Remarquons ici : 1o qu’un des airs de chanson les plus connus est celui de Tous les Bourgeois de Châtres (aujourd’hui d’Arpajon), et non pas de Chartres, 2o qu’à Reims, la porta carceris, porte de la prison de l’archevêque, où, dit-on, fut enfermé Ogier le Danois (non l’Ardenois), doit à cet ancien nom celui de Porte Cère, comme disent encore les bonnes gens du peuple, ou Porte Cérès, comme disent les gens bien élevés.
P. 27. Je veux bien « baisser ma guimpe ». La guimpe était pour les dames ce que la ventaille était pour les hommes. Voyez tome I, page 206, note.
P. 27. Par mon chef ! auj. « Sur ma tête ! »
P. 31. Elle prend « plein son poing de chandelles » (plain poing de candeilles). Cette expression, fréquemment répétée, donne à penser que ces chandelles étaient en faisceau de deux ou trois mêches. « Prendre plein ses poings, » c’est peut-être exactement notre empoigner.
P. 38. Je fais serment sur les saints. C’est-à-dire sur les reliques de saints. Je renvoie sur ce sujet à l’Étude sur les origines des romans de la Table ronde, insérée dans la Romania, tom. Ier.
P. 45. Comment le fait Galehaut, lieu commun d’entrée en propos, How do you do des Anglais ; (Comment le faites-vous) ? et notre Comment vous portez-vous ?
P. 45. Les dames « après s’être conseillées ». Ou avoir pris conseil. On dirait aujourd’hui s’être consultées, mais avec moins d’exactitude.
P. 45. Les Saisnes sont les Saxons ; les Irois, les Irlandais, souvent confondus avec les Escots ou Écossais. Pour la forme Saxons, elle eût écorché la bouche délicate de nos anciens Français : ils préféraient les Saisnes (Saxoni), et la Sassogne (Saxonia), au lieu de notre Saxe.
P. 46. Un riche peigne dont les dents étaient garnies de ses cheveux. Admettons qu’alors les beaux cheveux blonds des dames ne fussent jamais imprégnés d’huiles ou de pommades parfumées, on se rendra mieux compte du prix que les amoureux attachaient au don d’un peigne garni comme celui que Genièvre envoie à Lancelot. Ce mot peigne nous tient aujourd’hui en respect : autrefois c’était fréquemment une œuvre d’art. On en voit d’un charmant travail dans plusieurs cabinets, entre autres dans celui des Antiques de la Bibliothèque nationale. On y traçait à la pointe le Jugement de Paris, la Punition d’Actéon, ou quelque belle devise galante.
P. 70. La dame le fait asseoir sur « la couche ». L’usage de la couche répondait assez à celui de nos divans. Il ne faut pas la confondre avec notre lit ; les dames du Lancelot l’auraient fait partager trop fréquemment à ceux qui les visitaient.
P. 70. À Dieu soyez-vous recommandée ! Cette pieuse formule est devenue tellement elliptique que bien des gens aujourd’hui ne s’en rendent plus compte en la prononçant. Nous cessons depuis longtemps d’écrire : À Dieu ! on dit adieu, on fait ses adieux. On parle même des gens qui ont dit, les uns adieu à l’Église, les autres adieu à Satan. Ce que c’est d’oublier le vrai sens des mots !
P. 75. La bonne épée « Sequence ». On voit ici combien de remaniements souvent fâcheux dans les traditions. Le nom véritablement consacré de l’épée d’Artus est Escalibur. Les romanciers y ont substitué d’abord Marmcadoise, en faisant donner Escalibur à Gauvain. Ici, on nous parle de Sequence, la moins autorisée des trois épées. Au reste, il est rare, dans nos romans, de voir désigner les armes et les chevaux par des noms particuliers. Je ne me souviens que de ces trois épées et du cheval de messire Gauvain, Gringalet, nom que le Lancelot n’admet même pas.
P. 87. Il eut soin de mander les quatre clercs, etc. Le fond de cet alinéa a été plus tard défiguré dans le texte du manuscrit 751, que j’ai donné en note. Voici celui du manuscrit 752 : « Celui jor furent mandé li cler qui metoient en escrit les proesces as compaignons de la maison le roi. Si estoient quatre. Et avoit non li uns Arodion de Coloigne, e li segons Taudramides de Verzeaus, e li tiers Thomas de Tolede e li quarz Sapiers de Baudas. Cil, quatre metoient en escrit quanque li compaignon le roi faisoient d’armes. Si mistrent en escrit les aventures monseignor G. tot avant, porce que ce estoit li comencemens de la queste ; e puis les Hector, porce que del conte meesmes estoient branches. E puis les aventures as autres xviii compaignons. E tot ce fu del conte Lancelot. E tuit cest conte estoient branches, e li contes Lancelot meismes fu branche del grant conte del Graal, si tost com il fu ajostés. »
On voit ici que le « Grand conte du Graal » ne fut constitué que par la réunion successive des branches qu’avaient formées le Merlin, l’Artus, le Gauvain et le Lancelot. La branche de Gauvain n’est plus aujourd’hui séparée, au moins dans les romans en prose, de celles d’Artus et de Lancelot. Tout semble porter à croire que les deux livres d’Artus et de Lancelot étaient, dans l’origine, parfaitement indépendants du Saint Graal et du Merlin. C’est pour avoir voulu raccorder les deux premiers aux deux seconds que les arrangeurs définitifs auront été obligés de recourir çà et là à des interpolations.
P. 95. En tendant les bras à son « nourri ». Nous avons perdu ce mot, désignant celui qui avait passé sa jeunesse, avait été nourri, élevé, dans la maison d’un parent, ami, patron ou client, devenu père nourricier. Ainsi Eginhard nomme-t-il Charlemagne nutritor meus ; ainsi Guillaume de Machault se disait-il le nourri du roi de Bohême.
P. 97. On vit descendre devant le « degré ». Ancien nom de notre escalier. Celui du Palais de Justice s’appelle encore le degré.
P. 98. Les cheveux roulés en une seule tresse. Cette tresse descendait apparemment le long du dos, comme on le voit sur les coffrets et peintures murales des onzième et douzième siècles. On verra plus loin, page 222, qu’une fille était déshonorée quand on lui coupait ses tresses.
P. 102. Le plus loyal des hommes qui soient aux « îles de mer ». Autrefois on donnait volontiers le nom d’îles aux terres qui étaient à demi fermées de rivières ; et c’est ainsi que l’Île-de-France peut avoir mérité son nom. Froissart nomme fréquemment des îles de ce genre. Voilà pourquoi notre auteur distingue les îles de mer.
P. 106. Il se signait. Il faisait des signes de croix.
P. 107. Quiconque osera me contredire sera… réduit « à se déclarer foi mentie ». À se reconnaître parjure, à confesser un faux serment, à manquer à la foi jurée. On voit dans tous nos romans combien le nom de féodalité, de gouvernement féodal, était justement choisi. Tous les devoirs avaient pour base la foi promise, l’hommage librement rendu. Rien de plus sacré que cet engagement, rien ne pouvait excuser l’homme qui ne le respectait pas. Si vous promettiez, il fallait tenir ; fût-ce à la ruine de votre famille ou de votre pays. Nous n’avons plus guère de ces rigoureuses exigences, si ce n’est peut-être pour ce qui tient aux gageures et aux dettes de jeu.
P. 110. La nature de la clameur « qu’elle avait levée ». Lever, élever une clameur, c’était porter une accusation, ou réclamer contre une mesure, un décret du souverain. Telle était chez les Normands la Clameur de haro.
P. 112. Il fondait en larmes. On a dû remarquer avec quelle facilité les héros de nos chansons de geste et de nos romans fondent en larmes et se pâment de douleur. Nous sommes aujourd’hui plus durs et plus difficiles à émouvoir que ne l’étaient Charlemagne, Artus et Lancelot. Sans doute, les poëtes et les romanciers ont trop multiplié ces témoignages involontaires d’attendrissement ; mais il faut bien qu’on ne les trouvât pas, de leur temps, aussi exagérés qu’ils nous le paraissent aujourd’hui.
P. 128. Une manche de « samit » jaune. Le samit était, je crois, une espèce de taffetas. Le mot vient du grec ἑξαμίτον, ou peut-être de l’île de Samos d’où l’on tirait la plus belle soie.
P. 132. La fête de Noël, que le roi Artus a choisie pour tenir « cour plenière ». Le texte dit : cour enforcée, ce qui n’est pas exactement ce qu’on a plus tard entendu par Cour plénière.
P. 133. Seigneurs, vous êtes « mes hommes ». C’est-à-dire j’ai reçu votre hommage ; vous me devez conseil et service.
P. 135. Un « bailli » convoiteus met tout à destruction. Bailli est ici le régent, celui qui gouverne en l’absence ou pendant la minorité du seigneur naturel. De bajulus, bâton, on a fait bailli, celui qui tient le sceptre, le bâton. Le bail et la baillie sont le gouvernement, le pouvoir. À la page 310, bail est pris dans un autre sens.
P. 137. On apporta les « Saints. » Les reliques de saints sur lesquels on jurait. Il faut remarquer que dans ce temps-là le serment (sacramentum) se prêtait soit en adjurant Dieu représenté par une église, soit en posant la main sur l’évangile ou de saintes reliques qu’on faisait venir de l’église ou qu’on y allait chercher. On les invoquait comme garants de l’engagement pris ou de la vérité des déclarations. Mentir au serment ainsi prêté, c’était se dévouer à la vengeance céleste ; c’était renier Dieu et les saints.
P. 138. L’Apostole. C’est le synonyme ordinaire du mot pape. On a dit aussi la pape. Nous conservons encore le Siége apostolique.
P. 141. Il avait la barbe et les cheveux roux. Cette prévention contre les gens à cheveux roux accuse assez bien un gallo-breton. Les hommes de cette race étaient généralement bruns, comme nos Bretons du continent. Ils tenaient pour ennemis mortels les conquérants Anglo-Saxons, généralement roux. Il est vrai que, parmi les compagnons de Guillaume le conquérant, il devait se trouver autant de cheveux roux que de cheveux noirs ; mais Henri II, le protecteur de notre auteur, était, au moins par son père, Angevin.
P. 143. Un « behourdis » à armes courtoises fut disposé dans la prairie. Le behourdis était un exercice militaire comme les tournois et, plus tard, les Tables rondes. Il n’était pas interdit aux écuyers ni aux simples valets. Le plus souvent il s’agissait de franchir à cheval, et tout en combattant, des obstacles plus ou moins dangereux.
P. 144. Le « glaive » de Meleagan se brisa. Par glaive, il faut toujours entendre ici la lance ou l’épieu, non l’épée. De l’ancienne forme est venu glavelot, javelot (gladium, gladiolum). La hante (hasta) était le bois du glaive.
P. 144. Et tomba sous les pieds de son « destrier. » L’écuyer d’un chevalier prêt à combattre conduisait, à la dextre du cheval qui portait son maître, le cheval de bataille que le maître ne montait qu’après s’être fait complétement armer. De là le nom de destrier (dexterarius) donné au cheval de guerre.
P. 146. Des « mires » lui recommandent un repos absolu. Mire représente le latin medicus, et ne vient pas de l’arabe. On a dit mie, mege, et enfin mire.
P. 179. Prononcer le honteux mot de recréance. Avouer qu’on avait soutenu une mauvaise cause, et qu’on était outré, vaincu. On appelle encore aujourd’hui un cheval recru, celui qui est las, harassé, et ne peut avancer d’un pas.
P. 179. Si m’aist Dieu, adjuration sacramentelle : Ainsi Dieu me soit en aide ! (Sic me Deus adjuvet.)
P. 187. Allons ensemble le « mettre à raison », c’est-à-dire lui parler, le faire parler. Aujourd’hui, dans un sens presque analogue, arraisonner. Dans le livre curieux de Gautier Map De Nugis curialium, ce gallicisme est traduit mot à mot : « Dicunt Herlam regem… positum ad rationem ab altero rege… » (Dictinctio I, chap. xi.)
P. 193. La poursuite les occupa jusqu’à Nones. Le jour était encore distribué en quatre parties, de trois en trois heures. Prime commençait au lever du soleil, c’est-à-dire de six à neuf heures du matin. Tierce, de neuf heures à midi. Sexte, de midi à trois heures, et None, de trois à six heures. La nuit était également divisée en quatre parties : vêpres, nocturne, vigile et matines ; ou simplement première, deuxième, troisième et quatrième veilles de la nuit. — Il faut corriger la note de la page 251, où l’on a compté tierce de six à neuf heures.
P. 194. Sans perdre de temps, il revêt les armes du Seigneur-Dieu, c’est-à-dire les vêtements sacerdotaux. On comptait trois sortes de chevaliers : les chevaliers proprement dits, les chevaliers-ès-lois, les chevaliers clercs. À ces trois grades était acquis le titre honorifique de messires (mon seigneur, au cas régime). Les Présidents de cour souveraine et les évêques avaient le rang de chevaliers et c’est en vertu de cette ancienne hiérarchie que l’évêque est encore aujourd’hui qualifié Monseigneur. Mais, pour être conséquent, il eût fallu maintenir le monseigneur à nos présidents de justice et à ceux qu’on nomme aujourd’hui officiers supérieurs, ces chevaliers du moyen âge.
P. 206. L’usage d’Artus était de ne pas monter à cheval durant « la semaine peineuse ». La semaine sainte. On a vu plus haut qu’on se faisait généralement un scrupule de chevaucher le samedi, jour consacré à la vierge.
P. 208. Le roi le relève et le « baise sur la bouche ». Le baiser sur la bouche était le plus grand témoignage d’union, de paix et de réconciliation. Aussi un chrétien se serait-il gardé de jamais l’accepter d’un Sarrasin : il eût aussi bien renié sa foi. Voyez plus loin, page 306.
P. 218. Une pucelle, la plus belle qu’on puisse voir de pauvre lignage. Nous dirions aujourd’hui la plus belle fille de village ou de campagne ; ce qui rappelle le vers de Gresset :

Elle a d’assez beaux yeux, pour des yeux de province.

P. 219. Je vous le dirai « si je n’ai garde », c’est-à-dire si je n’ai pas à me garder, si je n’ai rien à craindre de vous. Le mot garde a précisément le sens de caution.
P. 230, note. L’histoire d’Ascalon est racontée dans la partie inédite du livre d’Artus ; mais c’est, je crois, d’après notre roman. Je suis aujourd’hui moins disposé à croire à cette antériorité du Lancelot. L’Artus inédit, bien distinct du texte que j’ai reproduit à la suite du Merlin, pourrait bien être une première ébauche bientôt abandonnée et qui aurait donné l’envie de mieux faire à l’auteur du Lancelot.
P. 241. La messe chantée par un « prouvaire ». Prouvaire est l’ancienne forme française du latin præsbiter mais la forme prêtre est aussi ancienne. Nous avons (ou nous avions) à Paris la rue des Prouvaires. Nos municipaux n’ont-ils pas trouvé à ce nom de rue le grand tort d’être ancien ?
P. 241. Des jeux d’échecs et de « tables ». Les jeux de tables étaient en général ceux que l’on jouait sur un tablier ou une sorte d’échiquier. En particulier, je crois qu’il désignait notre jeu de trictrac.
P. 244. Il est mort « s’il ne fiance prison ». C’est l’expression textuelle : s’il ne se rend prisonnier.
P. 257. On le replaça sur la litière « chevaleresque ». La litière placée en travers sur le dos de deux chevaux ; à la distinction de la litière portée à bras d’hommes, et qu’on appelait aussi bière.
P. 294. Aiglin des Vaux. Ce neveu de Keu d’Estrans est nommé « Kaeddin li biaus » dans le ms. 752, fo 89.
P. 300. Il était petit, et les deux figures étaient taillées sur une pierre noire.
Le manuscrit 752 ajoute un détail nouveau : « Si estoit li aniaus petit à une pierre plate bise, qui estoit de si grant force que ele descovroit les enchantemens vers celui qui la portoit, si tost com il l’avoit esgardée » (fo 91.). Mais le romancier confond ici l’anneau donné par la Dame du lac avec l’anneau de la Reine. C’est déjà beaucoup que Lancelot n’ait pas regardé le premier talisman, dès qu’il s’était vu au pouvoir de Morgain.
P. 301. Çà et là glisse des pensées d’amour. «  Si li trait avant de beles paroles, et rit et gabe et jue o lui, en chevauchant. De toutes les choses le semont de quoi ele le cuide eschaufer. Si se deslie sovent devant lui por mostrer son chief qui de très grant biauté estoit, et chantoit lais bretons et autres notes plaisans et envoisiés. Ele avoit la vois haute et clere, et si avoit la langue bien parlant et breton et françois et meins autres langages » (ms. 752, fo 92). J’ai rendu cette scène, le plus exactement que j’ai pu, d’après les plus nombreuses leçons, sans rien ajouter ni supprimer. Ce manuscrit 752 offre pourtant quelques détails de plus qu’il peut être intéressant de reproduire :
« Et quant ele voit un leu bel et plaisant, si le mostre et dit : « Veez ci biau leu, sire chevaliers ; dont ne seroit-il bien honiz qui cest leu trespaseroit avec bele dame ou bele damoisele sans faire plus ? » Mès sa parole a perdue, car Lancelot n’a talent ne volenté de nule chose qu’ele li die. Ainçois li anuie tant qu’il ne la puet regarder. Et quant ele tant l’anuie, si ne se puet-il plus taire, si li dit : « Damoisele, dites-vous acertes ce que vous dites ? » Ele respont que voirement le dit ele. — Se Deus me consant fet-il, je n’avoie pas apris que damoisele parlast en tel manière, ne qui eust si honte perdue. — Avoi ! sire chevalier, fet ele, il avient bien à un chevalier que, se il est boens et loiaus et sages, qu’il prie bele damoisele ou bele dame d’amors puis qu’il sont soul à soul ; et se li chevaliers ne la prie, parce qu’il la crieme ou parce qu’il est en autre pensée, la dame ou la damoisele le doit prier et semondre de quanqu’elle desirrera ; et s’il s’en escondist, dont sai-je bien qu’il est honis sur terre et doit avoir toutes leis perdues en totes corz. Et por ce que vous ieste beaus chevaliers et je bele damoiselle, por ce vos requier et pri que vos gesiez à moi. Et vez-ci beau leu et cointe et bien aesié. Et se vos ne le faites, je ne vos sivrai en avant, ne jamais ne vos troverai en cort que je ne vos apel de recréandise. »
…« Quant ils ont chevauchié une grant pièce au rai de la lune, si choisissent et voient devant aus un paveilon mult bel et mult riche. Si aperçoit Lanceloz que ce est li paveilons où Morgains soloit gésir au Val des faus amans, lor et au tens qu’il chasoit le chevalier qui se feri desous le lit… Lors esgarde Lanceloz et vit un des plus riches lis qu’il eust onques veus et des plus biaus. Car il n’estoit nu le grans richesce de courtepointe ne de dras ne de covertor qui n’i fust, et par desuz le chevez en haut si avoit deus oreilliers moult riches por le lit parer, dont les coites estoient d’un samit trop richement broudé ; et en la broudeure avoit de maintes riches pierres asises, plaines de vertuz ; et à chascun des cors des oreilliers avoit un grant boton d’or tout plain de basme qui rendoit si grant odor que nule mieudre ne puet estre. Et par desoz ces deus en avoit deus autres, et cil estoient fet por gesir sus…
Or Lanceloz s’est couchiez par le comandement à la damoisele, et semble bien que il ait garde, au semblant que il fait ; quar il n’oste ne braies ne chemise, ançois gist come huem qui a besoing. Quand la damoisele ot fet couchier touz les valez ès loges dont entour le paveilon avoit assez, si revient arère là où Lanceloz gisoit. Et l’en voit léans mult cler, car devant le lit avoit deus grans cirges qui ardoient. La damoisele prent les cirges, si les oste de soz un coffre où il estoient, si les esloigne et met en bas, si que la clarté ne parviengne à la couche où Lanceloz gist. Cil esgarde quanqu’ele fait, come cil qui entent plus à penser que à dormir. Si voit qu’ele a tote sa robe ostée fors sa chamise, puis vient à Lancelot, si lieve les dras de son lit et se lance lez lui, et giete les bras por lui acolier, et le vost beisier ; mes il n’a cure, si se defent moult durement, si qu’il li vole hors des bras et se lance hors dou lit, et ele est après lui saillie. Et quant il la vit hors del lit, si a trop grant honte et li dit : « Avoi ! damoisele, m’aist Deus ! bien avez honte perdue. Car onques mes n’oï parler de dame ne de demoisele qui vousist chevalier prendre à force. — Ha ! fit-ele, mauvez recréant ! dahés avez-vos ! car onques chevaliers ne fustes, et honie soit l’eure que vos vosvantastes de monseignor Gauvain rescoure, quant vostre lit avez guerpi por une damoisele sole ! si ne sui pas moins bele de voz ne meins valanz ; car au meins ne sui-je pas desloiaus com vos estes. — Damoisele, fet-il, vous dirois ce que vos plaira ; mes il ne se leva hui si buens chevaliers, se il m’apeloit de desloiauté, vers qui je ne me défendisse — Certes, fit-ele, or i parra coment vous en défendrez, car jel mostrerai encontre vos. » Lors se lance à lui, si le cuide prendre par le col, mais ele faut, et la main s’en vient par la chavesaille de la chamise, si la fent jusqu’à la pointe. Quant il voit ce, si a trop grant honte. Lors la seisist par les deux bras, si la met arière au plus belement que il puet, et dit qu’ele ne s’en relevera devant qu’ele li ait fiancé qu’ele ne couchera en lit où il gise, ne ne li querra chose qui encontre son cuer soit. — « Jel fiancerai, fet-ele, se vos volez fere une chose que je vos requerrai. — Dites, fet-il, car je le ferai teus puet-ele estre. — Ne vos en dirai rien se en l’oreille non ; car je ne sai qui nous escoute, et se vos m’en escondisiez et il fust oï, tant seroit por vous la honte greindre. » Lors s’abesse Lanceloz et met la destre oreille en sa boche. Et ele comence à sospirier, si dist moult belement : « Ha Deus ! coment le dirai-je ? » Lors s’estent si durement que Lancelot cuida bien que ele fust pasmée. Lors l’a regardée et, el regarder que il fist, ele giete la boche, si li beise. Et il en est si angoissous que par un poi que il n’enrage. Atant l’a laissiée, si comence à crachier de despit de ce qu’ele l’avoit beisié. Et ele le recort sore ; et quand il voit qu’il ne porra à lui durer, si cort à s’espée qui à l’atache dou paveillon estoit pendue, si la sache hors del fuere, et jure que il en ferra, se ele touche plus à lui. Ele set bien que il n’en fera riens, etc. (fo 92.)
P. 335, note. La preuve n’est pas décisive. Les Cisterciens, par exemple, confiaient tous les travaux de leurs terres à des frères convers ou néophites rendus. Ces bouviers rencontrés par Galehaut pouvaient donc être de ces rendus. Plus loin, on voit Lionel à l’entrée d’un enclos religieux, aborder « un des frères, qui labourait. »
P. 244. Le texte du ms. 752 raconte encore avec d’autres développements le songe et le départ de Lancelot :
Si li a mis poisons en son boivre qui estoient confites à conjuremenz et à charraiz ; si li troblerent la cervele, tant que, la nuit, li fu avis en son dormant que il veilloit et que il trovoit sa dame la roine gisant avec un chevalier si de près que il le li faisoit ; et il corroit à s’espée, si le voloit ocire, quant la roine sailloit sus et disoit : « Lanceloz, que volez vos à cest chevalier ? Ne soiez-vos jà si hardis que vos i metois la main ; car je sui soe ; ne jamais, si chier com vos avez vostre cors, n’entrez en leu où je soie, car je le vous deffent mult bien. » Ensi le fit Morgue songier, et por ce qu’il tensist sa vision au matin plus veraie, le fist porter hors de la chambre à mienuit, et metre en une litière, autresi com ele avoit fait ou Val sans retor, tout endormi, en une des plus belles landes del monde, bien trois lieues loing d’ilecques ; et ele meismes i ala, s’el fist à ses gens gueitier de près. Au matin fu avis Lanceloz qu’il estoit en un des plus biaus paveillons del monde, et véist devant lui une autretel couche com estoit cele où il avoit véu gesir la roine et le chevalier, et que encore tenoit l’espée dont il le voloit ocirre. Ne sous ciel n’a home qui croire li féist que il n’eust veu à ses iaus ce que il avoit songié. — Quant il vit les gens Morgain, si fu mult honteus, et ele meismes vint avant à guise de fame mult irée, si li dist : « Coment Lanceloz, i estes-vous si desloiaus que vous en i estes fuis sans mon congié ? » Et quant il entent, si cuide bien qu’ele l’ait ateint de desloiauté, si en a tel duel que par un poi qu’il ne forcene. Si prent l’espée qu’il cuide tenir, si la se viaut boter parmi le cors, quant Morgue li cort andeus ses mains tenir, si le chastie et dist que maintes gens trespassent lor loiautéz qui puis vivent loiaument totes lor vies. « Dame, fait-il, je ne porroie mie longuement durer en tel manière, et mieus me vendroit tot le monde guerpir et foïr, que à morir. Et vos me devisâstes er soir que je m’en iroie se vous juroie que je n’enterroie, etc. »
P. 350. C’est ainsi que finit Galehaut.
Dans plusieurs anciens manuscrits, cette partie du roman de Lancelot est appelée Le livre de Galehaut, ou Le prince Galehaut. À ce titre faisait allusion Dante Alighieri, dans les vers si souvent cités :

Noi leggevamo un giorno per diletto
Di Lancilotto, come amor lo strinse…
Galeotto fa il libro e chi Io serisse…

On sait que Bocace avait choisi pour second titre de son Decaméron celui de Il principe Galeotto, tant ce personnage avait acquis une célébrité générale.
Galehaut semble pourtant un hors-d’oeuvre dans l’ensemble de notre roman. L’auteur, après avoir promis de lui monts et merveilles, ne lui a confié qu’un rôle secondaire. Il est vrai qu’il devient l’utile intermédiaire des premières relations de Genièvre avec Lancelot, et qu’il donne un asile à la reine répudiée. Mais son excessive amitié pour Lancelot ; ses projets insensés de conquête, abandonnés au moment où la défaite du grand roi Artus allait lui permettre de les réaliser ; ses songes que douze astrologues viennent interpréter, tout cela forme je ne sais quelle fausse note qui affaiblit l’intérêt de l’action principale. Le romancier eût mieux fait de confier le soin de protéger la reine exilée au bon roi Baudemagus ; en rapportant au temps du séjour de Genièvre à la cour de ce prince la passion de l’orgueilleux Méléagan pour la reine, passion dont le livre suivant va nous entretenir. Il est vrai que dans un des premiers, sinon dans le premier des romans français, on ne pouvait guère espérer de trouver l’observation de toutes les règles du genre : c’est déjà avec une certaine surprise qu’on y reconnaît tant de précieuses qualités dont les romanciers postérieurs ont fait leur profit.
Ainsi l’Amadis espagnol, composé dans le cours du quatorzième siècle, dut à cette première partie trop oubliée du Lancelot, tout ce qu’on y loua le plus, tout ce qu’on en retint le mieux. Si le roi Périon demande à ses astrologues l’explication de ses songes, c’est parce que Galehaut avait fait les mêmes rêves et demande les mêmes explications aux astrologues d’Artus. Le damoisel de la mer reçoit chez Gandale l’éducation du « Beau valet » chez la Dame du lac. L’intervention répétée de demoiselles errantes, les landes, les forêts, les châteaux, les fontaines de l’Amadis, tout cela est emprunté au Lancelot. Urgande la desconnue, protectrice d’Amadis, est la Dame du lac protectrice de Lancelot. Ces deux fées sont amoureuses et ne disent pas celui qu’elles aiment. Languines, roi d’Écosse, arme chevalier le Damoisel de la mer, sans demander qui il est ni comment il se nomme, parce que le roi Artus en avait agi de même avec le Beau valet. Le premier entretien du Damoisel avec Oriane est librement traduit de celui de Lancelot avec Genièvre. L’aventure de Galaor avec la belle Aldene, est l’aventure de Gauvain avec la fille du roi de Norgales. Amadis rêvasse quand il voit Oriane, comme Lancelot quand il voit Genièvre ; et dans cette contemplation ils oublient également de parer les coups de leurs adversaires. Comment ne pas reconnaître Mabile et la demoiselle de Danemarc du roman espagnol dans la Saraïde et la dame de Malehaut du roman français ? L’arc des loiaus amans de l’Amadis n’est-il pas notre Val des faux amants ? Mais pourquoi tous ces rapprochements  ? Il faudrait pour ainsi dire rappeler à chaque page des quatre premiers volumes de l’Amadis une page correspondante des romans de la Table ronde, et surtout de notre Lancelot. Qu’il nous suffise de dire que pour avoir été si fidèle imitateur de nos romans, l’Amadis a justement été regardé comme le chef-d’œuvre de l’ancienne littérature espagnole.



  1. Et non de Bello loco, comme a cru devoir corriger M. Th. Wright, d’après le sermon en vers français publié par M. Jubinal sous ce dernier nom.
  2. Je ponctue autrement que l’éditeur du de Nugis, et je crois entendre ici que Map semble souhaiter de ne pas se laisser entraîner par une imagination vagabonde à écrire en français, à l’exemple de Guichart. Mais j’avoue que cette interprétation est fort douteuse.