Les Règles de l’éducation des enfants/Dédicace
A SON ALTESSE EMINENTISSIME
MONSEIGNEUR LE CARDINAL LANTGRAVE DE FURSTEMBERG,
Evesque & Prince de Strasbourg.
MONSEIGNEUR,
Dans l’engagement où je me suis trouvé de donner au Public les Regles de l’Education des Enfans, j’ay esté porté par tant de considerations à les presenter à V. A. E. qu’il ne m’a pas esté libre de balancer, ou de deliberer le moins du monde.
Ce sont les Regles, MONSEIGNEUR, que je m’estois proposé de suivre dans la conduite de Messieurs vos Neveux, dés que V. A. E. me fit l’honneur de m’en confier le soin.
Comme je les ay puisées dans les plus vives sources des Saintes Ecritures & des Peres de l’Eglise ; j’ay lieu de croire, MONSEIGNEUR, qu’elles seront bien reçûës du Public quand on les verra autorisées par une personne d’un goût aussi exquis, & d’un discernement aussi juste pour toutes choses, qu’est celuy de V. A. Ε.
L’experience vous a appris il y a long temps, MONSEIGNEUR, que les meilleures raisons ne sont souvent aucune impression sur l’esprit des personnes âgées, qui ont sucé l’erreur avec le lait, & qui y ont esté confirmées par les mauvais exemples qu’elles ont toujours eus devant les yeux. Et V. A. E. est tres-persuadée que c’est à la bonne éducation des Enfans qu’il faut principalement s’attacher ; en leur inspirant dés leurs plus tendres années, une solide piété envers Dieu, & une respectueuse soûmission envers leur Souverain.
C’est dans ces sentimens, MONSEIGNEUR, qu’on voit V. A. E. travailler avec tant de fruit dans son Diocese ; & particulierement dans la ville de Strasbourg, que l’avantage de sa situation, la multitude de ses habitans, leurs grandes richesses avoient renduë comme le rempart des Heretiques.
Ils y avoient, MONSEIGNEUR renversé tous les Autels ; & V. A. E. les releve. Ils en avoient abbattu, ou pillé les Eglises ; & V. A. E. les fait rebastir, ou y fait faire des embellissemens qui seront des marques éternelles de sa piété, aussi bien que de sa magnificence. Ils y avoient aboli par-tout le culte divin ; & V. A. E. le rétablit. Enfin, MONSEIGNEUR, ils en avoient chassé tous les Pasteurs, & dispersé entierement le troupeau du Seigneur ; & V. A. E. le rassemble, & met son principal soin à former des Ecclesiastiques, qui puissent éclairer les Fideles par les lumieres de leur science, & les édifier par la puretéde leurs mœurs. Ce sont ces considerations, MONSEIGNEUR, qui jointes à l’éclat de vostre illustre naissance, & aux services importans que V. A. E. a rendus depuis 30. ans à l’Estat & à l’Eglise, ont contribué à vous faire proposer à Sa Sainteté par nostre Invincible Monarque, pour remplir une des plus éminentes places de l’Eglise.
Ce sont aussi les mesmes considerations, MONSEIGNEUR, qui ont porté l’un des plus dignes Pontifes qui ait occupé le Saint Siege depuis long-temps, à accorder à Sa Majesté avec tant de joye une demande si juste & si avantageuse.
En effet, MONSEIGNEUR, que ne doit point attendre Sa Sainteté des lumieres & de l’experience consommée de V. A. E. aprés l’avoir vû travailler avec tant de bonheur & de succés à la conclusion de la derniere Paix, & au repos de toute l’Europe ? N’a-t elle pas sujet d’esperer que V. A. E continuëra de s’employer avec le mesme zele & avec la mesme ardeur au rétablissement de la veritable Religion, & à faire triompher par-tout la verité, & regner JESUS-CHRIST ?
Je m’estimerois heureux, MONSEIGNEUR, si ce petit Ouvrage, que je me donne l’honneur de presenter à V. A. E. pouvoit estre aussi utile au Public, que je le souhaite. Au moins ay-je lieu de me réjoüir qu’il m’ait fait naistre une si favorable occasion de vous donner cette marque publique de ma reconnoissance, & du profond respect avec lequel je suis, & je feray gloire d’estre toute ma vie,
MONSEIGNEUR,
De V.A.S.
Le tres-humble & tres-obeïssant serviteur Coustel.