Hetzel et Cie, bibliothèque d’éducation et de récréation (p. 139-151).


IX



Ils laissèrent passer respectueusement
l’héroïque femme










CHAPITRE IX



DES AMIS DANS LE BESOIN – SUR LE CANAL


Pendant ce temps les autres jeunes gens écoutaient le récit que leur faisait Peter. Bien des années auparavant, non loin de la cité s’élevait un vieux château dont l’orgueilleux seigneur s’était arrangé de façon à être si mal avec les bourgeois de la ville, qu’ils l’assiégèrent un jour dans ses vieilles tours et le forcèrent à capituler. La châtelaine, au moment où son mari allait se rendre et sans conditions, puisque les vainqueurs irrités n’en voulaient accorder aucune, s’avança sur les remparts et demanda aux assiégeants qu’on lui permît du moins de se retirer avec ce qu’elle pourrait emporter sur son dos.

Considérant qu’ils n’avaient pas contre la femme, qui s’était toujours montrée humaine et charitable, les mêmes griefs que ceux qu’ils avaient contre son mari, ce qu’elle demandait lui fut accordé.

À leur grand étonnement, ils virent alors la dame descendre le grand escalier portant son mari sur ses épaules. Ce beau trait les toucha. Fidèles à leur promesse, ils laissèrent passer respectueusement l’héroïque femme avec son fardeau qu’elle put déposer sain et sauf au delà du territoire de la ville qui, heureusement pour elle, n’était pas fort étendu.

« Est-ce que vous croyez à cette histoire-là, Peter ? demanda Karl d’un ton incrédule.

— Certainement que j’y crois. Est-ce parce qu’elle fait honneur à une Hollandaise que vous refuseriez d’y croire ?

— Non certes, répondit Karl troublé de s’être attiré cette réplique, mais c’est parce qu’il n’existe pas de femme qui puisse accomplir une chose pareille. »

Le gros Jacob Poot qui, en dépit de sa nature endormie, était sentimental, avait écouté l’anecdote avec un profond intérêt.

« C’est un beau trait, dit-il, et j’y crois absolument. Quant à moi, je n’épouserai jamais qu’une femme qui serait disposée à en faire autant pour moi.

— Dieu lui vienne en aide ! s’écria Karl en se retournant pour le considérer. Comment, Poot, mais trois hommes ne vous porteraient pas !

— Peut-être bien, repartit tranquillement le brave Poot. Ce serait sans doute exiger beaucoup de la future madame Poot. Cependant je désirerais qu’elle fût tout au moins disposée à le tenter.

— Celle qui l’essayerait mériterait déjà une mention honorable, dit Peter en riant. Et d’ailleurs, mon cher Poot, le proverbe aurait peut-être cette fois encore raison : « À cœur fort, poids léger. »

— Peter, demanda Ludwig en changeant de sujet, ne m’avez-vous pas dit hier au soir que le peintre Wouvermans était né à Haarlem ?

— Mais oui, et Ruysdaël aussi, et aussi Berghem. »

La course avait repris de plus belle.

Au moment où les pieds de Ben faisaient machinalement assaut de vitesse avec ceux de ses compagnons, sa tête s’embarquait, une fois encore, pour Londres. Si nous voulons faire la traversée avec elle, nous pourrons, sans sortir de notre sujet, constater un effet curieux de cette sympathie qui délie les distances et peut rapprocher par la pensée, au même instant, les êtres les plus séparés. Au moment même où Ben songeait à son petit frère et à sa sœur, les deux enfants pensaient à lui. Il faut dire que depuis qu’ils le savaient en Hollande, la Hollande était devenue l’objet favori de la préoccupation des deux aimables enfants et le sujet préféré de leurs études.

Robby et Jenny assis devant leur table en face de leur précepteur dans leur jolie salle de travail, prenaient leur leçon de lecture.

« Nous en étions, maître Robby, à la page deux cent quarante-deux. Faites attention aux points et même aux virgules, monsieur ; il ne suffit pas de lire, il faut montrer par la façon dont on lit que l’on comprend ce qu’on lit, pour être compris à son tour par ceux qui vous écoutent. Sur ce : commencez, maître Robby. »

Et Robby, de sa voix claire et enfantine, montée au diapason écolier le plus élevé, commença ainsi :

« Leçon 62. – Le petit héros de Haarlem. »

« Il y a bien des années, vivait à Haarlem un petit garçon aux cheveux d’or, du meilleur naturel. Son père était éclusier, c’est-à-dire qu’il était chargé d’ouvrir et de fermer les écluses placées à intervalles égaux à l’entrée des canaux, pour régler la quantité d’eau qu’on doit y laisser pénétrer. Les petits enfants eux-mêmes savent en Hollande que ce n’est qu’à force de surveillance, de soins constants et d’exactitude qu’on empêche l’Océan et les rivières d’accabler le pays, et qu’un seul instant de négligence de la part de l’éclusier, dans l’accomplissement de son devoir, peut causer la ruine et la mort de tous. »

« Très-bien, dit le professeur. À votre tour, Jenny. »

« Par une admirable après-midi d’automne, dit la petite fille d’une voix un peu plus posée que celle de son frère, alors que le petit garçon dont nous parlons n’avait encore que huit ans, il obtint de ses parents la permission d’aller porter des provisions à un pauvre aveugle qui demeurait à la campagne, au delà des digues. L’enfant partit, le cœur joyeux. Il resta une heure avec son vieil ami reconnaissant et reprit le chemin de sa demeure.

« Tout en trottant le long du canal, il remarquait combien les pluies d’automne avaient gonflé les eaux. Mais la solidité des écluses confiées à la garde de son père le rassurait, et l’étonnement que lui causait la prompte élévation du canal n’interrompait ni sa course, ni la chanson enfantine qu’il fredonnait tout en marchant.

« Cependant, se disait-il tout en continuant et sa chanson et son inspection, que deviendraient le père et la mère ? et aussi la verdure des prés et les moissons des champs, si les écluses venaient à céder ? »

« C’était à faire frémir, car c’est terrible la colère des eaux.

« Oui, mais papa est le plus fort, et c’est bien ce qui fâche les eaux ! Si elles se mettent en colère, c’est précisément parce qu’il les empêche de passer. »

« Chemin faisant et sans être tout à fait absorbé par ces idées, l’enfant se baissait pour cueillir les jolies fleurs bleues qui égayaient le bord de la route. Il comptait bien amasser un bouquet pour sa mère. Parfois il s’arrêtait aussi sur la rive du canal pour jeter en l’air quelques feuilles arrachées à un arbuste ; la brise s’en emparait, les élevait très-haut ; à les voir voler on eût dit des feuilles ailées. Ou bien, il suspendait brusquement sa marche ; c’est qu’il avait cru entendre le bruit d’un lapin se faufilant à travers les herbes. Ils sont peureux les lapins, ils fuyaient devant lui. Le plus souvent il souriait en se rappelant l’expression qui avait éclairé le visage de son vieil ami l’aveugle, quand il lui avait fait son petit cadeau :

« Il a été bien content de trouver mon gâteau à côté du pain de maman, » pensait-il.

« Tout à coup, l’expression de la figure de l’enfant changea :

« Il jeta autour de lui des regards effrayés. Il n’avait pas remarqué que le soleil se couchait, et il s’apercevait maintenant que les grandes ombres ne s’allongeaient plus sur le gazon. Il commençait à faire noir ; il se trouvait encore assez loin de la maison et dans un ravin solitaire où les fleurs bleues elles-mêmes paraissaient toutes grises. Il pressa le pas et son cœur battit au souvenir d’aventures d’enfants attardés dans des forêts affreuses. Au moment où, prenant son courage à deux mains, il allait se mettre à courir, il tressaillit. D’où pouvait provenir ce bruit d’eau tombant goutte à goutte ? Ouvrant tout grands ses bons yeux, il chercha dans toute l’étendue de la digue et aperçut dans une des planches épaisses qui la composaient un petit trou d’où s’échappait un mince filet d’eau. N’importe quel enfant en Hollande frissonne à l’idée d’une fissure dans les digues. Le fils de l’éclusier comprit immédiatement le danger. Si l’on permettait à l’eau de filtrer à travers ce trou insignifiant, elle ne tarderait pas à l’agrandir et causerait une terrible inondation.

« Prompt comme l’éclair, il comprit ce qu’il avait à faire. Jetant ses fleurs, il grimpa sur les hauteurs, se mit à cheval sur l’écluse, atteignit le trou et y fourra son doigt mignon avant même de s’être rendu compte de son action. Son doigt suffit à l’œuvre. L’écoulement s’arrêta.

« Ah ! pensa-t-il avec un éclat de rire exprimant sa joie enfantine, que les eaux se fâchent si elles veulent, mais elles resteront de l’autre côté. Haarlem ne sera pas inondé tant que je serai là ! »

« Cela alla assez bien d’abord, mais la nuit venait rapidement, l’air s’emplissait de vapeurs glaciales. Notre petit héros commença à trembler de froid et de peur. Il appela bien haut ; il cria : « Accourez vite ! accourez vite ! » Mais personne ne vint. Le froid redoubla d’intensité ; un engourdissement partant du mignon petit doigt et s’étendant à la main et au bras l’envahit bientôt en entier et il souffrit dans tout son corps. Il appela de nouveau : « Personne ne viendra-t-il ? Père ! venez, venez ! Je n’en puis plus ! » Il appela sa mère aussi : « Mère ! mère ! » Hélas ! sa mère, en bonne Hollandaise pratique, avait déjà fermé toutes les portes, bien décidée à gronder son fils sérieusement le lendemain pour le punir d’avoir passé la nuit avec Jansen, l’aveugle, sans permission. Il essaya de siffler ; qui sait si quelque écolier errant n’entendrait pas le signal ; mais ses dents claquaient tellement qu’il ne put en venir à bout.

« Alors il pria Dieu de venir à son secours, et la réponse lui arriva sous forme de résolution :

« Je resterai là jusqu’à demain matin, » se dit-il.

« Maintenant à vous, Robby, » dit le professeur.

Les yeux de Robby brillaient sous les larmes, mais il fit un effort et commença d’une voix un peu troublée par l’émotion :

« La lune de minuit put voir la silhouette solitaire de l’enfant, non plus à cheval sur la crête de la digue comme au début de sa faction, mais couché sur cette crête, le bras étendu, immobile, le doigt toujours dans le trou. Le petit martyr avait la tête baissée, mais il ne dormait pas, car, de temps en temps, sa main gauche frottait fiévreusement son bras droit rivé à la digue, et parfois aussi le visage de Robert, c’était le nom de l’innocent, se retournant vivement à quelque bruit réel ou imaginaire, apparaissait pâle et couvert de larmes à l’astre des nuits.

« Qui saura jamais les douleurs de cette longue et cruelle veillée ! Qui pourra dire les alternatives de courage et de défaillances de ce petit cœur intrépide, quand durant cette nuit terrible, il songeait à son bon lit qui l’attendait à la maison, à son père, à sa mère, à ses sœurs et à ses frères endormis. S’il retirait son doigt de ce trou, les eaux rendues plus furieuses par sa longue résistance, – il le pensait ainsi, – se précipiteraient soudain et ne s’arrêteraient que lorsqu’elles auraient balayé la ville entière. Oh oui ! il resterait là jusqu’au jour – s’il n’était pas mort avant ! – Certes, il n’était pas assuré de vivre jusque là. Que signifiait cet étrange bourdonnement dans ses oreilles ? Et puis ces douleurs aiguës qui semblaient le traverser des pieds à la tête ? Son doigt aussi avait enflé. Est-ce qu’il pourrait le retirer quand même il le voudrait ?

« Cependant il demeurait pour le salut de tous.

« Au point du jour, un bon prêtre qui revenait de passer la nuit au chevet du lit de l’une de ses ouailles malades, crut entendre dans le silence du matin et tandis qu’il marchait sur la partie supérieure de la digue, de sourds et faibles gémissements. Se penchant en avant, il vit l’enfant qui paraissait se tordre dans la douleur.

« Au nom du ciel, mon enfant, lui cria-t-il, que faites-vous donc là ?

— Ah, Monsieur le curé ! j’empêche les eaux de passer, répondit le petit héros, et j’y ai bien du mal. Dites à quelqu’un, s’il vous plaît, de venir m’aider. Je n’en puis plus. »

« Le bon curé commença par y aller lui-même, et, comme c’était le plus pressé, il mit son doigt, son petit doigt à la place de celui de l’enfant.

« Ah ! dit le pauvre petit, en secouant sa main endolorie, je suis content !… »

Et il s’évanouit.

« Heureusement il restait une main encore au bon prêtre, et il s’en servit pour tremper dans l’eau son mouchoir et l’appliqua sous le nez, sur les tempes et derrière les oreilles de l’enfant qui rouvrit bientôt les yeux.

« Là, mon garçon, lui dit son sauveur, fais encore un effort, va bien vite à la maison de l’éclusier et dis-lui ce qui se passe. Je craindrais de ne pas avoir le courage, tout homme et tout prêtre que je suis, de faire une faction aussi longue que la tienne, dans une si difficile position.

— Soyez tranquille, dit l’enfant ; l’éclusier c’est mon père, il viendra bien vite, allez. »

« Il est inutile d’ajouter qu’il vint en effet, et que le trou de l’écluse fut réparé.

« Oh ! monsieur, dit Robby, quel bon petit garçon !

— Et quel bonheur, ajouta Jenny en s’essuyant les yeux, que le bon prêtre ait passé par-là ! »

Chose étrange ! à l’heure même où son petit frère et sa petite sœur prononçaient ces paroles, Ben, de l’autre côté de la mer, disait à Lambert qui venait de lui raconter précisément la même histoire :

« Le noble enfant ! J’ai souvent lu la relation de cette aventure, mais je l’avais toujours prise pour une légende. Ma foi, tant mieux que le fait soit vrai !

— Vrai ! Certainement qu’il est vrai, répondit vivement Lambert, je vous l’ai raconté tout juste comme ma mère me l’a dit il y a bien des années. Il n’est pas un enfant en Hollande qui l’ignore. Et d’ailleurs, Ben, il est moins étonnant que vous ne le pensez. Ce petit garçon est la personnification de l’esprit public en Hollande. Il est impossible qu’il se produise chez nous une fissure dans une question intéressant soit l’honneur de la nation, soit sa sûreté, sans qu’un million de doigts ne soient prêts à la boucher, n’importe à quel prix.

— Oui dà ! s’écria maître Ben, c’est beaucoup dire, un million !

— C’est dire la simple vérité, reprit Lambert si tranquillement que Ben se serait fait scrupule de montrer à son ami le moindre doute.

— Heureux le pays dont tous les habitants sont de sincères patriotes ! » reprit-il pour désintéresser tout à fait son ami Lambert de l’exclamation qui lui était échappée.

« Sans aller bien loin, dit Peter intervenant dans la conversation, vous avez vu il n’y a pas longtemps le jeune garçon qui nous a rapporté notre bourse, eh bien, celui-là est taillé dans le même bois que l’enfant dont Lambert vient de nous raconter l’histoire. Je mettrais ma main au feu qu’à la place du petit éclusier, Hans eût fait absolument la même chose.

— Il a une bonne figure que j’ai remarquée, dit Ben, et qui témoignerait, en effet, en faveur de votre affirmation. »

Karl fit une grimace de dédain qu’heureusement pour lui Peter ne vit pas. Karl n’aimait pas le pauvre Hans, on a pu le voir déjà. Après cela, qui aime-t-on, quand on s’aime trop soi-même ?

La saison du patinage avait commencé plus tôt que d’habitude, et nos jeunes gens n’étaient pas seuls sur la glace. L’après-midi était si belle, que les hommes, les femmes, les enfants, désireux de jouir de cette journée de fête, se pressaient en foule sur le canal. Saint Nicolas s’était évidemment souvenu du passe-temps favori. Les patins reluisants et neufs ne manquaient pas sur la glace. Des familles tout entières glissaient vers Haarlem, Leyde, ou les villages voisins. La glace semblait vivante. Ben remarqua la taille droite et la démarche dégagée des femmes, ainsi que la variété de leurs costumes. Les dernières modes, arrivées toutes fraîches de Paris, coudoyaient des vêtements si usés qu’ils semblaient avoir servi à plusieurs générations.

Il y avait des « lionnes » de Leyde et des pêcheurs des plages voisines ; des marchandes de fromage de Gouda, et de hautaines matrones habitant les magnifiques maisons de campagne situées sur le lac de Haarlem. On apercevait constamment des patineurs à la tête grise et de vieilles femmes ridées, portant des pyramides sur la tête. De gros petits « trotillons » en patins s’accrochaient aux jupes de leur mère ; quelques paysannes portaient leurs babies attachés solidement sur leurs épaules avec des châles de couleurs voyantes. Tous ces gens passaient rapides comme des flèches, ou lentement comme des navires sans voiles, suivant qu’ils étaient ou n’étaient pas pressés ; quelques-uns faisaient en passant un signe de tête amical à leurs connaissances ; d’autres sifflaient, tout en allant, tandis que les mères passaient avec les petits paquets bien emmitouflés qui se collaient de leur mieux sur leur dos.

L’effet produit par cet ensemble était pittoresque et gracieux au possible.

Des garçons et des filles se pourchassaient, se cachant derrière les traîneaux à un cheval chargés bien haut de tourbe ou de bois, qui suivaient avec précaution, sur la glace, le chemin indiqué pour eux comme étant le plus sûr.

De belles dames à la démarche royale étaient là ; le plaisir brillait dans leurs calmes regards. Parfois une longue file de jeunes gens, se tenant par les basques de leurs habits, volaient rapides comme l’étincelle électrique ; puis on entendait crier la glace sous le ysselde d’une bonne grand’mère somptueusement parée, ou sous celui d’un riche bourgmestre. Le fauteuil devait être lourd, chargé comme il l’était de coussins et de chaufferettes, sans compter Madame la bourgmestre qui n’était pas mince. Monté sur des lames brillantes, il glissait, poussé par quelque domestique, raide comme un mannequin, et qu’on eût pris pour tel, s’il n’eût jeté de temps en temps des regards de mauvaise humeur sur la troupe de petits démons braillards qui leur faisait invariablement office d’avant-garde.

Les bons bourgeois offraient l’image parfaite d’un bonheur paisible. La plupart avaient l’air vieux avec leurs jaquettes de laine, leurs pantalons larges et leurs grosses boucles d’argent. Ils faisaient à Ben l’effet d’énormes petits garçons devenus hommes tout à coup et portant les habits de leurs grands-pères. Tous avaient des pipes à la bouche et fumaient comme des locomotives. On voyait là, réunies, la plus grande variété de pipes du monde entier, depuis la pipe de terre commune, jusqu’à celles d’écume, montées en or ou en argent. Quelques-unes avaient les formes les plus excentriques ; elles représentaient des oiseaux, des fleurs, des têtes d’animaux, des portraits d’hommes célèbres et une foule d’autres choses. Les unes étaient rouges, les autres du blanc le plus pur ; mais les plus respectables étaient celles qui prenaient les teintes brunes de la maturité : « Plus foncé le brun, plus honorée la pipe, » comme de juste, car c’était une preuve que le propriétaire consacrait volontairement sa force virile à la culotter. Quelle pipe n’aurait pas été fière d’être l’objet d’un pareil dévouement !