Les Origines de la France contemporaine/Tome 2/Livre V/Chapitre 3

Librairie Hachette et Cie (Vol. 2, L’Ancien régime, Tome 2nd.p. 272-298).

CHAPITRE III

I. État des cerveaux populaires. — Incapacité mentale. — Comment les idées se transforment en légendes. — II. Incapacité politique. — Comment les nouvelles politiques et les actes du gouvernement sont interprétés. — III. Impulsions destructives. À quoi s’acharne la colère aveugle. — Méfiance contre les chefs naturels. — De suspects ils deviennent haïs. — Dispositions du peuple en 1789. — IV. Recrues et chefs d’émeute. — Braconniers. — Contrebandiers et faux-sauniers. — Bandits. Mendiants et vagabonds. — Apparition des brigands. — Le peuple de Paris.

I

À présent, pour comprendre leurs actions, il faudrait voir l’état de leur esprit, le train courant de leurs idées, la façon dont ils pensent. Mais, en vérité, est-il besoin de faire leur portrait, et ne suffit-il pas des détails qu’on vient de donner sur leur condition ? On les connaîtra plus tard et par leurs actions elles-mêmes, quand, en Touraine, ils assommeront à coup de sabots le maire et l’adjoint de leur choix, parce que, pour obéir à l’Assemblée nationale, ces deux pauvres gens ont dressé le tableau des impositions, ou quand, à Troyes, ils traîneront et déchireront dans les rues le magistrat vénérable qui les nourrit en ce moment même et qui vient de dresser son testament en leur faveur. — Prenez le cerveau encore si brut d’un de nos paysans contemporains, et retranchez-en toutes les idées qui, depuis quatre-vingts ans, y entrent par tant de voies, par l’école primaire instituée dans chaque village, par le retour des conscrits après sept ans de service, par la multiplication prodigieuse des livres, des journaux, des routes, des chemins de fer, des voyages et des communications de toute espèce[1]. Tâchez de vous figurer le paysan d’alors, clos et parqué de père en fils dans son hameau, sans chemins vicinaux, sans nouvelles, sans autre enseignement que le prône du dimanche, tout entier au souci du pain quotidien et de l’impôt, « avec son aspect misérable et desséché[2] », n’osant réparer sa maison, toujours tourmenté, défiant, l’esprit rétréci et, pour ainsi dire, raccorni par la misère. Sa condition est presque celle de son bœuf ou de son âne, et il a les idées de sa condition. Pendant longtemps il est resté engourdi ; il manque même d’instinct[3] ; » machinalement et sans lever les yeux, il tire sa charrue héréditaire. En 1751, d’Argenson écrivait sur son journal : « Rien ne les pique aujourd’hui des nouvelles de la cour ; ils ignorent le règne… La distance devient chaque jour plus grande de la capitale à la province… On ignore ici les événements les plus marqués qui nous ont le plus frappés à Paris… Les habitants de la campagne ne sont plus que de pauvres esclaves, des bêtes de trait attachées à un joug, qui marchent comme on les fouette, qui ne se soucient et ne s’embarrassent de rien, pourvu qu’ils mangent et dorment leurs heures[4]. » Ils ne se plaignent pas, « ils ne songent pas même à se plaindre[5] » ; leurs maux leur semblent une chose de nature, comme l’hiver ou la grêle. Leur pensée, comme leur agriculture, est encore du moyen âge. — En Toulousain[6], pour découvrir l’auteur d’un vol, pour guérir un homme ou une bête malade, on a recours au sorcier, qui devine au moyen d’un crible. Le campagnard croit de tout son cœur aux revenants, et, la nuit de la Toussaint, il met le couvert pour les morts. — En Auvergne, au commencement de la Révolution, une fièvre contagieuse s’étant déclarée, il est clair que M. de Montlosier, sorcier avéré, en est la cause, et deux cents hommes se mettent en marche pour démolir sa maison. Aussi bien leur religion est de niveau : « Leurs prêtres boivent avec eux et leur vendent l’absolution. Tous les dimanches, aux prônes, il se crie des lieutenances et des sous-lieutenances (de saints) : à tant la lieutenance de saint Pierre ! — Si le paysan tarde à mettre le prix, vite un éloge de saint Pierre, et mes paysans de monter à l’envi[7]. » — À ces cerveaux tout primitifs, vides d’idées et peuplés d’images, il faut des idoles sur la terre comme dans le ciel. « Je ne doutais nullement, dit Rétif de la Bretonne[8], que le roi ne pût légalement obliger tout homme à me donner sa femme ou sa fille, et tout mon village (Sacy en Bourgogne) pensait comme moi. » Il n’y a pas de place en de pareilles têtes pour les conceptions abstraites, pour la notion de l’ordre social ; ils le subissent, rien de plus. « La grosse masse du peuple, écrit Gouverneur Morris en 1789[9], n’a pour religion que ses prêtres, pour loi que ses supérieurs, pour morale que son intérêt ; voilà les créatures qui, menées par des curés ivres, sont maintenant sur le grand chemin de la liberté ; et le premier usage qu’elles en font, c’est de s’insurger de toutes parts parce qu’il y a disette. »

Comment pourrait-il en être autrement ? Avant de prendre racine dans leur cervelle, toute idée doit devenir une légende, aussi absurde que simple, appropriée à leur expérience, à leurs facultés, à leurs craintes, à leurs espérances. Une fois plantée dans cette terre inculte et féconde, elle y végète, elle s’y transforme, elle se développe en excroissances sauvages, en feuillages sombres, en fruits vénéneux. Plus elle est monstrueuse, plus elle est vivace, accrochée aux plus frêles vraisemblances et tenace contre les plus fortes démonstrations. — Sous Louis XV, pendant l’arrestation des vagabonds, quelques enfants ayant été enlevés par abus ou par erreur, le bruit court que le roi prend des bains de sang pour réparer ses organes usés, et la chose paraît si évidente, que les femmes, révoltées par l’instinct maternel, se joignent à l’émeute : un exempt est saisi, assommé, et, comme il demandait un confesseur, une femme du peuple prend un pavé, crie qu’il ne faut pas lui donner le temps d’aller en paradis, et lui casse la tête, persuadée qu’elle fait justice[10]. — Sous Louis XVI, il est avéré pour le peuple que la disette est factice : en 1789[11], un officier, écoutant les discours de ses soldats, les entend répéter « avec une profonde conviction que les princes et les courtisans, pour affamer Paris, font jeter les farines dans la Seine ». Là-dessus, se tournant vers le maréchal-des-logis, il lui demande comment il peut croire à une pareille sottise. « C’est bien vrai, mon lieutenant, répond l’autre ; la preuve, c’est que les sacs de farine étaient attachés avec des cordons bleus. » L’argument leur semblait décisif ; rien ne put les en faire démordre. — Il se forge ainsi dans les bas-fonds de la société, à propos du pacte de famine, de la Bastille, des dépenses et des plaisirs de la cour, un roman immonde et horrible, où Louis XVI, la reine Marie-Antoinette, le comte d’Artois, Mme de Lamballe, les Polignac, les traitants, les seigneurs, les grandes dames, sont des vampires et des goules. J’en ai vu plusieurs rédactions dans les pamphlets du temps, dans les gravures secrètes, dans les estampes et dans les enluminures populaires, celles-ci les plus efficaces de toutes, car elles parlent aux yeux. Cela dépasse l’histoire de Mandrin ou de Cartouche, et cela convient justement à des hommes qui pour littérature ont la complainte de Cartouche et de Mandrin.

II

Jugez par là de leur intelligence politique. Tous les objets leur apparaissent sous un jour faux ; on dirait des enfants qui, à chaque tournant du chemin, voient dans un arbre, dans un buisson, un spectre épouvantable. Arthur Young, visitant des sources près de Clermont, est arrêté[12], et l’on veut mettre en prison la femme qui lui a servi de guide ; plusieurs sont d’avis qu’il a été « chargé par la reine de faire miner la ville pour la faire sauter, puis d’envoyer aux galères tous les habitants qui en réchapperont ». Six jours plus tard, au delà du Puy, et malgré son passe-port, la garde bourgeoise vient à onze heures du soir le saisir au lit ; on lui déclare « qu’il est sûrement de la conspiration tramée par la reine, le comte d’Artois et le comte d’Entragues, grand propriétaire du pays ; qu’ils l’ont envoyé comme arpenteur pour mesurer les champs, afin de doubler les taxes ». — Ici nous saisissons sur le fait le travail involontaire et redoutable de l’imagination populaire : sur un indice, sur un mot, elle construit en l’air ses châteaux ou ses cachots fantastiques, et sa vision lui semble aussi solide que la réalité. Ils n’ont pas l’instrument intérieur qui divise et discerne ; ils pensent par blocs ; le fait et le rêve leur apparaissent ensemble et conjoints en un seul corps. — Au moment où l’on élit les députés, le bruit court en Provence[13] « que le meilleur des rois veut que tout soit égal, qu’il n’y ait plus ni évêques, ni seigneurs, ni dîmes, ni droits seigneuriaux, qu’il n’y ait plus de titres ni de distinctions, plus de droits de chasse ni de pêche ;… que le peuple va être déchargé de tout impôt, que les deux premiers ordres supporteront seuls les charges de l’État ». Là-dessus quarante ou cinquante émeutes éclatent presque le même jour. « Plusieurs communautés refusent à leur trésorier de rien payer au delà des impositions royales. » D’autres font mieux : « lorsqu’on pillait la caisse du receveur du droit sur les cuirs à Brignolles, c’était avec les cris de : Vive le roi ! » — « Le paysan annonce sans cesse que le pillage et la destruction qu’il fait sont conformes à la volonté du roi. » — Un peu plus tard, en Auvergne, les paysans qui brûlent les châteaux montreront « beaucoup de répugnance » à maltraiter ainsi « d’aussi bons seigneurs » ; mais ils allégueront que « l’ordre est impératif, ils ont des avis que Sa Majesté le veut ainsi[14] ». — À Lyon, quand les cabaretiers de la ville et les paysans des environs passent sur le corps des douaniers, ils sont bien convaincus que le roi a pour trois jours suspendu les droits d’entrée[15]. — Autant leur imagination est grande, autant leur vue est courte. « Du pain, plus de redevances, ni de taxes, » c’est le cri unique, le cri du besoin, et le besoin exaspéré fonce en avant comme un animal affolé. À bas l’accapareur ! Et les magasins sont forcés, les convois de grains arrêtés, les marchés pillés, les boulangers pendus, le pain taxé, en sorte qu’il n’arrive plus ou se cache. À bas l’octroi ! Et les barrières sont brisées, les commis assommés, l’argent manque aux villes pour les dépenses les plus urgentes. Au feu les registres d’impôt, les livres de comptes, les archives des municipalités, les chartriers des seigneurs, les parchemins des couvents, toutes ces écritures maudites qui font partout des débiteurs et des opprimés ! Et le village lui-même ne sait plus comment revendiquer ses communaux. — Contre le papier griffonné, contre les agents publics, contre l’homme qui de près ou de loin touche au blé, l’acharnement est aveugle et sourd. La brute lâchée écrase tout en se blessant elle-même, et se heurte en mugissant contre l’obstacle qu’il fallait tourner.

III

C’est que les conducteurs lui manquent, et que, faute d’organisation, une multitude n’est qu’un troupeau. Contre tous ses chefs naturels, contre les grands, les riches, les gens en place et revêtus d’autorité, sa défiance est invétérée et incurable. Ils ont beau lui vouloir du bien et lui en faire, elle refuse de croire à leur humanité et à leur désintéressement. Elle a été trop foulée ; elle a des préventions contre toutes les mesures qui viennent d’eux, même les plus salutaires, même les plus libérales. « Au seul nom des nouvelles assemblées, dit une commission provinciale en 1787[16], nous avons entendu un pauvre laboureur s’écrier : Hé quoi ! Encore de nouvelles mangeries ! » — Tous leurs supérieurs leur sont suspects, et du soupçon à l’hostilité il n’y a pas loin. En 1788[17], Mercier déclare que, « depuis quelques années, l’insubordination est visible dans le peuple, et surtout dans les métiers… Jadis, lorsque j’entrais dans une imprimerie, les garçons ôtaient leurs chapeaux. Aujourd’hui ils se contentent de vous regarder et ricanent : à peine êtes-vous sur le seuil, que vous les entendez parler de vous d’une manière plus leste que si vous étiez leur camarade ». Aux environs de Paris, même attitude chez les paysans, et Mme Vigée-Lebrun[18], allant à Romainville chez le maréchal de Ségur, en fait la remarque : « Non seulement ils ne nous ôtaient plus leurs chapeaux, mais ils nous regardaient avec insolence ; quelques-uns même nous menaçaient avec leurs gros bâtons. » — Au mois de mars ou d’avril suivant, à un concert qu’elle donne, ses invités arrivent consternés. « Le matin, à la promenade de Longchamps, la populace, rassemblée à la barrière de l’Étoile, a insulté de la façon la plus effrayante les gens qui passaient en voiture ; des misérables montaient sur les marchepieds en criant : L’année prochaine, vous serez derrière vos carrosses et nous serons dedans. » — À la fin de 1788, le fleuve est devenu torrent, et le torrent devient cataracte. Un intendant[19] écrit que, dans sa province, le gouvernement doit opter, et opter dans le sens populaire, se détacher de privilégiés, abandonner les vieilles formes, donner au Tiers double vote. Clergé et noblesse sont détestés, leur suprématie semble un joug. « Au mois de juillet dernier, dit-il, on eût reçu les (anciens) États avec transport, et leur formation n’eût trouvé que peu d’obstacles. Depuis cinq mois, les esprits se sont éclairés, les intérêts respectifs ont été discutés, les ligues se sont formées. On vous a laissé ignorer que, dans toutes les classes du Tiers-état, la fermentation est au comble, qu’une étincelle suffit pour allumer l’incendie… Si la décision du roi est favorable aux deux premiers ordres, insurrection générale dans toutes les parties de la province, 600 000 hommes en armes et toutes les horreurs de la Jacquerie. » — Le mot est prononcé et l’on aura la chose. Quand une multitude soulevée repousse ses conducteurs naturels, il faut qu’elle en prenne ou subisse d’autres. De même une armée qui, entrant en campagne, casserait tous ses officiers ; les nouveaux grades sont pour les plus hardis, les plus violents, les plus opprimés, pour ceux qui, ayant le plus souffert du régime antérieur, crient « en avant », marchent en tête et font les premières bandes. En 1789, les bandes sont prêtes ; car, sous le peuple qui pâtit, il est un autre peuple qui pâtit encore davantage, dont l’insurrection est permanente, et qui, réprimé, poursuivi, obscur, n’attend qu’une occasion pour sortir de ses cachettes et se déchaîner au grand jour.

IV

Gens sans aveu, réfractaires de tout genre, gibier de justice ou de police, besaciers, porte-bâtons, rogneux, teigneux, hâves et farouches, ils sont engendrés par les abus du système, et, sur chaque plaie sociale, ils pullulent comme une vermine. — Quatre cents lieues de capitaineries gardées et la sécurité du gibier innombrable qui broute les récoltes sous les yeux du propriétaire, provoquent au braconnage des milliers d’hommes d’autant plus dangereux qu’ils bravent des lois terribles et sont armés. Déjà en 1752[20], autour de Paris, on en voit « des rassemblements de cinquante à soixante, tous armés en guerre, se comportant comme à un fourrage bien ordonné, infanterie au centre et cavalerie aux ailes… Ils habitent les forêts, ils y ont fait une enceinte retranchée et gardée, et payent exactement ce qu’ils prennent pour vivre ». En 1777[21], près de Sens en Bourgogne, le procureur général M. Terray, chassant sur sa terre avec deux officiers, rencontre sept braconniers qui tirent sur le gibier à leurs yeux et bientôt tirent sur eux-mêmes : M. Terray est blessé, l’un des officiers à son habit percé. Arrive la maréchaussée, les braconniers font ferme et la repoussent. On fait venir les dragons de Provins, les braconniers en tuent un, abattent trois chevaux, sont sabrés ; quatre d’entre eux restent sur la place et sept sont pris. — On voit par les cahiers des États Généraux que, chaque année, dans chaque grande forêt, tantôt par le fusil d’un braconnier, tantôt et bien plus souvent par le fusil d’un garde, il y a des meurtres d’hommes. — C’est la guerre à demeure et à domicile ; tout vaste domaine recèle ainsi ses révoltés qui ont de la poudre, des balles et qui savent s’en servir.

Autre recrue d’émeute, les contrebandiers et les faux sauniers[22]. Dès qu’une taxe est exorbitante, elle invite à la fraude, et suscite un peuple de délinquants contre son peuple de commis. Jugez ici du nombre des fraudeurs par le nombre des surveillants : douze cents lieues de douanes intérieures sont gardées par 50 000 hommes, dont 23 000 soldats sans uniforme[23]. « Dans les pays de grande gabelle et dans les provinces des cinq grosses fermes, à quatre lieues de part et d’autre de long de la ligne de défense, » la culture est abandonnée ; tout le monde est douanier ou fraudeur[24]. Plus l’impôt est excessif, plus la prime offerte aux violateurs de la loi devient haute, et, sur tous les confins par lesquels la Bretagne touche à la Normandie, au Maine et à l’Anjou, quatre sous pour livre ajoutés à la gabelle multiplient au delà de toute croyance le nombre déjà énorme des faux sauniers. « Des bandes nombreuses[25] d’hommes, armés de frettes ou longs bâtons ferrés et quelquefois de pistolets ou de fusils, tentent par force de s’ouvrir un passage. Une multitude de femmes et d’enfants de l’âge le plus tendre franchissent les lignes des brigades, et, d’un autre côté, des troupeaux de chiens conduits dans le pays libre, après y avoir été enfermés quelque temps sans aucune nourriture, sont chargés de sel, que, pressés par la faim, ils rapportent promptement chez leurs maîtres. » — Vers ce métier si lucratif, les vagabonds, les désespérés, les affamés accourent de loin comme une meute. « Toute la lisière de Bretagne n’est peuplée que d’émigrants, la plupart proscrits de leur patrie, et qui, après un an de domicile, jouissent de tous les privilèges bretons : leur unique occupation se borne à faire des amas de sel pour les revendre aux faux sauniers. » On aperçoit comme dans un éclair d’orage ce long cordon de nomades inquiets, nocturnes et traqués, toute une population mâle et femelle de rôdeurs sauvages, habitués aux coups de main, endurcis aux intempéries, déguenillés, « presque tous attaqués d’une gale opiniâtre », et j’en trouve de pareils aux environs de Morlaix, de Lorient et des autres ports, sur les frontières des autres provinces et sur les frontières du royaume. De 1783 à 1787, dans le Quercy, deux bandes alliées de soixante à quatre-vingts contrebandiers fraudent la ferme de quarante milliers de tabac, tuent deux douaniers et défendent, fusil en main, leur entrepôt de la montagne ; il faudrait pour les réprimer des soldats que les commandants militaires ne donnent pas. En 1789[26], une grosse troupe de contrebandiers travaille en permanence sur la frontière du Maine et de l’Anjou ; le commandant militaire écrit que « leur chef est un bandit intelligent et redoutable, qu’il a déjà avec lui cinquante-quatre hommes, qu’il aura bientôt avec lui un corps embarrassant par la disposition des esprits et la misère » ; il serait peut-être à propos de corrompre quelques-uns de ses hommes, et de se le faire livrer puisqu’on ne peut le prendre. Ce sont là les procédés des pays où le brigandage est endémique. — Ici en effet, comme dans les Calabres, le peuple est pour les brigands contre les gendarmes. On rappelle les exploits de Mandrin en 1754[27], sa troupe de cent cinquante hommes qui apporte des ballots de contrebande et ne rançonne que les commis, ses quatre expéditions qui durent sept mois à travers la Franche-Comté, le Lyonnais, le Bourbonnais, l’Auvergne et la Bourgogne, les vingt-sept villes où il entre sans résistance, délivre les détenus et vend ses marchandises ; il fallut, pour le vaincre, former un camp devant Valence et envoyer 2 000 hommes ; on ne le prit que par trahison, et encore aujourd’hui des familles du pays s’honorent de sa parenté, disant qu’il fut un libérateur. — Nul symptôme plus grave : quand le peuple préfère les ennemis de la loi aux défenseurs de la loi, la société se décompose et les vers s’y mettent. — Ajoutez à ceux-ci les vrais brigands, assassins et voleurs. « En 1782, la justice prévôtale de Montargis instruit le procès de Hulin et de plus de 200 de ses complices qui, depuis dix ans, par des entreprises combinées, désolaient une partie du royaume[28]. » — Mercier compte en France « une armée de plus de 10 000 brigands et vagabonds », contre lesquels la maréchaussée, composée de 3 756 hommes, est toujours en marche. « Tous les jours on se plaint, dit l’assemblée provinciale de la Haute-Guyenne, qu’il n’y ait aucune police dans la campagne. » Le seigneur absent n’y veille pas ; ses juges et officiers de justice se gardent bien d’instrumenter gratuitement contre un criminel insolvable, et ses terres deviennent l’asile de tous les scélérats du canton[29] ». — Ainsi chaque abus enfante un danger, la négligence mal placée comme la rigueur excessive, la féodalité relâchée comme la monarchie trop tendue. Toutes les institutions semblent d’accord pour multiplier ou tolérer les fauteurs de désordre, et pour préparer, hors de l’enceinte sociale, les hommes d’exécution qui viendront la forcer.

Mais leur effet d’ensemble est plus pernicieux encore ; car, de tant de travailleurs qu’elles ruinent, elles font des mendiants qui ne veulent plus travailler, des fainéants dangereux qui vont quêtant ou extorquant leur pain chez des paysans qui n’en ont pas trop pour eux-mêmes. « Les vagabonds, dit Letrosne[30], sont pour la campagne le fléau le plus terrible ; ce sont des troupes ennemies qui, répandues sur le territoire, y vivent à discrétion et y lèvent des contributions véritables… Ils rôdent continuellement dans les campagnes, ils examinent les approches des maisons et s’informent des personnes qui les habitent et des facultés du maître. — Malheur à ceux qui ont la réputation d’avoir quelque argent !… Combien de vols de grand chemin et de vols avec effraction ! Combien de voyageurs assassinés, de maisons et de portes enfoncées ! Combien d’assassinats de curés, de laboureurs, de veuves qu’ils ont tourmentés pour savoir où était leur argent et qu’ils ont tués ensuite ! » Vingt-cinq ans avant la Révolution, il n’était pas rare d’en voir quinze ou vingt « tomber dans une ferme pour y coucher, intimider les fermiers, et en exiger tout ce qu’il leur plaisait ». — En 1764, le gouvernement prend contre eux des mesures qui témoignent de l’excès du mal[31] : « Sont réputés vagabonds et gens sans aveu, et condamnés comme tels, ceux qui, depuis six mois révolus, n’auront exercé ni profession ni métier, et qui, n’ayant aucun état ni aucun bien pour subsister, ne pourront être avoués ni faire certifier de leurs bonnes vies et mœurs par personnes dignes de foi… L’intention de Sa Majesté n’est pas seulement qu’on arrête les vagabonds qui courent les campagnes, mais encore tous les mendiants, lesquels, n’ayant point de profession, peuvent être regardés comme suspects de vagabondage. » Pour les valides, trois ans de galères ; en cas de récidive, neuf ans ; à la seconde récidive, les galères à perpétuité. Pour les invalides, trois ans de prison ; en cas de récidive, neuf ans ; à la seconde récidive, la prison perpétuelle. Au-dessous de seize ans, les enfants iront à l’hôpital. « Un mendiant qui s’est exposé à être arrêté par la maréchaussée, dit la circulaire, ne doit être relâché qu’avec la plus grande certitude qu’il ne mendiera plus ; on ne s’y déterminera donc que dans le cas où des personnes dignes de foi et solvables répondraient du mendiant, s’engageraient à lui donner de l’occupation ou à le nourrir, et indiqueraient les moyens qu’elles ont pour l’empêcher de mendier. »

Tout cela fourni, il faut encore, par surcroît, l’autorisation spéciale de l’intendant. En vertu de cette loi, 50 000 mendiants, dit on, furent arrêtés tout d’un coup, et, comme les hôpitaux et prisons ordinaires ne suffisaient pas à les contenir, il fallut construire des maisons de force. Jusqu’à la fin de l’ancien régime, l’opération se poursuit avec des intermittences : dans le Languedoc, en 1768, on en arrêtait encore 433 en six mois, et, en 1787, 205 en quatre mois[32]. Vers la même époque, il y en avait 300 au dépôt de Besançon, 500 au dépôt de Rennes, 650 au dépôt de Saint-Denis. Leur entretien coûtait au roi un million par an, et Dieu sait comment ils étaient entretenus ! De l’eau, de la paille, du pain, deux onces de graisse salée, en tout cinq sous par jour ; et, comme depuis vingt ans le prix des denrées avait augmenté d’un tiers, il fallait que le concierge chargé de la nourriture les fit jeûner ou se ruinât. — Quant à la façon de remplir les dépôts, la police est turque à l’endroit des gens du peuple ; elle frappe dans le tas, et ses coups de balai brisent autant qu’ils nettoient. Par l’ordonnance de 1778, écrit un intendant[33], « les cavaliers de la maréchaussée doivent arrêter, non seulement les mendiants et vagabonds qu’ils rencontrent, mais encore ceux qu’on leur dénonce comme tels ou comme personnes suspectes. Le citoyen le plus irréprochable dans sa conduite et le moins suspect de vagabondage ne peut donc se promettre de ne pas être enfermé au dépôt, puisque sa liberté est à la merci d’un cavalier de la maréchaussée constamment susceptible d’être trompé par une fausse dénonciation ou corrompu à prix d’argent. J’ai vu dans le dépôt de Rennes plusieurs maris arrêtés sur la seule dénonciation de leurs femmes, et autant de femmes sur celle de leurs maris ; plusieurs enfants du premier lit à la sollicitation de leur belle-mère ; beaucoup de servantes grosses des œuvres du maître qu’elles servaient, enfermées sur sa dénonciation, et des filles dans le même cas, sur la dénonciation de leur séducteur ; des enfants sur la dénonciation de leur père, et des pères sur la dénonciation de leurs enfants : tous sans la moindre preuve de vagabondage et de mendicité… Il n’existe pas un seul jugement prévôtal qui ait rendu la liberté aux détenus, malgré le nombre infini de ceux qui ont été arrêtés injustement. » — Supposons qu’un intendant humain, comme celui-ci, les élargisse : les voilà sur le pavé, mendiants par la faute de la loi qui poursuit la mendicité et qui ajoute aux misérables qu’elle poursuit les misérables qu’elle fait, aigris de plus, gâtés de corps et d’âme. « Il arrive presque toujours, dit encore l’intendant, que les détenus, arrêtés à vingt-cinq ou trente lieues du dépôt, n’y sont renfermés que trois ou quatre mois après leur arrestation, et quelquefois plus longtemps. En attendant, ils sont transférés de brigade en brigade dans les prisons qui se trouvent sur la route, où ils séjournent jusqu’à ce qu’il en soit arrivé un assez grand nombre pour former un convoi. Les hommes et les femmes sont renfermés dans la même prison, et il en résulte toujours que celles qui n’étaient pas grosses quand elles ont été arrêtées le sont toujours quand elles arrivent au dépôt. Les prisons sont ordinairement malsaines ; souvent la plupart des détenus en sortent malades ; » plusieurs, au contact des scélérats, en sortent scélérats. — Contagion morale et contagion physique : l’ulcère grandit ainsi par le remède, et les centres de répression deviennent des foyers de corruption.

Et cependant, avec toutes ses rigueurs, la loi n’atteint pas son objet. « Nos villes, dit le parlement de Bretagne[34], sont tellement peuplées de mendiants, qu’il semble que tous les projets formés pour bannir la mendicité n’ont fait que l’accroître. » — « Les grands chemins, écrit l’intendant, sont infestés de vagabonds dangereux, de gens sans aveu et de véritables mendiants que la maréchaussée n’arrête pas, soit par négligence, soit parce que son ministère n’est point provoqué par des sollicitations particulières. » Qu’en ferait-on, si elle les arrêtait ? Il y en a trop, on ne saurait où les mettre. Et d’ailleurs comment empêcher des gens à l’aumône de demander l’aumône ? — Sans doute l’effet en est lamentable, mais il est infaillible. À un certain degré, la misère est une gangrène lente où la partie malade mange la partie saine, et l’homme qui subsiste à peine est rongé vif par l’homme qui n’a pas de quoi subsister. « Le paysan est ruiné, il périt victime de l’oppression de la multitude des pauvres qui désolent les campagnes et se réfugient dans les villes. De là ces attroupements dangereux à la sûreté publique ; de là cette foule de fraudeurs, de vagabonds ; de là cette multitude d’hommes devenus voleurs et assassins uniquement parce qu’ils manquent de pain. Ce n’est là encore qu’une légère idée des désordres que j’ai vus sous mes yeux[35]. » — « Excessive en elle-même, la misère des campagnes l’est encore dans les désordres qu’elle entraîne ; il ne faut point chercher ailleurs la source effrayante de la mendicité et de tous ses vices[36]. » — À quoi bon des palliatifs ou des opérations violentes contre un mal qui est dans le sang et qui tient à la constitution même du corps social ? Quelle police peut être efficace dans une paroisse où le quart, le tiers des habitants n’ont pour manger que ce qu’ils vont quêter de porte en porte ? À Argentré, en Bretagne[37], « sur 2300 habitants sans industrie ni commerce, plus de la moitié ne sont rien moins qu’à l’aise et plus de 500 sont réduits à la mendicité ». À Dainville, en Artois, « sur 130 maisons, 60 sont sur la table des pauvres[38] ». En Normandie, d’après les déclarations des curés, « sur 900 paroissiens de Saint-Malo, les trois quarts peuvent vivre, le reste est malheureux ». — « Sur 1 500 habitants de Saint-Patrice, 400 sont à l’aumône ; sur 500 habitants de Saint-Laurent, les trois quarts sont à l’aumône. » À Marbœuf, dit le cahier, « sur 500 personnes qui habitent notre paroisse, 100 sont réduites à la mendicité, et en outre nous voyons venir des paroisses voisines 30 ou 40 pauvres par jour[39] ». À Boulbonne[40], dans le Languedoc, il y a tous les jours aux portes du couvent « une aumône générale à laquelle assistent 300 ou 400 pauvres, indépendamment de celle qu’on fait aux vieillards et aux malades, qui est la plus abondante ». À Lyon, en 1787, « 30 000 ouvriers attendent leur subsistance de la charité publique » ; à Rennes, en 1788, après une inondation, « les deux tiers des habitants sont dans la misère[41] » ; à Paris, sur 650 000 habitants, le recensement de 1791 comptera 118 784 indigents[42]. — Vienne une gelée et une grêle comme en 1788, que la récolte manque, que le pain soit à quatre sous la livre, et qu’aux ateliers de charité l’ouvrier ne gagne que douze sous par jours[43] ; croyez-vous que ces gens-là se résigneront à mourir de faim ? Autour de Rouen, pendant l’hiver de 1788, les forêts sont saccagées en plein jour, le bois de Bagnères est coupé tout entier, les arbres abattus sont vendus publiquement par les maraudeurs[44]. Affamés et maraudeurs, tous marchent ensemble, et le besoin se fait le complice du crime. De province en province, on les suit à la trace : quatre mois plus tard, aux environs d’Étampes, quinze brigands forcent trois fermes avant la nuit, et les fermiers, menacés d’incendie, sont obligés de donner, l’un trois cents francs, l’autre cent cinquante, probablement tout l’argent qu’ils ont en coffre[45]. « Voleurs, galériens, mauvais sujets de toute espèce », ce sont eux qui, dans les insurrections, feront l’avant-garde, « et pousseront le paysan aux dernières violences[46] ». Après le sac de la maison Réveillon à Paris, on remarque que, « sur une quarantaine de mutins arrêtés, il n’en est presque point qui n’aient été précédemment des repris de justice, fouettés ou marqués[47] ». En toute révolution, la lie d’une société monte à la surface. On ne les avait jamais vus ; comme des blaireaux de forêt ou comme des rats d’égout, ils restaient dans leurs tanières ou dans leurs bouges. Ils en sortent par troupes, et tout d’un coup, dans Paris, quelles figures[48] ! On ne se souvient pas d’en avoir rencontré de pareilles en plein jour… D’où sortent-ils ? Qui les a tirés de leurs réduits ténébreux ?… Étrangers de tous pays, armés de grands bâtons, déguenillés,… les uns presque nus, les autres bizarrement vêtus » de loques disparates, « affreux à voir », voilà les chefs ou comparses d’émeute, à six francs par tête, derrière lesquels le peuple va marcher.

« À Paris, dit Mercier[49], il est mou, pâle, petit, rabougri, maltraité, et semble un corps séparé des autres ordres de l’État. Les riches et les grands qui ont équipage ont le droit barbare de l’écraser ou de le mutiler dans les rues… Aucune commodité pour les gens de pied, point de trottoirs. Cent victimes expirent par an sous les roues des voitures. » — « Un pauvre enfant, dit Arthur Young, a été écrasé sous nos yeux et plusieurs fois j’ai été couvert de la tête aux pieds par l’eau du ruisseau. Si nos jeunes nobles allaient à Londres, dans les rues sans trottoir, du même train que leurs frères de Paris, ils se verraient bientôt et justement rossés de la bonne manière et traînés dans le ruisseau. » — Mercier s’inquiète en face de ce populaire immense. « Il y a peut-être à Paris deux cent mille individus qui n’ont pas en propriété absolue la valeur intrinsèque de cinquante écus ; et la cité subsiste ! » Aussi bien l’ordre n’est maintenu que par la force et la crainte, grâce aux soldats du guet que la multitude appelle tristes-à-patte. « Ce sobriquet met en fureur cette espèce de milice, qui appesantit alors les coups de bourrade et qui blesse indistinctement tout ce qu’elle rencontre. Le petit peuple est toujours sur le point de lui faire la guerre, parce qu’il n’en a jamais été ménagé. » À la vérité, « une escouade du guet dissipe souvent sans peine des pelotons de cinq à six cents hommes qui paraissent d’abord fort échauffés, mais qui se fondent en un clin-d’œil dès que les soldats ont distribué quelques bourrades et gantelé deux ou trois mutins. » — Néanmoins, « si l’on abandonnait le peuple de Paris à son premier transport, s’il ne sentait plus derrière lui le guet à pied et à cheval, le commissaire et l’exempt, il ne mettrait aucune mesure dans son désordre. La populace, délivrée du frein auquel elle est accoutumée, s’abandonnerait à des violences d’autant plus cruelles qu’elle ne saurait elle-même où s’arrêter… Tant que le pain de Gonesse ne manquera pas, la commotion ne sera pas générale ; il faut que la halle[50] y soit intéressée, sinon les femmes demeureront calmes… Mais si le pain de Gonesse venait à manquer pendant deux marchés de suite, le soulèvement serait universel, et il est impossible de calculer à quoi se porterait cette grande multitude aux abois, qui voudrait se délivrer de la famine, elle et ses enfants. » — En 1789, le pain manque à Gonesse et dans toute la France.

  1. Théron de Montaugé, 102, 113. Dans le Toulousain, sur cinquante paroisses, dix ont des écoles. — Dans la Gascogne, dit l’Assemblée provinciale d’Auch (24), « la plupart des campagnes sont sans maîtres d’école ni presbytères ». — En 1778, le courrier de Paris n’arrive à Toulouse que trois fois par semaine ; celui de Toulouse pour Alby, Rodez, etc., deux fois par semaine, pour Beaumont, Saint-Girons, etc., une fois. « À la campagne, dit Théron de Montaugé, on vit pour ainsi dire dans la solitude et dans l’exil. » En 1789, le courrier de Paris n’arrive à Besançon que trois fois par semaine (Arthur Young, I, 257).
  2. Mot du marquis de Mirabeau.
  3. Archives nationales, G, 300, lettre d’un directeur des aides à Coulommiers (13 août 1781).
  4. Marquis d’Argenson, VI. 425 (16 juin 1751).
  5. Comte de Montlosier, I, 102, 146.
  6. Théron de Montaugé, 102.
  7. Tableaux de la Révolution, par Schmidt, II, 7 (Rapport de l’agent Perrière, qui a habité l’Auvergne).
  8. Monsieur Nicolas, I, 448.
  9. Gouverneur Morris, II, 69 (29 avril 1789).
  10. Mercier, Tableau de Paris, XII, 83.
  11. Vaublanc, 209.
  12. Arthur Young, I, 283 (13 août 1789), I, 289 (19 août 1789).
  13. Archives nationales, H, 272. Lettres de M. de Caraman (18 mars et 12 avril 1789), de M. d’Eymar de Montmeyran (2 avril), de M. de la Tour (30 mars). « Le plus grand bienfait du souverain a été interprété de la manière la plus bizarre par une populace ignorante. »
  14. Doniol, Histoire des classes rurales, 495 (Lettre du 3 août 1789 à M. de Clermont-Tonnerre).
  15. Archives nationales. H, 1453 (Lettre d’Imbert-Colomès, prévôt des marchands, du 5 juillet 1789).
  16. Procès-verbaux de l’Assemblée provinciale de l’Orléanais, 296. « Une défiance toujours tremblante règne encore dans les campagnes… Vos premiers ordres d’assemblées de département n’ont en quelques endroits réveillé que des soupçons.
  17. Tableau de Paris, XII, 186.
  18. Mme Vigée-Lebrun, I, 158 (1788), I, 183 (1789).
  19. Archives nationales, H, 723 (Lettre de M. de Caumartin, intendant de Besançon, 5 décembre 1788).
  20. Marquis d’Argenson. 13 mars 1752.
  21. Correspondance, par Métra, V, 179 (22 novembre 1777).
  22. Beugnot. I, 142. « Pas un seul des habitants de la baronnie de Choiseul ne se mêla à ces bandes, composées des patriotes de Montigny, de contrebandiers ou de mauvais sujets des environs. » — V. sur les braconniers du temps, Les deux amis de Bourbonne, par Diderot.
  23. Calonne, Mémoires présentés à l’Assemblée des Notables, n° 8. — Necker, De l’Administration des Finances, I, 195.
  24. Letrosne, De l’Administration des Finances. 59.
  25. Archives nationales, H, 425 (Mémoires des fermiers généraux, 13 janvier 1781, 15 septembre 1782). H, 614 (Lettre de M. de Coëtlosquet, du 25 avril 1777). H, 1431, Rapport par les fermiers généraux, du 9 mars 1787.
  26. Archives nationales, H, 1453 (Lettre du baron de Besenval, du 19 juin 1789).
  27. Mandrin, par Paul Simian, passim. — Histoire de Beaune par Rossignol, 453. — Mandrin, par Ch. Jarrin (1875). Le commandant Fischer, qui attaque et disperse la bande, écrit que la chose était urgente ; car sinon. « en remontant du côté du Forez, ils auraient trouvé deux ou trois cents vauriens n’attendant ! que le moment de se joindre à eux » (47).
  28. Mercier, XI, 6.
  29. Voir ci-dessus, livre I, 85.
  30. Letrosne, Ib. (1779), 539.
  31. Archives nationales, F16, 965, et H, 892 (Ordonnance du 4 août 1764, instruction circulaire du 20 juillet 1767, Lettre du lieutenant de la maréchaussée de Toulouse du 21 septembre 1787).
  32. Archives nationales, H, 724, H, 554, F4, 2397, F16, 965. — Lettres des concierges des prisons de Carcassonne (22 juin 1789), de Béziers (19 juillet 1786), de Nîmes (1er  juillet 1786), de l’intendant, M. d’Aîne (19 mars 1786).
  33. Archives nationales, H, 554 (Lettre de M. de Bertrand, intendant de Rennes, du 17 août 1785).
  34. Archives nationales, H, 426. (Remontrances du 4 février 1783.) — H, 554. (Lettre de M. de Bertrand du 17 août 1785.)
  35. Archives nationales, H, 614. (Mémoire par René de Hauteville, avocat au Parlement, Saint-Brieuc, 25 décembre 1776.)
  36. Procès-verbaux de l’Assemblée provinciale du Soissonnais (1787), 457.
  37. Archives nationales, H, 616. (Lettre de M. Caze de la Bove, intendant de Rennes du 23 avril 1774.)
  38. Périn, la Jeunesse de Robespierre, 301. (Doléances des paroisses rurales en 1789.)
  39. Hippeau, le Gouvernement de Normandie, VII, 147 à 177 (1789). — Boivin-Champeaux, Notice historique sur la Révolution dans le département de l’Eure, 83 (1789).
  40. Théron de Montaugé, 87. (Lettre du prieur du couvent, mars 1789.)
  41. Procès-verbaux de l’Assemblée provinciale du Lyonnais, 57. — Archives nationales, F4, 2073. Mémoire du 24 janvier 1788. « Les secours de la charité sont très bornés, et les États de la province ne font aucun fonds pour de tels accidents. »
  42. Levasseur, la France industrielle, 119. — En 1862, sur une population presque triple (1 696 000), il y avait 90 000 indigents.
  43. Albert Babeau. Histoire de Troyes, I, 91 (Lettre du maire Huez, 30 juillet 1788).
  44. Floquet, VII, 506.
  45. Archives nationales, H, 1453. (Lettre de M. de Sainte-Suzanne, du 29 avril 1789.)
  46. Arthur Young, I, 256.
  47. Correspondance secrète inédite de 1777 à 1792, publiée par M. de Lescure, II, 351 (8 mai 1789). Cf. C. Desmoulins, la Lanterne : sur 100 émeutiers arrêtés à Lyon, 96 étaient marqués.
  48. Besenval, II, 344, 350. — Dusaulx, la Prise de la Bastille, 352. — Marmontel, II, ch. xiv, 249. — Mme Vigée-Lebrun. I. 177, 188.
  49. Mercier, I. 32, VI, 15, X, 179, XI, 59, XII, 83. — Arthur Young, I, 122.
  50. Dialogues sur le commerce des blés, par Galiani (1770). « Si les forts de la halle sont contents, il n’arrivera aucun désastre à l’administration. Les grands conspirent et se révoltent ; les bourgeois se plaignent et vivent dans le célibat ; les paysans et les artisans se désespèrent et s’en vont ; les portefaix s’ameutent. »