Les Merveilleux Voyages de Marco Polo dans l’Asie du XIIIe siècle/Partie II/Chapitre 50

CHAPITRE L

L’Île de Ceylan


L’Île de Ceylan a actuellement 2 400 milles d’étendue. D’après les récits des marins, elle en avait trois mille autrefois, mais les vents du nord-est, qui y soufflent avec violence, en ont submergé une partie. Là où ils soufflent, la côte est très basse. Elle n’apparaît pas de loin et les navigateurs ne la découvrent qu’au moment de l’atteindre. Le roi de l’île s’appelle Sandemain[1]. Il est indépendant. Ses sujets sont idolâtres. Ils n’ont pas de blé, ils se nourrissent de riz, de lait et de viande, ils boivent du vin de palmier.

Dans cette île on trouve le rubis que ne produit aucune autre contrée. On y trouve aussi des saphirs, des topazes et des améthystes, ainsi que beaucoup d’autres pierres précieuses. Le roi possède un rubis qui est le plus beau et le plus gros qui existe au monde. Il a une paume de longueur, il est gros comme le bras d’un homme. L’éclat en est incomparable, il est aussi brillant que le feu et n’a pas une tache. À peine en pourrait-on estimer la valeur. Le grand Khan envoya au roi des ambassadeurs pour le prier de lui vendre ce rubis. Il offrait d’en payer le prix d’une ville ou quelque prix qu’en demanderait le roi. Mais celui-ci répondit que pour rien au monde il ne consentirait à se défaire d’une pierre qui lui venait de ses ancêtres.

  1. Probablement soudhamma « de grande vertu », appellation donnée au roi Sargwadjnya qui régnait à Ceylan, au temps de Marco Polo.