Les Merveilleux Voyages de Marco Polo dans l’Asie du XIIIe siècle/Partie II/Chapitre 28

CHAPITRE XXVIII

Le pont du Poulisangin


Un jour, le grand Khan manda messire Marco Polo, qui dicte ces récits, et l’envoya dans un pays vers l’Ouest. Marco Polo quitta donc Cambaluc et pendant quatre mois fit route vers l’Ouest et je vous dirai ce qu’il vit dans son voyage.

Quand on a chevauché dix milles après être parti de Cambaluc, on rencontre un très grand fleuve, le Poulisangin, qui se jette dans l’Océan. Des marchands le suivent avec leurs marchandises. On y voit un très beau pont de pierre comme il n’en existe que fort peu. Il est long de trois cents pas et large de huit. Dix hommes à cheval y peuvent passer de front. Il a vingt-quatre arches et est construit tout en marbre gris. De chaque côté du pont, par dessus, règne un parapet fait de colonnes de marbre. Chaque colonne repose sur un lion de marbre et supporte elle-même un autre lion. Tous ces animaux sont beaux, grands et artistement sculptés. L’espace entre les colonnes est fermé par des balustrades de marbre gris afin d’empêcher que les passants ne tombent à l’eau.

Quand on quitte le pont et qu’on chevauche trente milles vers l’Ouest, à travers une contrée pleine de vignes, de vergers, de champs cultivés, de sources et semée d’hôtelleries, on trouve une ville nommée Giugiu[1]. Elle est grande et belle ; elle contient de nombreux monastères de religieux idolâtres ; ses habitants se livrent au commerce et à l’industrie : ils fabriquent des étoffes de soie et d’or. Il y a des hôtels pour les voyageurs.

  1. Tcho-tchéou.