Les Livres d’étrennes, 1907

(Redirigé depuis Les Livres d'étrennes, 1907)
Les Livres d’étrennes
Jules Bertrand

Revue des Deux Mondes tome 42, 1907


LES
LIVRES D’ÉTRENNES

Dans le présent qui nous écrase de ses exigences multiples et mesquines et chasse l’idéal, d’aucuns prétendent qu’au développement de l’éducation physique et à l’entraînement pour tous les sports, il faut attribuer la défaveur qui semble frapper de plus en plus les œuvres de littérature ou de science pures. D’autres nient cette faillite, tout au moins pour les ouvrages d’imagination, les romans en particulier, dont le nombre s’accroît prodigieusement d’année en année, tandis que le tirage a dépassé, pour quelques-uns, tous les chiffres précédemment atteints. Mais il est un fait incontestable, c’est que chacun croit se connaître en art en affectant un goût de plus en plus marqué pour l’image, pour la reproduction des croquis, dessins, peintures, estampes, figurations et scènes de tous les âges. A suivre des expositions si nombreuses et si diverses, tous s’imaginent, même sans aucune étude, s’être familiarisés avec la manière des maîtres, le caractère ou les tendances si opposées de nos écoles, depuis les commencemens de nos peintres-selliers ou imagiers et de nos Primitifs du XIIIe siècle, jusqu’à nos modernistes, symbolistes, luministes, impressionnistes, — qui n’ont d’ailleurs fait que reprendre les procédés d’antan, — et la mode, secondant ces prétentions, a favorisé l’éclosion des publications les plus rares et les plus riches, comme aussi les plus étranges et les plus disparates. Assurément, seuls quelques privilégiés peuvent acquérir les somptueux exemplaires, limités à un très petit nombre, des ouvrages de MM. Emile Gebhart, Henri Bouchot, P. de Nolhac, Frédéric Masson, pour ne citer que les derniers éclos, dont le prix varie entre quelques centaines et quelques milliers de francs. Mais presque toutes les productions des artistes naguère encore peu connus sont aujourd’hui célèbres ou répandues et mises à la portée de tous par nos grands éditeurs, qui tiennent à maintenir les qualités de parfaite exécution et d’exquise élégance, dont s’honore la librairie française. Grâce à elles, ses livres continuent de se distinguer de ceux de fabrication étrangère. Cette année, comme à leur ordinaire, ils n’ont pas manqué à la tradition.

Un des manuscrits les plus précieux de la Bibliothèque nationale est le manuscrit qui renferme la traduction des Antiquités judaïques[1]de Josèphe, et que le don, fait en 1906 par le roi Edouard VII, des dix feuillets retrouvés à Windsor, a permis de compléter. Plusieurs artistes travaillèrent à l’enrichir de leurs miniatures et enluminures, et l’on sait que la partie la plus belle des illustrations a pour auteur le peintre tourangeau Jehan Foucquet. A l’heure où tant de merveilles d’art sont dispersées, où l’ancienne France est atteinte dans ce qui a fait sa grandeur et sa force, et jusque dans son patrimoine, formé des trésors de ses églises, de ses monastères et de ses couvens, tandis que l’on s’efforce de faire disparaître tant de témoignages de son passé et de ruiner ses croyances, l’Académie des Inscriptions, par un heureux contraste et dans un geste généreux, a voulu assurer la reproduction de ce magnifique ouvrage. Elle a confié le soin de cette publication à M. le comte Paul Durrieu, que ses études spéciales sur l’art du moyen âge et sur les premiers peintres français, qu’il a mieux fait connaître et dont il a même révélé quelques-uns, sa compétence, son goût et son savoir, désignaient pour cette tâche.

Parmi les auteurs de l’antiquité, dont les œuvres sont restées le plus en vogue au moyen âge, Flavius Josèphe, l’historien de la nation juive, est au premier rang. Né en Judée, à Jérusalem, en l’an 37 de notre ère, à une époque encore très voisine de celle où le Christ a vécu, on s’explique aisément que ses œuvres écrites tout d’abord en grec aient été de bonne heure traduites, et surtout son livre des Antiquités judaïques, qui n’est guère autre chose que l’Histoire Sainte si vénérée dans tout le monde chrétien. Transcrites en latin à partir du VIe siècle, les Antiquités judaïques et la Guêtre des Juifs furent, au moyen âge, maintes fois copiées et recopiées. Mais alors que l’on continuait à répandre le texte latin de Josèphe, il en circulait déjà des versions françaises. La première des « Anciennetés des Juifs selon Josèphe » remonterait, dit M. P. Durrieu, à qui nous empruntons ces détails, au moins au règne de Charles VI, et, ce qui est certain, c’est qu’au mois de janvier 1410, un exemplaire de cette traduction, saisi l’année précédente à Marcoussis, après l’exécution du grand maître de l’hôtel du roi, Jean de Montaigu, fut envoyé à la Bibliothèque ou, comme on disait alors, à la Librairie royale du Louvre par le duc de Guyenne, fils du Roi. Vers le même temps, deux autres exemplaires se sont trouvés entre les mains du duc Jean de Berry, — frère de Charles V, — mort le 15 juin 1416, dont le Musée Condé à Chantilly conserve les Très Riches Heures. L’un de ces exemplaires en français, qui, après le duc de Berry, a appartenu à son neveu le duc de Bourgogne Jean sans Peur, est complet en un seul volume, illustré d’une grande miniature et de vingt-cinq petites. Le récit même de ces vicissitudes est une page tragique des rivalités entre Armagnacs et Bourbons, depuis l’arrestation et la mort du malheureux duc de Nemours jusqu’à la condamnation du connétable de Bourbon, dont les biens furent confisqués au profit de la couronne ainsi que le précieux manuscrit, qui passa de Blois à Fontainebleau et de Fontainebleau à Paris. Aujourd’hui, après une séparation de quatre siècles, et à la suite de la découverte faite à Windsor des dix feuillets qui ont été réintégrés dans le volume acquis en 1903 par M. Yates Thompson et la remise du manuscrit, ainsi restauré, faite entre les mains du président de la République par le roi d’Angleterre, l’exemplaire des « Anciennetés des Juifs selon Josèphe, » provenant des ducs Jean de Berry et Jacques de Nemours se trouve de nouveau reconstitué par le rapprochement de ses deux tomes.

L’examen des merveilleuses miniatures du tome Ier du Josèphe a amené M. Durrieu à conclure que les trois miniatures des trois premiers livres sont contemporaines de l’époque du duc Jean de Berry et que les onze autres grandes miniatures (des livres IV à XIV) sont l’œuvre d’un artiste très supérieur, d’un artiste qui travaillait à la fin du règne de Charles VII, ou sous Louis XI, et qui était incontestablement un Français, mais qui cependant avait vu Rome. Ses conclusions s’accordent d’ailleurs parfaitement avec une des deux notes que le secrétaire du gendre Je Louis XI, François Robertet, contemporain de l’époque où Foucquet travaillait encore, a inscrites à la fin du volume : « En ce livre a douze ystoires : les troys premières de l’enlumineur du duc Jean de Berry et les neuf de la main du bon paintre et enlumineur du roi Louis XI Jehan Foucquet, natif de Tours. »

Dans les Antiquités juives, ce qui donne encore la plus haute idée du talent de Foucquet, ce sont moins peut-être les scènes et les personnages que les paysages qui les encadrent. La plupart nous transportent vers la Touraine ou vers le Poitou, dans ces vallées délicieuses aux rivières d’une courbe pleine de grâce. Quelques-uns semblent empruntés à une nature plus tourmentée et font penser aux régions du massif central de la France, qui constituaient ou avoisinaient les comtés et vicomtes de la Marche, de Carlat, de Murat et de Castres, domaines personnels de ce Jacques d’Armagnac duc de Nemours, pour qui Foucquet a peint ses miniatures. Le plein air dont on a tant parlé, il est déjà là tout entier, indiqué discrètement avec un sentiment des valeurs qui tient presque du prodige. C’est ce qui atteste la supériorité de Foucquet sur la plupart des peintres du XVe siècle ses contemporains, des maîtres qui savaient également dérouler derrière leurs figures principales des paysages étendus ; et elle n’a jamais été plus marquée que dans ces compositions du Josèphe, où il apparaît avec quelque chose de plus qu’eux, l’intuition de l’atmosphère, de cette lumière si fine, si exquise dans ses demi-teintes, qui, en enveloppant l’horizon d’une brume légère, donne aux aspects de la nature française un charme infini et fait du bon peintre de Louis XI un précurseur. Ses miniatures, — où revit la France des premiers Valois, de la fin du XIVe siècle et du commencement du XVe siècle, — constituent un document d’une valeur exceptionnelle pour l’histoire de l’art français.

Après l’avoir suivi depuis les origines, — avant les statuts de 1391, — chez les célèbres miniaturistes parisiens Jehan Pucelle, Jacquet, Macry et Anseau de Sens, chez Grotto, chez Girart d’Orléans, qui exécutait, pour le roi Jean, des cartons que d’autres grandissaient contre les murailles, et avoir étudié, avec M. Durrieu, la seconde période gothique, celle qui nous a valu Foucquet, comme aussi le maître de Moulins et les illustres Avignonnais, quel n’est pas l’intérêt de comparer l’œuvre du peintre de Tours à celle qu’exécutait à la même époque le maître de Nuremberg, Albert Durer[2], peintre, graveur, aquafortiste, illustrateur d’objets d’art, chez qui l’imagination singulièrement féconde et le rêve fantastique s’allient à l’observation rigoureuse de la réalité, qui fut amoureux à la fois d’idéal et de réalité, dont les portraits, si vivans et d’un coloris plein d’éclat, sont admirables d’expression, — l’un des artistes les mieux doués et les plus complets, et qui, dans toutes les branches de l’art, fut et restera la plus parfaite incarnation du génie allemand, de l’âme pensive et mystique du Nord ? Une consciencieuse et savante étude nous permet de suivre l’évolution du talent et de la brillante carrière du peintre de Maximilien Ier et de Charles-Quint, et 447 gravures nous donnent l’idée la plus juste de son œuvre : portraits, dessins, gravures à l’eau-forte, dispersés entre trente-neuf collections publiques et particulières.

C’est également à l’époque de la Renaissance que nous transporte le livre de M. E. Rodocanachi sur la Femme italienne[3]. Il témoigne d’une connaissance générale de tout ce qui touche à son sujet, de l’abondance de son information puisée aux sources mêmes, dans les correspondances, les contes, les mémoires, les chroniques, les poèmes, les récits galans et spirituels et les chefs-d’œuvre de l’art italien ? qui nous montrent bien tout ce qu’il y eut d’intelligence et de beauté, de charme et de séduction, d’amour et de perfidie chez quelques-unes des héroïnes que nous racontent Pétrarque, Boccace, Castiglione, et que nous représentent les portraits de Titien, de Véronèse. Dans cette incomparable galerie qui résume plus d’un siècle de grâce féminine et enchanteresse et d’histoire, combien de tableaux exquis, de documens précieux, et qui nous font pénétrer dans l’intimité de la vie, des coutumes et des mœurs de cette époque incomparable !

Entre tous les livres à gravures publiés cette année, s’il en est un qui se distingue par ce double caractère d’histoire et d’art, la nouveauté et l’étendue des recherches, le format somptueux, la beauté typographique, le luxe des planches tirées hors texte d’après les photographies de l’auteur et des planches en couleurs, établies conformément à ses indications, c’est assurément cette magnifique monographie de M. Marcel Dieulafoy, véritable musée où se trouvent réunis pour la première fois les chefs-d’œuvre de la Statuaire polychrome espagnole[4]. L’on sait aujourd’hui par le témoignage des hypogées, des temples, des statues exhumées, que les Grecs, comme avant eux les Égyptiens et les Chaldéens, ne s’étaient pas bornés à l’étude des formes, mais qu’ils avaient aussi cherché à rendre la couleur des êtres mortels dont ils souhaitaient créer ou conserver l’image, et que les premières sculptures des divinités adorées par les Hellènes, celles qu’on appelait des ξόανα (xoana) furent également les premières qui reçurent des applications de matières colorées. Le chef-d’œuvre de la polychromie naturelle fut sans doute la statue chryséléphantine. En même temps que la polychromie naturelle, les artistes grecs pratiquaient la polychromie artificielle, c’est-à-dire la peinture des statues. MM. Homolle, Pottier, Collignon, — ce dernier, à qui nous devons les monographies sur Phidias[5], Scopas et Praxitèle[6], — M. Lechat et M. Perrot ont établi cette vérité jusqu’alors si discutée. M. Marcel Dieulafoy, à son tour, a savamment expliqué comment les écoles de sculpture espagnoles, manifestant leur unité et accusant leur personnalité en face des écoles étrangères, sont toujours restées fidèles à la statuaire peinte. Leur prédilection pour le bois et la polychromie était bien raisonnée : dans leur esprit, comme dans celui des artistes grecs du Parthénon, bien loin de nuire à la forme, la couleur pouvait lui être associée pour le plaisir des yeux et dans un sentiment de respect pour la beauté véritable et parfaite.

A l’histoire de l’art se rattache la nouvelle série des Chefs-d’œuvre des Grands Maîtres[7], qui déroule sous nos yeux les peintures les plus célèbres et les plus caractéristiques du XIXe siècle, collection d’admirables estampes, qui met à la disposition de tous, sans exclusion à l’égard d’aucune école, les plus beaux tableaux de notre temps, reproduits dans des gravures d’une fidélité merveilleuse.

Et si l’on veut connaître toutes les écoles de la Peinture anglaise[8], suivre sans trop d’efforts les grandes lignes de son évolution de ses origines à nos jours, de Nicolas Hilliard, le peintre de la reine Elisabeth, et de Dobson, jusqu’à George Henry et Wilson Steer, c’est au livre de M. Armand Dayot qu’il faut avoir recours, à cette étude aussi méthodiquement composée que clairement et agréablement présentée, avec autant d’érudition que de goût. L’Angleterre est demeurée pendant longtemps en arrière des autres pays d’Europe pour la culture des Beaux-Arts, et la renommée de l’école anglaise date en réalité du XVIIIe siècle, de William Hogarth, de Joshua Reynolds, de Gainsborough et de sir Thomas Lawrence, qui ont excellé a exprimer le caractère et l’individualité de leurs modèles. Puis ce furent, à la suite de la réforme de l’école due à Ruskin, les préraphaélites qui affectaient d’imiter la manière des Van Eyck, des Memling, des Masaccio, de Giotto, et dont les tableaux montrent le goût pour la recherche, la prétention à la profondeur, mêlés à beaucoup d’inexpérience. En parcourant cette galerie des maîtres britanniques, on jugera des tendances nouvelles de l’école moderne, de ses manifestations diverses depuis un demi-siècle et de ses progrès, car si elle reste encore bien souvent raide et prétentieuse, virulente de tons, avec des incorrections de dessin et des licences qui passent la permission, indécise et obscure, et parfois énigmatique et laide, nous sommes loin du temps où l’on pouvait dire : C’est déjà beaucoup à la fois d’être Anglais et d’être peintre.

Dans les Galeries d’Europe[9], l’intérêt du commentaire s’ajoute à celui qui naît de la vue des œuvres les plus accomplies qu’aient produites les artistes de tous les temps, de tous les pays et de toutes les écoles. Leurs tableaux les plus célèbres nous y apparaissent avec la représentation de leur couleur même, de manière à donner presque l’illusion des originaux et nous sont présentés par les écrivains d’art les plus compétens, qui nous initient à la fois à la vie du peintre et à la genèse de son œuvre.

A côté de ce livre, la place est tout indiquée pour les Maîtres contemporains[10], publication qui ne contient que de l’inédit, reproduit directement en couleurs les tableaux des peintres modernes, et répond parfaitement aux préoccupations des artistes et des amateurs. Et, dans ces belles collections d’un éditeur qui se distingue par le soin et la perfection qu’il apporte à tous les ouvrages consacrés à l’histoire de l’art et à ses diverses manifestations, rappelons ici les dernières monographies publiées de la collection des Grands artistes[11], Holbein[12], Murillo[13], — les Van Eyck[14], Prud’hon[15], Daumier[16], Paul Potter[17]et, dans les Villes d’art[18] : Gênes[19], Prague[20], Palerme et Syracuse[21], Poitiers et Angoulême[22], Grenoble et Vienne[23], par M. Marcel Reymond, Dijon et Beaune[24], tous ces volumes, dus à la plume de critiques autorisés, au crayon, à la pointe, ou au pinceau d’habiles praticiens.

Parmi les œuvres d’imagination qui sont entrées dans la circulation générale des richesses de l’humanité, Don Quichotte[25], qui est à la fois la personnification de son auteur et du génie mystique, réaliste et héroïque de l’Espagne, restera toujours le partage de ces privilégiés de l’idéal et de l’enthousiasme qui admirent sa fierté, sa loyauté, sa fidélité à toute épreuve, qui veulent, avec le pauvre et généreux hidalgo, mépriser la calomnie et les méchans, librement rire de la sottise humaine, s’amuser au spectacle des folies du monde, de ses rêves, de ses ambitions et de ses amours, et, comme le chevalier de la Manche, continueront à se mesurer avec le chevalier de la Blanche-Lune, à combattre pour la délivrance des princesses enchantées et la défense des opprimés. Hélas ! Dulcinée est bien morte, elle ne se réveillera plus !

Si Gil Blas[26]est assez éloigné de valoir Don Quichotte et s’en distingue par sa psychologie un peu courte, sa philosophie toute pratique, qui est celle de l’expérience et de l’intérêt, par le caractère du personnage qui n’a rien d’un héros, qui est tout l’opposé de celui que Cervantes appelait la Fleur des chevaliers errans, il est un chef-d’œuvre de notre littérature nationale. Assurément ce n’est pas par la moralité des principes, trop souvent cachée sous l’immoralité des actes, que Gil Blas, plus roué encore que poltron, aussi peu délicat en amour qu’en affaires, mais toujours enjoué et d’une humeur égale dans son égoïsme cynique, se recommande à la jeunesse. Pour qu’il puisse être lu par elle et qu’elle goûte l’excellence et le naturel d’un style clair et sobre, qui a la perfection dans la simplicité, il lui faut une édition comme celle faite à son usage par les soins de M. Louis Tarsot.

Un livre qui se présente tout naturellement à la pensée comme un thème d’inspirations pittoresques, c’est assurément celui de La Fontaine, et, si jamais œuvre se prêta à ces curiosités de mise en scène par lesquelles nous aimons à renouveler la parure de nos vieux classiques, c’est bien celle du conteur original et prime-sautier, du poète et de l’observateur de la nature, dont les Fables[27]répètent aujourd’hui ce qui se pensait il y a deux mille ans sur les bords du Gange et restera, dans l’antiquité du monde, la jeunesse de l’humanité. L’illustration en a tenté la verve imaginative et fertile de M. Vimar. Il sait donner aux animaux la physionomie, le geste et l’attitude d’êtres qui pensent et moralisent, et dont la morale, souvent déguisée comme eux, est un peu tout ce qu’on veut, tout ce qu’on voudra et semble faite pour ne gêner personne.

L’une des plus charmantes et des plus pittoresques interprétations qui aient été données de ce livre des Fables, qui se prête si bien à la fantaisie des talens les plus différens par la diversité même des personnages, la variété des paysages, des tableaux de mœurs, est celle de M. Benjamin Rabier[28]. Lui aussi, sait, à l’imitation du bon fabuliste, mettre dans l’expression des bêtes, les passions et les sentimens qui sont de tous les temps. A l’imagination de l’artiste les aventures de l’immortel héros de Daniel de Foë offrent également un thème inépuisable, et dans cette édition si intéressante à la fois par son illustration entièrement renouvelée et par son texte que rajeunit une élégante traduction, des lecteurs de tous les âges goûteront, avec Robinson Crusoë[29], les âpres joies de la solitude, de la lutte pour la vie et y admireront la puissance de la volonté unie à l’esprit d’initiative.

Les éditions nouvelles d’Eugène Fromentin : Sahara et Sahel[30], des Lettres de mon moulin[31]d’Alphonse Daudet, ainsi que de toutes celles du même auteur, le Petit Chose, — Tartarin, — Numa Roumestan, toutes publiées chez l’éditeur Lemerre, dont on peut recommander l’incomparable choix d’ouvrages qui font partie de la Petite Bibliothèque littéraire[32], les poésies et les romans, chefs-d’œuvre de pensée et de style de l’élite du monde littéraire.

A côté de ces récits que l’on trouve beaucoup de plaisir et de profit à relire, et dans un tout autre genre, il n’est guère de livre plus attachant et de plus instructif que celui de M. de Wyzewa. Quelques figures de femmes aimantes et malheureuses[33], dont les écrits se distinguent entre tous par la séduction du style, par la souplesse du talent, la diversité des études, la délicatesse de touche et la variété des connaissances.

En éveillant le goût des voyages, en même temps qu’il apporte sur les pays étrangers des vues plus larges, des notions précises, les résultats des dernières explorations et qu’il donne des coutumes et des hommes des images authentiques et des idées exactes, le Tour du Monde[34]continue d’exercer l’influence la plus profonde sur l’éducation des jeunes gens. Comme à l’ordinaire, il nous conduit, cette année, dans les régions les plus opposées : au Cœur de l’Afrique, de Mombasa au Victoria Nyanza[35] ; chez les Pères Blancs[36] ; à Zanzibar[37] ; à Malacca[38] ; à Cuba[39] ; en Bolivie[40] ; dans l’Inde[41] ; chez les populations des Fidji[42] ; au Soudan égyptien[43] ; dans la Cyrénaïque[44] ; à Fez[45] ; à Formose, première colonie japonaise[46] ; dans le Grand-Duché de Luxembourg[47]. L’actualité y est représentée par M. Henri Bourdon, qui nous décrit la catastrophe de Valparaiso[48], l’incendie de la ville et la fusillade des bandits incendiaires ; par M. Reginald Kann, qui nous fait assister aux Combats des Philippines[49] ; par M. Dolens, qui raconte ses souvenirs d’Arménie[50] ; par M. Gaston Cahen, qui nous montre les récentes transformations de notre capitale tonkinoise Hanoi[51]. Avec Mme Dieulafoy : en Castille et en Andalousie[52], M. Henri Guerlin en Espagne[53], MM. G. de Beauregard et de Fouchier en Portugal[54] ; Au Japon[55] ; En Amérique latine[56], ce sont surtout des impressions esthétiques et des sensations pittoresques que nous éprouvons à la description des richesses d’art de ces pays, des mœurs, des coutumes, des habitans des campagnes et des villes, de tout ce qui en fait la sévère et séduisante originalité. C’est encore l’Espagne somptueuse et séductrice qui revit dans les chants du sculpteur et poète Zacharie Astruc : les Alhambras[57], dont les merveilleuses illustrations en couleurs sont signées des noms les plus illustres.

Mais l’étude à la fois la plus instructive et la plus intéressante que l’on puisse faire de l’une de nos plus belles possessions africaines, on la trouvera dans ce volume, si nouveau, si bien informé et si complet, de MM. Marius et Ary Leblond, sur la Grande Ile de Madagascar[58], et dans Neuf ans à Madagascar[59], l’ouvrage du général Gallieni, qui, plus qu’aucun autre, en sa qualité de gouverneur, a contribué aux progrès réalisés. C’est, avant tout, une histoire de la pacification de l’Emyrne, du Betsiléo, des opérations militaires, de l’extension de la pénétration et de l’influence française dans les provinces côtières, de la genèse, de l’organisation, du développement de notre colonie, des travaux entrepris, des résultats obtenus au point de vue administratif, économique et social.

Aujourd’hui où l’œuvre de pénétration européenne, en Afrique peut être considérée comme à peu près terminée, où cette partie du monde se trouve explorée en tous sens, l’histoire de la conquête, du partage et de la formation territoriale des colonies que l’Europe s’est adjugées dans ce continent peut être faite ; et c’est la tâche que s’est proposée le docteur Rouire en écrivant un résumé de ses recherches, de ses voyages : l’Afrique aux Européens[60].

Si de ces possessions lointaines et de nos colonies, nous revenons en France[61], M. Vidal de la Blache nous donne sur notre pays le plus magistral tableau, le plus vivant, le plus complet qu’on en ait encore tracé des rapports de l’homme avec la terre. Cette savante monographie de son action sur la contrée qu’il habite et qu’il accommode à ses besoins porte le témoignage de ce que peut la géographie moderne avec sa méthode, sa perfection et ses procédés.

A l’Homme et la Terre[62]est également consacrée l’œuvre d’Elisée Reclus, toute d’érudition et qui porte la marque de connaissances si vastes. Le tome quatrième traite des communes, des monarchies, des Mongols, Turcs et Chinois, de la découverte de la Terre, de la Renaissance, des colonies, du XVIIIe siècle.

Une des plus belles publications de l’année, une des plus charmantes et des plus originales, éditée avec autant de luxe que de goût, où l’écrivain et l’artiste se complètent, qui répond à ce que l’on demande à un livre d’étrennes et ne peut manquer d’avoir à la même librairie le succès qu’ont obtenu les précédens ouvrages, est ce brillant album où MM. Montorgueil et H. Vogel évoquent la fière et galante figure de Henri IV[63]dans ses grandes lignes et dans quelques-unes des attitudes devenues proverbiales ou restées légendaires. Nous sommes à un moment admirable de la vie intellectuelle de la France, au temps des Estienne, qui font connaître les chefs-d’œuvre de l’antiquité : de Cujas, qui prépare ce qui sera un jour la loi moderne en enseignant le droit romain ; de Pierre Ramus, le rénovateur de l’Université ; de Ronsard, de Bernard Palissy, de Jean Goujon, de Philibert Delorme. Mais artistes, savans, lettrés, sont animés d’un zèle extraordinaire dans la guerre religieuse qui passionne tous les esprits, et c’est sur ce sombre fond que se détache tout d’abord, menant au château de Coarraze, sous les yeux de sa mère, rigide calviniste, la vie rude, frugale et libre des montagnards, le petit Henri de Navarre, tout à ses parties de saute-mouton et de cligne-musette, trop jeune encore pour comprendre quelque chose aux conflits religieux qui font à ce beau pays de France la blessure qu’il sera un jour appelé à guérir. Le voici bientôt à la cour du roi Henri II, qu’il amuse par ses bons mots et ses saillies. A quinze ans à peine, il assiste à la bataille de Jarnac. Échappé à la Saint-Barthélémy, il fait avec Henri III le siège de Paris, bat les Ligueurs à Arques, à Ivry, abjure le calvinisme, se fait sacrer à Chartres, met fin à une longue période de guerres et signe la paix de Vervins et l’Édit de Nantes. Regardez-le alors. Il sourit dans sa belle barbe en éventail, à la fois guerrier magnifique et prince généreux, qui adore ses sujets et en est adoré.

Tel nous apparaît ici le plus spirituel des rois de France avec son tempérament brave, ardent et passionné, cette bonhomie apparente et cette habile séduction, cette volonté et cette force tempérées par la prudence, la souplesse et la ruse, et ce scepticisme de nouveau converti, qui lui permettront de louvoyer entre catholiques et protestans, de manœuvrer entre les deux Églises, de se rendre maître d’une nation divisée, l’aideront à gouverner, à concevoir une vaste politique, à grandir l’influence française en devenant le roi des ministres, des prêtres et des évêques, avec le désir de leur paraître à tous un sincère et puissant protecteur afin de les mieux tenir en bride. Les portraits si bien rendus, si saisissans de vérité, de Marie de Médicis, de Coligny, de Sully, qui resta parmi ceux de la religion que le roi ne put « ployer à quelques honnêtetés, » dignes d’un tout autre nom, sont bien faits, ainsi que tous ces tableaux, pour frapper les jeunes imaginations et leur mettre sous les yeux des spectacles qu’ils n’oublieront plus.

Dans l’histoire des grandes explorations, les expéditions comme celle de la Discovery, conduite au Pôle Sud par le capitaine Robert Scott, montrent ce que peuvent la volonté et le sang-froid unis au courage et à la persévérance.

C’est un tout autre voyage, que celui du prince Scipion Borghèse, De Pékin à Paris[64], et qui, s’il n’a pas le même intérêt au point de vue scientifique, n’en est pas moins remarquable dans sa nouveauté ; puisqu’en soixante jours l’intrépide chauffeur a pu voir d’une automobile la moitié du monde en passant, en dépit des obstacles, par toutes les plus dures épreuves de locomotion, de climat et de température. Les vues prises en cours de route ajoutent à l’originalité du parcours qu’a accompli de son côté M. Cornier dans le Raid Pékin-Paris[65], et M. Jean du Taillis, en sens inverse, de Paris à Pékin[66]en quatre-vingts jours. Le Journal d’un Cosaque du Transbaïkal[67], illustré d’après les photographies et les dessins de l’auteur, le colonel A. Kvitka, est la tragique iliade de la guerre russo-japonaise, le commentaire saisissant des actions héroïques où il fut mêlé dans la campagne de Mandchourie. Pour bien connaître l’origine de cette guerre, les causes de la Crise Russe[68]et ses conséquences, il faut lire le livre de M. Paul Milioukov.

Ceux qui aiment les aventures émouvantes, les drames terribles, auront de quoi contenter leur goût dans le récit, écrit d’après des documens originaux, de la Vie de Mandrin[69], l’un de nos brigands les plus sympathiques, l’un de ceux que la France a, paraît-il, le droit de revendiquer, et dont l’histoire se rattache à celle de la Ferme et des fermiers généraux aussi étroitement que la corde au pendu. Le capitaine général des contrebandiers de France laissa d’ineffables souvenirs dans les lieux où il passa, depuis la maison où il naquit, à Saint-Étienne-de-Saint-Geoirs, jusqu’au château où il fut pris à Rochefort-en-Novalaise, le « château Mandrin, » comme on l’appelle encore. La recette buraliste de Craponne, qu’il a dévalisée, la rue du Consulat au Puy, où il a pris d’assaut l’entrepôt des Fermes, la Chaise-Dieu qu’il a « visitée » deux fois, les rives de l’Arroux, où il a ramassé d’un heureux coup de filet trente-sept séminaristes, les champs de bataille de Guennaud et de La Sauvetat ne se sont guère modifiés.

Dans les romans, contes moraux et honnêtes dont la moralité n’exclut pas l’agrément, nous n’avons pas besoin de faire ressortir ceux d’écrivains dont on connaît depuis longtemps la manière et les œuvres : l’Enfant de Saint-Marc[70], par M. B.-A. Jeanroy, brillante reconstitution historique dont le cadre est la Florence des Médicis, qui a tout d’abord paru dans le Journal de la Jeunesse[71] ; la Sorcière du Vésuve[72], par MM. Gustave et Georges Toudouze, drame qui se déroule au temps du Premier Empire, dans la Campanie et dans la Calabre, entre soldats français et bandits italiens ; le Temps des cerises[73]de Clovis Hugues ; la Petite Patricienne[74], par M. Henri Guerlin, roman de reconstitution historique et chrétienne, auquel une chaste intrigue d’amour ajoute le charme de son idylle. Un livre qui, lui aussi, convient aux jeunes filles est Guillaumette[75], par M. Pierre Lenglé.

La plupart ont mis dans leurs récits beaucoup de verve et d’humour : ils sont aujourd’hui légion à la suite des Fenimore Cooper, dont la librairie Flammarion donne une élégante édition du Tueur de daims[76], des Gabriel Ferry, des Jules Verne. Et, puisque nous avons nommé un des conteurs les plus ingénieux et les plus féconds de notre temps dont la disparition a été si vivement ressentie de toute la jeunesse, citons son dernier roman : l’Agence Thomson[77]. On y suit l’odyssée du voyage organisé par cette agence sur le Seamew, où s’engage au milieu des péripéties les plus imprévues une double intrigue, qui finit par le mariage de Roger de Sorgues avec la jeune Américaine Dolly, et de l’interprète, qu’on découvre être le marquis de Gramond, avec mistress Lindsay. Autour d’un Secret[78]de M. Perrault ne sera pas moins apprécié pour ses scènes si délicates que ses précédentes nouvelles : Pour l’honneur, Ma sœur Thérèse. Quant aux Chevauchées d’un Saint-Cyrien dans le Sud Oranais[79], il emprunte aux événemens récens encore plus de vie et d’actualité. Il en est de même du volume de M. Déroulède : Feuilles de route[80], destiné à tous les patriotes.

Parmi les récits d’aventures de terre et de mer qui conservent la préférence des jeunes, tout simplement parce qu’ils sont dus à la plume d’écrivains qui ont une brillante imagination et de la verve ou de l’humour, il faudrait nommer tous ceux que publie M. P. d’Ivoi : Miss Mousqueterr[81], Jalma la Double[82], qui a pour cadre la Corne d’Or et pour héroïnes deux nièces du sultan Abdul-Hamid ; — Péril en mer[83], par Gustave Toudouze ; — l’Orgueilleuse[84], Grande Amie[85], Bénédict[86], par M. Emile Pech ; — la Petite princesse des Neiges[87], par Thécla de Mommerot et tous ceux de la Bibliothèque du Petit Français[88], de Mon Journal, et du Saint-Nicolas.

Le joli conte féerique de M. J.-M. Barrie : Piter Pan[89], l’enfant-oiseau, qui répond si bien à la verve étrange et merveilleuse d’Arthur Rackham, ainsi que la Reine des Neiges[90]d’Andersen, la fantastique histoire de Valdemar Daa et de ses filles contée par le Vent, traduite par M. Etienne Avenard, et illustrée par le peintre danois Hans Tegner, prennent naturellement place ici.

À ce genre de romans où l’habileté, le fin de l’art est de faire accomplir aux personnages des exploits invraisemblables et de les faire accepter par le lecteur, se rattachent : Robinsons sous-marins[91], par le commandant Driant, récit aussi instructif qu’impressionnant de la perte de la Libellule, qui s’abîme par cinquante-cinq mètres de fond dans le golfe de Tunis, et des souffrances endurées dans ce cercueil d’acier ; — le Trésor dans l’abîme[92], par Jean de La Hire ; — les Aventures de Roule-ta-Bosse[93], par M. Louis Boussenard ; — le Coffre-Fort vivant[94], par M. Frédéric Mauzens ; — les Bandits de la Cordillère[95], par M. Henry Leturque ; — les Deux Tigres[96], ou exploits des pirates de la Malaisie qui ne sont pas moins terribles ; enfin le Million de l’Héritière[97]et Sherlock Holmes[98], de Conan Doyle. Ceux qui goûtent les livres où l’élément scientifique domine seront satisfaits en lisant les Secrets de la prestidigitation[99], par M. Saint-Jean de l’Escap, Ballons dirigeables, Aviateurs[100], le Radium[101], l’Océanographie[102]. D’autres s’amuseront aux joyeuses histoires de M. Jean Drault : Nos domestiques[103]. Quant aux amateurs de vieilles chansons, ils apprécieront l’heureuse idée qu’a eue M. Maurice Bouchor en publiant un recueil de Chants de la jeunesse[104], qui s’ouvre par une page de Beethoven, et s’achève sur une admirable mélodie de Schubert, comme aussi M. Xavier Privas en écrivant la poésie et la musique de Chantez, petits ![105], — ce qui permet de dire que, même dans ce qui n’est pas toujours gai, tout finit par des chansons.


J. BERTRAND.

  1. Plon, Nourrit.
  2. Hachette.
  3. Hachette.
  4. Hachette.
  5. Plon.
  6. Plon.
  7. Hachette.
  8. Lucien Laveur.
  9. H. Laurens.
  10. H. Laurens.
  11. H. Laurens.
  12. H. Laurens.
  13. H. Laurens.
  14. H. Laurens.
  15. H. Laurens.
  16. H. Laurens.
  17. H. Laurens.
  18. H. Laurens.
  19. H. Laurens.
  20. H. Laurens.
  21. H. Laurens.
  22. H. Laurens.
  23. H. Laurens.
  24. H. Laurens.
  25. Delagrave.
  26. H. Laurens.
  27. Mame.
  28. Librairie illustrée. Jules Tallandier.
  29. Librairie illustrée. Jules Tallandier.
  30. Plon.
  31. Ernest Flammarion.
  32. Alphonse Lemerre.
  33. Perrin.
  34. Hachette.
  35. Hachette.
  36. Hachette.
  37. Hachette.
  38. Hachette.
  39. Hachette.
  40. Hachette.
  41. Hachette.
  42. Hachette.
  43. Hachette.
  44. Hachette.
  45. Hachette.
  46. Hachette.
  47. Hachette.
  48. Hachette.
  49. Hachette.
  50. Hachette.
  51. Hachette.
  52. Hachette.
  53. Mame
  54. Hachette.
  55. Vuibert et Nony.
  56. Vuibert et Nony.
  57. Leclerc.
  58. Charles Delagrave.
  59. Hachette.
  60. Hachette.
  61. Hachette.
  62. Librairie universelle
  63. Ancienne librairie Furne. Boivin.
  64. Hachette.
  65. Delagrave.
  66. Félix Juven.
  67. Plon.
  68. Librairie universelle.
  69. Hachette.
  70. Hachette.
  71. Hachette.
  72. Hachette.
  73. Ch. Delagrave.
  74. A. Mame.
  75. Librairie universelle.
  76. Flammarion.
  77. Hetzel.
  78. Hetzel.
  79. Hetzel.
  80. Félix Juven.
  81. Ancienne maison Furne. Boivin.
  82. Librairie illustrée. Jules Tallandier
  83. A. Mame.
  84. Charles Delagrave.
  85. Boivin.
  86. Félix Juven.
  87. Charles Delagrave
  88. Armand Colin.
  89. Hachette.
  90. Félix Juven.
  91. E. Flammarion.
  92. Boivin
  93. Librairie illustrée.
  94. E. Flammarion.
  95. Boivin.
  96. Ch. Delagrave.
  97. Librairie universelle.
  98. F. Juven.
  99. Hachette.
  100. Librairie universelle.
  101. Librairie universelle.
  102. Vuibert et Nony.
  103. A. Mame.
  104. Charles Delagrave.
  105. Charles Delagrave.