Les Livres d'étrennes, 1903

Les Livres d'étrennes, 1903
Revue des Deux Mondes5e période, tome 18 (p. 933-946).
LES
LIVRES D’ÉTRENNES

Ainsi qu’il est agréable parfois de marcher, au hasard du chemin, à la découverte, il peut y avoir quelque plaisir à rencontrer, dans cette production annuelle, inégale et illustrée, plus abondante que choisie, plus brillante que solide, quelques œuvres distinguées, de les feuilleter sans dessein arrêté, de s’attacher à la lecture de celles qui intéressent plus particulièrement l’histoire et l’art, le progrès et la science, ou qui, par l’évocation d’une gracieuse féerie, d’une ingénieuse légende, nous transportent dans les régions plus sereines du monde imaginaire. Les parcourir, c’est aussi parcourir un peu notre histoire ; et c’est, avant tout, ce caractère historique, joint à l’originalité, qui fait l’attrait des plus remarquables. M. Frédéric Masson, dont les nombreux ouvrages sur Napoléon et sa famille, sur Joséphine et sur Marie-Louise, forment, dès à présent, un jugement d’ensemble tel que le réclame l’histoire, nous fait assister, dans cette nouvelle étude sur Napoléon et son fils[1], au plus émouvant spectacle qu’ait fourni l’existence de l’homme que l’adversité comme le triomphe a fait plus grand que nature. Le livre s’ouvre aux heures les plus prospères et les plus triomphantes du règne, sur la plus grande espérance et la plus grande joie que l’Empereur avait pu concevoir, et se ferme sur la fin la plus triste qui soit d’une fortune qui paraissait si haute, d’une dynastie qui semblait assurée et qui l’une et l’autre allaient sombrer dans le désastre et la ruine, le fils, après le père, mourant dans l’exil et, comme lui, victime de la tyrannie étrangère. « Il est des souffrances désespérées devant lesquelles l’histoire s’émeut ; il est des vies brisées avant le temps, qui, pour jamais, gardent leur secret ; il est des âmes réfugiées dans le silence qui ne se sont pas manifestées par des actes, des écrits, même des paroles, et qui posent ainsi devant la postérité leur redoutable énigme. » C’est ce secret que M. Masson cherche à découvrir dans la mêlée confuse des événemens, et il a résumé son sentiment dans des pages où s’estompent, en un tableau d’une vérité saisissante, les traits principaux d’une figure indécise et terne, et qui en fixent le caractère moral avec toute la précision qu’on y pouvait apporter. A côté du Roi de Rome, l’Empereur nous apparaît sous des traits plus humains. A la naissance de son fils, il a vu son étoile remonter à l’horizon : il croit désormais que l’avenir lui appartient. Il a pour ce fils l’attachement le plus passionné et le plus idolâtre. Quel soin ne prend-il pas non seulement de lui, mais de tout ce qui l’entoure, soumettant à son service son impérieuse volonté ! Et, quand il est terrassé par l’Europe, quand le malheur l’a courbé, c’est à son fils seul qu’il pense ; c’est ce fils qu’il recommande à Marie-Louise, à ses compagnons d’armes, à tous ceux du moins en qui il croit encore. Et, jusqu’au dernier jour, il est rivé à la pensée de son fils, et c’est sur le portrait de son fils qu’il attache ses regards mourans, comme s’il voulait emporter cette image par delà la tombe : « Mon souvenir sera la gloire de sa vie. »

Or, ce fils, qu’a-t-il été ? Physiquement, c’est un Autrichien et, bientôt, il sera aussi déformé moralement qu’il était atteint physiquement. Pour s’en convaincre, il suffit de le voir, non pas comme le représentent tous ces portraits faits en France dont on connaît tant de répétitions, où chaque artiste s’ingéniait à préciser le rapport entre le fils et le père, et, s’écartant des originaux, déjà peu fidèles, d’Isabey, arrivait à formuler une tête purement napoléonienne, mais comme nous le montrent toutes les autres peintures et dessins et croquis exécutés en Autriche, si admirablement reproduits dans ce beau livre, et qui en apprennent tant sur le duc de Reichstadt. Si Napoléon a voulu, par des portraits officiels, imprimer à son fils le type dynastique, qu’il a imprimé lui-même à ses propres représentations, ce type disparaît dès la chute de l’Empire : entre le Roi de Rome et le prince de Parme, un abîme se creuse, et, loin de reproduire les traits de son père, l’enfant, selon une loi commune, reproduit ceux de sa mère, ceux-là qui sont héréditairement fixés dans la maison d’Autriche. « Que mon fils n’oublie jamais, avait dit Napoléon, qu’il est né prince ! » Il ne l’oublia pas. Goethe a dit que nul ne devient grand dans l’histoire sans avoir recueilli un grand héritage, et l’héritage, de Napoléon, c’était la Révolution française. M. Frédéric Masson a très bien montré tout cela dans cette belle étude historique, où il cherche la vérité dans la mêlée confuse des événemens. Les cinquante photogravures Goupil tirées en taille-douce, les deux planches hors texte en fac-similé en couleurs, les quarante en camaïeu, qui toutes ont été relevées pour cette publication d’après des miniatures, des dessins, des portraits authentiques et des pièces anciennes, et dont quelques-unes sont des merveilles de reproduction, ajoutent encore à l’intérêt du texte.

Parmi tous les ouvrages originaux consacrés à l’art, il faut mettre en première ligne la magnifique publication sur l’Art byzantin[2], due à la collaboration de M. Al. Gayet, pour le texte, et de M. Charles Errard pour le dessin et l’aquarelle ; d’une érudition aussi solide que l’exécution en est de tous points parfaite. C’est à la fois une étude originale d’archéologie et d’histoire et une monographie artistique du plus haut prix que ce deuxième volume consacré à Parenzo[3]. La Société française des éditions d’art l’a édité avec un luxe et surtout un goût qui lui font le plus grand honneur. Parenzo, dont l’histoire se confond avec celle du reste de l’Istrie et de Pola, sa capitale, si florissante sous la domination romaine, dut son importance à sa position sur l’Adriatique. Elle avait reçu de bonne heure l’Évangile, — en 276, — Haric, évâque d’Aquilée, y avait enseigné la foi nouvelle. Soumise en 493 à Théodoric, elle resta aux mains des Goths jusqu’à la conquête de Bélisaire. en 539. Aux temps gothiques succédèrent les temps byzantins. Le premier évêque d’Istrie avait été nommé sous le règne prospère de Théodoric, en 524 ; les institutions de l’Église se consolidèrent avec la tutelle byzantine. Justinien ne changea pas grand’chose aux usages établis. Ce fut ainsi qu’à cette époque, Eufrasio, décurion de Pola, fut élevé à l’évêché de Parenzo et devint le fondateur de la basilique, commencée vers 539 et terminée en 543, qui nous offre, sous le rapport de l’architecture et de la décoration, un des spécimens les plus complets de l’art byzantin. L’église du Dôme est un type parfait de la basilique à trois nefs des premiers temps du christianisme. Son plan a conservé l’intégrité absolue de ses premières dispositions ainsi que celles de l’atrium, et du baptistère à piscine pour le baptême par immersion, qui s’y trouvent réunis. Des analogies frappantes relient le style de Saint-Vital de Ravenne à celui du Dôme de Parenzo. Ce sont les mêmes décors dans l’arc triomphal de l’une et l’autre basiliques, les mêmes sculptures, les mêmes mosaïques, le même symbolisme du décor. Dans l’une et l’autre, on retrouve les mêmes marbres grecs, des colonnes, des portes, des chapiteaux identiques, et cette belle unité de l’art chrétien, alors étroitement lié au culte, et qui, par cela même, proscrivait toute inspiration individuelle. L’art de l’école byzantine, école toute de transition entre l’art antique, qui poursuivait le beau pour la forme elle-même, et l’art chrétien, qui ne se servait de la forme que pour l’expression de l’idée, s’y manifeste dans toute la plénitude de son développement.

Avec l’Histoire de l’Art dans l’antiquité[4], qui restera un des monumens les plus complets de ce temps-ci, nous remontons aux sources mêmes de l’art. Le huitième volume de cet ouvrage considérable qui fait honneur à l’érudition française est consacré à la Grèce archaïque[5]. La tâche de nous décrire cette terre antique, ce pays classique du beau ne pouvait être confiée à un archéologue plus érudit, à un écrivain plus compétent que M. Georges Perrot. En dépit de quelques réminiscences et imitations, il met en lumière l’originalité de la sculpture grecque. Il montre comment les écoles dorienne et attique, par la succession de leurs travaux, ont concouru à préparer les chefs-d’œuvre prochains, et que ce qui rend toutes ces sculptures si attachantes, malgré leurs incorrections mêmes, ce sont les différences qui les distinguent les unes des autres, leur sincérité et leur diversité. Et c’est ainsi qu’il nous conduit à l’époque où nous allons aborder l’œuvre du siècle fécond et glorieux dans l’Athènes de Périclès. Les artistes et les savans les plus autorisés et les plus éminens ont apporté leur contribution à ce travail de reconstitution.

Tous les arts dont l’action profonde ou superficielle peut être reconnue dans l’art occidental du moyen âge : art musulman et art byzantin, art germanique et art français, avant même ou après la conquête des princes d’Orient et d’Occident, ont pénétré dans l’Italie méridionale. A la suite du byzantin, l’art romain du VIIIe et du IXe siècle a été en quelque sorte le véhicule de l’art chrétien, la source de l’art bénédictin et de l’art carolingien. Parfois les formes étrangères y ont gardé leur accent d’origine, là où elles ont été transportées. Ainsi rien ne distingue les fresques basiliennes d’Apulie de celles qui ont été peintes en Grèce ; l’église du Saint-Sépulcre, à Barletta, est une église française de l’Orient latin ; l’église d’Arbona dans les Abruzzes est une église cistercienne de Bourgogne : mais, plus souvent, les artistes locaux ont uni l’art d’Occident et l’art d’Orient dans leurs combinaisons. Aucune église de Campanie n’atteint à la richesse bigarrée de ces basiliques palatines de Sicile, dont l’architecture, moitié grecque, moitié latine, est revêtue de marqueteries sarrasines et de mosaïques byzantines. Cependant les héros des Gestes du Nord se mêlent, aux pavemens des cathédrales de Brindisi et d’Otrante, à la foule des monstres orientaux. Le moyen âge n’a pas produit d’œuvres plus complexes et plus fécondes en surprises que ces miniatures des rouleaux de l’Exultet, enluminés au Mont-Cassin, où l’iconographie latine et germanique revêt les formes byzantines les plus pures. La Sicile même ne possède pas de monument plus composite que Castel del Monte, ce château impérial commencé par Frédéric II en 1240, admirable type d’architecture française élevé sur une colline de la Terre de Bari. Cette supériorité de l’art de l’Italie méridionale du XVIIIe siècle sur le reste de la Péninsule ; ces combinaisons et pénétrations réciproques, art byzantin et art germanique, art musulman et art lombard, art antique et art français, qui se résument en Nicola di Pietro d’Apulle, M. Emile Bertaux les a fait admirablement ressortir dans cet ouvrage méthodique, l’Art dans l’Italie méridionale[6], qui groupe tous les résultats acquis par les études iconographiques et où il découvre véritablement tous les apports de l’art français à l’art italien. Il y fallait une connaissance également approfondie des textes, des témoignages et des monumens, une lecture immense et des voyages longs, répétés et difficiles. Ainsi l’art de l’Italie méridionale des premiers siècles du christianisme s’éclaire d’une lumière nouvelle ; peu à peu l’Occident a repris l’empire que l’art romain avait autrefois exercé. On ne saurait d’ailleurs résumer en quelques lignes une œuvre aussi importante, accompagnée de 400 figures dans le texte, 33 planches hors texte et des dessins et photographies de l’auteur, et qui fera l’objet d’une étude spéciale.

L’étude de l’art grec, de l’art byzantin, nous conduit tout naturellement à parler des ouvrages de M. Roger Peyre sur Nîmes, Arles, Orange[7], de M. Charles Diehl sur Ravenne[8], de M. H. Barth sur Constantinople[9], de M. Eugène Schmidt sur Séville[10] ; ces noms seuls évoquent le souvenir de la civilisation grecque et latino-byzantine, dont ces cités renferment les types les plus parfaits en architecture et en sculpture.

L’histoire de l’art n’offre guère de plus grand nom que celui de Rubens, ce maître universel entre tous, ce grand peintre de la vie physique et morale, dont l’œuvre comprend plus de quinze cents ouvrages, la plus considérable et la plus régulièrement parfaite qu’un artiste ait produite. Avec ses allures de grand seigneur et de diplomate, ses aptitudes si diverses, son intelligence si fertile, son esprit si clair et si noble, son goût pour la science, les lettres, son érudition, son ardeur soutenue par le plus mâle effort, la spontanéité de sa conception sereine et la promptitude de son exécution, il est unique, et, de toutes manières, il est un des plus grands spécimens de l’humanité. Il ne saurait se révéler tout d’un coup, et, quelque nombreux ouvrages qu’on ait écrits sur l’ensemble de sa vie et de ses productions, — et dont le plus complet, le mieux composé, le plus somptueux et le mieux présenté en France est celui de M. Emile Michel, — on ne dira jamais assez sa glorieuse existence, sur laquelle les recherches des érudits et des critiques nous valent encore d’importantes découvertes. Mieux que personne, l’éminent conservateur du Musée Plantin, M. Max Rooses, — qui, après la mort de M. Ruelens, a continué la Correspondance de Rubens et a écrit l’Histoire de l’Ecole de peinture d’Anvers, — a contribué à renouveler les études sur le chef de cette école en lui élevant un véritable monument dans son grand et inestimable ouvrage, l’Œuvre de Rubens[11], que M. Michel avait déjà fait connaître ici même, dont il s’était lui-même inspiré, et qui a servi, comme tous les autres travaux du même auteur, pour l’importante monographie aussi complète qu’érudite et informée, dont M, Louis Van Keymeulen nous donne aujourd’hui la traduction, du néerlandais en français, dans cette superbe édition, avec 280 gravures et 65 photogravures et autotypies hors texte.

Les portraits de Carmontelle[12] sont pour l’histoire des quarante dernières années de l’ancienne monarchie française des témoins d’une irrécusable valeur. Dans ce vaste recueil revit la seconde moitié du XVIIIe siècle, avec toutes ses élégances, et quelques-unes aussi de ses trivialités. La collection, composée de sept cent cinquante portraits de princes et seigneurs, de princesses et dames titrées, de ministres, de guerriers, magistrats, ecclésiastiques, savans et personnages illustres sous le règne de Louis XV, coloriés à la gouache d’après nature, fut achetée par son ami le chevalier Richard de Lédans, ancien officier retraité. Forcé de céder un certain nombre de ces portraits, il fit le catalogue des cinq cent trente dessins qui lui restaient. Après le décès de Lédans, en 1816, ils furent acquis par La Mésangére, puis, à la vente de La Mésangère, par les Duff Gordon Duff, et passèrent en Écosse, d’où ils sortirent en 1877 pour entrer à Chantilly, chez le Duc d’Aumale, qui les paya 112 599 francs, et y ajouta un certain nombre d’autres Carmontelle qu’il possédait déjà. C’est cette précieuse collection que M. F.-A. Gruyer, l’éminent conservateur du Musée Condé, nous présente dans ce volume, en ajoutant à l’attrait de cette belle publication, éditée avec luxe, dont les planches sont des reproductions fidèles des originaux, son commentaire historique et des notices où la connaissance des personnages et de leur temps égale l’érudition d’art. Si quelques-uns de ces portraits laissent à désirer au point de vue de la correction, le dessin en est toujours spirituel, la couleur agréable, et donne à tel point l’impression de la vie qu’après les avoir vus, on ne les oublie pas.

Tout ce qu’on a dessiné de gracieux, depuis le XVIIIe siècle, sur la femme française, et sur la plus fine et la plus séduisante d’entre toutes, sur la Parisienne[13], dont le type idéal et aimable a servi, en tous temps, de modèle à nos grands peintres, toutes les peintures, esquisses, estampes de prix, ou tout simplement fameuses, se trouvent réunies dans cette publication, qui compte 1 400 reproductions, dont les épreuves originales sont dispersées un peu partout dans les grandes collections publiques, les cartons des amateurs, les musées, les bibliothèques, et qu’aucun ne pouvait se flatter de rassembler toutes.

Elle nous apparaît ici sous le pinceau des Coypel, des Boucher, des Fragonard, des Greuze, des peintres les plus fameux de la beauté féminine, et, sous les apparences les plus aimables, se révèle à nous, à toute heure du jour et de la nuit, avec ou sans voiles, dans toutes les élégances de la toilette ou du déshabillé, mais conservant toujours, avec le souci de l’attitude, le désir de plaire : seule sa pudeur est endormie, mais sa coquetterie veille encore.

Dans cette série, qui résume près de trois siècles de grâce féminine et enchanteresse, combien d’exquises œuvres d’art, de merveilleux documens pour l’histoire des modes et des mœurs ! Avec quelle justesse et quel goût ces peintres charmans, précieux témoins du passé, nous décrivent leur époque et nous font pénétrer dans le domaine mystérieux de l’intimité, le désordre amusant, pittoresque dont on s’accommodait jadis ! C’est bien là leur siècle peint au naturel, en négligé, avec un réalisme aimable qui ne semble jamais aller trop loin ; et, parce que leurs modèles sont beaux et bien choisis, ils conservent une certaine grâce chaste, inconnue des artistes contemporains, qui ont perdu la tradition galante du XVIIIe siècle. Sans doute dans toutes ces scènes familières, qui vont d’Abraham Bosse à Chaplin, la Parisienne ne file pas toujours de la laine, comme dans l’estampe du tableau de Chardin, et les mères n’accrocheraient peut-être plus dans la chambre de leurs filles les estampes de Schall, de Baudoin, de Queverdo, comme le raconte Buisson dans ses Entretiens du Palais-Royal ; mais quel fonds précieux, inestimable, quelle source abondante de documens pour tous les amateurs d’art, que ce superbe et rare album qui, mieux que les Chroniques et Mémoires du temps, nous rend la physionomie d’une époque et l’image de ses mœurs en évoquant avec les Parisiennes d’aujourd’hui celles qui les ont précédées et dont le règne est de tous les temps ! C’est ce qu’a très bien vu M. Jean Robiquet.

Entre tous les livres d’étrennes, la superbe édition de : Une Vie d’artiste[14] ne peut manquer d’être distinguée. Avec une verve intarissable, une habileté incomparable, jointes à beaucoup d’hujnour et de sentiment, Dumas y a mis en scène l’un des plus brillans interprètes de son théâtre et raconté la vie si mouvementée de Mélingue. Pour une fois, Alexandre Dumas n’a guère eu besoin de beaucoup inventer, ni de recourir à son imagination. Mais il n’a pas été moins bien inspiré, original et fécond, en suivant le récit du héros de ses drames, de Buridan, qu’il interprète à son tour en revivant, en quelque sorte, sa vie dans ses plus émouvantes péripéties. A cet attrait particulier s’ajoute celui de voir cette véridique histoire du célèbre artiste dramatique, qui fut, à ses heures, peintre et sculpteur, illustrée par le propre fils de l’auteur, qui s’est piqué d’honneur, a mis tout son talent et tout son cœur au service de cette luxueuse édition. Il a voulu fixer par l’image les plus piquans épisodes de la vie de son père, dans une suite de compositions à l’aquarelle et à la sépia, qui sont autant de charmans petits tableaux familiers, admirablement reproduits par l’héliogravure de Wittmann, et qui, rendues en couleurs, rehaussent encore le prix de ce livre spirituel et honnête, imprimé avec le soin et le goût parfaits qui distinguent la typographie de M. Philippe Renouard.

Chaque génération semble trouver un attrait nouveau au charme des récits de La Fontaine. A la tête des œuvres d’imagination qui sont de tous les temps, qui restent associées à nos souvenirs d’enfance, qui seront toujours jeunes comme le génie qui a présidé à leur naissance, on placera toujours les Fables[15] de La Fontaine, dont la morale est un peu tout ce qu’on veut, tout ce qu’on voudra, et est faite pour ne gêner personne, — de ce conteur émancipé de toutes règles, original et primesautier, qui n’a d’autres guides que ses instincts de poète et d’observateur de la nature. Il n’est pas de livre qui prête mieux à l’illustration : la diversité même des sujets appelle la diversité d’interprétation, et les talens les plus différens peuvent y concourir. Les dessins et les aquarelles de M. Henri Morin ornent cette élégante édition. Ce sont, au contraire, les célèbres compositions de Fragonard, de Lancret, de Boucher, Oudry, Eisen, que l’on retrouve dans les Contes et Nouvelles[16] de La Fontaine, publiés par la librairie Tallandier, dans une édition qui rappelle, de très loin, celle du temps de Fouquet, et qu’aucune ne saurait surpasser dans l’illustration du texte, puisqu’elle relie si bien l’inspiration des artistes à celle de l’œuvre et rassure la pudeur alarmée par le tour licencieux en déguisant les circonstances avec circonspection. Ce qui fait la grâce de ces choses-ci, n’est-ce pas la manière de les dire et de les peindre ?

C’est aussi de l’Arioste, de nos fabliaux du moyen âge, de Rabelais, de Montaigne, et de tous les ancêtres de La Fontaine en gauloiserie, que Balzac s’est inspiré dans ses Contes drolatiques[17], qui ne sont point uniquement bagatelles, comme disait le bonhomme de ses Contes que Mme de Sévigné goûtait de préférence aux Fables, mais récits de haute liesse, et, point seulement parce qu’ils sont imités du vieux français et écrits dans la langue de Pantagruel, ne sauraient convenir qu’à quelques-uns. Tout se tient. et marche d’ensemble dans cette publication, texte et dessins ; ceux-ci, de A. Robida, l’artiste ingénieux qui se prête admirablement à ces curiosités de mise en scène, et qui est toujours si fertile en ressources, en trouvailles spirituelles, dans sa verve aussi fantaisiste qu’intarissable.

Ceux qui aiment les aventures émouvantes, les terribles drames, auront de quoi contenter leur goût dans les Brigands[18] de M. Frantz Funck-Brentano, qui, après avoir tracé une peinture générale des principales catégories de brigands qui ont paru dans notre histoire : routiers, pirates et gens des grandes compagnies, flibustiers et chauffeurs, a essayé de caractériser quelques-uns des brigands français ; de nos plus sympathiques brigands : Gilles de Rais, le Barbe-Bleue de la légende du XVe siècle, Guilleri, Cartouche, Mandrin, Schinderhannes, le bandit de Rhin-et-Moselle, que la France a, paraît-il, le droit de revendiquer. Le livre a été composé d’élémens empruntés en partie aux documens inédits conservés dans nos archives et dans nos bibliothèques, en partie aux documens publiés et aux travaux des historiens. A côté d’êtres cupides et cruels, il a paru, parmi eux, des héros, presque des grands hommes. Dans les origines de la France, le brigandage a joué un rôle considérable, et ce rôle n’est sans doute pas fini ; seulement, au lieu que les brigands exercent, comme autrefois, le pillage en armes, ouvertement, ils le pratiquent sournoisement aujourd’hui, et le droit nouveau établi par les théoriciens du changement perpétuel ne leur est plus contesté par le possesseur du fief : M. Frantz Funck-Brentano a corrigé la légende par l’histoire avec l’érudition que l’on sait. Les dessins et planches en couleurs de M. A. Paris sont très vivans et mouvementés.

Dans les récits que l’on trouve beaucoup de plaisir à relire, parce qu’ils sont gais, de bon ton, généreux, émouvans, relevés par le charme du style, d’une observation toujours juste et délicate, d’une imagination finement colorée, il n’en est pas de plus vivant que les Lettres de mon moulin[19], cette pittoresque ruine aux ailes mortes pour laquelle Alphonse Daudet s’était épris d’un véritable amour. C’est de là qu’il a daté quelques-uns de ses plus jolis contes, où il a mis le bourdonnement qui lui restait aux oreilles de ces chants, de ces rires clairs, de ces féeriques légendes, un reflet aussi de ce soleil vibrant de Provence, du parfum de ses collines brûlées. A tous ces souvenirs des Alpilles, des Aliscamps, des Baux, de Châteauneuf-des-Papes, de Maillane, il se laisse aller avec la gaîté d’une âme légère, avec la fantaisie d’un artiste qui s’abandonne à l’impulsion de son tempérament foncièrement sympathique et toujours plein de compassion pour toutes les souffrances. C’est ainsi que, dans les Lettres de mon moulin, il nous entraine et nous séduit par la vivacité de son esprit, la sincérité de son observation, son ironie si fine, son imagination si fertile, sa poétique rêverie. C’est assez pour que cette œuvre souple et gracieuse ait la vogue ; mais elle est de plus illustrée par deux artistes de grand talent, MM. G. Fraipont et José Roy, que les sujets ont vraiment bien guidés dans leurs dessins et aquarelles.

Dans l’histoire des grandes explorations, les expéditions au Pôle Nord montrent ce que peuvent la volonté, le sang-froid, unis au courage et à la persévérance. Mais, quelles que soient les vicissitudes essuyées par la plupart d’entre elles, le problème capital de la navigation hyperboréenne ne cesse de solliciter ceux qui, poursuivis par l’obsession polaire, veulent percer le mystère dont s’enveloppe le monde arctique. Grâce à leurs découvertes, l’ultima Thule semble se rapprocher du monde habité ; des points de repère importans ont été marqués à des latitudes tout à fait extrêmes. Avec M. Charles Bénard, nous suivons les voyages à la Conquête du pôle[20] depuis l’antiquité, jusqu’à ceux de Nordenskjöld, Nansen, le duc des Abruzzes. Des gravures d’après des photographies nous font connaître les aspects polaires et les traits principaux du bassin des mers de glace, des paysages de la banquise. Entre toutes, l’expédition de l’Étoile polaire[21] publiée dans le Tour du Monde[22], dirigée par le duc des Abruzzes, et que le commandant Cagni conduisit un peu au delà du point où Nansen était parvenu, excitera l’enthousiasme et l’effroi, non moins que la relation du capitaine du Fram, Sverdrup, qui passa Quatre années dans les glaces[23], à la suite de Nansen.

L’étude la plus complète et la plus instructive que l’on puisse faire de la France, on la trouvera dans l’un des ouvrages dont nous avons signalé, lors de l’apparition, chacun des volumes, et qui est aujourd’hui terminé avec le cinquième : la France du Sud-Est[24], de M. Charles Brossard. Œuvre considérable, dont l’information est aussi étendue et sûre que l’exécution en est parfaite ; qui nous fait pénétrer mieux qu’aucime autre dans l’iatimité de notre pays, nous montre ce qu’il y a de plus remarquable en fait de monumens, de sites, de cu- riosités, de produits et de productions, de ressources de toute sorte dans deux mille illustrations originales, dont huit cents aquarelles de Slom, le tout exécuté avec beaucoup de goût par Charles Gillot.

Se plaçant à un point de vue différent, qui va, pour ainsi dire, de la circonférence au centre, du général au particulier, MM. Marcel Dubois et Camille Guy, avant d’aborder la France[25], dont la publication coïncidera dans leur Album géographique[26], avec celle du tome IV et dernier sur les XVIIIe et XIXe siècles de l’Album historique[27], ont décrit dans trois premiers volumes : les aspects généraux de la nature, — les Régions tropicales, — les Régions tempérées. Le quatrième, tout entier consacré aux Colonies françaises[28], a été de la part des auteurs et des éditeurs l’objet d’un soin particulier : collections des explorateurs, documens originaux, ont été recherchés pour donner à ces études coloniales l’attrait de l’exactitude et de la nouveauté. On ne saurait imaginer un tableau plus vrai de nos possessions d’outre-mer, que nous font voir plus de cinq cents gravures merveilleusement tirées d’après des photographies.

En opposition avec la France d’aujourd’hui, ceux qui voudront jeter un regard en arrière sur la Vieille France qui s’en va[29], sur tout ce qui en a fait une nation au rôle historique si grand, à l’action si profonde, sa foi, son esprit, son art, liront le livre enthousiaste où M. Charles Géniaux, en un élan de piété filiale, se retourne vers le passé, et exprime ses regrets des choses qui disparaissent, monumens, mœurs, coutumes, sous l’effort des transformations contemporaines, qui ne sont pas toujours le progrès.

Les sports et les jeux d’adresse ont pris depuis quelques années une extension considérable, et le public français particulièrement les suit et les pratique avec une activité telle qu’il suffira de lui signaler un livre qui convient de préférence à la jeunesse, mais est fait pour plaire à tous les âges. M. H.-R. d’Allemagne, dans des pages érudites et charmantes, remplies de piquantes anecdotes, a reconstitué l’histoire du développement de l’activité physique. Le jeu fait partie de l’éducation ; il est un élément moralisateur, mais, pour que la récréation soit complète, faut qu’il n’y ait pas excès de dépense et de force. Age quod agis, disait l’antique sagesse, et c’est un axiome qu’il n’est pas inutile de rappeler à ceux qui n’ont d’autres préoccupations que de « battre le record. » Les Sports et les Jeux[30], le sujet forme la suite naturelle des Jouets, puisqu’ils leur succèdent, les remplacent dans la vie et s’adressent surtout à l’adolescence.

Ceux qui ont le goût des livres à la fois intéressans et instructifs apprécieront les ouvrages comme la Vie des animaux illustrée[31], publiée sous la direction de M. Edmond Perrier, et dont le premier volume, rédigé par M. Menégaux, est aussi savant que les planches et les aquarelles en sont merveilleuses ; — les Plantes originales[32], par M. Henri Coupin ; — le deuxième volume des Animaux vivans du monde (oiseaux, reptiles, poissons)[33] ; — l’Astronomie des dames[34], par l’astronome Flammarion ; — le Mélange des couleurs[35], par M. E. Hareux ; — enfin la Science au XXe siècle[36], revue nouvelle.

La littérature à l’usage de la jeunesse est, comme à l’ordinaire, abondante et riche cette année. La maison Hetzel ajoute à sa collection incomparable tous les récits qu’a publiés le Magasin illustré d’éducation et de récréation[37], toujours si au courant de ce qui peut amuser les jeunes lecteurs, en y mêlant quelques connaissances utiles, un aperçu des dernières découvertes scientifiques. Voici d’abord M. Jules Verne, qui nous raconte cette fois, dans Bourses de voyage[38], l’expédition aux Iles sous-le-vent, sur le trois-mâts Alert, des lauréats d’Antilian School, les détails du drame qui avait débuté dans la baie de Cork et dont le dénouement s’est accompli en plein Océan. Avec le Géant de l’azur[39], c’est également dans le monde des merveilles que M. André Laurie nous transporte sur l’Épiornis, ce ballon articulé, imité de l’oiseau. Les héros de M. Paul d’Ivoi dépassent, eux aussi, la mesure commune, et cette fois encore, dans les Semeurs de glace[40], accomplissent des actions héroïques.

Parmi les récits d’aventures d’une invraisemblance si naturelle qu’on ne sait plus bien où finit la fiction, où commence la réalité, le succès ne peut manquer d’aller aux nouveaux romans de la maison Delagrave, toujours si bien choisis : La Côte d’Ivoire[41], de M. E. Salgari, dont l’action ou plutôt le terrible drame se déroule au Dahomey ; — Job Macaër[42], fils de pêcheur dont l’intrépide courage et les exploits sur terre et sur mer sont récompensés par tous les bonheurs ; — les Jeunes Aventuriers[43], qui affrontent les plus grands périls dans les régions du Niger et de Tombouctou ; le Zouave de Malakoff[44], meurtrière épopée du champ de bataille de Sébastopol, par M. Louis Boussenard, — la Jeunesse de Cyrano de Bergerac[45], illustrée par M. Edouard Zier. Ajoutons dans un genre amusant tous les récits du Saint-Nicolas[46], les Petits Ménétriers de Duguay-Trouin[47], la Fortune de Betty[48], l’Automobile enchantée[49], l’Orphelin de la Nouvelle-Orléans[50] ; les Cinquante, par Paul Éric, chez Combet.

Nous ne pouvons signaler, ni surtout analyser ici, tous les romans qui se recommandent par un tour ingénieux, amusant, instructif et toujours moral, d’autant moins que la plupart sont déjà quelque peu connus pour avoir été publiés dans quelque journal illustré, ce qui est pour eux la meilleure des recommandations. Tels les Lectures pour tous[51], le Journal de la Jeunesse[52], qui fait une large place aux œuvres d’imagination, et d’où sortent la Gondole fantôme[53], par M. Toudouze ; la Mission de Geneviève[54], par M. B.-A. Jeanroy.

C’est à cette catégorie des contes moraux et honnêtes, où la moralité n’exclut pas l’agrément et dont quelques-uns sont relevés par le charme du style et la finesse de l’observation, qu’appartiennent : Fille unique, par Pierre Perrault[55], Périlleuse Aventure, de J. Talbot[56] ; Un fameux gars[57], de M. d’Agon de la Conterie ; Fille de preux[58], de Jean Guétary. Il faudrait encore nommer tous ceux qui ont paru dans la Bibliothèque des Écoles et des Familles[59], L’Ouragan[60], de M. Mélandri ; Dette de cœur[61], de Julie Borius ; Malheur est bon[62], de Danielle d’Arthez ; Le Petit Léveillé[63], de M. Albert Cim. Un autre genre d’intérêt, l’histoire vécue des tentatives des Européens vers la Route de l’Inde[64], celle de la découverte et de la conquête de la Louisiane[65] anime deux excellens livres de M. Eugène Guénin, distingués par l’Académie française, et qui rappellent ce que la France d’autrefois avait fait pour la colonisation et comment elle l’avait comprise. Nous pouvons rapprocher de ces livres le Conscrit de 1870[66], par MM. Th. Cahu et Paul de Semant ; — L’Armée française[67] de M. Ch. Ponsonailhe ; — Aux Pays de la prière[68], par M. Henri Guerlin ; — L’Épopée biblique[69], par M. le chanoine H. Boissonnot ; ces trois volumes où vibre la note la plus pure du patriotisme et de la religion sont parmi les meilleurs de la maison Mame, qui publie une édition nationale, en deux volumes in-4o, de la Vie de Notre Seigneur Jésus-Christ, par James Tissot ; et puisque nous parlons d’apostolat, de devoir, d’héroïsme et d’abnégation, rappelons l’admirable publication les Missions catholiques[70]. À côté de ce bel ouvrage de la maison Colin, signalons sa jolie collection tirée du Petit Français[71], celles de Mon Journal[72], de la Petite Bibliothèque de la famille[73], de la Revue Mame[74], celle de la Bibliothèque de mes petits-enfans[75], rose et bleue, créée l’année dernière, toutes charmantes et instructives.

Mentionnons encore Odette[76], par Mlle Louise Vaquette, La lune rousse, par Champol ; Le page de Ménélick[77], de Constant Amero. Trois enfans courageux[78], de Mlle Berthe Flammarion ; Le Papillon bleu[79], de M. Eugène Muller ; Le Roman de Colette[80], de M. Émile Pech ; Disparus[81], de J. Lermont. Enfin pour terminer, nous ne pouvons pas ne pas citer quelques albums : le Roy Soleil[82], de Maurice Leloir, Murat[83], par Job et G. Montorgueil ; Belles-Dames[84], par Job ; les Animaux en Pique-Nique[85], dessinés par G. H. Thompson, la Prise de Pékin[86], Philéas et son Anglaise[87], par R. de la Nézière, Sac à tout[88], par Séverine, la Flore artistique[89], par M. Gustave Greux qui attestent l’entrain, l’abandon, la fécondité et la libre recherche de nos illustrateurs.


J. BERTRAND.

  1. Manzi, Joyant et Cie.
  2. Société française des éditions d’art
  3. Société française des éditions d’art
  4. Hachette.
  5. Hachette.
  6. Fontemoing.
  7. Henri Laurens.
  8. Henri Laurens.
  9. Henri Laurens.
  10. Henri Laurens.
  11. Ernest Flammarion.
  12. Plon.
  13. R. Baschet.
  14. Calmann-Lévy.
  15. Henri Laurens.
  16. Librairie illustrée.
  17. Librairie illustrée.
  18. Hachette.
  19. Ernest Flammarion.
  20. Hachette.
  21. Hachette.
  22. Hachette.
  23. Flammarion.
  24. Flammarion.
  25. Armand Colin.
  26. Armand Colin.
  27. Armand Colin.
  28. Armand Colin.
  29. Mame.
  30. Hachette.
  31. J.-B. Baillière.
  32. Vuibert et Nony.
  33. E. Flammarion.
  34. E. Flammarion.
  35. H. Laurens.
  36. Delagrave.
  37. Hetzel.
  38. Hetzel.
  39. Hetzel.
  40. Combet et Cie.
  41. Charles Delagrave.
  42. Combet.
  43. Charles Delagrave.
  44. Combet.
  45. Hachette.
  46. Delagrave.
  47. Delagrave.
  48. Delagrave.
  49. Delagrave.
  50. Delagrave.
  51. Hachette.
  52. Hachette.
  53. Hachette.
  54. Hachette.
  55. Hetzel.
  56. Société française d’Éditions d’art.
  57. Société française d’Éditions d’art.
  58. Mame.
  59. Hachette.
  60. Hachette.
  61. Hachette.
  62. Hachette.
  63. Hachette.
  64. Hachette.
  65. Hachette.
  66. Flammarion.
  67. Mame.
  68. Mame.
  69. Mame.
  70. Armand Colin.
  71. Armand Colin.
  72. Hachette.
  73. Hachette.
  74. Mame.
  75. Société française d’Éditions d’art.
  76. Combet.
  77. Flammarion.
  78. Flammarion.
  79. Delagrave.
  80. Juven.
  81. Hetzel.
  82. Combet.
  83. Hachette.
  84. Hachette.
  85. Hachette.
  86. Hachette.
  87. Delagrave.
  88. Juven.
  89. Librairie de l’Art ancien et moderne.