Les Honnêtetés littéraires/Édition Garnier/10

Œuvres complètes de VoltaireGarniertome 26 (p. 128).

DIXIÈME HONNÊTETÉ.

Un gentilhomme de Bretagne, qui a fait des comédies charmantes[1], nous a donné des anecdotes très-curieuses sur la ville de Paris et sur l’histoire de France, imprimées avec privilége, et surtout avec celui de l’approbation publique ; aussitôt les auteurs de je ne sais quelles feuilles[2] (car je ne lis point les feuilles) écrivent dans ces feuilles, dédiées à la cour, à douze sous par mois, que l’auteur est incontestablement déiste ou athée, et qu’il est impossible que cela ne soit pas, puisqu’il a dit que Maugiron, Quélus, et Saint-Mégrin, tués sous le règne de Henri III, furent enterrés dans l’église de Saint-Paul, et qu’on n’avait pas voulu inhumer une vieille femme dans la rue de l’Arbre-Sec avant qu’on eût vu son testament.

Le Breton, qui n’entend point raillerie, fait assigner au Châtelet les auteurs des feuilles, par-devant le lieutenant criminel, en réparation d’honneur et de conscience, au mois de juin 1763. Les folliculaires civilisent l’affaire, et sont forcés de demander pardon de leur incivilité.

  1. Saint-Foix, auteur des Essais sur Paris. Voyez tome XX, page 323.
  2. Ce sont les auteurs du Journal chrétien. Or, ce journal n’étant pas bon, on a dit qu’il était mauvais chrétien. (Note de Voltaire.)