Librairie nouvelle (p. 45-57).
Les instruments de musique à l’Exposition universelle

Les instruments de musique à l’Exposition universelle.


Je ne m’aviserai certes pas d’écrire ici un préambule sur l’industrie et les expositions universelles. Argumenter sur certaines questions expose parfois le raisonneur à des dangers assez graves ; c’est quelquefois aussi de sa part une véritable condescendance de les discuter. Je me sais si loin de posséder le calme olympien nécessaire en pareil cas, qu’au lieu de combattre les systèmes qui me choquent, je vais souvent, en désespoir furieux de cause, jusqu’à avoir l’air de les accepter, jusqu’à les approuver de la tête, sinon de la parole et de la plume… Et ceci me rappelle une question que j’adressai un jour à un amateur de chimie… (Peut-être mon amateur, semblable aux amateurs de musique, de philosophie, à bien des amateurs enfin, croyait-il à l’absurde. Cette croyance est fort répandue. Peut-être aussi, après tout, l’absurde est-il le vrai ; car si l’absurde n’était pas le vrai, Dieu serait cruel d’avoir mis dans le cœur de l’homme un si grand amour de l’absurde ! Mais enfin voici ce que je demandai à mon chimiste et sa réponse :)

« Si l’on pouvait placer, lui dis-je, un certain nombre de kilogrammes, cent ou mille kilogrammes de poudre à canon, au point central de l’une des plus énormes montagnes du globe, de l’Hymalaya ou du Chimborazo, par exemple, et si, par l’un des procédés dont on dispose aujourd’hui, on y mettait le feu, qu’arriverait-il ? Croyez-vous que l’explosion pût avoir lieu, et que sa force fût capable de briser, de faire sauter une masse aussi extraordinairement résistante par sa densité, par sa cohésion et par son poids ? »… L’amateur de chimie, embarrassé, réfléchit un instant, chose que font rarement les amateurs de musique ou de philosophie, et me répondit en hésitant : « Il est probable que la puissance de la poudre serait insuffisante, que son inflammation ayant lieu néanmoins et produisant instantanément des gaz dont l’expansion serait domptée par la résistance de la montagne, ces gaz se condenseraient en un liquide, toujours disposé à reprendre une forme gazeuse et à faire une épouvantable explosion le jour où la force supérieure cesserait de le comprimer. » Je ne sais jusqu’à quel point l’opinion de mon chimiste dilettante est fondée, mais peut-être cité-je à propos la proposition qui lui fut soumise.

Il y a des gens, en effet, j’en connais, qui, obligés de lutter avec une montagne d’absurdités, éprouvant au centre de leur cœur une colère incalculable, insuffisante cependant pour faire sauter la montagne, prennent feu tout d’abord, et presque aussitôt se soumettant sans bruit, en souriant même, à la loi de la déraison, voient les foudres de leur volcan se liquéfier jusqu’à nouvel ordre.

Les liquides, ainsi produits, sont ordinairement noirs et d’une extrême amertume ; il y en a pourtant d’insipides, d’incolores, il y en a même, telle est leur diversité, qui semblent doux à l’œil et au goût. Ceux-là sont les plus dangereux. Quoi qu’il en soit, bien des fourneaux (ces mines monstres s’appellent ainsi depuis le siège de Sébastopol) ont été allumés, bien des kilogrammes de poudre ont été liquéfiés pendant la laborieuse session des divers jurys appelés à donner ou plutôt à prêter leur avis sur les produits de l’industrie.

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Le jury spécial désigné pour examiner les instruments de musique, à la dernière exposition universelle, était formé de sept membres, compositeurs, virtuoses, acousticiens, savants, amateurs et fabricants. Persuadés qu’on les consultait à propos des instruments de musique pour connaître la valeur musicale de ces instruments, ils sont bien vite tombés d’accord sur les moyens à prendre pour en apprécier le mieux possible les qualités de sonorité et de confection, pour rendre justice aux inventions ingénieuses et utiles, pour placer à leur rang les facteurs intelligents. En conséquence, pour n’être en rien distraits de ce travail ardu, plus difficile qu’on ne pense, extrêmement pénible et même douloureux, je puis l’assurer, ils firent transporter successivement dans la salle de concerts du Conservatoire ces milliers d’instruments de toutes sortes, harmonieux, cacophoniques, sonores, bruyants, magnifiques, admirables, inutiles, grotesques, ridicules, rauques, affreux, propres à charmer les anges, à faire grincer des dents les démons, à réveiller les morts, à endormir les vivants, à faire chanter les oiseaux et aboyer les chiens.

On commença par l’examen des pianos. Le piano ! À la pensée de ce terrible instrument, je sens un frisson dans mon cuir chevelu ; mes pieds brûlent ; en écrivant ce nom, j’entre sur un terrain volcanique. C’est que vous ignorez ce que sont les pianos, les marchands de pianos, les fabricants de pianos, les joueurs de piano, les protecteurs et protectrices des fabricants de pianos. Dieu vous préserve de le savoir jamais ! Les autres marchands et facteurs d’instruments sont beaucoup moins redoutables. On peut dire d’eux à peu près ce qu’on veut, sans qu’ils se plaignent trop aigrement. On peut donner au plus méritant la première place, sans que tous les autres aient à la fois la pensée de vous assassiner. On peut aller jusqu’à reléguer le pire au dernier rang sans recevoir des bons la moindre réclamation. On peut dire même à l’ami d’un prétendu inventeur : « Votre ami n’a rien inventé, ceci n’est pas nouveau, les Chinois se servent de son invention depuis des siècles ! » et voir l’ami désappointé de l’inventeur se retirer presque silencieusement comme eût fait sans doute l’illustre Colomb, si on lui eût appris que des navigateurs Scandinaves avaient longtemps avant lui trouvé le continent américain.

Mais le piano ! ah ! le piano ! « Mes pianos, monsieur ! vous n’y songez pas. À moi le second rang ! À moi une médaille d’argent ! moi qui ai inventé l’emploi de la vis pour fixer la cheville voisine de la mortaise du quadruple échappement ! Je n’ai pas démérité, monsieur ? J’emploie, monsieur, six cents ouvriers ; ma maison est toujours ma maison ; j’envoie toujours mes produits non seulement à Batavia, à Vittoria, à Melbourne, à San-Francisco, mais dans la Nouvelle-Calédonie, dans l’île de Mounin-Sima, monsieur, à Manille, à Tinian, à l’ile de l’Ascension, à Hawaï ; il n’y a pas d’autres pianos que mes pianos à la cour du roi Kamehameha III, les mandarins de Pékin ne prisent que mes pianos, monsieur, on n’en entend pas d’autres à Nagasaki, monsieur… et à Saint-Germain-en-Laye ; oui, monsieur. Et vous venez me parler de médaille d’argent, quand la médaille d’or serait pour moi une fort médiocre distinction ! et vous ne m’avez pas seulement proposé pour le grand cordon de la légion d’Honneur ! Vous me la baillez belle ! Mais nous verrons, monsieur, cela ne se passera pas ainsi. Je proteste, je protesterai ; j’irai trouver l’Empereur, j’en appellerai à toutes les cours de l’Europe, à toutes les présidences du Nouveau-Monde. Je publierai une brochure ! Ah ! bien oui, une médaille d’argent à l’inventeur de l’échappement de la cheville qui fixe la vis de la quadruple mortaise !!! »

Ceci met le feu, vous pouvez le penser, aux mille kilogrammes de poudre qui sont dans la montagne. Mais comme il est absolument impossible de répondre ainsi qu’il conviendrait à de pareilles exclamations, et de faire sauter… la montagne, la condensation des gaz s’opère, et il ne reste au fond du fourneau qu’un peu d’eau insipide.

Ou bien : « Hélas ! monsieur, je n’ai donc pas la première médaille ?… Il est donc vrai ? une pareille iniquité a pu être accomplie ?… Mais on reviendra là-dessus, et j’ose vous demander votre voix, votre énergique intervention !… Vous me refusez ?… Oh ! c’est incroyable ! Mes pianos n’ont pourtant pas démérité ; je fais toujours d’excellents pianos qui peuvent soutenir la lutte avec tous les pianos. Ce n’est pas un musicien tel que vous, monsieur, qui pourrait s’abuser à cet égard… Je suis ruiné, monsieur… Monsieur, je vous en supplie, accordez-moi votre voix… Oh ! mais, c’est affreux ! Monsieur, je vous en conjure… voyez mes larmes… je n’ai plus d’autre refuge que… la Seine… j’y cours… Ah ! c’est de la férocité ! je n’eusse jamais cru cela de vous… Mes pauvres enfants !… »

On ne peut encore rien faire sauter.

Eau de mélisse !

Ou bien : « J’arrive d’Allemagne, et l’on y rit beaucoup de votre jury. Comment ! ce n’est pas le premier facteur de pianos qui est le premier ? il serait donc devenu le second ? il aurait donc démérité ? Cela a-t-il le sens commun ? et le second serait devenu le premier ? A-t-on jamais vu rien de semblable ? Vous allez recommencer tout cela, je l’espère, pour vous au moins. Certainement je ne connais pas ce merveilleux piano que vous avez couronné ; je ne l’ai ni vu ni entendu ; mais c’est égal, une telle décision vous couvre tous de ridicule. »

Eau de Cologne !

Ou bien : « Je viens, monsieur, pour une petite affaire… une affaire. C’est par erreur, sans doute, que les pianos de ma maison ont été déclassés ; car tout le monde sait que ma maison n’a pas démérité. L’opinion publique a déjà fait justice de cette… erreur, et vous allez recommencer l’examen des pianos. Or, pour qu’il n’y ait pas de nouvelle bévue commise, je prends la liberté d’éclairer messieurs les membres du jury sur la force de ma maison. Je fais de nombreuses et importantes affaires… et ni mes associés ni moi nous ne regardons à… des… sacrifices… nécessaires dans certaines… circonstances… Il n’y a qu’à bien comprendre… » À un certain froncement de sourcils du juré, l’homme d’affaires voit qu’on ne… comprend pas et se retire.

Eau-de-vie camphrée !

Ou bien : « Monsieur, je viens…

« — Vous venez pour vos pianos ?

« — Sans doute, monsieur.

« — Votre maison n’a pas démérité, n’est-ce pas ? Nous allons recommencer l’examen ; il vous faut la première médaille ?

« — Certes, Monsieur !

« — Feux et tonnerres !… »

Le juré quitte son salon, et ferme violemment une porte derrière lui, en en faisant sauter la serrure.

Eau forte ! acide hydro-cyanique.

Telles sont les scènes qu’infligeaient autrefois aux malheureux jurés les facteurs, les joueurs, et les protecteurs des facteurs de pianos ; au dire d’un ancien juré libéré, juré de rebut, méchante langue sans doute, car nous ne voyons plus rien de pareil aujourd’hui.

Je reprends ma narration.

Les jurés, lors de la dernière exposition, étaient donc au nombre de sept. Nombre mystérieux, cabalistique, fatidique !… Les sept sages de la Grèce, les sept branches du flambeau sacré, les sept couleurs primitives, les sept notes de la gamme, les sept péchés capitaux, les sept vertus théologales… ah ! pardon, il n’y en a que trois, du moins il n’y en avait que trois, car j’ignore si l’Espérance existe encore.

Mais, je le jure, nous étions sept jurés : un Écossais, un Autrichien, un Belge et quatre Français ; ce qui semblerait prouver que la France à elle seule est plus riche en jurés que l’Écosse, la Belgique et l’Autriche réunies.

Cet aréopage constituait ce qu’on nomme une classe. La classe, après un examen minutieux et attentif de toutes les questions dont elle était saisie, devait ensuite prendre part à une assemblée où cinq ou six autres classes se trouveraient réunies pour former un groupe. Et ce groupe avait à prononcer à la majorité des voix sur la validité des décisions prises isolément par chaque classe. Ainsi la classe chargée d’examiner les tissus de soie et de laine, ou celle qui avait étudié le mérite des orfèvres, ciseleurs, ébénistes, et plusieurs autres classes, voulaient bien nous demander, à nous autres musiciens, si les récompenses avaient été justement données à tels ou tels fabricants de tissus, à tels ou tels marchands de bronze, etc., questions auxquelles mes confrères de la classe de musique semblaient un peu embarrassés de répondre dans les premiers jours. Ces jugements ex abrupto leur paraissaient singuliers ; ils n’y étaient pas faits, aucun d’eux n’ayant été appelé à voter de la même façon, quatre ans auparavant, à l’Exposition universelle de Londres, où cet usage était déjà admis, et où j’avais pu faire mon noviciat.

J’eus, il est vrai, un instant d’angoisse assez pénible quand, en 1851, le jour de la première assemblée de notre groupe, les jurés anglais, voyant que je m’abstenais, me sommèrent de voter sur les récompenses proposées pour les fabricants d’instruments de chirurgie. Je pensai aussitôt à tous les bras, à toutes les jambes que ces terribles instruments allaient avoir à couper, aux crânes qu’ils devaient trépaner, aux polypes qu’ils auraient à extraire, aux artères, aux filets nerveux qu’il leur faudrait saisir, aux pierres qu’on leur ferait broyer !!! Et je vais, moi, qui ne sais ni A ni B en chirurgie, moins encore en mécanique et en coutellerie, et qui d’ailleurs, fussé-je à la fois un Amussat et un Charrière, n’ai jamais examiné un seul des dangereux outils dont il est question, je vais dire là, carrément, officiellement, que les instruments de celui-ci sont beaucoup meilleurs que ceux de celui-là, et que monsieur un tel et non pas un autre mérite le premier prix ! J’avais la sueur au front et des glaçons dans le dos en y songeant. Dieu me pardonne si, par mon vote, j’ai causé la mort de quelques centaines de blessés anglais, français, piémontais, et même russes, mal opérés en Crimée par suite du prix donné à de mauvais instruments de chirurgie !…

Peu à peu néanmoins mes remords se sont calmés ; le feu a bien pris à la mine, mais la montagne n’a pas sauté, comme toujours, et le fourneau ne contient à cette heure qu’une petite quantité d’eau pure. J’ai donné dernièrement à Paris un prix à une clef de Garengeot pour arracher les dents, sans éprouver aucune douleur. D’ailleurs, l’institution des groupes ayant été adoptée en Angleterre et en France, et personne ne s’en étant plaint, il faut bien qu’elle soit bonne, utile, morale, et je n’ai que la honte d’avouer la faiblesse d’intelligence qui me met dans l’impossibilité de comprendre sa raison d’être. — Il y a un peu d’ironie dans votre humilité, direz-vous ; sans doute le groupe dont vous faisiez partie aura contrarié la classe des musiciens en infirmant quelques-uns de ses jugements, et vous lui gardez rancune ? — Ah ! certes, non. Le groupe a essayé à peine deux ou trois fois de soutenir que nous nous étions trompés, et en toute autre occasion nos confrères non musiciens ont levé leur main droite pour le vote affirmatif, avec un ensemble qui les montrait dignes de l’être. Non, ce sont de simples réflexions antiphilosophiques sur les institutions humaines, que je vous donne pour ce qu’elles valent, c’est-à-dire pour rien.

Or nous étions sept dans la loge officielle de la salle du Conservatoire, et chaque jour une fournée de quatre-vingt-dix pianos au moins faisaient gémir sous son poids le plancher du théâtre en face de nous. Trois habiles professeurs jouaient chacun un morceau différent sur le même instrument, en répétant chacun toujours le même ; nous entendions ainsi quatre-vingt-dix fois par jour ces trois airs, ou, en additionnant, deux cent soixante-dix airs de piano, de huit heures du matin à quatre heures de l’après-midi. Il y avait des intermittences dans notre état. À certains moments, une sorte de somnolence remplaçait la douleur, et comme, après tout, sur ces trois morceaux il s’en trouvait deux de fort beaux, l’un de Pergolèse et l’autre de Rossini, nous les écoutions alors avec charme ; ils nous plongeaient dans une douce rêverie. Bientôt après, il fallait payer son tribut à la faiblesse humaine ; on se sentait pris de spasmes d’estomac et de véritables nausées. Mais ce n’est pas ici le cas d’examiner ce phénomène physiologique.

Pour n’être en aucune façon influencés par les noms des facteurs des terribles pianos, nous avions eu l’idée d’étudier ces instruments, sans savoir à qui ni de qui ils étaient. On avait en conséquence caché le nom des facteurs par une large plaque de carton portant un numéro. Les essayeurs pianistes, avant de commencer leur opération, nous criaient du théâtre : Numéro 37, ou numéro 20, etc. Chacun des jurés prenait ses notes d’après cette désignation. Quand ensuite le deux cent soixante-dixième air était exécuté, les jurés, non contents de cette épreuve, descendaient sur le théâtre, examinaient de près le mécanisme de chaque instrument, en touchaient eux-mêmes le clavier, et modifiaient ainsi, s’il y avait lieu, leur première opinion. Le premier jour, on entendit un nombre considérable de pianos à queue. Les sept jurés en distinguèrent tout d’abord six dans l’ordre suivant :

Le no 9 obtint l’unanimité pour la première place ;

Le no 19 obtint également l’unanimité pour la seconde ;

Le no 5 eut 6 voix sur 7 pour la troisième ;

Le no 11, 4 voix sur 7 pour la quatrième ;

Le no 17, 6 voix pour la cinquième ;

Le no 22, 5 voix pour la sixième.

Les jurés, pensant que la position des pianos sur le théâtre, position plus ou moins rapprochée de certains réflecteurs du son, pouvait rendre les conditions de sonorité inégales, imaginèrent alors d’entendre une seconde fois ces six instruments dans un autre ordre et après les avoir tous déplacés. En outre, pour ne pas subir l’influence d’une première impression, ils tournèrent eux-mêmes le dos à la scène pendant le déplacement des instruments, dont ils connaissaient la couleur, la forme et la place, voulant ignorer où ils allaient être portés. Ils les entendirent ainsi sans se retourner, sans savoir lequel était touché le premier, le second, etc. ; et leurs notes consultées ensuite, et les numéros rapprochés du nouveau numéro d’ordre dans lequel on venait de les faire entendre, il se trouva, en fin de compte, que les suffrages s’étaient répartis de la même façon sur les mêmes instruments qu’à la première épreuve, tant les qualités de chacun étaient tranchées. Ce fait est l’un des plus curieux de ce genre que l’on puisse citer ; il prouve d’ailleurs le soin minutieux avec lequel le jury s’est acquitté de sa tâche.

Après chaque séance, le résultat des votes était consigné dans le procès-verbal ; un membre du jury allait découvrir les noms cachés par la plaque de carton, écrivait ces noms avec les numéros auxquels ils correspondaient, et sa déclaration, jointe au procès-verbal, était enfermée dans une enveloppe cachetée et revêtue du timbre du Conservatoire.

C’est pourquoi, pendant les longues semaines consacrées à l’examen des pianos, personne, pas même les membres du jury (excepté un), ne connaissant le nom des facteurs classés, aucun de ceux-ci n’a pu réclamer, ni se plaindre, ni venir nous dire : « Monsieur, je n’ai pas démérité, etc. »

La même marche a été suivie pour les pianos à queue petit format, pour les pianos carrés et pour les pianos droits. Nous avons la satisfaction d’annoncer qu’aucun juré n’a succombé par suite de cette épreuve, et que la plupart d’entre eux sont aujourd’hui en convalescence.