Les Femmes arabes en Algérie/Le Paradis et les houris

Société d’éditions littéraires (p. 172-176).


Le Paradis et les Houris




Le mahométisme maintient dans le Paradis l’inégalité des sexes qu’il a établie sur la terre ; car, bien qu’il ait donné à la femme la capacité légale, morte ou vivante, dans le ciel comme dans le désert, la musulmane n’est que pour le plaisir de l’homme.

On sait qu’on ne peut toucher le Koran sans avoir fait une ablution ; mais l’eau même ne lave pas, dans certaines circonstances. Pendant les menstrues et pendant ses couches, il est défendu à la femme, eût-elle fait cent ablutions, de toucher au Koran.

Elle prend ce qu’elle veut de la croyance commune, on s’occupe peu de sa foi.

« La femme a l’âme d’un chien » ; inutile qu’elle aille à la mosquée, car cette créature sans vertu troublerait les hommes par sa présence. Il est donc superflu de dire que si chaque croyant musulman peut, à l’occasion, remplir l’office de prêtre, les femmes ne peuvent en exercer le rôle.

Nous sommes loin, comme on voit, de l’époque où la cheikesse Chohdah, surnommée la gloire des femmes et rangée parmi les savants de l’Islamisme, donnait dans la grande mosquée des conférences publiques, où elle expliquait le livre des « Défaites ou Infortunes des amants. »

Le Vendredi est le Dimanche des Arabes. La femme doit en ce jour, consacré à Dieu, tisser comme les autres jours les tapis et les burnous, moudre la farine d’orge, car le Koran blâme qui imite les infidèles chrétiens ou juifs en s’abstenant de travailler ce jour-là.

Les catholiques libéraux et anti-sémites de France préconisent l’alliance et non la fusion franco-arabe, parce qu’ils ont des préjugés de race. Combien ce grand metteur en scène défunt, Lavigerie, fut mieux inspiré qu’eux, quand, ne se contentant pas de faire planter aux frais des contribuables et des gens charitables, par les orphelins arabes, des milliers d’hectares de vigne, dont sa famille hérita ; il releva les nègres, en honorant à Notre-Dame d’Afrique une madone du plus beau noir, une vierge nègre !

La mosquée ne rassemble le vendredi que la moitié de la nation musulmane, les hommes ; les rares femmes qui s’y rendent vont là pour causer, non pour prier. Je les vois encore, ces femmes s’accroupir dans une nef, séparées des hommes et parler entre elles de toutes choses étrangères à la religion. Elles me forçaient à m’accroupir comme elles, ce qui me brisait les jambes ; elles comptaient mes jupes, détaillaient mes vêtements ; il est vrai, qu’en revanche, elles me laissaient complaisamment satisfaire ma curiosité et soulever le voile qui masquait leur visage.

Il y a, dans le Sahara, des femmes qui, comme les marabouts, rendent dans les Zaouïas des oracles. On vient de loin leur demander de résoudre des différends et l’on se soumet aux jugements qu’elles rendent.

Toutes les femmes Touareg savent lire et écrire ; alors que grâce à nous, civilisateurs, les Mauresques d’Alger croupissent dans la plus grande ignorance.

Les femmes qui ont fait le pèlerinage de la Mecque, sont pour le reste de leur vie célèbres dans leur tribu. Seulement, après leur mort, elles n’ont, comme toutes les autres musulmanes, droit, dans le Paradis de Mahomet, qu’à une soixante-douzième partie de mari ; en d’autres termes, un homme a, pour lui seul, soixante-douze houris.

Comment donc Mahomet fera-t-il, quand il n’y a pas même une femme pour chaque homme, pour en donner soixante-douze à chaque Mahométan ? La multiplication des femmes aura donc lieu comme a eu lieu la multiplication des pains ? Sans doute, puisque d’après le Koran, la femme est uniquement créée pour composer à l’homme un harem éternel et lui procurer des joies et des plaisirs ininterrompus.

— À qui, dans l’autre monde, appartiendra la femme qui a épousé plusieurs hommes ?

Le prophète répond que ses maris la tireront au sort.

La cruauté divine envers la femme et l’habitude prise par les hommes de la laisser hors de la religion, prédisposent peu les Musulmanes à s’occuper de l’au-delà de la vie.

N’attendant pas dans le Ciel de bonheur, la femme arabe le cherche sur la terre. Pour elle, la suprême félicité est de plaire, d’inspirer de l’amour ; aussi le Cadi, auquel elle va se plaindre quand elle n’est point satisfaite de son mari, lui donne-t-il droit souvent en disant : « Je te comprends, car je sais que la religion des femmes, c’est l’amour ! »