Les Femmes arabes en Algérie/Conclusion

Société d’éditions littéraires (p. 247-250).


Conclusion




En prenant possession de l’Algérie, la France a assumé la responsabilité du bonheur des Arabes. Cependant, au lieu de leur procurer les avantages de la civilisation, elle exerce sur eux depuis 70 ans une oppression barbare.

Les vaincus désarmés, ridiculisés, exploités, spoliés, par l’autorité et les particuliers ; sont tiraillés entre nos lois et les leurs, repris par le code de l’indigénat, quand ils échappent à la législation française ou musulmane. Pour justifier la cruauté et les exactions, on feint d’être devant eux en état de légitime défense, comme devant l’ennemi.

Pendant que la France tyrannise les arabes et leur accorde en compensation de leur liberté et de leurs biens, le droit de s’abrutir en violant les enfants, en faisant abus des femmes qu’ils peuvent séquestrer par troupe elle ouvre ses bras maternels aux étrangers ! Les étrangers sucent son sein et quand ils sont régénérés, ils retournent dépenser en leur pays la fortune acquise ; tandis que les musulmans meurent de faim.

La République peut-elle conserver à sa porte sans le mettre en valeur, un riche et merveilleux pays dans le seul but d’occuper une armée de fonctionnaires à pousser à dégénérer une race de quatre millions d’individus ?

Le lecteur qui m’a suivi regardant avec commisération la femme arabe instinctivement idéaliste livrée à une bestialité sauvage, et le musulman dont les plaies saignantes sont sans cesse avivées par les vautours dont il est la proie, est forcé de conclure que pour réaliser l’unité française en Algérie, pour fusionner les deux races, une loi commune régissant à la fois français et arabes, est nécessaire.

Aussi bien, il y a trop longtemps que ceux auxquels on a pris leur patrie sont exclus de son administration. Le meilleur moyen de les empêcher de se rebeller, c’est de les charger de concourir à faire prospère et libre leur pays.

Il n’y aura plus de conflits entre algériens et Israélites, quand les arabes dont ils se disputent la dépouille pourront se défendre à coups de bulletins.

Dès que les indigènes sont instruits, ils adoptent nos mœurs ; d’ailleurs, bien que les coutumes des méridionaux et des Corses différent de celles des habitants du nord de la France ; tous ne sont pas moins soumis à une même législation.

L’Allemagne n’a pas attendu pour courber sous ses lois les Alsaciens-Lorrains, autant de temps que nous, pour imposer notre langue et notre civilisation aux indigènes d’Algérie.

En traitant en égaux des enfants sortis de son sein les arabes désespérés, en utilisant pour la mise en valeur de la colonie leur endurance et pour la défense du territoire leur courage guerrier, la France peut décupler sa force et sa richesse, faire de l’Algérie où l’on n’entend actuellement que paroles de haine, cris de colère, lamentations, un paradis terrestre serein, où les habitants vivraient unis par la communauté des intérêts et où les houris aux beaux yeux, ne seraient plus ni vendues ni séquestrées.


Hubertine Auclert.