Les Anacréontiques/La Cigale

Les AnacréontiquesAlphonse Lemerre, éditeurPoésies d’Auguste Lacaussade, tome 1 (p. 114).

XLIV

LA CIGALE


 
Nous te disons heureuse et divine, ô cigale !
Posée au front d’un arbre en fleurs,
Quand du matin tu bois les pleurs,
Aux sillons verts disant ton hymne sans égale,
Tu chantes libre comme un roi.
Fruits des bois et des champs, gerbe ou grappe embaumée,
Toutes ces choses sont à toi,
Que le soleil mûrit dans l’herbe et la ramée.
Inoffensive à tous, du laboureur aimée,
Ton chant des Dieux même est goûté,
O prophétesse de l’été !
La muse te chérit, et Phoibos, non moins qu’elle,
Te chérit ; il t’a fait la voix limpide et belle.
Exempte de nos maux cuisants,
Tu ne sais pas le poids des ans :
Lourde aux mortels, à toi la vieillesse est légère.
Sans chair ni sang, habile au chant mélodieux,
O docte fille de la terre,
Je te salue heureuse et l’égale des Dieux !