Les Amours de Tristan/Les vaines douceurs


LES VAINES DOVCEVRS.

SONNET.



IE n’ay plus de relaſche au ſoucy qui me ronge,
Depuis que ma Philis s’eſloigna de ces lieux ;
Si ce n’est que la nuict il m’arrive qu’en ſonge
Ce bel Aſtre d’Amour ſe preſente à mes yeux.

Alors dans les douceurs où ceſte erreur me plonge,
Ie croy que des Enfers ie monte dans les Cieux :
Et ie renoncerois à la gloire des Dieux
Si ma felicité n’eſtoit point vn menſonge.

Philis en vn moment par vn charme ſi doux
Se iette entre mes bras malgré tant de ialoux,
Et tant d’empeſchemens qui ſont ſi difficiles.

Sommeil dont la bonté merite des Autels,
Si les biens que tu fais n’eſtoient point ſi fragiles
Tu ſerois le plus grand de tous les Immortels.