Librairie de L. Hachette et Cie (p. 78-82).

XX

MIRACLES DE SAINT PIERRE.



Grand’mère. Il y avait aussi à Joppé, autre ville près de Lydda, une femme nommée Tabithe, surnommée Dorcas.

Elle était très-charitable ; elle aidait beaucoup les pauvres, non-seulement par ses aumônes, mais aussi en travaillant pour eux et en les soignant, les consolant dans leurs maladies et leurs peines. Cette sainte femme tomba malade et mourut. Et après que les femmes qui l’entouraient eurent lavé son corps…

Henriette. Pourquoi lavée, puisqu’elle était morte ?

Grand’mère. Parce que partout, dans tous les pays, il est d’usage de rendre ce dernier service aux morts ; on veut que le dernier regard jeté sur un mort n’inspire pas de sentiment de dégoût ni de répulsion.

Quand donc les femmes eurent lavé le corps, elles le portèrent dans une chambre haute…

Louis. Pourquoi haute ? il ne lui fallait pas beaucoup de place, puisqu’elle était morte.

Grand’mère, souriant. Chambre haute veut dire ici au haut de la maison. Les disciples, voyant la désolation des pauvres gens que secourait Dorcas, et apprenant que le grand Apôtre saint Pierre était à Lydda, tout près de Joppé…

Armand. Où est Joppé ?

Grand’mère. Joppé est un petit port de la Syrie, situé sur le bord de la mer Méditerranée, à treize ou quatorze lieues de Jérusalem.

Ils lui envoyèrent deux hommes, pour le prier de venir auprès d’eux.

Pierre, se levant, vint les rejoindre. Et les disciples le conduisirent dans la chambre haute. Et là, toutes les veuves pauvres de Joppé s’assemblèrent autour de lui, pleurant et montrant les manteaux et les vêtements que leur faisait Dorcas.

Pierre, ayant fait sortir tout le monde, se mit à genoux et pria ; puis, se tournant vers le corps, il dit : « Tabithe, lève-toi ! » Elle ouvrit les yeux, et, ayant vu Pierre, elle s’assit. Alors Pierre, lui donnant la main, l’aida à se lever ; et, ayant appelé les disciples et les veuves, il la leur rendit pleine de vie…

Jeanne. Grand’mère, pourquoi, quand on vient chercher saint Pierre, dit-on, qu’il se leva ? il était donc toujours couché ?

Grand’mère. Non, chère petite ; il se couchait et il se reposait probablement bien peu ; mais il priait beaucoup, et quand on dit : Il se leva, c’est qu’il priait à genoux.

Jacques. Et pourquoi a-t-il fait sortir tout le monde ? C’eût été bien mieux de faire ce miracle devant tout le monde.

Grand’mère. En faisant sortir tout le monde et en restant seul avec la morte, saint Pierre a voulu faire voir que pour obtenir de grandes grâces du bon Dieu, il fallait du recueillement et du silence, ce qui est bien difficile quand on est dans le tourbillon du monde et de ses agitations. Quand il est seul, il se met à genoux, il se recueille, il prie, et alors seulement il ressuscite Dorcas.

Louis. Pourquoi saint Pierre se met-il à genoux ? Notre-Seigneur faisait ses miracles, même les plus grands, comme de ressusciter les morts, debout et sans prier.

Grand’mère. Parce que saint Pierre tenait son pouvoir de Notre-Seigneur ; par lui-même il ne pouvait rien, il n’était rien ; tandis que Jésus-Christ tenait sa puissance de lui-même, de sa Divinité. Pierre n’était qu’un homme ; Jésus-Christ était Dieu.

Valentine. Et pourquoi Dorcas, étant redevenue vivante, attend-elle pour se lever tout à fait que saint Pierre lui donne la main ?

Grand’mère. Parce que, quoique ressuscitée, elle avait encore besoin de l’aide du saint Apôtre pour se dégager tout à fait de l’engourdissement de la mort.

Ce miracle fit, comme vous le pensez, un grand bruit dans Joppé et amena beaucoup de conversions. Et saint Pierre y demeura plusieurs jours chez un corroyeur chrétien nommé Simon.

Armand. Qu’est-ce que c’est : corroyeur ?

Grand’mère. C’est un homme qui travaille des peaux de bêtes.

Louis. Comment travaille-t-on des peaux de bêtes ? Et quelles bêtes ?

Grand’mère. Toutes espèces de bêtes, dont la peau peut faire du cuir, comme vaches, chevaux, moutons, veaux, chiens même. Quand l’animal dont on veut avoir la peau est mort, on arrache sa peau, et pour qu’elle ne devienne pas sèche, dure et roide, on la saupoudre et on l’arrange dans ce qu’on appelle du tan, qui est l’écorce sèche de différents arbres. En Russie on enterre les peaux avec du tan ou écorce de bouleaux ; c’est ce qui donne au cuir de Russie cette odeur qu’on aime beaucoup en France et qui en Russie est très-dédaignée.

Mais ne nous éloignons pas des Actes des Apôtres, revenons à saint Pierre. Remarquez bien que saint Pierre a été le premier à enseigner et à convertir les Juifs, le premier à recevoir les Gentils, c’est-à-dire les hommes des nations païennes ; le premier à faire des miracles ; le premier à ressusciter un mort, le premier partout. Nous verrons tout à l’heure que c’est également saint Pierre qui, le premier, a reçu dans le sein de l’Église les premiers païens.

Louis. Qu’est-ce que c’est : Païens ?

Grand’mère. On appelle païens les hommes qui ne connaissaient pas le vrai Dieu ; ils adoraient les faux dieux. Les faux dieux des païens étaient des dieux voleurs, ivrognes, gourmands ; les païens adoraient aussi des chiens, des oiseaux, des pierres, des légumes, des fleurs, etc. Il y a encore dans le monde des millions de païens, comme les Chinois, les Indiens, les sauvages.

Henri. Qu’ils sont bêtes, ces pauvres gens !

Grand’mère. Ignorants et malheureux surtout, de ne pas connaître le bon Dieu et de ne pas avoir les consolations de la vraie foi ; saint Pierre et les autres Apôtres en ont converti des milliers.