Le premier acte du synode nocture (éd. 1608)/Prologve

Bandeau pour Le Premier acte du Synode nocturne
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LES ACTES DV
SYNODE NOCTVRNE
DES TRIBADES LEMA-
nes, Vnelmanes, Propetides, à
la ruine des biens, vie, &
honneur de Calianthe.


PROLOGVE.



Quel affront ? Quel coup de pied ? Que ce bas Borée, mon vnique & rabobeliné mignon, mon petit Myſogine fanfreluché, te conuient bien, à toy qui te releue dans les armes Tymbrées de la plus noble haute & couillarde famille des aſnes Arcadics, iſſu, A Paterno latere, de celuy que le vieillard Sylene cheuaucha au triomphe du bon pere Thyonée, lors que victorieus il remporta les depouilles Indiennes.

Ainſi parloit l’vne des Propetides, celle qui a ſoubs ſa clef les modernes tapiſſeries de haulte liſſe de la generale Cabale des Tribades oyant lire l’Anemoſtereane copulation de Borée & d’Orithie.

Et vous, trepelus, biberons infatigables & ſempiternels, quelle paillarde de fortune fortunante auez vous couruë depuis le temps que vous l’entendiſtes reciter entre les verres & les pots dans le plus fameux Delubre Dioniſien de voſtre ville à voſtre aduis.

Nonnè ſeſe excruciat qui beatis inuidet.

Et n’eſtoient-ils pas bien de loiſir, ces Diables Cenſorins, & par conſequent paillards, ſi le dire du poëte eſt vray, que l’oiſiueté eſt mere de paillardiſe, que d’Alambiquer l’Elixir de leurs terreſtres & peſans eſprits à Rabaniſer, Metragraboliſer, Philogroboliſer, Grabaler & Cabanaſſer les dicts, geſtes, & faits de ceuls qui ne leurs appartenoient en rien, ne reſſemblans à autres qu’à eux meſmes, qui veulent par Inſipides efforts faire retrograder les deſtins, & deſtourner les influences celeſtes qui ſont ça bas infuſes aux mortels par l’arreſt irreuocable & definitif des volontez ſuperieures du Monarque de ce grand tout.

O Curas hominum, ô quantum eſt in rebus inane.

Ventre ſainct Quenet ils euſſent bien eu plus de profit & d’honneur de paſſer le temps, comment que ce fuſt au Soleil, ou à la Lune, ce m’eſt tout vn, à epuceter les ſainctes Brayes de leurs nouueaux hoſtes, ces bons Kaloucres Enchapouinés, ou bien à former leurs vies ſur ceſte tant eſmerueillable & pieuſe hiſtoire depuis trois iours arriuée de Veniſe où ces bons peres de hault relief, font iouër ſur vn Theatre de verre, S. Paul, S. François & vn Eueſque à trois perſonnages reformez. Ils en trompetent le miracle, d’autant que Magna ſtultorum miracula.

Mais or ſus, de par le tout puiſſant, ie ſuis au per autant eſcarbillat & reſiouy de voſtre contentement que mon ame ſe ſent alegre & prend de plaiſir en leur confuſion, momentuellement preparé d’vne irrefragable volonté de vous faire iouïr de paſſe-temps tous frais eſmoulus & nouuellement Tirés de la profondeur de voſtre foſſe Morant en laquelle autrefois ils ont eſté accompagnez de la Croix de voſtre Egliſe lors qu’elle y fut iettée pour la crainte des Archers Anglois de Baignolet. Mais quoy ? Il ſemble à vous voir que vous penſiez que mes parolles ſoient baies, certes non pas d’aquo ? Mal ſainct Anthoni Bous rape, mal de terre bous bire, le maulancis de Biterne bous trigoſſe ſi iou ne diſi la bertat ; ne ſçauez-vous pas par tradition authentique, que

Non patitur ludum fama, fides, oculus.


Vous me regardez encores ? & ie vous aſſeure que tous les diſcours que ie vous tiendray ſont vrais, ou la renommée ment ; ie ſuis du tout aueugle, & la foy eſt generalement eſteincte entre les hommes,

Qui niſi ſunt veri, ratio quoque falſa ſit omnis.


Et bien que vous n’ayez iamais eſté imbus des veritables caracteres de ces lignes, & que tout cecy n’aye iuſques à ce iour eſté neque ſcriptum, neque pictum, neque fictum, ſi eſt-ce toutefois ſi vous les voulez tant ſoit peu gouſter, voſtre Palais s’aguiſera, & au plus ſimple deſil de vos paupieres vous cōgnoiſtrez par vne certaine vray-ſemblance les ſeules traces d’vne non ſaincte hiſtoire : donnez donc d’autres lineamens à voſtre viſage, faictes que la plus ſaine partie de voſtre eſprit s’imprime ce qui doit apporter le Colophe à ceſte Satyre, qui eſt la creance, & puis commandez que ie crayonne les premiers traicts d’icelle, qui ne ſeront beaucoup eſloignez des derniers pour eſtre de long temps formez en mon memento : ie vous iure, S. Trigault de Breſſure qu’ils me poiſent plus dans la teſte que la guerriere Minerue ne poiſoit à l’Omniculteur Iupin dans ſa celeſte ceruelle, & croy que l’on n’aura que faire de lire la vie de Saincte Marguerite lors que ie les enfanteray, pour eſtre la matrice de mon eſprit à raiſon de ces continuelles couches, ample & large d’auantage ſans comparaiſon que la plus ouuerte & capable de toutes celles du grand & petit Huleu de Paris. Mais maintenant il me ſemble que ie congnois en vous d’autres geſtes qui ſe ſont compoſez par la diſpoſition de vos ſens prets & appareillez à receuoir telles impreſſions que l’on deſirera d’eux. Plaiſt ? Ouy, ie le congnois, ie le voy.

O terque quaterque beati.


Gens heureux, voſtre ſeule foy vous exempte des grifes des plus abominables, ſales, vilaines, ordes, infectes, puãtes & venimeuſes Harpies qui ayẽt iamais raui les viandes appreſtées & ſeruies ſur la table du miſerable Pinée. Ouy, elle vous en exempte ! & d’auantage elle vous affranchit du hoqueton & de la hallebarde, pourueu, cela s’entend, qu’elle entretienne ſans ceſſe ſa ferueur en vous meſmes. Ce n’eſt pas tout ; ſçauez-vous mon Theme, & ſur quel ſubject ie veux donner carriere à vos ſens les plus aigus & delicats, ne vous mettez pas dans la fantaſie que ce ſoit ſur quelque maheutre engroſſement gamoiſic, cauſé par ie ne ſais quel Couillon ver moulu, diſcratié, & appelãt, non ce ne ſera pas, n’eſtimez pas auſſi que ie vous veille entretenir, de matrices, Bourgeoiſes charitables entrelardées de Verpes Monachales, nenny rien moins que tout cela. Ma plume me feroit banqueroute & dedaigneroit de donner ces faicts à la lumiere comme incapables de vous & de moy. Je vous ai faict efleuer vn Theatre ſans comparaiſon bien plus magnificentißime democritic & Cachinnatic. Où il vous ſera repreſenté vn Synode de deux nations limitrophes & adioinctes de toutes les plus apparentes & Engalochées Tribades d’icelles.

Curis acuentes mortalia corda, aſſiſtées (d’autãt qu’il n’eſt pas bon que l’homme ſoit ſeul : Va homini Soli)

De deux monſtres freres fredons Aphiſtamiſtes,
Qualia demensÆgyptus portenta colit,
d’vn Bagoas Badelorié & courbatu, d’vn veſpille citadin,
& d’vn Maiſtre Huißier nommé Harpetirade.

Auſi Omnes immane nefas. Idque en vne ville Lemane ſur les occultes machinations pretenduës d’vne part, & reformées de l’autre, en la perſonne d’vn pauure diable querant fortune, & beliſtre d’icelle nommé Calianthe. Où vous voirez le Deigma de l’intelligence des Lunetiers de Calabre auec le Pape Gregoire, leur Confederé, qui fut telle que tous les enfans perdus s’eſtant rencontrez de haſard en vn meſme chemin, ils ſe perdirent tous perdus enſemble, & fut dict ce temps là le temps perdu. Et bien Couillus Couilletez Couillards, Couillardez, Couillauds Couillaudez, Couillatiſez & Couilletãs, eſt-ce rien cela ? Hem ? Qu’en monopollebaliſez vous, eſt-ce rien ? Ouy ie vous affie c’eſt quelque choſe, & du plus ſuperlificoquentieux, eſcoutez donc, viedazes, eſcoutez que dict le paillard, ventre ſus vẽtre, quels Trinquenailles, quels gallefretiers.

Mais quelle parolle aſſez hardie hauſſera la bonde aus commencemens de ces merueilles ma Muſe dis-moy ma toute belle quel accent ſera le premier entendu à la voix d’icelles.

Ma Clion, mon deſir,
Mon doux contentement, mon vnique plaiſir

Enleue moy d’icy, monte moy ſur le feſte
Du ſainct double Rocher.


Deſcoule ton diuin nectar dans ma bouche, fais que ma plume ſoit mouillée dans le ſucre de ton encre, afin qu’elle imprime ſur ce papier vn diſcours autãt inaudict que nouueau, meritoire pour ſa couche, & vous, Pnomes chatouilleux, delicates oreilles, acourez voicy freche marée vous aurez dequoy raſſaſier vos affections atteles ſeulement vos ſens pour mieux comprendre.

Ἀκούται λἐος Admiranda Canam.
EtΟἶδα μὲν ὡς σχεδίῃσι μακρὸν
πλόον ἐκπερόωμεν
.