Gervais Clouzier, 1680 (1 / 2, pp. 9-10).
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LEs connoissances necessaires pour reüssir dans la cure des maladies des Chevaux, sont outre l’idée generale qu’il en faut avoir, de le considerer attentivement, pour découvrir l’infirmité particuliere qui l’afflige : le premier signe qu’il vous donnera de sa maladie, sera le dégoust ; lors il faut voir s’il a l’œil agart & farouche, l’œil du Cheval est le vray miroir de son intérieur ; s’il a l’oreille froide, la bouche échauffée, pasteuse ou baveuse, le poil herissé aux flancs, & lavé aux extremirez plus qu’à l’ordinaire, c’est à dire, desteint, ayant accoustumé de l’avoir vif ; si la fiante est dure & noire, ou verdatre : s’il urine clair, c’est à sçavoir une eau claire, & cruë ; que l’œil luy pleure, qu’il aye la teste pesante & basse, qu’en cheminant il chancele, qu’ayant accoustumé d’estre vigoureux, on le void tardif & pesant, qu’estant vicieux aux autres Chevaux, il ne leur dit rien, qu’il se leve & couche souvent dans l’Escurie, regardant son flanc, que lesdits flancs luy redoublent, que le coeur luy batte: ce qui se connoist appliquant la main platte entre l’épaule & la sangle au costé gauche, qu’il se neglige sans se soucier quoy qu’on luy fasse, & plusieurs autres signes que les Chevaux nous donnent de leurs maladies, desquels nous parlerons de chacun en particulier en son lieu.

Lors qu’un Cheval a esté long-temps malade, & qu’il ne se campe plus pour pisser, mesme qu’il ne tire pas, mais simplement laisse degoutter l’urine de dedans le fourreau, c’est presque toujours un signe mortel, s’il ne pissoit pas de la sorte estant en santé, mais si se portant bien, il laissoit degoutter l’urine de dedans le fourreau, comme cela arrive quelquefois, on ne pourroit en tirer aucune conjecture s’il pissoit de mesme estant malade.

C’est encore un signe presque toujours mortel, lors que la queuë & le crain s’arrache avec beaucoup de facilité.Chap.
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C’est un signe de maladie dangereuse, lors que le Cheval ne se couche point estant malade, ou s’il se couche qu’il se releve d’abord, ne pouvant respirer à son aise estant couché, que si au contraire au declin d’une maladie le Cheval se couche, & demeure long-temps couché, c’est un tres-bon signe.

Lors qu’un Cheval malade montre le blanc de ses yeux au haut, c’est signe qu’il souffre de la douleur, & que sa maladie sera longue.

De ces signes vous pourrez conjecturer que vostre Cheval est malade, il faut tâcher de connoistre ensuitte sa maladie en particulier pour y donner remede, un mal connu est à demy guery, morbum nosse curationis principium : nous commencerons par les maux qui viennent à la teste, & suivrons en cet ordre tout au long du corps du Cheval, jusqu’aux moindres infirmitez, & donnerons les remedes apres avoir donné une legere definition de la maladie, & de ses causes, & l’avoir fait connoistre autant qu’on le peut sur le papier.