PhilomélaJ. Hetzel, libraire-éditeur (p. 81-84).
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LE MATIN



La tenture s’est décrochée
Et l’on voit au fond du boudoir
Une femme, tête penchée
Sur un coussin de satin noir.


Elle agite un lambeau fantasque,
Écharpe folle de houri ;
À ses pieds un tambour de basque
S’endort près d’un bouquet flétri.

Sa gorge ferme, demi-nue,
Jaillit de ses voiles tombés,
La robe à peine retenue
Par la hanche aux contours bombés.

Son dos luxurieux se cambre ;
Sous le bras qui souvent son front
On voit, avec des reflets d’ambre,
Un sein bruni saillir en rond.


Sa main fine, à demi serrée,
Relevant un coin du peignoir,
Découvre sa jambe nacrée,
Ronde et blanche sur un fond noir ;

Tandis qu’une tête plus sombre,
Lèvre épaisse aux plis tortueux,
Planant sur elle, éclaire l’ombre
De sourires voluptueux !

Mais déjà, blanchissant l’alcôve
Des feux de son premier rayon,
Le soleil montrait son œil fauve
À la vitre de l’horizon,


Et les pins, branches remuées,
Là-bas, sur les deux entr’ouverts,
Balayaient au loin les nuées
Du bout de leurs panaches verts !