Hachette (p. 87-104).
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V.

première journée de marche.


Il était un peu plus de huit heures lorsque John Cort, Max Huber, Khamis et l’enfant prirent direction vers le sud-ouest.

À quelle distance apparaîtrait le cours d’eau qu’ils comptaient suivre jusqu’à son confluent avec l’Oubanghi ?… Aucun d’eux ne l’eût pu dire. Et si c’était celui qui paraissait couler vers la forêt, après avoir contourné le tertre des tamarins, n’obliquait-il pas à l’est sans la traverser ?… Et, enfin, si les obstacles, roches ou rapides, encombraient son lit au point de le rendre innavigable ?… D’autre part, si cette immense agglomération d’arbres était dépourvue de sentiers ou du moins de passées ouvertes par les animaux entre les halliers, comment des piétons pourraient-ils s’y frayer une route sans employer le fer ou le feu ?… Khamis et ses compagnons trouveraient-ils, dans les parties fréquentées par les gros quadrupèdes, le sol dégagé, les broussailles piétinées, les lianes rompues, le cheminement libre ?…

Llanga, comme un agile furet, courait en avant, bien que John Cort lui recommandât de ne pas s’éloigner. Mais, lorsqu’on le perdait de vue, sa voix perçante ne cessait de se faire entendre.

« Par ici… par ici ! » criait-il.

Et tous trois marchaient vers lui, en suivant les percées dans lesquelles il venait de s’engager.

Lorsqu’il fallut s’orienter à travers ce labyrinthe, l’instinct du foreloper intervint utilement. D’ailleurs, par l’interstice des frondaisons, il était possible de relever la position du soleil. En ce mois de mars, à l’heure de sa culmination, il montait presque au zénith, qui, pour cette latitude, occupe la ligne de l’équateur céleste.

Cependant le feuillage s’épaississait à ce point que c’est à peine si un demi-jour régnait sous ces milliers d’arbres. Par les temps couverts, ce devait être presque de l’obscurité, et, la nuit, toute circulation deviendrait impossible. Il est vrai, l’intention de Khamis était de faire halte entre le soir et le matin, de choisir un abri au pied de quelque tronc en cas de pluie, de n’allumer de feu que juste pour cuire le gibier abattu dans l’avant ou l’après-midi. Quoique la forêt ne dût pas être fréquentée par les nomades, — et on n’avait pas relevé trace de ceux qui avaient campé sur la lisière, — mieux valait ne point signaler sa présence par l’éclat d’un foyer. Au surplus, quelques braises ardentes, disposées sous la cendre, devaient suffire à la cuisine, et il n’y avait rien à craindre du froid à cette époque de la saison africaine.

En effet, la caravane avait déjà eu à souffrir des chaleurs en parcourant les plaines de la région intertropicale. La température y atteignait un degré excessif. Sous l’abri de ces arbres, Khamis, Max Huber, John Cort seraient moins éprouvés, les conditions étant plus favorables au long et pénible parcours que leur imposaient les circonstances. Il va de soi que pendant ces nuits, imprégnées des feux du jour, à la condition que le temps fût sec, il n’y avait aucun inconvénient à coucher en plein air.

La pluie, c’était là ce qui était le plus à craindre dans une contrée où les saisons sont toutes pluvieuses. Sur la zone équinoxiale soufflent les vents alizés qui s’y neutralisent. De ce phénomène climatérique il résulte que, l’atmosphère étant généralement calme, les nuages épanchent leurs vapeurs condensées en d’interminables averses. Toutefois, depuis une semaine, le ciel s’était rasséréné au retour de la lune, et, puisque le satellite terrestre paraît avoir une influence météorologique, peut-être pouvait-on compter sur une quinzaine de jours que ne troublerait pas la lutte des éléments.

En cette partie de la forêt qui s’abaissait en pente peu sensible vers les rives de l’Oubanghi, le terrain n’était pas marécageux, ce qu’il serait sans doute plus au sud. Le sol, très ferme, était tapissé d’une herbe haute et drue qui rendait le cheminement lent et difficile, lorsque le pied des animaux ne l’avait pas foulée.

« Eh ! fit observer Max Huber, il est regrettable que nos éléphants n’aient pas pu foncer jusqu’ici !… Ils auraient brisé les lianes, déchiré les broussailles, aplani le sentier, écrasé les ronces…

— Et nous avec… répliqua John Cort.

— Assurément, affirma le foreloper. Contentons-nous de ce qu’ont fait les rhinocéros et les buffles… Où ils ont passé, il y aura pour nous passage. »

Khamis, d’ailleurs, connaissait ces forêts de l’Afrique centrale pour avoir souvent parcouru celles du Congo et du Cameroun. On comprendra, dès lors, qu’il ne fût point embarrassé de répondre relativement aux essences forestières si diverses, qui foisonnaient dans celle-ci. John Cort s’intéressait à l’étude de ces magnifiques échantillons du règne végétal, à ces phanérogames dont on a catalogué tant d’espèces entre le Congo et le Nil.

« Et puis, disait-il, il en est d’utilisables, susceptibles de varier le monotone menu des grillades. »

Sans parler des gigantesques tamarins réunis en grand nombre, les mimosas d’une hauteur extraordinaire et les baobabs dressaient leurs cimes à une altitude de cent cinquante pieds. À vingt et trente mètres s’élevaient certains spécimens de la famille des euphorbiacées, à branches épineuses, à feuilles larges de six à sept pouces, doublées d’une écorce à substance laiteuse, et dont la noix, lorsque le fruit est mûr, fait explosion en projetant la semence de ses seize compartiments. Et, s’il n’eût possédé l’instinct de l’orientation, Khamis n’aurait-il pu s’en rapporter aux indications du sylphinum lacinatum, puisque les feuilles radicales de cet arbuste se tordent de manière à présenter leurs faces l’une à l’est, l’autre à l’ouest.

En vérité, un Brésilien perdu sous ces profonds massifs se serait cru au milieu des forêts vierges du bassin de l’Amazone. Tandis que Max Huber pestait contre les buissons nains qui hérissaient le sol, John Cort ne se lassait pas d’admirer ces tapis verdoyants de haute lisse, où se multipliaient le phrynium et les aniômes, les fougères de vingt sortes qu’il fallait écarter. Et quelle variété d’arbres, les uns de bois dur, les autres de bois mou ! Ceux-ci, ainsi que le fait remarquer Stanley, — Voyage dans les ténèbres de l’Afrique, — remplacent le pin et le sapin des zones hyperboréennes. Rien qu’avec leurs larges feuilles, les indigènes se construisent des cabanes pour une halte de quelques jours. En outre, la forêt possédait encore en grand nombre des teks, des acajous, des cœurs-verts, des arbres de fer, des campêches de nature imputrescible, des copals de venue superbe, des manguiers arborescents, des sycomores qui pouvaient rivaliser avec les plus beaux de l’Afrique orientale, des orangers à l’état sauvage, des figuiers dont le tronc était blanc comme s’il eût été chaulé, des mpafous colossaux et autres arbres de toutes espèces.

En réalité, ces multiples produits du règne végétal ne sont pas assez pressés pour nuire au développement de leur ramure sous l’influence d’un climat à la fois chaud et humide. Il y aurait eu passage même pour les chariots d’une caravane, si des câbles, mesurant jusqu’à un pied d’épaisseur, n’eussent été tendus entre leurs bases, — interminables lianes qui s’enroulaient autour des fûts comme des fouillis de serpents. De toutes parts s’enchevêtraient un enguirlandement de branchages dont on ne saurait se faire une idée, des tortis capricieux, des festons ininterrompus allant des massifs aux halliers. Pas un rameau qui ne fût rattaché au rameau voisin ! Pas un tronc qui ne fût relié par ces longues chaînes végétales, dont quelques-unes pendaient jusqu’à terre comme des stalactites de verdure ! Pas une rugueuse écorce qui ne fût tapissée de mousses épaisses et veloutées sur lesquelles couraient des milliers d’insectes aux ailes pointillées d’or !

Et des moindres amalgames de ces frondaisons s’échappait un concert de gazouillements, de hululements, ici des cris, là des chants, qui s’éparpillaient du matin au soir.

Les chants, c’étaient des myriades de becs qui les lançaient en roulades, rossignolades, trilles plus variés et plus aigus que ceux d’un sifflet de quartier-maître à bord d’un navire de guerre. Et comment n’être point assourdi par ce monde ailé des perroquets, des huppes, des hiboux, des écureuils volants, des merles, des perruches, des tette-chèvres, sans compter les oiseaux-mouches, agglomérés comme un essaim d’abeilles entre les hautes branches ?…

Les cris, c’étaient ceux d’une colonie simienne, un charivarique accord de babouins à poil grisâtre, de colobes encamaillés, de grenuches à fourrure noire, de chimpanzés, de mandrilles, de gorilles, les plus vigoureux et les plus redoutables singes de la faune africaine. Jusqu’alors, ces quadrumanes, bien qu’ils fussent en bandes, ne s’étaient livrés à aucune manifestation hostile contre Khamis et ses compagnons, les premiers hommes, sans doute, qu’ils apercevaient au fond de cette forêt de l’Afrique centrale. Il y avait lieu de croire, en effet, que jamais êtres humains ne s’étaient aventurés sous ces massifs. De là, chez la gent simienne, plus de curiosité que de colère. En d’autres parties du Congo et du Cameroun, il n’en eût pas été de même. Depuis longtemps, l’homme y a fait son apparition. Les chasseurs d’ivoire, auxquels des centaines de bandits, indigènes ou non, prêtent leur concours, n’en sont plus à étonner des singes, depuis longtemps témoins des ravages que ces aventuriers exercent, et qui coûtent tant de vies humaines.

Après une première halte au milieu de la journée, une seconde fut faite à six heures du soir. Le cheminement avait présenté parfois de réelles difficultés en présence d’inextricables réseaux de lianes. Les couper ou les rompre exigeait un pénible travail. Toutefois, sur une grande étendue du parcours s’ouvraient des sentiers fréquentés plus particulièrement par les buffles, dont quelques-uns furent entrevus derrière les buissons, — entre autres des onjas de forte taille.

Ces ruminants ne laissent point d’être redoutables, grâce à leur force prodigieuse, et les chasseurs doivent éviter, quand ils les attaquent, d’être chargés par eux. Les tirer entre les deux yeux, pas trop bas, afin que la blessure soit foudroyante, c’est le plus sûr moyen de les abattre.

John Cort et Max Huber n’avaient jamais eu l’occasion d’exercer leur adresse contre ces onjas, qui s’étaient tenus hors de portée. D’ailleurs, la chair d’antilope ne manquant pas encore, il importait de ménager les munitions. Aucun coup de fusil ne devait retentir pendant cette traversée, à moins qu’il ne s’agît de la défense personnelle ou de la nécessité de pourvoir à la nourriture quotidienne.

Ce fut au bord d’une petite clairière que, le soir venu, Khamis donna le signal d’arrêt, au pied d’un arbre qui dépassait la futaie environnante. À six mètres du sol s’étendait son feuillage d’un vert tirant sur le gris, entremêlé de fleurs d’un duvet blanchâtre tombant en neige autour d’un tronc à l’écorce argentée. C’était un de ces cotonniers d’Afrique, dont les racines sont disposées en arcs-boutants, et sous lesquelles on peut s’abriter.

« Le lit est tout fait !… s’écria Max Huber. Pas de sommier élastique, sans doute, mais un matelas de coton, et nous en aurons l’étrenne ! »

Le feu allumé avec le briquet et l’amadou dont Khamis était amplement approvisionné, ce repas fut semblable au premier du matin et au deuxième de la méridienne. Par malheur, — et comment ne point s’y résigner ? — manque absolu de ce biscuit qui avait remplacé le pain pendant la campagne. On se contenta donc des grillades, lesquelles satisfirent l’appétit dans une large mesure.

Le souper fini, avant d’aller s’étendre entre les racines du cotonnier, John Cort dit au foreloper :

« Si je ne me trompe, nous avons toujours marché dans le sens du sud-ouest…

— Toujours, répondit Khamis. Chaque fois que j’ai pu apercevoir le soleil, j’ai relevé la route…

— À combien de lieues estimez-vous nos étapes pendant cette journée ?…

— Quatre à cinq, monsieur John, et, si nous continuons de la sorte, en moins d’un mois nous aurons atteint les bords de l’Oubanghi.

— Bon, reprit John Cort, n’est-il pas prudent de compter avec les mauvaises chances ?…

— Et aussi avec les bonnes, repartit Max Huber. Qui sait si nous ne découvrirons pas quelque cours d’eau, qui nous permettra de descendre sans fatigue…

— Jusqu’ici il ne semble pas, mon cher Max…

— C’est que nous ne sommes pas assez avancés en direction de l’ouest, affirma Khamis, et je serais très surpris si demain… ou après-demain…

— Faisons comme si nous ne devions pas rencontrer une rivière, répliqua John Cort. Somme toute, un voyage d’une trentaine de jours, si les difficultés ne sont pas plus insurmontables que pendant cette première journée, ce n’est pas pour effrayer des chasseurs africanisés comme nous le sommes !

— Et encore, ajouta Max Huber, je crains bien que cette mystérieuse forêt ne soit totalement dépourvue de mystère !

— Tant mieux, Max !

— Tant pis, John ! — Et, maintenant, Llanga, allons dormir…

— Oui, mon ami Max », répondit l’enfant, dont les yeux se fermaient de sommeil, après les fatigues d’une longue route pendant laquelle il n’était jamais resté en arrière.

Aussi fallut-il le transporter entre les racines du cotonnier et l’accoter dans le meilleur coin.

Le foreloper s’était offert à veiller toute la nuit. Ses compagnons n’y voulurent point consentir. On se relayerait de trois heures en trois heures, bien que les entours de la clairière ne parussent pas suspects. Mais la prudence commandait d’être sur ses gardes jusqu’au lever du jour.

Ce fut Max Huber qui prit la première faction, tandis que John Cort et Khamis s’étendaient sur le blanc duvet tombé de l’arbre.

Max Huber, sa carabine chargée à portée de la main, appuyé contre une des racines, s’abandonna au charme de cette tranquille nuit. Dans les profondeurs de la forêt, tous les bruits du jour avaient cessé. Il ne passait entre les ramures qu’une haleine régulière, la respiration de ces arbres endormis. Les rayons de la lune, très élevée vers le zénith, glissaient par les interstices du feuillage et zébraient le sol de zigzags argentés. Au-delà de la clairière, les dessous s’illuminaient aussi du scintillement des irradiations lunaires.

Très sensible à cette poésie de la nature, Max Huber la goûtait, l’aspirait, pourrait-on dire, croyait rêver parfois, et cependant ne dormait point. Ne lui semblait-il pas qu’il fût le seul être vivant au sein de ce monde végétal ?…

Monde végétal, c’était bien ce que son imagination faisait de cette grande forêt de l’Oubanghi !

« Et, pensait-il, si l’on veut pénétrer les derniers secrets du globe, faut-il donc aller jusqu’aux extrémités de son axe, pour découvrir ses derniers mystères ?… Pourquoi, au prix d’effroyables dangers et avec la certitude de rencontrer des obstacles peut-être infranchissables, pourquoi tenter la conquête des deux pôles ?… Qu’en résulterait-il ?… La solution de quelques problèmes de météorologie, d’électricité, de magnétisme terrestre !… Cela vaut-il que l’on ajoute tant de noms aux nécrologies des contrées australes et boréales ?… Est-ce qu’il ne serait pas plus utile, plus curieux, au lieu de courir les mers arctiques et antarctiques, de fouiller les aires infinies de ces forêts et de vaincre leur farouche impénétrabilité ?… Comment ! il en existe de telles en Amérique, en Asie, en Afrique, et aucun pionnier n’a eu jusqu’ici la pensée d’en faire son champ de découvertes, ni le courage de se lancer à travers cet inconnu ? Personne n’a encore arraché à ces arbres le mot de leur énigme comme les anciens aux vieux chênes de Dodone ?… Et n’avaient-ils pas eu raison, les mythologistes, de peupler leurs bois de faunes, de satyres, de dryades, d’hamadryades, de nymphes imaginaires ?… D’ailleurs, pour se restreindre aux données de la science moderne, ne peut-on admettre, en ces immensités forestières, l’existence d’êtres inconnus, appropriés aux conditions de cet habitat ? À l’époque druidique, est-ce que la Gaule transalpine n’abritait pas des peuplades à demi sauvages, des Celtes, des Germains, des Ligures, des centaines de tribus, des centaines de villes et de villages, ayant leurs coutumes particulières, leurs mœurs personnelles, leur originalité native, à l’intérieur de ces forêts dont la toute-puissance romaine ne parvint pas sans grands efforts à forcer les limites ?… »

Ainsi songeait Max Huber.

Or, précisément, en ces régions de l’Afrique équatoriale, est-ce que la légende n’avait pas signalé des êtres à un degré inférieur de l’humanité, des êtres quasi fabuleux ?… Est-ce que cette forêt de l’Oubanghi n’avoisinait pas, à l’est, les territoires reconnus par Schweinfurth et Junker, le pays des Niam-Niam, ces hommes à queue, qui, il est vrai, ne possédaient aucun appendice caudal ?… Est-ce que Henry Stanley, dans les contrées au nord de l’Itouri, n’avait pas rencontré des pygmées hauts de moins d’un mètre, parfaitement constitués, à peau luisante et fine, aux grands yeux de gazelle, et dont le missionnaire anglais Albert Lhyd a constaté l’existence entre l’Ouganda et la Cabinda, plus de dix mille, abrités sous la ramure ou perchés sur les grands arbres, ces Bambustis, ayant un chef auquel ils obéissaient ?… Est-ce que dans les bois de Ndouqourbocha, après avoir quitté Ipoto, il n’avait pas traversé cinq villages, abandonnés de la veille par leur population lilliputienne ? Est-ce qu’il ne s’était pas trouvé en présence de ces Ouambouttis, Batinas, Akkas, Bazoungous, dont la stature ne dépassait pas cent trente centimètres, réduite même, pour certains d’entre eux, à quatre-vingt-douze, et d’un poids inférieur à quarante kilogrammes ? Et, cependant, ces tribus n’en étaient pas moins intelligentes, industrieuses, guerrières, redoutables, avec leurs petites armes, aux animaux comme aux hommes, et très craintes des peuplades agricoles des régions du haut Nil ?…

Aussi, emporté par son imagination, son appétit des choses extraordinaires, Max Huber s’obstinait-il à croire que la forêt de l’Oubanghi devait renfermer des types étranges, dont les ethnographes ne soupçonnaient pas l’existence… Pourquoi pas des humains qui n’auraient qu’un œil comme les Cyclopes de la Fable, ou dont le nez, allongé en forme de trompe, permettrait de les classer, sinon dans l’ordre des pachydermes, du moins dans la famille des proboscidiens ?…

Max Huber, sous l’influence de ces rêveries scientifico-fantaisistes, oubliait tant soit peu son rôle de sentinelle. L’ennemi se fût approché sans avoir été signalé à temps pour que Khamis et John Cort pussent se mettre sur la défensive…

Une main s'appuya sur son épaule.

« Eh !… quoi ? fit-il en sursautant.

— C’est moi, lui dit son compagnon, et ne me prenez pas pour un sauvage de l’Oubanghi ! — Rien de suspect ?…

— Rien…

— Il est l’heure à laquelle il est convenu que vous iriez reposer, mon cher Max…

— Soit, mais je serai bien étonné si les rêves que je vais faire en dormant valent ceux que j’ai faits sans dormir ! »

La première partie de cette nuit n’avait point été troublée, et le reste ne le fut pas davantage, lorsque John Cort eut remplacé Max Huber, et lorsque Khamis eut relevé John Cort de sa faction.

une main s’appuya sur son épaule.