I

L’ESPRIT DU MOYEN AGE

On se figure trop le Moyen Âge comme une immense collégiale où règnent des mœurs ecclésiastiques et où l’artiste affecte des façons de tertiaire.

Puvis de Chavannes, allégorisant l’inspiration chrétienne, a donné, comme fond au cloître que décore le moine artiste, une pente inculte qui sert de cimetière. Sans transition, sans rompre sa clôture, le frère peintre ira de sa dernière fresque à la tombe : rien du monde jamais n’aura obscurci sa vision. Belle image sans réalité, ni historique, ni psychique !

On juge l’esprit des œuvres ordinairement par le choix des sujets ; et pour les superficiels, les statues de Saint-Pierre de Rome, Saint-Pierre lui-même, comme le Stabat de Rossini, relèvent de l’esthétique religieuse. Si la madone se détache sur un fond d’or ou que le Seigneur apparaisse largement nimbé, on croit voir l’artiste ceinturé du cordon franciscain et préludant à son travail par des récitations de chapelet. Ainsi s’est formée et se prolonge cette bizarre confusion de la foi avec la dévotion, et des mœurs cléricales avec les bonnes mœurs.

Fra Angelico pleurait en peignant les scènes de la Passion, mais il n’y a eu qu’un Fra Angelico.

Ce Dominicain ne représente nullement le type artistique de son temps et l’épithète de Beato lui vient du suffrage profane. Aucun pape n’a songé à mettre sur les autels ce religieux d’une supériorité si étrangère à la routine et d’un exemple si humiliant pour la corporation paresseuse entre toutes.

On cite souvent ces paroles, attribuées à Buffalmaco : « Nous autres peintres, nous ne nous occupons que de faire des saints et des saintes sur les murs et les autels, afin qu’au grand dépit des démons, les hommes soient plus portés à la piété. » Nous savons que ce même giottesque montait, après vêpres, sur la colline de Fiesole et buvait frais avec des camarades.

Rio, dans son Art chrétien, dit littéralement que « l’atelier du peintre était transformé en oratoire, vers 1350 ». Il représente la confrérie de Saint-Luc non comme une réunion d’artistes se communiquant leurs découvertes ou délibérant sur l’adoption de nouvelles méthodes, mais en pieuse assemblée ayant ce but unique, rendere lode e grazie a Dio.

Nous touchons ici à la grande erreur de l’enseignement sacerdotal. Est-ce un heureux changement, celui qui transforme un lieu d’activité et de création en formule passive ?

Quelles louanges et quelles actions de grâces égalent une belle fresque, même au sens clérical ?

En méprisant les œuvres du génie pour exalter les vertus cachées, l’humble obéissance et les mérites qu’on n’a pas besoin de prouver, le clergé de tous les temps a conçu un dessein politique où sa paresse s’accordait avec le soin de son prestige. La canonisation d’un Labre prend ses raisons, non de la belle humilité du personnage, mais d’une volonté séculaire et tyrannique d’humilier la supériorité véritable et d’opposer à l’idéal naturel de l’homme civilisé une autre conception qui sauvegarde l’hégémonie du clerc sur le laïc. Chose bien digne d’étonner, cette aberration a été exaspérée et portée au point actuel par l’esprit protestant. Un Jules II, un Léon X savent la surnaturalité d’un Michel-Ange et d’un Raphaël : ce sont des humanistes, et l’art profite de ce qu’ils ôtent à la religion. Le Moyen Âge, implacable à l’hérétique et au sorcier, ne fut pas bassement tracassier. Son indulgence même nous est témoignée par les documents les plus authentiques. Quel chapitre contemporain laisserait un sculpteur le portraiturer dans les attitudes des vices, au portail de la basilique ?

Giotto, qui a glorifié saint François aux voûtes d’Assise, a écrit un poème contre la pauvreté volontaire qui était le dogme fondamental du petit Frère.

Une des nouvelles de Sachetti nous montre le grand fresquite comme un homme jovial, à la réplique très vive, à l’esprit critique, à l’humeur joyeuse.

Alexandre VI reconnaissait l’éclatante vérité des discours de Savonarole : il le fit brûler pour un motif politique. Le Dominicain avait écrit au roi de France pour l’engager à chasser les Borgia de Rome et de l’Italie même.

À mesure que la religion perd son influence, ses tenants augmentent d’impériosité et gênent ainsi par leurs proférations polémiques, l’étude des périodes antérieures.

L’artiste primitif croyait d’une manière sentimentale. Sa psychologie se compose de trois termes ; le péché originel, legs détestable, mais source d’excuses illimitée ; l’ange gardien qui veillait sur lui et devait finalement le sauver ; et le Malin, l’éternel adversaire, le tentateur, véritable auteur de tout le mal. Ces trois notions aboutissaient à une confiance sans borne dans la miséricorde divine. Le médiéviste a bonne opinion de son espèce ; une faute ancestrale le relève d’une part de responsabilité et le diable si puissant, si méchant, porte le reste des coulpes. À ces notions rassurantes, une autre et qui suffirait à rendre l’espérance au plus grand scélérat, vient ajouter encore son rafraîchissement incomparable. Le Verbe s’est fait chair, Dieu eut une mère humaine, les hommes donc ont une mère au ciel.

Certainement le Moyen Âge ne distingue pas entre Marie et Jésus ; dans son cœur, la Trinité se compose de quatre personnes. Nul ne le dit et chacun le croit. L’idée de maternité et l’idée de divinité se mêlent si bien dans cette adoration que la Vierge est déesse autant que la déesse est maternelle. La théologie actuelle s’insurgerait. Mais qu’importe la théologie à la foi et l’esthétique à la volonté de créer ? Quelles pauvretés que les formules en face des mouvements de l’âme ! le médiéviste avait donc une mère dans les cieux, une mère d’éternité ; et pour elle il a travaillé anonymement à ces sculptures que nul ne devait voir, à ces vitraux que nous pouvons à peine deviner au moyen des meilleures jumelles.

Cette application avait deux caractères ; celui d’œuvre pie et satisfactoire et un autre de sens ouvrier. Enlumineurs et tailleurs d’images ne distinguaient pas en eux l’artiste de l’artisan, puisque en ce beau temps, l’artisan était presque toujours artiste. Ils mettaient donc leur amour-propre dans la perfection du procédé. Ils étaient, avant tout, des ouvriers ; ils faisaient très bien tout ce qu’ils faisaient, sans dédain aux lenteurs et aux difficultés du travail manuel. Le sculpteur de 1300 n’est pas ce manieur de terre mouillée que nous connaissons : il s’affrontait, marteau et ciseau en main, avec le bloc de pierre. Le peintre broyait ses couleurs et le statuaire polissait sa statue. Les gens de métier formaient une caste et chaque métier une maçonnerie, ayant ses secrets, ses modes d’affiliation. Nul ne pouvait exercer un état sans l’agrément des maîtres et le gâte-métier n’existait pas. Au commencement du XIXe siècle, le compagnonnage conservait beaucoup de traditions médiévales qui avaient surnagé sur le chaos révolutionnaire.

Au XIIIe siècle, la pratique d’un art même inférieur exigeait un long apprentissage : on n’exerçait pas plus la sculpture sans licence des maîtres tailleurs de pierres qu’on n’exerce aujourd’hui la médecine sans la permission, sous forme d’examen et de concours et de diplômes obtenus devant la corporation médicale.

Ces garanties profitaient singulièrement au grand art. La situation des élèves chez les peintres italiens diffère étrangement des actuels cours de beaux-arts ; c’étaient des apprentis traités familièrement, mais vivant de la vie intime du maître et moralement adoptés.

Le livre de Cennino Cennini donne une juste idée de l’apprentissage.

Wagner a exprimé dans la physionomie à demi comique de David, l’élève de Sachs, cette condition si éloignée de nos mœurs.

Si socialement l’artiste était classé parmi les ouvriers, il ne s’ensuit pas qu’il fût condamné à une culture exclusivement technique. La pensée d’alors fut très active, aussi audacieuse qu’en aucun temps et nullement encapuchonnée de cléricalisme.

Le XIIIe siècle nous a légué son Encyclopédie, comme le XVIIIe. Au point de vue des idées générales, l’œuvre de Diderot reste inférieure à celle de Vincent de Beauvais, esprit synthétique d’une rare lucidité.

Le Miroir du monde fournit une image très complète de la haute culture à l’époque des grandes cathédrales. Dieu et son œuvre, la création ; l’homme et son œuvre, l’évolution dans le sens de salut et d’éternité : voilà le schéma de l’ouvrage. Après la théodicée vient la cosmologie, et suivant l’ordre de la Genèse les sciences physiques et naturelles. Ensuite l’homme paraît. Les diverses branches du savoir sont autant de branches de salut. La morale nous apprend à nous gouverner individuellement et selon notre état et condition ; l’économique nous enseigne les devoirs familiaux ; la politique les obligations civiques. Il y a au moins 10,000 chapitres dans cette somme des connaissances humaines. Une seule phrase, à peine choisie, suffira à montrer quel haut esprit était le lecteur de saint Louis.

« Les premiers rangs, dans l’empire des lettres, appartiennent sans contredit aux écrivains originaux qui étendent les connaissances humaines, qui agrandissent une science, qui enrichissent un art, qui conçoivent ou expriment des idées nouvelles. » Si on se souvient de la date de 1250, on s’apercevra une fois de plus que la nuit du Moyen Âge n’était ni si noire, ni si épaisse qu’on le prétend.

Les dix in-folio du lecteur de Louis IX, formidable compilation, nous livrent les opinions du temps, les superstitions mêmes. On y trouve la direction des études, les auteurs connus, ceux préférés et ceux dédaignés, et les divers systèmes en cours dans les écoles et les monastères.

La liste des auteurs cités dépasse 400. Il ressort, je n’ose dire de cette lecture, mais du feuilletement, que l’avidité du savoir était aussi ardente au Moyen Âge, qu’à la Renaissance, qui passa de l’invocation d’Aristote à celle de Platon, puis de Plotin.

Le dogme n’immobilisait pas l’investigation comme on l’a cru, pas plus que le sacristain n’est empêché dans ses va-et-vient par la génuflexion qu’il donne à l’autel, en passant. Jamais un libre penseur n’arrivera à l’inconsciente familiarité du monsignore dans les basiliques romaines. L’homme violet, étant chez Dieu, est chez lui ; il en use avec des simagrées, mais il en use étrangement. Le médiéviste ne conclut jamais contre la foi, mais il l’accommode à son gré et lui impose le pli de sa prédilection, sous la bénédiction d’un clergé certain de son empire et dès lors fort accommodant à l’invidualisme[sic] silencieux.

Si on voulait aller plus avant et plus haut, on rencontrerait Albert le Grand et Roger Bacon. Qui croirait que les phrases suivantes sont du moine d’Oxford, mort en 1294 :

« On peut faire jaillir du bronze des foudres plus redoutables que celles de la nature ; une faible quantité de matière congrument préparée produit une horrible explosion accompagnée d’une vive lumière. On peut multiplier ce phénomène jusqu’à détruire une ville et une armée. L’art peut construire des instruments de navigation tels que les plus grands vaisseaux, gouvernés par un seul homme, parcourront les fleuves et les mers avec plus de rapidité que s’ils étaient remplis de rameurs. On peut aussi faire des chars, qui sans le secours d’aucun animal, courront avec une incommensurable vitesse !… » Visionnaire ? Non, voyant !

Interrogeons maintenant saint Bonaventure, qui mourut en 1274. Que dira-t-il : « La lumière extérieure ou la tradition éclaire les arts mécaniques : la lumière des sens nous procure les notions expérimentales ; la lumière intérieure ou raison nous révèle les vérités intelligibles. » Quelle gêne ces formules-là imposent-elles à l’activité cérébrale ?

Dans l’ordre des faits, quelle audace est comparable à celle d’un Godefroy de Bouillon, qui rêve d’établir en Palestine ce même christianisme des parfaits que Blanche de Castille exterminera en Occitanie. Rien n’atteste mieux l’intensité de la vie philosophique que l’Inquisition. La bulle datée de Brescia (1251) indique que le clergé se trouvait déjà débordé par l’hérésie, c’est-à-dire par les progrès de l’indépendance intellectuelle.

Au mouvement mystique d’un Joachim de Flore, d’un Jean d’Oliva, aux fratricelles, aux bégards, il faut ajouter le pullulement des sociétés secrètes. Rutebeuf, le roman de la Rose et celui du Renart lus entre les lignes, offrent de véritables cours d’hérésie. La chaîne gnostique qui a son premier anneau parmi les néo-platoniciens se continue sans interruption jusqu’aux Gibelins. Cecco d’Ascoli, ami du Dante condamné d’abord à se défaire de ses livres et à assister tous les dimanches au sermon des dominicains, fut brûlé pour son poème Acerba et cependant il n’était coupable que d’allusions critiques, tandis que la Divine Comédie est une divine diatribe.

Les troubadours n’étaient pas les poètes anodins qu’on suppose ; leurs Sirventes cachent plus d’un secret. Fauriel a remarqué qu’un seul, un unique troubadour avait été favorable aux croisés de l’orthodoxie. La gaie science dépassait de beaucoup de coudées la rimaillerie. Lorsque Ulderic Utter disait : In Italia quærite Turcas, il dénonçait des doctrines de source orientale. L’ordre du Temple eut le plus extraordinaire des avocats, le poète de la Vie nouvelle. Le lyrisme enveloppa si bien l’hétérodoxie que les papes acceptèrent comme poème religieux le plus épouvantable pamphlet qui ait jamais été écrit contre aucun clergé, si on en excepte le Christ de Michel-Ange à la Sixtine, identique d’inspiration gibeline.

Le primitif n’est pas ce faucon encapuchonné qu’un évêque porte à son poing ganté. Croyant, il prie et espère en poète, et plie le dogme aux besoins de sa sensibilité ; dissident, il ose les plus extrêmes audaces et rêve de communisme et de panthéisme. Il semble que l’honneur de l’historien soit de présenter à tout prix une unité illusoire pour chaque époque : la vie morale ondoie davantage et n’affecte jamais cet alignement des consciences qui serait une espèce d’ataxie intérieure. L’hérésie est un abcès de la foi. Actuellement personne ne se passionnerait pour une matière doctrinale ; les meilleurs érudits refusent créance à un ésotérisme provençal et enseignent que les cours d’amour étaient simplement les salons bleus d’Arthénice du XIIe siècle.

On a vu la plus ancienne carte du Tendre dans les quatre degrés de l’initiation albigeoise : hésitant, priant, écouté et ami ; on a vu que la dame impose au chevalier des exigences de coquette avant d’octroyer l’amoureuse merci. Fauriel avec ingénuité donne comme usage du XIIIe siècle, le fait de se consacrer au culte d’une dame par un vœu analogue aux vœux de religion. Cent chevaliers se sont fait raser la tête pour la comtesse de Rodez ; il faut lire : Tonsurés pour le service du diocèse de Rodez. Le même auteur remarque encore ceci : « Rien de plus fréquent que de voir des clercs, des hommes déjà engagés dans les ordres, y renoncer pour se faire troubadours. »

Ces quelques traits cursifs indiquent que le Moyen Âge, même au riant soleil du Midi, vivait d’une vie sentimentale intense et échappait à la domination romaine sous le masque de la galanterie. La version adoptée plaira encore longtemps aux imaginations éprises d’absurde et de contes fabuleux, mais la vérité apparaîtra prochainement sous une signature de l’Institut qui la rendra recevable.

On contemple le Moyen Âge comme le voyageur, une cathédrale : la masse étonne, l’ascendance des lignes enthousiasme : on vénère la piété qui a dressé le monument ; mais on ne déchiffre pas les sculptures du portail et du chapiteau et surtout on ne se rend pas compte du caractère prime-sautier, intime, individualiste, que les vieilles pierres manifesteraient à un minutieux et méditatif examen.

Si une opération humaine mérite l’épithète de divine, c’est assurément celle de créer : ceux qui conçurent le chœur de Beauvais, le clocher de Chartres, la nef d’Amiens, le portail de Reims, pouvaient être et devaient être des hommes convaincus de la divinité du Christ ; mais qui s’estimaient fort au-dessus de leurs curés, et avec justice, car ils faisaient des miracles d’art beaucoup plus étonnants que les thaumaturgies attribuées aux plus grands saints. Celui qui produit un chef-d’œuvre s’élève si haut qu’il ne se trompe plus sur la véritable hiérarchie et, spirituellement, il n’obéit qu’à son génie ou à son démon.

En ce temps, toute supériorité se manifeste par la sédition ; il n’y a pas d’originalité sans bizarrerie ou du moins elle ne se produit pas autrement. Le primitif conseillé par son intérêt, contenu par la pression du corps social pensait librement ; mais ne s’exprimait pas. On a pris cette prudence pour de la passivité cérébrale ; c’était seulement l’effet combiné du besoin de sécurité et de l’esprit d’ordre. Connaît-on deux madones semblables, identiques de sentiment, du Xe au XVe siècle ? Quelle autre marque cherchera-t-on du profond individualisme de cette période ? Chacun donnait à la Vierge mère les traits les plus chers à son cœur et je ne trouve aucune erreur à employer même la beauté de sa maîtresse aux représentations sacrées. L’amour nous rachète de l’instinct, c’est un principe rédempteur et le charme indéfinissable de l’œuvre médiéviste provient de sa douce chaleur. L’artiste aimait son métier, son art, son sujet et ses outils : et cette sensibilité profonde a triomphé de l’imperfection technique.

Lorsque, Pausanias à la main, je me suis acheminé vers le radieux Parthénon, mon esprit a reçu l’éblouissement de la chose parfaite qui réunit les rapports possibles en d’infaillibles proportions. J’ai admiré, de tout mon cerveau, avec une espèce de fierté d’espèce et un soudain orgueil d’être homme. La cathédrale produit une impression moins définissable. Elle manifeste que l’homme n’est point le but de l’homme. Le véritable idéal commence là même où la personnalité s’oublie. C’est ce mont Nebo d’où Moïse aperçut la Terre Promise. La moindre figure médiévale produit à divers degrés cet effet d’au delà et d’horizon infini.

Hérétique ou marguillier, albigeois ou courbé sous le joug dominicain, le Primitif eut dans l’âme cette pénombre mystérieuse et il la traduisit dans ses moindres travaux, comme on peut traduire une pénombre par des nuances de sensibilité.

L’Antiquité et la Renaissance justifieraient le moindre détail de leurs œuvres ; elles concevaient, selon des méthodes et n’exprimaient que de la pensée logique, lucide, essentiellement typique.

Le Moyen Âge fut un cœur humain très vif. Son accent, irrésistiblement, séduit, comme dans la réalité une vraie larme et un vivant sourire. Pour avoir tout fait avec amour, même la ferrure, même la sculpture invisible, cette époque si concentrée garde un prestige étrange.

À côté du hiératisme oriental, à côté de la beauté hellénique, la grâce médiévale, comme une dixième muse, représente l’ingénuité, c’est-à-dire, une personnalité si sincère qu’elle s’oublie. Elle ne signe pas son œuvre, tellement sa joie d’œuvrer est profonde tellement le suffrage souhaité diffère de celui que nous cherchons aujourd’hui.