Agence Gutenberg (p. 144-152).


XVIII


Quelques heures plus tard, à la nuit tombante, Christine et ses deux valets mettaient pied à terre devant une hôtellerie que recommandait une enseigne de cuivre : Saint Martin offrant à un pauvre la moitié de son manteau.

Ils entrèrent dans la salle commune d’où sortaient un brouhaha de conversations et de rires et une chaude odeur de nourritures. Toutes les tables semblaient occupées. Au fond, devant une vaste cheminée aux flammes vives, tournait à une solennelle cadence une broche à laquelle étaient enfilés deux oies et une dizaine de poulets gras.

Des jambons, des écheveaux de saucisses, des quartiers de lard étaient suspendus aux poutres du plafond de chêne, alternant avec de gros boulets jaunes et rouges : des fromages de Hollande.

Des garçons couraient, portant des plats, et l’aubergiste, un Allemand, vêtu d’un petit manteau à collet crénelé et à capuchon fauve, promenait son gros ventre et sa face hilare autour des tables, remplissant les gobelets d’étain de la bière brune du pays.

Il s’avança vers Christine.

— Je veux deux chambres, dit-elle, de son ton le plus impérieux, une pour moi, une pour mes valets. Et je désire souper tout de suite car j’ai grand faim.

L’hôte eut un petit sourire narquois : — Je regrette, mon jeune seigneur, mais je viens justement de donner mes deux dernières chambres ; le roi lui-même surviendrait que je ne pourrais pas le coucher ; quant à ce qui est de souper, ce n’est pas la nourriture qui manque, pardieu ! C’est la place ; mais si vous trouvez à vous accommoder autour d’une de ces tables…

Et sans daigner remarquer les sourcils froncés de Christine et son piétinement d’impatience, qui ne convenaient ni à sa jeunesse ni à son médiocre équipage, l’hôte reprit son broc et se remit à servir les clients.

La jeune fille, habituée à d’autres égards, allait éclater quand Clairet la prévint, en la tirant par la manche, qu’un esclandre n’était pas opportun. En même temps, au fond de la pièce, quelqu’un se levait et lui faisait de grands signes d’appel et d’amitié. Toute sa mauvaise humeur s’évanouit alors car elle avait reconnu le bel Italien de la forêt.

— Comment, vous, Chevalier ? s’écriait celui-ci en accourant. Quelle heureuse surprise ! Êtes-vous tout à fait remis de votre petit accident ? Et voulez-vous nous faire le plaisir de soüper avec nous ?

— De grand cœur ! répondit-elle, les yeux rayonnants. Décidément l’aventure continuait !

Quelques minutes plus tard, servis par Jean et par Clairet, nos trois jeunes gens étaient attablés et dévoraient avec leur solide appétit tout neuf, en devisant gaîment.

— Figurez-vous, dit Monaldeschi, que nous espérions être reçus au château de Dronningen, à quelques kilomètres d’ici, mais le châtelain, pour lequel nous avions une lettre, est absent. Nous avons donc dû nous rabattre sur cette hôtellerie. D’où l’heureux hasard oui, pour la seconde fois, nous met en présence.

On parla d’abord du Danemark où les deux Italiens venaient de séjourner ; ils se lamentèrent sur la rudesse des habitants, leur défaut de politesse et de culture.

— De vrais barbares ! s’écria Sentinelli.

— J’aurais mauvaise grâce à vous contredire, fit Christine. C’est la première fois que je mets le pied dans ce pays, pourtant si proche du mien ; mais les Danois sont les perpétuels adversaires et rivaux des Suédois et nous ne les aimons guère.

— La Suède ? dit Monaldeschi. Nous n’aurons, je le crains, pas le temps de la visiter car une lettre nous rappelle à Rome. Mais nous savons quelle civilisation raffinée y règne ; surtout depuis l’avènement de votre grande reine. Stockholm est devenue avec Paris et Rome une capitale des lettres et des arts.

Christine conduisit alors la conversation sur Rome, ses monuments, ses richesses artistiques : tableaux, sculptures, objets d’art.

— Mais vous les connaissez aussi bien et même mieux que nous ! observa un des deux jeunes gens.

— C’est que mon père possède quelques échantillons de votre art et aussi des livres avec des gravures que j’ai passionnément étudiées : il y a là des œuvres de Giotto, du céleste Angélico, de mystérieuses figures de Vinci, des groupes sculptés de ce géant Michel-Ange…

— Peste, Chevalier ! Quel connaisseur vous faites en dépit de vos vingt ans !

— Vous devinez donc ma hâte d’aller admirer ces chefs-d’œuvre, ceux de la Rome antique comme ceux de la Rome chrétienne. J’espère également être présenté à votre pape.

— Alexandre VII ? C’est le plus savant des théologiens, le plus aimable des hommes, le plus fastueux des grands seigneurs ! s’écria Monaldeschi avec enthousiasme.

— Quel dommage, ajouta Sentinelli, que nous ne puissions boire à sa santé et à votre prochain séjour à Rome autrement qu’avec cette triste et lourde boisson !

Christine se retourna vivement :

— Dis-moi, Clairet, n’as-tu pas encore quelques bouteilles de ce vin que tu me fis goûter ce matin ? Un vin qui est presque votre compatriote, Messieurs, et, en outre, un vin du pape !

— S’il ressemble à celui des Châteaux du Saint Père près de Rome !

— Vous allez voir.

Les trois jeunes gens trinquaient bientôt gaîment ; en admirant la couleur de rubis, l’odeur de violette, la saveur incomparable de ce maître vin.

— Il me semble que notre petite Majesté y prend diablement goût ! Elle qui ne souffrait que l’eau ! confia Clairet à l’oreille de Jean Holm dont le long visage jauni se renfrognait :

— Qu’elle se méfie. Il est traître, le bougre !

Soudain, Christine tourna la tête. Elle venait d’entendre prononcer son nom.

Il avait été lancé à une table voisine où étaient groupés quelques marchands allemands dont l’opulence se décelait à la sobre richesse de leurs vêtements et aux colliers d’or massif qu’ils portaient autour du cou.

— C’est bien vrai : elle a abdiqué il y a quelques jours. Il n’était pas question d’autre chose à Stockholm dont j’arrive. Maintenant, elle cingle vers la Prusse ou la Belgique suivie de quinze navires de guerre… Mon compère Maître Goefle, orfèvre de la Cour de Suède, m’a conté la cérémonie de l’abdication. Elle a été magnifique, mais quelle tristesse pour tous ! Il en pleurait encore en me la narrant.

— Bien de la bonté ! s’écria un autre. Une folle qui abandonne sans raison son trône et ses sujets !

— Une dévergondée !

— Et puis laide avec ça ! Une vraie moricaude !

— Avec une épaule plus haute que l’autre. Presque bossue ! Monaldeschi se dressa, les yeux étincelants, une main sur la garde de son épée, l’autre sur la hanche, et s’avançant vers les marchands :

— Messieurs, prononça-t-il d’une voix claironnante, si vous étiez gentilshommes, je vous prierais de régler sur-le-champ l’affaire là, devant la porte, et à l’épée. Puisque tel n’est pas le cas, laissez-moi vous dire que je n’admets pas que l’on parle sur ce ton d’une reine célèbre dans le monde entier par sa grâce et sa science. Elle est bonne, elle est belle, elle est savante. Si elle abdique, c’est qu’elle a ses raisons et nul n’a le droit d’y redire. Que l’un de vous se permette un commentaire et je lui coupe les deux oreilles, foi de gentilhomme romain.

Dans la salle, tous les dîneurs s’étaient levés et écoutaient en silence. Les marchands se turent en grommelant et le marquis, qui les défiait du regard, se rassit, encore frémissant.

« Qu’il est beau ! pensait Christine, quelle flamme, quelle ardeur chevaleresque ! Oui, il a les yeux plus verts que Magnus. Et comme cette peau d’or sombre en souligne l’éclat ! »

— Maintenant, buvons à la santé de la reine Christine ! dit Sentinelli.

— Et à son bonheur ! ajouta Monaldeschi.

— Oui, à son bonheur ! s’écria le chevalier de Donha. Elle a bien mérité d’être heureuse !

Clairet riait franchement et Jean Holm lui-même, la lèvre retroussée sur son unique dent noire, grimaçait une sorte de sourire.

Puis Christine, pensive, accoudée à la table, son menton reposant dans ses deux mains, écouta le marquis qui contait de spirituelles anecdotes sur la Cour pontificale. Elle le regardait de tous ses grands yeux qui, peu à peu, s’illuminaient de tendresse. Sa jeunesse, si longtemps comprimée, autant par son éducation que par sa propre volonté, battait des ailes. Un prodigieux espoir gonflait son cœur oppressé.

Comme s’il venait seulement de remarquer son silence, Monaldeschi s’arrêta soudain :

— Excusez-moi, Chevalier, mais je vous fatigue. Après une journée longue et fertile en incidents, vous devez avoir besoin de repos. La salle assombrie s’était peu à peu vidée.

— Clairet ! appela Christine. Prépare-nous des lits en rapprochant ces bancs. Étends mon manteau sur le tien.

— Comment ! s’écria le marquis d’un air innocent, vous n’avez pas de chambre ? *

— Mais non. L’hôtellerie est pleine. Cela n’a aucune importance. Nous passerons la nuit dans la salle commune.

— Voilà ce que je ne souffrirai point, Chevalier ! Nous avons une chambre à deux lits et c’est avec plaisir que nous vous en céderons un.

— D’ailleurs, intervint Sentinelli, je vous avais déjà prévenu, cher ami, que je préférais demeurer sur le lit de camp du cabinet où l’on a déposé nos bagages… En cette époque de larrons éhontés, on ne saurait être trop prudent.

— Nous verrons, nous verrons, Comte. En tout cas, nous vous gardons dans notre chambre, Monsieur. Il n’est pas question que vous restiez ici !

— Mais c’est… impossible ! balbutia Christine en jetant un regard éperdu vers Clairet qui s’était retourné, en riant sous cape.

— Impossible ? Per Bacco ! Je voudrais bien savoir pourquoi ! Et saisissant la jeune fille sous le bras : — De gré ou de force, je vous enlève !

Dans la chambre où Clairet venait d’apporter à Christine son sac de selle, celle-ci demeurait incertaine, ne sachant que faire ni que dire. Le valet qui l’épiait du coin de l’œil, sourit et disparut. Elle regardait tantôt, côte à côte, les deux lits à courtines de serge verte, tantôt la cruche d’eau et le cuveau à toilette placés dans un angle, tantôt encore la fenêtre faiblement éclairée par la lune devant laquelle se balançait et brillait l’enseigne de cuivre.

— Mais… où est donc le Comte ? demanda-t-elle.

— Sentinelli ? Sans doute ne le reverrons-nous pas avant demain. Je l’ai vu avant le dîner, serrant de près une des servantes. Telle est la raison blonde et bien en chair de sa sollicitude pour nos bagages ! Mais pourquoi ne vous dévêtez-vous pas, Chevalier ? Monaldeschi qui avait déjà enlevé son justaucorps et ses bottes s’était rapproché de Christine.

— Je devine, fit-il. Vos bras ont sans doute été froissés par votre chute. Vous souffrez et ne pouvez les soulever. Laissez-moi vous aider…

Et d’un geste vif, il déboutonna le pourpoint de la jeune fille et l’ouvrit d’un coup jusqu’à la ceinture.

Celle-ci poussa un faible cri, en croisant ses deux mains sur sa poitrine, puis : »

— Que faites-vous, Monsieur ? Partez ! Je vous l’ordonne ! fit-elle d’une voix irritée.

En même temps une rougeur de braise envahissait son visage de la base du cou jusqu’au front.

Monaldeschi recula de quelques pas puis demeura immobile. Les expressions les plus diverses se succédaient sur ses traits mobiles, dans ses regards, depuis la stupéfaction incrédule jusqu’à la joie émerveillée. Puis, recouvrant le sentiment, il se jeta aux pieds de Christine.

— Ah ! Madame, Madame ! Excusez-moi de ne pas avoir deviné plus tôt… Votre beauté, votre charme, la douceur de vos grands yeux et de votre voix auraient pourtant dû vous trahir et me prévenir !… Mais pourquoi ce déguisement ? Qui vous y a contrainte r Seriez-vous en quelque souci ? Vous persécuterait-on ?

— Vous l’avez dit, Monsieur : un tuteur indigne m’a dépouillé de tous mes biens. Il voulait par surcroît abuser de l’orpheline qu’on lui avait confiée. J’ai dû fuir en prenant le nom d’un de mes cousins. Je dois retrouver des parents à Hambourg. Mais jusque-là je ne suis qu’une pauvre fugitive, poursuivie et traquée, avec la seule protection de deux valets dévoués. *

Christine qui venait sur-le-champ d’inventer cette fable, se laissa tomber, accablée, dans un fauteuil.

À genoux, Monaldeschi se rapprocha d’elle. Il lui prit les deux mains et la tenant sous l’emprise magnétique de ses yeux si étrangement clairs dans sa peau bronzée, ses yeux débordants d’amour et de pitié, il lui dit d’une voix émouvante, plus chaude qu’une caresse :

— Non, vous n’êtes plus seule, Mademoiselle ! Vous avez désormais un chevalier qui vous consacre sa vie et vous suivra jusqu’à l’heure où vous retrouverez votre famille ; un ami qui veillera sur vous, vous protégera, vous défendra non seulement avec un dévouement absolu, mais avec la plus ineffable des joies… Comment vous appelez-vous, pour que je puisse vous invoquer dans mes rêves ?

— Éléonore, murmura Christine, pensant à sa mère.

— Éléonore, ma bien-aimée, soupira-t-il tout bas d’une voix enivrée.

Glissant doucement sa main par l’ouverture du pourpoint, il couvrit de baisers brûlants les mains, les bras, les tendres seins palpitants, puis remontant insensiblement jusqu’à la bouche, il la tint enfin, tremblante et consentante, sous ses lèvres impérieuses. Quand Monaldeschi souleva Christine, défaillante sous ses mains expertes, et la porta jusqu’au lit : « Dieu merci, je ne suis plus reine ! » soupira celle-ci en roucoulant comme une tourterelle. Et elle ferma bienheureusement les yeux.

C’est ainsi que la dernière et orgueilleuse descendante des Vasa, la fille du grand Gustave-Adolphe, celle qui avait refusé comme époux princes régnants, rois et empereurs, celle qui avait su lutter héroïquement contre un premier amour qui la consumait, s’abandonna sur un lit d’auberge entre les bras d’un inconnu, d’un aventurier.


— Eh bien ? Ai-je été discret ? demanda Sentinelli, le lendemain matin, à son ami triomphant.

— Eh bien, Comte, que t’avais-je dit le jour de l’abdication ? répondit le marquis, en frisant sa fine moustache de jais. Crois-moi si tu veux : elle m’avait attendu ! La fière Christine de Suède m’a choisi comme premier amant ! Et elle m’adore… Notre but est donc atteint. Voici maintenant le mot d’ordre : nous escortons jusqu’à Hambourg une demoiselle errante, une orpheline fugitive qui n’a que nous comme protecteurs. Telle est la fable que la donzelle a imaginée. Si je continue à plaire — et je m’y efforcerai — sans doute, arrivée là-bas, se dévoilerait-elle. Alors, à nous la vie des Cours ! Avoue-le : n’est-ce pas bien joué ?

— Tu es un maître, Marquis, et je m’incline très bas devant ton génie… ou ta canaillerie !

— Génie ou canaillerie, notre fortune est faite. Et tu me la dois !

Au même moment, sur une table massive de la salle commune, Christine écrivait à sa chère Ebba :

« Que mon bonheur serait sans second, s’il m’était permis de le partager avec vous et si vous étiez témoin de ma félicité ! J’ai trouvé l’amour qui jusqu’à présent m’avait fuie. L’amour pur, désintéressé que j’avais toujours rêvé : un homme beau, brave, fin comme une lame, lettré jusqu’aux ongles et qui m’aime avec transport, me croyant une pauvre fille sans feu ni lieu ! Tout ce que je puis vous en dire, c’est qu’il est gentilhomme, Italien, qu’il a vingt-cinq ans et s’appelle Rinaldo.

« Je vous jure que je serais digne de l’envie des dieux, si je pouvais jouir en outre du bien de vous voir et de vous narrer ma joie, alors que trop souvent vous avez été témoin de mes peines. Mais ce sont là des choses qui ne se peuvent écrire.

« Par contre, je veux vous conter une historiette qui vient de se dérouler en cette hôtellerie où j’ai passé les plus belles de mes heures. Ce matin, pendant que je déjeunais d’un fort bel appétit, je vis dans un coin, appuyée au mur, une servante d’agréable aspect, dont les traits ne m’étaient point inconnus, et qui me dévorait des yeux. Je l’appelai pour la questionner. Là-dessus, elle poussa un cri, laissa tomber un plat qu’elle tenait devant elle, et saisissant ses cotillons à deux mains, s’ensauva, comme si elle avait le diable aux trousses.

« Mon Clairet fit donc un tour aux cuisines pour savoir de quoi il retournait. Et qu’apprit-il ? Cette servante, Ebba, était la reine de Danemark qui, prévenue de mon passage et de mon déguisement, et se trouvant en séjour dans le voisinage, avait voulu me voir sans être connue de moi. Shakespeare n’a-t-il point traité quelque sujet de ce genre ? Pour moi, je vais incontinent quitter ces lieux.

« Conservez-moi votre souvenir et ne troublez pas la douceur de la félicité dont je jouis par un injuste oubli de la personne du monde qui vous honore le plus.

« Adieu, Belle, souvenez-vous de votre

« CHRISTINE ».


Au moment où elle apposait sa signature, elle vit surgir Jean Holm auquel elle avait donné, en même temps qu’à Clairet, ses instructions pour la poursuite du voyage. Elle avait dû leur expliquer que les deux gentilshommes italiens seraient désormais attachés à sa personne et comment elle les avait trompés par une fable ingénieuse.

Jean Holm avait le visage plus long, plus jaune que jamais. Regardant tout autour de lui pour s’assurer que personne ne l’écoutait :

— Madame, fit-il avec une profonde révérence, je viens demander à Votre Majesté la permission de retourner à Stockholm.

— Comment, Jean, tu veux me quitter ? Toi qui m’as vue naître, toi ?

Deux larmes coulèrent le long des rides de la triste figure. Puis, se prenant la tête à deux mains :

— Ah ! Madame ! gémit le pauvre homme. Un étranger ! Un papiste ! Vous ! Est-ce possible ?

Christine était si joyeuse qu’elle éclata de rire :

— Rentre à Stockholm si tu y tiens, mon vieux Jean. Mais, ne me fais pas cette tête-là ! Ne vois-tu donc point, mille diables, que je suis la plus heureuse des femmes ?