Le Roman anglais en 1907
Revue des Deux Mondes5e période, tome 42 (p. 897-920).
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LE ROMAN ANGLAIS
EN 1907

II[1]
LES NOUVEAUX VENUS


I

Le règne des « convenances, » dans le roman anglais, est décidément bien fini. Il y a plus de douze ans déjà que j’ai eu l’occasion, ici même, d’annoncer sa fin, en signalant la substitution au type traditionnel de l’honnête « roman anglais, » tel que le connaissaient et l’appréciaient toutes les mères de famille, d’un type nouveau, le roman sexualiste, — qui d’ailleurs n’avait de proprement nouveau que ce nom, et n’était, en somme, qu’une suite directe de notre roman « naturaliste » français. Je citais, à ce propos, quelques lignes significatives d’un article, alors récent, de la Nineteenth Century : « Qu’un écrivain anglais, — y lisait-on, — produise aujourd’hui un roman ou une pièce traitant d’autre chose que des phénomènes divers qui caractérisent et distinguent les deux sexes ; et, si exquis que soit son style, si profonde et subtile son émotion, si délicate sa fantaisie, le public, d’un commun accord, rejettera son œuvre. » Le fait est qu’une véritable frénésie de sensualité s’était emparée, tout à coup, des auteurs anglais et de leurs lecteurs : ce n’étaient, de toutes parts, qu’histoires d’adultères, aventures de jeunes femmes émancipées affirmant leur droit à jouir de la vie, confessions de « filles » plus ou moins repenties, tableaux minutieux et hardis de la dépravation des mœurs dans les « rues basses » des faubourgs de Londres.

Aujourd’hui, fort heureusement, cette fièvre « naturaliste » paraît avoir beaucoup perdu de son intensité : le public anglais, — ainsi que suffirait à nous le prouver l’extraordinaire renouveau de popularité des romans de Dickens, — s’est remis à pouvoir goûter des œuvres « traitant d’autre chose que des phénomènes divers qui caractérisent les deux sexes ; » et peut-être n’est-ce point simplement par une rencontre fortuite que la résurrection de la gloire du grand romancier a coïncidé avec le retour des compatriotes de Dickens au goût des peintures décentes, aussi bien dans la comédie et le drame que dans le roman. Mais l’ancienne domination absolue des « convenances, » après avoir duré exactement un siècle, n’en reste pas moins désormais abolie ; et si bon nombre des romanciers d’à présent réussissent à plaire sans avoir besoin de toucher à l’élément sensuel de l’amour, l’étude détaillée de cet élément continue cependant à être permise et encouragée, de l’autre côté de la Manche, autant, sinon plus, qu’elle l’est chez nous. Entre les cent cinquante romans que je viens de lire, j’en ai trouvé une vingtaine qui, par la liberté de leurs sujets ou de leurs descriptions, dépassent les « tranches de vie » les plus audacieuses que nous ait jadis offertes l’école de Médan. Et les auteurs de ces romans ne cherchent même plus, comme les romanciers « sexualistes » dont je parlais il y a douze ans, à couvrir leur franchise ou leur grivoiserie du prétexte d’une « thèse : » les aventures scandaleuses qu’ils nous racontent ne prétendent à nous intéresser que par ce qu’elles ont de « choquant, » soit que l’on nous montre une femme partageant son cœur entre son mari et ses deux amans, ou qu’on nous promène à travers les bals publics, les cafés-concerts, et les restaurans de nuit d’un Paris fantaisiste et tout à fait incroyable, — d’un Paris qu’un groupe nombreux de romanciers anglais semblent avoir inventé, en commun, afin de pouvoir y transporter toutes les images de luxure et de vice que leurs sens échauffés leur feront concevoir. Hier encore, un rédacteur du Bookman protestait violemment contre « la dégradation du roman moderne » par ce qu’il appelait « l’école charnelle » (fleshly school of fiction). A l’en croire, l’unique moyen de faire fortune, pour un homme de lettres anglais, serait maintenant d’écrire « des histoires ignobles, joignant le cynisme à la cruauté. »

Mais le plus curieux est que ce genre du roman « charnel, » ou « sexualiste, » est pratiqué surtout par des demoiselles. De tous les romans que j’ai lus, aucun ne m’a plus effaré, par l’audace imperturbable de son naturalisme, qu’un gros livre où la femme d’un pasteur de village ne s’arrête point de passer d’un amant à l’autre, avec une inconscience et une effronterie singulières, tandis qu’autour d’elle, les servantes, les voisines, le village entier étale à nos yeux les aspects les plus variés de l’animalité. Le roman était signé d’un nom de famille que précédait seulement l’initiale M, sans doute un prénom ; et je me représentais l’auteur comme un clubman d’âge et d’expérience, se divertissant à vexer la pudibonderie de ses concitoyens. Je me trompais. En feuilletant, l’autre jour, une revue illustrée, j’ai découvert le portrait de l’intrépide « sexualiste : » c’est une aimable jeune fille aux cheveux bouclés, souriante et un peu rêveuse, avec une petite croix d’or suspendue à son cou ; et l’initiale qui précède son nom est pour signifier Marguerite !


Ainsi les « convenances » ont dorénavant cessé d’exercer aucune contrainte sur le roman anglais, et il n’y a plus un seul domaine de la réalité ou du rêve qui ne soit largement ouvert au jeune romancier. Mais tout porte à espérer que les heureux effets subsisteront longtemps encore, qu’a produits autrefois l’interdiction de s’occuper de certains sujets, et que le roman d’outre-Manche conservera, notamment, cette variété qui est l’un de ses mérites les plus évidens et les plus précieux. Longtemps encore, quoi qu’en dise le pessimiste rédacteur du Bookman, le public anglais fera bon accueil à des œuvres qui non seulement « traiteront d’autre chose que de la différence des sexes, » mais qui même n’accorderont nulle place à l’amour, dans leur intrigue, sans être pour cela moins « romanesques, » ni moins littéraires, ni même moins libres et moins audacieuses au point de vue moral. Et si cet espoir ne nous était pas assez nettement confirmé par la persistance de la vogue de Robert Stevenson, — le moins « sexualiste, » assurément, des romanciers anglais, — nous en trouverions une confirmation nouvelle dans le succès, toujours plus marqué, des romans et des contes de M. Mariott Watson.

Car M. Watson est à présent, comme Stevenson l’a été avant lui, le maître le plus parfait d’un genre essentiellement anglais, et dont la formation constitue, à coup sûr, l’un des phénomènes les plus curieux de l’histoire littéraire au siècle passé. Tandis, que chez nous, depuis Balzac et Flaubert, les « artistes » de la littérature se sont trouvés, en quelque sorte, forcés d’employer l’originalité et l’indépendance naturelles de leur tempérament à l’étude des seules passions de l’amour, les « artistes » du roman anglais ont dû se mettre en quête d’un autre terrain pour y dépenser à leur aise des qualités pareilles ; et, faute de pouvoir approfondir l’analyse des sentimens amoureux, plusieurs d’entre eux ont entièrement renoncé à l’étude de ces sentimens, de telle façon qu’il y a telles de leurs œuvres, et des plus personnelles et des plus fameuses, qui ne présentent pas l’ombre d’une intrigue galante, et parfois ne contiennent pas une seule figure de femme. Mais, de la même manière que leurs rivaux français affirmaient leur « différence » dans la singularité ou dans l’intensité des émotions « sexuelles » qu’ils évoquaient devant nous, ces écrivains anglais, — poussés dans une autre voie par un même besoin de nier, et peut-être aussi de braver, les principes le plus universellement admis autour d’eux, — ont concentré tout leur effort à s’élever au-dessus du code de la morale traditionnelle, en créant des figures d’une dépravation séduisante, des types de magnifiques ou délicieux coquins, qui, tantôt joignaient à leur profonde immoralité les allures délicates de gentlemen accomplis, et tantôt déployaient, au milieu de leurs entreprises les plus criminelles, d’inépuisables trésors de tendresse, de douceur, et d’abnégation.

Déjà Thackeray, dans la Foire aux Vanités et dans les Aventures de Philippe, s’était plu à dessiner des créatures vraiment belles à force d’impudence ou d’hypocrisie, d’inconscience ingénue ou de perversité ; et sa Rebecca Sharp, son Rowdy Croydon, le père de son Philippe, auraient de quoi être considérés déjà comme des modèles du genre nouveau, si Thackeray ne nous avait encore laissé voir qu’il détestait ces personnages, malgré tout le plaisir qu’il prenait à les imaginer. Après lui est venu Stevenson, qui, on peut bien le dire, n’a point fait autre chose que d’imaginer des personnages analogues, avec une richesse et une variété d’invention merveilleuses, mais qui, désormais, ne nous a plus caché qu’il les adorait, et souvent nous a obligés, nous-mêmes, a les adorer avec lui. Son Maître de Ballantrae, son Allan Breck, et presque tous les héros de son Naufrageur et de son Reflux, — deux romans où l’amour n’a pas la moindre place, — ce sont en vérité des monstres, des êtres effroyablement dépourvus de scrupules moraux, et cependant si grands dans leur monstruosité, ou bien si généreux et si gais, exhalant une vie si ardente, que nous avons à peine le courage de nous reprocher l’irrésistible affection qui nous attache à eux.

Aussi n’est-il pas étonnant que, à la suite de cet inimitable conteur, une foule de romanciers se piquant de « littérature » aient consacré leur talent à inventer, semblablement, des figures, plus ou moins heureuses, de coquins sympathiques. Une pièce anglaise tirée d’un roman, que l’on est en train de jouer avec succès dans un de nos théâtres parisiens, n’est qu’un médiocre échantillon de la centaine de « gentlemen cambrioleurs, » de magnanimes assassins, de faussaires contrefaisant des chèques par pure curiosité esthétique, qui remplissent à présent les romans ou recueils de contes de MM. Hornung, Morrison, Arnold Bennett, etc. Il y a là une abondante et florissante école d’hommes de lettres qui font ouvertement leur métier de la glorification du vice ; et sans cesse les plus raffinés parmi eux estiment plus piquant, selon l’exemple de Stevenson, d’éliminer de leurs récits toute figure de femme, d’où résulte, en effet, pour nous, l’impression assez inattendue d’un mélange de décence et de corruption. Voilà des livres que l’on serait d’abord tenté de « mettre entre toutes les mains ; » et peut-être, au fait, les y met-on réellement ; et pourtant je jure que la lecture même de la Fille Elisa ne risquerait point de causer autant de ravages dans de jeunes âmes ! Si bien que je pardonnerais malaisément à Stevenson d’avoir contribué à produire cette fâcheuse lignée d’ « immoralistes, » si je ne devinais point que c’est lui aussi, d’autre part, qui a inspiré et nourri l’exquise fantaisie poétique de M. Watson.


On a parfois comparé M. Mariott Watson au vieil Alexandre Dumas, qui paraît bien être aujourd’hui, — soit dit en passant, — après Dickens, le romancier favori du public anglais[2]. Et certes il y a, chez l’auteur des Aventuriers, une aisance et une fécondité inventives, un mouvement continu, une habileté à créer des complications en apparence inextricables pour les résoudre, ensuite, presque sans trace d’effort, qui rappellent l’auteur des Trois Mousquetaires. Je croirais d’ailleurs volontiers que M. Watson, comme naguère Stevenson, a beaucoup pratiqué les cinq ou six bons romans d’Alexandre Dumas, n’étant pas gêné dans cette pratique, ainsi que l’est un lecteur français, par la pauvreté du style et l’absence, trop fréquente, de « tenue » littéraire. Mais c’est surtout par l’intermédiaire de Stevenson que le nouveau conteur anglais doit avoir tiré profit du talent de Dumas ; et c’est manifestement Stevenson qui lui a appris à revêtir de « littérature » ses imaginations les plus extravagantes. Car le charme particulier des récits de M. Watson, tout de même que celui de Saint- Yves, du Reflux, et du Prince Othon, leur vient de la subtile beauté de leur forme, ou, plus exactement, du contraste incessant de cette forme avec l’abandon romanesque des aventures qui nous sont contées. Que l’on se représente une histoire de brigands, toute semée de duels, d’enlèvemens, d’évasions dramatiques, et de plus d’exploits prodigieux et de coups de théâtre imprévus que n’en contiennent la Dame de Monsoreau ou Vingt ans après, mais qu’on se représente cette histoire traitée avec un souci scrupuleux du relief et de la consistance des caractères, de la couleur pittoresque des décors, de l’élégante précision des images et de la pureté expressive du style : on aura une idée des Aventuriers, qui sont l’un des premiers ouvrages de M. Watson, ou encore de ces Corsaires qu’il a publiés voici quelques semaines[3]. Bien plutôt qu’aux romans d’Alexandre Dumas, je les comparerais au Capitaine Fracasse de Théophile Gautier, le seul essai que je connaisse, en France, — si l’on excepte, peut-être, l’Homme qui rit et les Misérables, — d’une introduction de l’« aventure » dans le domaine du roman « littéraire. »

Au contraire des Aventuriers, où l’auteur s’était amusé à n’admettre aucun rôle de femme, le dernier roman de M. Watson nous présente une gracieuse figure de jeune fille, esquissée du trait le plus fin et le plus adroit : mais cette jeune fille ne tient, dans l’intrigue, que la place d’un « accessoire, » et l’unique sujet du roman est la lutte, en pleine mer ou sur les côtes anglaises et bretonnes, de deux brasseurs d’affaires américains, Alston et Rudgwick, venus en Europe pour trancher enfin une vieille querelle. Ces deux hommes d’aujourd’hui ont beau différer infiniment l’un de l’autre par le tempérament et l’éducation, chacun correspondant à l’un des types opposés de la civilisation présente de leur pays : tous deux sont de véritables « corsaires, » qui ne reconnaissent d’autres lois que leur volonté, et ne souffrent point qu’une autorité étrangère se mêle de leurs intérêts privés, serait-ce pour les défendre ou pour les secourir. C’est précisément afin d’échapper à toute intrusion de la police américaine qu’ils ont résolu de transporter dans le vieux monde l’implacable bataille qu’ils se livrent depuis des années ; et le fait est qu’ils procèdent à l’achèvement de cette bataille avec une ardeur si sauvage, et un si parfait dédain de nos conventions sociales et morales, que nous avons l’impression d’assister à la lutte de deux bêtes féroces, dans l’immensité d’un désert africain. Encore leur férocité n’exclut-elle point la ruse : sans arrêt nous voyons l’un, puis l’autre, s’aviser de quelque nouveau stratagème pour avoir raison de son adversaire, soit que, par exemple, Rudgwick ravisse la fiancée d’Alston, qui est l’aimable jeune fille dont je parlais tout à l’heure, et s’en serve comme d’un appât pour attirer sa proie, ou qu’Alston s’empare du yacht de Rudgwick, et se lance à la poursuite de la chaloupe où s’est réfugié son terrible rival. Et non seulement le degré exceptionnel de leur dépravation donne aux figures de ces deux « corsaires » une incontestable beauté, la beauté d’échantillons choisis et caractéristiques de deux variétés de la « bête humaine ; » mais l’un et l’autre unissent à leur qualité de « beaux monstres » un certain agrément personnel qui, jusque dans leurs crimes les plus odieux, ne nous permet point de les détester. Le plus âgé, Rudgwick, nous séduit par sa rondeur joviale et sa bonhomie : impossible de souhaiter un plus brave homme, plus généreux et plus délicat, aussitôt que sa passion cesse d’être en jeu. Quant à l’autre, le jeune Alston, je dois avouer que celui-là a l’âme beaucoup plus noire, et que l’on aurait peine à découvrir, dans le roman ou dans la vie, un coquin plus complet : mais combien, avec cela, ce coquin est poli et tendre, combien il ajoute d’élégance artistique à son ignominie !

C’est là un genre de roman qui ne satisfait point tous les goûts : trop frivole, suivant les uns, tandis que d’autres le jugent affecté, et d’un art trop savant. Mais ceux qui l’aiment sauront gré à M. Watson des heures charmantes que leur procurera la lecture des Corsaires. Tout au plus regretteront-ils que le conteur anglais se croie plus ou moins tenu, par sa conscience de poète et de lettré, à garder une réserve excessive en présence de ses personnages, au lieu de se livrer pleinement à eux, comme le faisait son maître Stevenson. Car toujours on devine qu’il redoute, pour ainsi dire, de paraître dupe de ses inventions. « N’oubliez pas que ce que je vous raconte n’est pas absolument vrai ! » semble-t-il nous murmurer, dans tels tours de phrase d’une préciosité délicieuse, mais inutile, ici, et un peu gênante. Par où il nous fait voir, lui aussi, ce manque de naturel qui est décidément la grande maladie de tous les romanciers anglais d’à présent, et qui comporte, entre autres symptômes, un besoin de rappeler au lecteur que l’auteur n’invente et ne développe ses récits que pour s’amuser. Heureux, du moins, l’auteur des Corsaires, de réussir à nous amuser autant qu’il s’amuse lui-même !


II

A côté de ce « roman d’aventures littéraire, » le roman religieux a toujours été un genre essentiellement anglais, se poursuivant sans cesse, de génération en génération, dans la littérature nationale. Cette année encore, la production du roman religieux a été abondante et diverse : toutes tes nuances de l’opinion anglaise y ont trouvé, une fois de plus, de zélés défenseurs, depuis le papisme le plus orthodoxe jusqu’aux limites extrêmes de l’agnosticisme, en passant par cette forme particulière du protestantisme qui consiste, uniquement, à dénoncer les erreurs et les crimes de l’« idolâtrie romaine. » Mais je n’ai pas eu la chance de rencontrer, parmi les nombreux romans nouveaux qui reflètent cette dernière nuance, un seul ouvrage ayant une valeur philosophique ou littéraire assez réelle pour qu’il me soit possible de le signaler. L’un d’eux, pourtant, est l’œuvre d’un écrivain qui s’était fait, naguère, une spécialité de flétrir les vices d’une nombreuse série de cardinaux, camériers secrets, et autres prélats, tous personnages inventés par lui avec une remarquable richesse d’imagination, et rendus presque vraisemblables par l’exactitude minutieuse du décor romain où il nous les montrait. Ainsi Un Mystère romain et Lancement de filets, les deux romans les plus renommés de M. Richard Bagot, avaient été des coups très savamment assénés, sans que, d’ailleurs, ils aient paru causer le moindre dommage appréciable à l’Eglise catholique, contre laquelle ils étaient dirigés. Et peut-être est-ce cette douloureuse expérience de l’inefficacité de ses assauts qui aura fatigué et découragé la verve « anti-papiste » de M. Bagot : toujours est-il que son roman de cette année, Tentation[4], ne tâche presque plus à combattre l’« Idole ; » c’est une simple histoire d’amour, placée, suivant l’usage de l’auteur, dans un cadre italien, mais au reste bien banale et insignifiante.

Plus combative, infiniment, est la Femme de Babylone de M. Joseph Hocking[5]. Celui-ci, d’après une note de son éditeur, « a entrepris la tâche ardue d’exposer au grand jour les intrigues employées par d’astucieux prêtres papistes pour s’assurer un pouvoir dominateur dans les familles. » Et la note ajoute que ce roman a « une très haute portée, par la manière dont il nous révèle la nécessité, pour la loi anglaise, de ne plus tolérer certains forfaits commis au nom de l’Eglise romaine. » Hélas ! pourquoi M. Hocking, avec la ferveur passionnée qui l’animait, n’a-t-il pas essayé de mettre au service de sa thèse une histoire moins ennuyeuse que celle qu’il nous a racontée ? Si « ardue » que soit la tâche qu’il a entreprise, le roman qu’il nous donne à lire l’est encore davantage ; et c’est vraiment à grand’peine que nous atteignons la fin de ce livre de près de quatre cents pages en petits caractères, pour n’y découvrir que l’aventure, usée et défraîchie, d’une jeune fille qu’un prêtre veut enfermer, de force, dans un froid, humide, et sinistre couvent. Le seul enseignement curieux que nous retirions de cette Femme de Babylone est d’apprendre que, en Angleterre, des romanciers continuent à écrire de tels livres, et que des milliers de braves gens continuent à les lire.

Après cela, il faut bien reconnaître que, dans le genre du roman religieux, la nuance « antipapiste » n’a malheureusement pas le monopole de l’ennui. Qu’il y ait là une fatalité attachée à la nature même du genre, ou un accident fortuit et exceptionnel, c’est chose trop certaine que, de tous les genres du roman pratiqués en Angleterre durant l’année présente, aucun, pris en bloc, ne m’a été d’une lecture plus malaisée que le roman religieux. Et je serais porté à croire que le hasard, dans l’espèce, n’est point seul responsable : car plusieurs des écrivains dont les romans religieux m’ont le plus ennuyé m’avaient, autrefois, paru beaucoup plus intéressans et beaucoup plus vivans, dans des récits où les questions religieuses n’avaient point de part. La vérité est, sans doute, que pas un des autres genres n’est plus difficile : et c’est de quoi les jeunes auteurs auraient profit à se persuader, en Angleterre aussi bien que chez nous.


Voici, par exemple, l’éminente femme de lettres connue sous le pseudonyme de Lucas Malet ! Fille et nièce de deux hommes qui ont naguère figuré au premier rang des écrivains de leur pays, les deux frères Kingsley, elle a apporté elle-même aux lettres anglaises un très précieux mélange de vigueur intellectuelle et de grâce féminine : dix romans, élaborés tour à tour avec une élégance discrète et raffinée, depuis les Gages du Péché jusqu’à Sir Richard Calmady, nous l’ont montrée promenant avec une égale aisance, sur les terrains les plus divers, la délicate sûreté de son observation. Or il est arrivé récemment que, — à en juger, du moins, par son dernier livre, — cette nièce de l’adversaire et dénonciateur passionné de Newman s’est convertie au catholicisme ; et je dois dire que sa conversion est venue compléter, le plus heureusement du monde, l’image toute respectueuse et belle que je m’étais toujours faite de sa personnalité d’écrivain. Mais elle n’a pu s’empêcher, sans doute, ayant goûté personnellement les bienfaisantes délices de sa foi nouvelle, de vouloir consacrer à l’éloge de cette foi le prochain roman qu’elle allait écrire : et, en effet, son Horizon lointain[6] est un roman catholique, destiné à nous représenter l’Église romaine comme le refuge idéal des âmes fatiguées ou endolories. Elle nous y raconte l’histoire d’un vieux garçon qui, poursuivi par une malchance implacable, finit toutefois par trouver la paix, et même un humble et tranquille plaisir, en revenant aux croyances de ses jeunes années.

On ne saurait souhaiter un sujet plus simple, ni plus vrai, ni plus apte à fournir de matière un bon roman religieux. Par malheur, c’est aussi un sujet difficile, trop difficile pour une femme qui ne s’était jamais occupée, jusqu’ici, que de la partie « temporelle » de la vie humaine ; et ainsi Mme Lucas Malet, qui avait naguère excellemment réussi à peindre les souffrances d’un vieux mari amoureux, ou encore la destinée tragique d’un poète de génie condamné à porter le poids d’un corps difforme, n’a point pu réussir, cette fois, à imprégner de vie son portrait d’un incrédule converti au catholicisme. À cette conversion, qui ne nous aurait intéressés que si nous l’avions vue produisant ses fruits au plus profond de l’âme du héros, elle a donné le caractère d’un acte banal et superficiel, à peine plus important, dans l’existence du vieux garçon, que la liaison de celui-ci avec une jeune actrice, personnage qui intervient là on ne sait trop pourquoi. Malgré maints épisodes charmans, l’Horizon lointain est un livre manqué : il n’a ni l’élévation poétique que demanderait son sujet, ni le relief vivant et l’intensité pathétique qui, à défaut d’un roman religieux, en auraient fait, du moins, un récit agréable ou touchant, comme la plupart des précédens ouvrages de Mme Malet.

Je n’affirmerais pas, non plus, que l’ennui soit entièrement absent d’un autre roman catholique, publié, au début de 1906, par Mme Wilfrid Ward, sous un titre qui signifie Hors de propos, ou, mieux encore, Avant l’heure[7]. Toute la première partie du roman, consacrée à la présentation des principaux personnages, a quelque chose de gauche, d’emprunté, et d’un peu fastidieux. Ayant à nous exposer le conflit dramatique de deux fortes âmes, l’auteur a imaginé de nous faire raconter son récit par une troisième personne, une jeune fille, qui assiste à toutes les péripéties du drame sans y prendre jamais une part bien active ; et cette jeune fille, dont le rôle n’a rien pour nous intéresser, tient, dans le livre, une place infiniment trop grande, jusqu’au moment où l’auteur se décide enfin à la congédier, pour ne laisser désormais en notre présence que les seules figures qu’il nous importe de connaître. Mais si ce roman est mal composé, je ne saurais dire avec quelle intelligence pénétrante Mme Ward y a traité plusieurs des points les plus graves du problème religieux d’aujourd’hui, ni avec quelles admirables simplicité et franchise littéraires elle a dessiné les deux figures dont l’opposition symbolise le contraste des deux courans actuels du sentiment catholique. Considéré au point de vue artistique, ce gros livre, de même que l’Horizon lointain de Mme Malet, est une œuvre manquée ; mais peut-être toute la littérature anglaise contemporaine ne nous offre-t-elle point d’autre exemple aussi remarquable d’une utilisation des ressources et de la portée du roman pour le développement d’une idée religieuse.

Le sujet de ce roman, vieux déjà de plus d’une année, est, au juste, la question du « modernisme. » Un écrivain anglais récemment converti à la foi catholique, homme d’un savoir, d’une puissance de pensée, et d’un talent d’expression supérieurs, a écrit un traité d’apologétique où il proclame le devoir, pour l’Eglise, de s’accommoder aux tendances de la pensée moderne. Condamné par son évêque, il fait appel à l’autorité du Pape ; et lorsque la Cour romaine, à son tour, l’a condamné, il refuse de se soumettre, renonce violemment au catholicisme. Il avait près de lui, durant toutes les phases de sa lutte, une jeune sœur qui partageait ses espérances, et l’encourageait de son tendre amour : mais à présent, au lieu de le suivre encore dans sa rébellion, cette jeune fille se résout à sacrifier son propre bonheur, afin de racheter la faute de son frère. Elle se sépare d’un fiancé qu’elle adorait, emploie ses dernières années à la mortification et aux bonnes œuvres ; et Dieu, après l’avoir rappelée à lui, finit par la récompenser de son sacrifice, car le « moderniste » révolté revient à la foi. Non pas que le frère ni la sœur soient jamais contraints à reconnaître la fausseté de leurs opinions, ou du moins à se repentir de l’intention vraiment pieuse qui les leur inspirait ; mais tous deux consentent à admettre qu’ils ne sauraient être juges de l’« opportunité » de réformes dont les conséquences pratiques échappent, forcément, à nos yeux mortels.

Telle est l’intrigue du roman. J’ajouterai que la conduite de cette intrigue, d’abord très maladroite et embarrassée, acquiert sans cesse plus de précision au courant du récit, et que tous les chapitres consacrés au séjour de Marcelle et de son frère à Rome, en particulier, sont un modèle de narration vivante, pittoresque, et touchante. Les descriptions des églises, des palais, des jardins romains s’y mêlent très harmonieusement avec l’analyse des émotions fiévreuses de deux jeunes cœurs avides de beauté. Mais ni l’intérêt brûlant du sujet, ni le mouvement du récit et le charme des descriptions, n’égalent l’admirable qualité des portraits du frère et de la sœur, tels que nous les présente la seconde moitié du roman. Il y a, dans l’âme du frère, un mélange de douceur et d’orgueil, de sincère pitié et d’ambition égoïste, qui prête à ce caractère une originalité saisissante ; et la sœur est si adorablement affectueuse et bonne que son image suffirait, à elle seule, pour nous rendre sympathiques des croyances dont elle est l’expression spontanée et parfaite, anima naturaliter christianissima.


Heureuse la littérature anglaise, qui possède des romanciers catholiques capables de traiter les problèmes religieux avec autant de hardiesse, et de sagesse, et d’art ! Sans compter que deux ou trois de ces romanciers, tout en servant un idéal commun, mettent à son service les tempéramens les plus différens que l’on puisse concevoir. Pendant que Mme Wilfrid Ward incarne en deux belles figures le conflit tragique de deux modes de foi, un vénérable prêtre irlandais dont j’ai eu déjà l’occasion de parler, l’abbé Sheehan, continue à dessiner, avec une bonhomie et une malice piquantes, des types de prêtres et de paysans de son pays[8] ; et un prêtre anglais, de son côté, le P. Robert Hugh Benson, transporte dans les domaines les plus divers une imagination et une habileté narrative qui, s’il les dépensait à des sujets profanes, lui auraient valu déjà une réputation comparable à celles de M. Hall Gaine ou de M. Conan Doyle. Fils d’un prélat de l’Eglise anglicane, mais converti depuis longtemps au catholicisme, ce prêtre érudit et lettré a publié d’abord des romans historiques, dont l’un, Par quelle autorité ? mériterait d’avoir, dans tout l’univers catholique, le succès populaire d’un second Quo vadis ? C’est un roman d’aventures, l’histoire de l’apostolat et du martyre d’un jeune jésuite au temps d’Elisabeth : mais les figures y ont un relief si marqué, le milieu où elles s’agitent nous est reconstitué si fidèlement, et l’auteur y a si ingénieusement combiné et gradué les catastrophes qui échoient à ses personnages, que le lecteur, le plus difficile est forcé de le suivre avec une curiosité frémissante, jusqu’à l’horrible et triomphale agonie de son jeune martyr. Et le P. Benson ne s’en est point tenu au seul champ de l’histoire : nous avons eu de lui des romans de mœurs contemporaines, après quoi est venu un recueil de contes « occultistes ; » et voici maintenant\que, rivalisant avec M. Wells, cet infatigable inventeur nous entraîne avec lui dans l’avenir, pour nous faire assister à la fin du monde[9] !

Je me rappelle que jadis, à vingt ans, parmi bien d’autres projets longuement médités et puis abandonnés, j’avais rêvé d’écrire un « roman des temps futurs, » à la manière de ceux que produisaient alors, un peu partout, des romanciers socialistes ou simplement « scientifiques. » Mais tandis que tous ces romanciers ne s’occupaient que du côté extérieur de la vie de nos descendans, nous montrant la manière dont on voyagerait, au XXIe siècle, ou dont on se meublerait, ou dont seraient répartis le travail et le capital, mon intention était de décrire plutôt l’âme et la vie intérieure des hommes de demain, d’après la transformation que je voyais s’opérer déjà dans les sentimens et les idées morales de notre temps présent. Je me divertissais à imaginer une race où régneraient, désormais sans aucune réserve, la sottise, l’égoïsme, et la grossièreté, une race achevant de revenir à l’animalité primitive, parmi tous les progrès du bien-être et du luxe, jusqu’au jour où l’application universelle du malthusianisme aurait réduit la population de notre globe à une centaine de « dégénérés, » incapables même de tirer profit des ballons dirigeables, automobiles, microphones, et autres « conquêtes de la civilisation » qu’ils auraient sous la main[10].

Je projetais là, sans m’en douter, un roman religieux : car j’ai reconnu depuis lors que le meilleur moyen de sauver les races futures de la dépravation et de l’abrutissement serait de maintenir ou d’implanter, dans les cœurs, la contrainte et les promesses salutaires d’un dogme. De telle sorte que, en apprenant le sujet du nouveau livre du romancier catholique anglais, je me suis attendu à y trouver une réalisation de l’un de mes vieux rêves : mais non, M. Benson est très loin de se faire une idée aussi pessimiste de l’état intellectuel et moral des hommes à venir. Il nous les montre, au contraire, profitant merveilleusement des « conquêtes » pratiques de la science, et jouissant d’une organisation sociale beaucoup plus sage et mieux réglée que la nôtre, et cultivant, en somme, un altruisme des plus enviables, — encore qu’il ait négligé de nous expliquer sur quel principe, à défaut de toute doctrine religieuse, pourront s’appuyer, par exemple, des coutumes telles que la fidélité conjugale, ou le respect de la propriété. Car l’unique différence entre ces hommes du XXIe siècle et les hommes d’aujourd’hui, suivant M. Benson, serait que nos arrière-neveux ne posséderont plus la moindre notion de nos croyances chrétiennes, sauf un très petit nombre de pauvres gens illettrés, qui, sous la conduite du Pape et de quelques prêtres, continueront obscurément à entretenir l’espérance d’une vie future. Et ceux-là mêmes auront à disparaître bientôt. Des profondeurs de l’Orient surgira un homme mystérieux qui, avec une éloquence et un pouvoir de séduction irrésistibles, prêchera une religion nouvelle, le culte de l’Humanité, et exigera que, dans le monde entier, tous les hommes s’unissent pour célébrer les rites de ce culte suprême. Au nom de l’Humanité, toute personne refusant de prendre part à cette célébration sera supprimée, — d’une suppression tout « humanitaire, » doucement et délicieusement, par les procédés les plus affinés de l’euthanasie. Enfin, le Pape et une douzaine de derniers chrétiens, réfugiés dans un village de la Palestine qui sera l’Armageddon de l’Apocalypse, se prépareront, parmi les prières et les chants de louanges, à l’accomplissement de la sentence de mort prononcée contre eux ; et alors, malgré le zèle de ces représentai des Douze Eglises pour apaiser la colère du Très-Haut, cette colère éclatera, selon ce que nous a prédit le Voyant de Pathmos ; et les flammes de la terre et du ciel se joindront pour engloutir les aveugles adorateurs de l’Humanité.

Malheureusement, ce rapide résumé n’est guère fait, je le sens, pour suggérer au lecteur français une idée un peu juste de l’intérêt captivant du livre de M. Benson, — le plus étrange, à coup sûr, de tous les livres que j’ai rencontrés dans mon exploration des romans anglais. Tout d’abord, ce livre est un vrai roman, avec des personnages d’une individualité bien distincte : un homme d’État anglais et sa jeune femme, un prêtre, le vénérable vieux pape, et cet énigmatique et surnaturel apôtre de la religion nouvelle, ce symbole de l’Antéchrist, qui ne nous apparaît que de loin, sous un voile de mystère, mais dont l’ombre même nous cause une impression inoubliable de malaise et de vague effroi. Un roman, où plusieurs intrigues se déroulent et s’entremêlent, de chapitre en chapitre, et semées de péripéties ingénieuses ou pathétiques, depuis l’agonie désespérée d’une vieille femme que ses enfans veulent empêcher de se confesser, jusqu’à l’épouvantable anéantissement de Rome, au moyen de quelques bombes lancées du haut d’un ballon, et jusqu’à la veillée funèbre des douze derniers chrétiens, précédant la brève, mais terrifiante, peinture de « l’abomination de la désolation. » Un roman « d’aventures, » un roman « sensationnel : » l’auteur, dans sa préface, l’avoue expressément. Mais aussi un roman « scientifique, » non moins riche que ceux de Jules Verne ou de M. Wells en descriptions d’appareils prodigieux, ballons et explosifs, automobiles perfectionnés, inhalateurs transformant la mort en une extase de pure volupté. Et enfin ce sont, entrecoupant tout cela, de savantes conversations sur la philosophie, la religion, et la politique, dont la présence achève de donner au livre une allure à la fois imprévue et piquante. Certes, le genre du roman religieux échappe à l’ennui, traité de la façon qu’il l’est par M. Benson. A peine avons-nous le loisir de nous demander, par instans, si la fin du monde n’était peut-être pas un sujet bien sérieux pour qu’il fût permis, à un écrivain catholique, d’en faire la matière d’un roman-feuilleton.


C’est encore dans la catégorie des romans religieux que doit être classé, si on veut le tenir pour un roman, un livre anonyme qui vient de paraître il y a quelques semaines, et qui est en train de provoquer aujourd’hui, dans le public anglais, un très vif mouvement de curiosité. Le livre s’appelle Père et Fils[11], et nous expose l’histoire d’un jeune homme s’affranchissant, peu à peu, des rigides croyances calvinistes où l’ont élevé ses parens. Mais, plutôt qu’un roman, ce Père et Fils est, sans aucun doute, une autobiographie. L’auteur ne nous y raconte que des faits réels, ne nous y décrit que des personnes dont le caractère et les actes ont été, exactement, tels qu’il nous les représente. Le savant fanatique et borné, sacrifiant sa science même à ses convictions religieuses, et n’ayant d’autre préoccupation profonde que d’éviter la damnation pour soi et pour ses « saints, » tandis qu’il la souhaite pour le reste des hommes ; ce personnage éminemment loyal, mais ridicule et parfois déplaisant, c’est le propre père de l’auteur anonyme ; et c’est sa propre mère que celui-ci nous montre demandant presque à Dieu l’admission prochaine de son fils au nombre des « élus, » par une perversion étonnante de sa tendresse maternelle, ou bien, sur son lit de mort, « ayant ses dernières heures illuminées » par l’espérance que Napoléon III et Victor-Emmanuel vont s’allier pourchasser le Pape de Rome, et mettre fin à « l’arrogance infernale de la Grande Babylone. » Il y a là, dans cette résignation d’un fils à étaler franchement devant nous toutes les faiblesses et tous les travers de ses parens, un phénomène psychologique qui fait songer à la publication, entreprise naguère par le fils de Robert Browning, de la plus intime correspondance amoureuse de son père et de sa mère[12] ; et je crains que la singularité de ce phénomène n’empêche maints lecteurs d’apprécier pleinement la valeur et la portée d’un ouvrage qui abonde, cependant, en renseignemens significatifs sur les déformations produites, dans des cerveaux et des cœurs de choix, par l’étroitesse, la dureté, l’accablante sévérité d’une religion toute partagée entre la croyance à la véracité littérale de la Bible et la considération continue de l’Enfer.

Car, quelque terrible que vise à être la peinture des apprêts de la fin du monde, aux derniers chapitres du roman de M. Benson, plus inquiétante encore et plus désolante est l’image qui nous est offerte, ici, de l’éducation d’une jeune âme dans ce milieu de « saints. » Qu’on se la représente, cette jeune âme, maintenue, jusqu’à près de vingt ans, dans l’ignorance absolue de tous les « divertissemens » de la vie ! Le petit héros du livre ne connaît ni une chanson, ni un jeu ; Robinson Crusoë, les contes de Grimm et d’Andersen, tout roman et tout conte lui sont interdits, comme des « œuvres de mensonge, » des pièges diaboliques ; et ainsi, d’année en année, il grandit sans lumière et sans air, nourri seulement d’effrayans ouvrages tels que les Pensées sur l’Apocalypse ou les Horæ apocalypticæ ; après quoi vient un jour où son besoin naturel de respirer librement le force enfin à secouer, de ses épaules, l’intolérable fardeau du calvinisme familial, et, en même temps, à se dépouiller pour toujours de toute croyance religieuse, à tarir irrémédiablement dans son cœur toute source d’émotion consolante et d’immortel espoir.

En vérité, l’auteur nous assure que ses parens ont été les derniers types d’une espèce religieuse aujourd’hui éteinte, et que, jusque dans les familles les plus fidèles à la forme primitive et surannée du puritanisme, les enfans reçoivent désormais une éducation toute différente de celle qu’il a reçue. Mais son livre, en dépit même de la tendance nettement agnostique de ses conclusions, n’en exercera pas moins une action bienfaisante dans toutes les classes des lecteurs chrétiens, en leur apprenant, par un exemple le plus expressif du monde, combien la connaissance de la bonté de Dieu est toujours préférable à celle de sa justice. Si les parens de l’écrivain anonyme avaient été plus pénétrés du sentiment de cette bonté, ils auraient accoutumé leur fils à la reconnaître, et à en recueillir, autour de lui, les mille fruits divers ; ils auraient cultivé en lui la limpide gaîté, qui est au premier rang des vertus chrétiennes ; et leur enfant, devenu homme, aurait pu développer librement sa personnalité sans être forcé de rompre le lien sacré qui l’attachait à sa race. J’irai plus loin : si ces parens avaient eu plus de foi dans la bonté de Dieu que dans sa justice, leur immense amour pour leur enfant aurait laissé à celui-ci un souvenir plus tendre, et l’aurait empêché, même converti à d’autres croyances, de nous dessiner d’eux l’impitoyable portrait qui remplit tout son livre.


III

Il me resterait à parler, maintenant, d’un certain nombre d’ouvrages qui, sans avoir la portée artistique ou philosophique de ceux que j’ai déjà signalés, se recommandent par l’agrément de leurs sujets ou de leur mise en œuvre ; mais la place me manque pour les étudier aujourd’hui aussi longuement que je l’aurais voulu, et je vais devoir me borner à les énumérer, avec l’espoir de trouver peut-être, un jour, l’occasion de revenir sur quelques-uns d’entre eux.

C’est ainsi que1 M. Ford Madox Hueffer ne manquera point, j’imagine, de compléter par un troisième roman la reconstitution qu’il a entreprise de la dramatique et touchante aventure de Catherine Howard[13]. Rendant compte ici, il y a deux ans, d’une savante étude du major Martin Hume sur les Femmes d’Henri VIII, j’exprimais le souhait qu’un historien s’employât bientôt à nous révéler la figure véritable de la plus belle, et probablement de la plus sympathique, des six femmes du « Barbe-Bleue anglais. » C’est un romancier qui s’est chargé de ce soin : mais combien il y a employé d’érudition, de scrupuleuse conscience, et, en même temps, de talent poétique ! Les deux volumes publiés jusqu’à présent par M. Hueffer, La cinquième Reine et Le Garde du Sceau privé, sont des œuvres parfaitement exquises, avec l’éclat et la richesse pittoresques de leur décor, la piquante saveur un peu archaïque de leur langue, mais surtout avec l’incomparable beauté corporelle et morale de l’héroïne que l’auteur nous y fait voir courant, d’une démarche légère et le sourire aux lèvres, vers la catastrophe tragique de sa destinée. De toute la personne de cette jeune fée, de ses actes comme de ses paroles, de ses prières comme de ses chansons, et du merveilleux sourire qui la traduit tout entière, se dégage un parfum si fort de douceur féminine et de séduction que le spectateur du drame est tenté de n’avoir d’yeux que pour elle : et cependant, à côté d’elle, les figures de l’énorme roi, du garde des sceaux Cromwell, de l’évêque Cranmer, sont peintes aussi avec un relief et une couleur remarquables. Le second roman, en particulier, Le garde du Sceau privé, atteste, chez M. Ford Madox Hueffer, une très précieuse combinaison des qualités essentielles de l’historien et du romancier. Puisse un troisième volume achever dignement cette trilogie, de manière à enrichir la littérature anglaise d’un excellent roman historique, et à réhabiliter, du même coup, la mémoire d’une belle jeune femme dont le seul crime semble bien avoir été son attachement à « l’idolâtrie de la Grande Babylone ! »

J’espère aussi avoir prochainement l’occasion de parler plus à loisir de M. E. M. Forster, auteur d’un très curieux roman intitulé : Le plus long Voyage[14]. M. Forster nous apprend, sur la page de titre de son livre, qu’il a publié déjà un autre roman : Là où les Anges craignent de poser le pied ; mais je ne puis me défendre d’imaginer qu’il est un tout jeune homme, et bien résolu à se corriger des nombreux défauts qu’il nous laisse voir encore dans son Plus long Voyage. Rarement j’ai lu un récit plus inexpérimenté, affirmant une plus complète ignorance des artifices habituels du roman. M. Forster ne semble avoir aucune idée, par exemple, de l’avantage qu’il y aurait, pour lui, à préparer et à mettre en valeur les scènes importantes d’une action dramatique : il étale toutes ses scènes sur un même plan, ou bien s’attarde à des conversations purement épisodiques, tandis qu’il expédie en quelques pages des événemens que nous aimerions à voir décrits dans tout leur détail. Avec cela, une curiosité non moins puérile des incidens familiers de la vie universitaire : au point que nous croirions entendre un étudiant de Cambridge, persuadé que le monde entier s’intéresse, autant que lui-même, au programme des cours, aux formalités des examens, aux prouesses des joueurs de ballon ou des canotiers. La première partie de son roman, appelée Cambridge, au lieu d’occuper la moitié du volume, aurait dû être concentrée en une vingtaine de pages ; et nous nous serions fort bien passés, également, de maints chapitres dépensés à la peinture de l’existence quotidienne d’un pensionnat, où le héros de M. Forster, après sa sortie de Cambridge, remplit obscurément un emploi de sous-maître.

Ce sont des faiblesses que l’on ne songerait pas à remarquer, ou du moins à déplorer, dans un roman banal ; mais le malheur est que, ici, elles risquent de nuire à l’agrément d’une œuvre toute pleine d’observation et de poésie : car cet ancien étudiant de Cambridge, cet obscur professeur, dont M. Forster nous raconte l’histoire, est certainement l’une des figures les plus aimables qu’il m’ait été donné de rencontrer, dans toute la série des nouveaux romans anglais qui ont défilé sous mes yeux. Il a une âme d’une sensibilité et d’une pureté sans pareilles, acceptant les coups les plus cruels de la destinée avec un sourire doucement résigné, et toujours transformant en beaux rêves fleuris les tristesses ou les laideurs de la réalité. Il est gauche, timide, incurablement naïf, et, pour comble de malechance, boiteux ; sa jeune femme le méprise, ses camarades refusent de le prendre au sérieux, et un frère qu’il voudrait aimer repousse ses avances, faute de pouvoir, avec sa grosse santé de corps et d’esprit, comprendre les désirs ni les peines de ce cœur malade ; et lui, toujours il poursuit son « voyage » en ouvrant sur le monde un gentil regard étonné, et la mort même n’altère point la mélancolique sérénité de sa rêverie. Certes, nous sommes en droit d’attendre beaucoup d’un écrivain qui a su concevoir et exécuter ce portrait de poète : sans compter que, autour de son charmant héros, l’auteur a esquissé quelques autres figures non moins vivantes et originales, dans les rôles accessoires qu’il leur a prêtés.

En contraste absolu avec M. Forster, un autre jeune écrivain, M. John Galsworthy, est peut-être le plus adroit des nouveaux romanciers de son pays. Je n’en sais point à qui s’applique mieux l’épithète anglaise clever, signifiant à la fois l’habileté de l’esprit et celle de la main. Les deux romans que M. Galsworthy a publiés coup sur coup, Un Propriétaire et La Maison de campagne[15], abondent en tableaux évidemment très fidèles des mœurs et de l’existence intime de la bourgeoisie « cossue ; » et l’auteur nous décrit ce milieu particulier avec une précision un peu sèche, un sang-froid ironique, que l’on a aussitôt comparés à ceux de Thackeray, quoique la manière de M. Galsworthy se rapproche bien plutôt de celle de M. Paul Hervieu et d’autres « ironistes » français d’à présent. Des types savoureux de propriétaires campagnards, de puissans boursiers, de femmes ennuyées ou dépravées, surgissent devant nous, sous le prétexte d’une intrigue toute simple et assez banale : et nous devinons que l’auteur les a patiemment étudiés à notre intention, et que, s’ils sont fiers de leur fortune et de la qualité de leurs vins, il n’est pas, lui-même, sans éprouver un légitime orgueil à l’idée de les connaître aussi parfaitement. Parfois, en vérité, le lecteur souhaiterait d’échapper, un moment, à la considération de ces êtres égoïstes et vides, en compagnie d’une figure plus sympathique ; mais le petit dépit que risque de nous inspirer l’ironie trop continue de M. Galsworthy ne saurait nous permettre d’oublier l’aisance, la sûreté, ni le relief satirique de toutes ses peintures.


Je ne dirai rien de la Convertie[16] de Mme Elisabeth Robins, malgré tout le talent et toute la notoriété de cette femme de lettres : car, s’étant affiliée au féminisme le plus intransigeant, elle a été entraînée, par sa ferveur de néophyte, à nous débiter une plaidoirie, au lieu de nous raconter une histoire vivante. Tout au plus dois-je signaler, dans son livre, la prudente sagesse d’une jeune fille qui refuse d’épouser un homme qu’elle adore, parce qu’il ne partage point ses convictions féministes, et qu’ainsi elle redoute de manquer, avec lui, de sujets de conversation. Beaucoup plus intéressant, et mieux mis à notre portée, est un autre roman « féminin, » sinon tout à fait « féministe, » l’Assistante (ou l’Associée), par Mlle May Sinclair[17]. C’est l’aventure, un peu bien « charnelle, » d’une jeune femme qui, le lendemain de ses noces, s’aperçoit que son mari a eu naguère une maîtresse, et que, par suite, elle ne peut plus l’aimer comme elle le voudrait : de sorte qu’elle témoigne désormais à son mari une froideur, une indifférence, et un dédain si obstinés que le pauvre garçon finit par être forcé de se consoler en se créant, ailleurs, un second « ménage ; » mais voici alors que sa femme, en présence de cette nouvelle infidélité, se décide à comprendre sa faute, demande pardon au mari adultère, et jure de devenir désormais son « assistante » dévouée !

Quand j’aurai cité encore la Nouvelle Religion de M. Maarten Maartens[18], spirituelle et mordante satire du monde médical contemporain, et l’émouvante « chronique » où Mme Vida Scudder nous raconte, avec un mélange exemplaire de science et de fantaisie, la vie d’un compagnon de sainte Catherine de Sienne[19], j’aurai épuisé la série de ceux des nouveaux romans anglais qui m’ont paru se distinguer par des qualités vraiment de premier ordre. Mais, à la suite de ces œuvres d’une valeur exceptionnelle, combien je regrette de ne pouvoir pas en signaler plusieurs autres qui se trouvent être, au total, de bons romans, et très intelligemment appropriés au goût des classes particulières de lecteurs à qui ils s’adressent ! Quelques-uns d’entre eux, par exemple, auraient de quoi nous offrir des renseignemens bien curieux sur deux genres non moins foncièrement « nationaux » que ceux du roman religieux et de la transfiguration poétique du roman d’aventures : à savoir, le roman « historique, » et ce qu’on pourrait appeler le roman du « coup de poing, » c’est-à-dire un roman qui a pour objet d’offrir aux Anglais la représentation d’un type idéal de leur race, sous les espèces d’un jeune gaillard affirmant sa supériorité, et l’élévation de ses sentimens, par un généreux emploi de sa vigueur musculaire. De ce dernier genre on trouvera un échantillon magnifique dans le John Glynn de M. Paterson[20], où l’on verra une façon d’apôtre se servir de la force invincible de ses poignets pour ramener la vertu dans un des quartiers les plus vicieux de Londres ; et la forme du roman « historique, » de son côté, reste si profondément familière au lecteur anglais que, de plus en plus, des romanciers prennent l’habitude de situer dans le passé jusqu’à des histoires de détectives poursuivant la piste de mystérieux criminels, tandis que d’autres s’amusent à imaginer des héros fictifs qui, avec des caractères différens, jouent exactement le rôle politique qu’ont joué naguère des personnages fameux de l’histoire nationale[21]. Et comment, enfin, pourrais-je terminer cette rapide revue du roman anglais d’aujourd’hui sans mentionner le vif plaisir que m’ont causé des études psychologiques à la fois élégantes et solides, comme La plus forte Plume de M. Hugh de Sélincourt[22], ou de fins tableaux de la vie enfantine, comme ceux qui remplissent le Petit Seigneur de Mme de la Pasture[23], ou des visions infiniment mélancoliques et tendres comme celles que nous décrit, sous couleur de nous exposer la carrière d’un poète, M. Arthur Machen dans sa Colline des Rêves[24] ?


D’une manière générale, le roman anglais me semble n’avoir rien perdu de sa vitalité de jadis ; et je doute qu’aucune autre des littératures étrangères soit en état de nous présenter, parmi ses romans de l’année, un aussi grand nombre d’ouvrages excellens. C’est là un fait que je me garderais bien de vouloir expliquer : mais il y a, tout au moins, l’une de ses causes que je ne saurais m’empêcher d’indiquer en passant. Je crois, en effet, que la belle floraison littéraire du roman tient, pour une certaine part, à ce que, en Angleterre, le théâtre n’a pas commencé jusqu’ici, comme à Berlin, à Rome, à Pétersbourg, ou chez nous, à écarter du roman, par la séduction qu’il exerce sur eux, les plus intelligens et les mieux doués des jeunes écrivains. Sauf de rares exceptions, les romanciers anglais dédaignent, l’estimant trop facile et indigne d’eux, le succès qu’aurait à leur offrir le public spécial des théâtres de Londres : et ainsi ils s’avancent, d’un pas ferme et sûr, dans la voie que leur ont tracée leurs prédécesseurs, au lieu d’être distraits et troublés par la pensée des avantages de renommée ou de gain matériel qui les attendraient, s’ils se décidaient à entrer dans une voie différente. Hélas ! il n’est pas impossible que, sur ce point encore, le « splendide isolément » des compatriotes de Dickens finisse bientôt : car déjà la « littérature » est manifestement en train de s’introduire sur la scène anglaise ; déjà des romanciers de valeur, comme M. Barrie ou M. John Galsworthy, jaloux du triomphe de M. Bernard Shaw, abandonnent le roman pour la comédie ; et peut-être le moment n’est-il pas éloigné où, à l’exemple de MM. Paul Hervieu, d’Annunzio, et Maxime Gorky, les remarquables auteurs dont je viens de parler renonceront à perpétuer, ainsi qu’ils le font jusqu’à ce jour avec un zèle infiniment méritoire, la longue et glorieuse tradition de leur roman national.


T. DE WYZEWA.

  1. Voyez la Revue du 15 novembre 1907.
  2. Non seulement une grande librairie anglaise a entrepris la publication des Œuvres complètes d’Alexandre Dumas : celui-ci tend même, de plus en plus, à devenir, en Angleterre, un auteur « classique. » Plusieurs de ses romans sont imprimés, à Londres, dans leur texte français, avec une introduction et des notes anglaises ; et il s’est trouvé un écrivain anglais pour offrir à ses compatriotes un gros livre illustré, tout rempli d’érudites recherches, sur le Paris d’Alexandre Dumas ! On avait essayé naguère d’acclimater, de la même façon, l’œuvre de Balzac ; et, chose curieuse, la tentative semble, pour celui-là, avoir beaucoup moins réussi en Angleterre qu’aux États-Unis.
  3. The Privateers, par H. Mariott Watson, 1 vol. illustré, Londres, librairie Methuen, 1907.
  4. Temptation, par Richard Bagot, un vol. Londres, librairie Methuen, 1907.
  5. The Woman of Babylone, par Joseph Hocking, un vol. illustré, Londres librairie Cassell, 1907.
  6. The far Horizont, par Lucas Malet, un vol. Londres, librairie Hutchinson, 1907.
  7. Out of due Time, par Mme Wilfrid Ward, un vol. Londres, librairie Longmans, 1906.
  8. Voyez la Revue du 15 septembre 1902.
  9. Lord of the World, par R. H. Benson, 1 vol. Londres, librairie Pitman, 1907 Le recueil des contes, paru précédemment à la même librairie, était Intitulé : The Lady of Shalott.
  10. On trouvera, d’ailleurs, une conception analogue des « temps à venir » dans l’admirable Machine à mesurer le temps de M. Wells (traduit par M. Davray, à la librairie du Mercure de France).
  11. Father and Son, 1 vol. in-8o, Londres, librairie Heinemann, 1907.
  12. Voyez la Revue du 15 mai 1899.
  13. The Fifth. Queen et Privy Seal, par F. Madox Hueffer, deux volumes. Londres, librairie Alston Rivers, 1906 et 1907.
  14. The longest Journey, par E. M. Forster, Londres, librairie Blackwood, 1907.
  15. A Man of Property, et The Country House, par J. Galsworthy, deux vol. Londres, librairie Heinemann, 1906 et 1907.
  16. The Couvert, par E. Robins, 1 vol. Londres, librairie Methuen, 1907.
  17. The Helpmate, par May Sinclair, 1 vol. Londres, librairie Constable, 1907.
  18. The New Religion, par Maarten Maartens, 1 vol. Londres, librairie Methuen, 1907.
  19. The Disciple of a Saint, par Vidda Scudder, 1 vol. Londres, librairie Dent, 1907.
  20. John Glynn, par Arthur Paterson, 1 vol. Londres, librairie Macmillan, 1907.
  21. Ainsi le personnage principal des Rebelles de Sa Majesté, de M. S. Royse Lysaght (Macmilian), se trouve être un éloquent agitateur irlandais qui succombe à la tentation d’un amour coupable, tout comme l’a fait, autrefois, Charles Stewart Parnell ; et les Tisserands de M. Gilbert Parker (Heineman) nous décrivent une figure de conquérant mystique qui ressemble exactement à celle de l’illustre Gordon-Pacha.
  22. The Strongest Plume, par H. de Sélincourt, 4 vol. Londres, librairie Lane, 1907.
  23. The little Squire, par Mrs H. de la Pasture, 1 vol. illustré. Londres, librairie Cassell, 1906.
  24. The Hill of Dreams, par Arthur Machen, 1 vol. Londres, librairie Gran-Richards, 1907.