Le Prisme (Sully Prudhomme)/Devant l’Apollon du Belvédère, sonnet à Charles Degeorge


DEVANT L’APOLLON DU BELVÉDÈRE

sonnet


a charles degeorge


L’horizon verse en nous l’allégresse ou l’ennui,
Le monde intérieur se teint du jour solaire :
Le climat laisse empreint son vivant similaire
Dans l’âme et le roseau qu’elle a pour frêle étui,

Et la beauté du corps n’est que l’hymen en lui
De sa terre natale et du ciel qui l’éclairé ;
Elle est de leur baiser l’ouvrage séculaire,
Ébauche heureuse, encore à parfaire aujourd’hui.

O Sculpteur ! plus puissant que la Nature même,
Tu coules en airain son modèle suprême
Dans le moule idéal qu’elle n’a pas rempli ;

Ton regard dans la forme humble encore devine
Le pur contour élu par son type accompli :
On te la livre humaine, et tu la rends divine !