Le Poulailler/Chapitre18

Librairie agricole de la Maison rustique (p. 171-178).

CHAPITRE VIII

Race espagnole.

COQ.


Grav. 77. — Coq espagnol.


PROPORTIONS ET CARACTÈRES GÉNÉRAUX.

Corps ovalaire, haut sur pattes ; muscles convenablement fournis ; membres allongés ; quatre doigts à chaque patte plumes du camail et de l’aile de longueur ordinaire ; grande faucilles longues, queue touffue portée droit et près du cou ; plumage collant entièrement noir, noir et blanc chez le poulet ; figure d’un blanc de farine ; crête simple, charnue et droite (grav. 77).


POIDS, DIMENSIONS ET CARACTÈRES PARTICULIERS.

Poids. — À l’âge adulte, de 3 kilogrammes à 3 kilogrammes 1/2. Os fins et légers.

Chair. — Abondante et très-bonne.

Taille. — De la partie supérieure de la tête sous les pattes fie 0m.55 à 0m.60. Du dos sous les pattes, 0m.40.

Tête (grav. 77). — D’une forme particulière déterminée par les épaisses rugosités de ses joues.

Crête. — Simple, droite, extrêmement haute, plus grande que chez toutes les autres espèces, très-épaisse à la base, mince dans la partie supérieure, dentelée de grandes pointes régulières.

Barbillons. — Longs, minces et pendants, de la même couleur que la crête, qui est d’un rouge rosé très-vif.

Oreillons. — Longs, épais et sinueux, de la même couleur et de la même nature que les joues, avec lesquelles ils semblent se confondre et ne faire qu’une vaste plaque de blanc, interrompue seulement par une touffe de petites plumes minces qui recouvrent le conduit auditif.
Grav. 77. — Tête de coq espagnol.

Joues. — Larges, d’un blanc de farine mat, dans lequel on aperçoit des teintes nacrées et d’un bleu extrêmement tendre. Lorsque l’animal vieillit, ses joues sont remplies de sinuosités profondes et de plis irréguliers si saillants, que l’œil disparaît quand la tête est vue de devant ou de derrière. Ses joues sont parsemées de très-petits trous espacés et invisibles à distance.

Bouquets. — Composés de petites plumes noires, fines et rares.

Bec. — Droit et ordinairement noir.

Iris. — Aurore.

Pupille. — Chocolat foncé.

Patte, canon de la patte. — Assez mince, longueur, 0m.09, couleur bleu ardoisé.

Doigts. — Ordinaires, de même couleur que le canon.


DESCRIPTION DU PLUMAGE.

Le plumage du coq est complètement noir ; les plumes du camail, du dos et des reins sont criblées de reflets métalliques argentins, et prennent, dans certaines positions, des tons mêlés de vert et de pourpre ; celles des épaules sont d’un noir velouté ; les plumes de recouvrement du vol sont reflétées de couleurs vertes et bronzées, ainsi que les grandes et les petites faucilles ; le reste est mat. Dans son ensemble, le coq espagnol a des façons d’hidalgo qui lui appartiennent en propre ; son vêtement de velours noir, son visage colleté de blanc, sa crête en forme d’aigrette et ses barbillons rouges lui donnent un air tout à fait espagnol.


POULE.
PROPORTIONS ET CARACTÈRES GÉNÉRAUX.

La poule a bien les caractères du coq ; mais elle aurait beaucoup d’analogie avec nos poules communes noires, sans la particularité qu’offrent ses joues, son large oreillon blanc, ainsi que sa longue crête ployée à angle droit. Elle est éveillée et porte fièrement sa tête et sa queue. Son plumage est noir comme celui du coq ; mais les reflets en sont moins variés et moins éclatants.

POIDS, DIMENSIONS ET CARACTÈRES PARTICULIERS.

Poids. — 2 kilogrammes 1/2 ; un peu plus, un peu moins.

Tête (grav. 78). — Fine, jolie, d’une assez petite dimension.

Crête. — Longue, finement dentelée, ployée près de la base et se rabattant sur un des côtés de la tête, sans pour cela tomber sur les joues.

Barbillons. — Longs et arrondis.

Oreillons. — Larges et blancs.
Grav. 78. — Tête de poule espagnole.

Bouquets. — Plus volumineux que chez le coq.

Joues. — Blanches comme celles du coq, mais sans sinuosités et parsemées de petites plumes noires imperceptibles à distance.

Narines. — Ordinaires.

Bec. — Comme chez le coq.

Iris. — Aurore.

Pupille. — Chocolat foncé.

Pattes et doigts. — Ordinaires, quoique longuets.

Ponte. — Excellente ; œufs blancs, très-gros et très-délicats.

Incubation. — Nulle.


OBSERVATIONS GÉNÉRALES SUR L’ESPÈCE.

La race espagnole n’est connue en France que depuis quelques années, quatre ou cinq ans environ. Elle est répandue déjà depuis assez longtemps en Angleterre, d’où elle nous est venue, et qui l’a tirée d’Espagne. Quant à son origine, elle est tout aussi nébuleuse que celle de presque toutes les autres espèces. Son mérite consiste en deux points : beauté remarquable comme oiseau de luxe, et grande fécondité. On peut ajouter, mais en troisième ligne, bonne qualité des produits pour la table.

Le coq est un admirable oiseau qui forme le plus étrange contraste avec les autres espèces, et la poule pond en quantité de très-beaux œufs laiteux à coque blanche et d’un goût exquis. La chair, assez abondante, est d’une saveur remarquable, la peau est blanche et fine ; mais : 1o  la crête, qui est par sa taille et par le contraste qu’elle forme avec la couleur de la figure un ornement propre à l’espèce, la crête, dis-je, est d’une extrême sensibilité pendant les saisons froides, et peut être détruite par la moindre gelée si l’on n’a soin d’enfermer les animaux à temps, ce qui constitue une impossibilité complète de peupler nos basses-cours de cette espèce à l’état pur ; aussi cette volaille n’est-elle recommandable que pour les pays chauds ; 2o  les poulets, couverts d’un duvet noir bleuâtre, marqué de blanc, qui tombe pour les laisser souvent tout nus, sont extrêmement frileux et longs à s’emplumer. Ce n’est qu’à cinq semaines qu’ils commencent à s’habiller de plumes, dont les premières paraissent sur le dos, et ils ne sont complètement emplumés que vers deux mois et demi. On en perd beaucoup au moment de la pousse des grandes plumes de la queue, qui a lieu vers le quatrième mois. Ils sont d’une bonne apparence pour la couleur de la peau, et peuvent être livrés à la consommation à cinq ou six mois ; mais une poitrine saillante et des membres allongés leur donnent un aspect désavantageux, qui fait à tort, il est vrai, mal présager de la bonté et de l’abondance de leur chair ; 3o  les vieux, comme les jeunes, sont sensibles à tous les mauvais temps et longs à se rétablir de la mue : aussi leur productivité se ressent-elle toujours des intempéries ; 4o  l’éducation des petits a besoin d’être très-surveillée pendant les six premières semaines surtout, et exige une nourriture délicate, distribuée souvent et en petite quantité.

Du reste, cette espèce est sobre, se nourrit comme toutes les autres volailles, et la poule est une des meilleures pondeuses connues.

Voici ce que donne souvent une espagnole : 6 œufs par semaine, de février en août, et, de novembre en février, 3 œufs par semaine, plus petits que ceux d’été. Pourvu que le logement soit bien abrité, les poulettes commencent à pondre à cinq mois et continuent pendant l’hiver.

Les œufs de cette race ne peuvent être mis à couver qu’en avril.

On voit qu’il y a des compensations, et ces compensations deviendraient des avantages sans inconvénients, si des croisements intelligents modifiaient l’espèce.

Le blanc de la face paraît plutôt chez le coq que chez la poule, et se modifie suivant que le sujet est plus ou moins en amour.

On voit souvent, surtout dans les places cachées, des plumes blanches mêlées aux noires, et dont le nombre finit quelquefois par augmenter tellement, que certains sujets deviennent mélangés, de noir et de blanc, ou même tout blancs. Il n’en est pas ainsi des jeunes, qui commencent invariablement par être blancs et noirs, mais finissent par devenir complètement noirs à l’âge adulte.

La couleur noire pure est la seule très-recherchée.

Lorsqu’on a laissé imprudemment un animal de cette race exposé à une température trop basse, et que la crête est gelée, ce qu’on voit facilement à sa couleur noircie, il faut se garder de le rentrer dans un endroit chaud, car la crête ou la partie gelée de la crête tomberait infailliblement ; on doit laisser le malade dehors et frotter de suite l’endroit attaqué avec de la neige ou de l’eau glacée, jusqu’à ce que la couleur rouge revienne.

L’espagnol a des variétés dont nous allons donner sommairement les appellations et caractères.

Le minorque, dont la joue n’est blanche ni chez le coq ni chez la poule, quoique l’oreillon soit le même que chez l’espagnol ; moins haut sur pattes, préférable comme volaille de table, à cause de sa forme plus arrondie.

L’ancône, semblable au minorque, si ce n’est que le plumage est tantôt blanc et noir et tantôt perdrix.

L’espagnol blanc, qui n’est autre chose qu’un albinos reproduisant noir.

On a cependant fixé cette variété ; mais elle n’est pas recherchée, maintenant au moins, parce qu’on ne la trouve pas aussi jolie que la noire.

L’andalous. Coq, 3 kilogrammes à 3 kilogrammes 1/2 ; poule, 2 kilogramme 1/2 à 3 kilogrammes. Couleur du plumage, gris bleuâtre ardoisé ; plumes du camail, du dos, de la queue, du recouvrement supérieur des ailes et des épaules, variant entre le gris ardoisé, le noir et le ramier ; plumes des cuisses, de la poitrine, du recouvrement inférieur des ailes, gris bleuâtre ardoisé.

Le plumage de la poule est presque partout gris bleuâtre.

La crête du coq est très-haute et très-large, ainsi que celle de la poule, qui est grande et pendante.

Dans les deux sexes, les oreillons sont blancs, les joues rouges, l’œil et le bec noirs.