Le Poème sans nomBibliothèque-Charpentier (p. 15).
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III



Je ne recherche point ce renom transitoire
Qui se glace aussitôt que le corps s’est glacé
Et qui roule avec lui dans le fangeux fossé
Qu’ouvre à nos pieds la mort, à la fin de l’histoire.

Peu m’importe, vivant, de n’être pas notoire.
Non ! Et, devriez-vous me traiter d’insensé,
Je le dis librement, puisque je l’ai pensé :
J’ai rêvé pour moi-même une plus longue gloire.

Le poète, bravant toute dérision,
Se berce jusqu’au bout de cette illusion.
Jamais à sa survie il n’assigne de terme.

Il se voit traversant les âges en vainqueur.
Quand son livre est fini, si son livre renferme
Les lambeaux à jamais palpitants de son cœur.